Chapitre 7
-Alors, il paraît que tu as rencontré quelqu'un ?
Louis baissa le magazine qu'il lisait pour observer sa mère qui se tartinait de crème solaire juste devant lui. Elle portait un grand chapeau bleu qui cachait en partie son visage, mais il n'eut pas de mal à apercevoir sa bouche rieuse.
-Je suppose que c'est Daisy qui t'en as parlé...
Sa mère ne répondit rien mais s'allongea sur sa serviette de plage. Louis n'avait jamais vraiment parlé de ses petits-amis à sa mère. Il était assez secret concernant tout ça. Ce n'était pas qu'il ne lui faisait pas confiance mais c'était simplement un pan de sa vie qu'il voulait garder pour lui-même. Et d'habitude, elle n'abordait jamais le sujet non plus alors il ne savait pas vraiment quoi lui répondre. Face au silence de sa mère, il finit pourtant par murmurer :
-Je vais boire un verre ce soir avec lui... Ca ne te déranges pas d'être toute seule avec les filles ?
-Bien sûr que non Louis. Ne fais pas trop de bruit si tu rentres tard par contre.
Louis hocha la tête (bien qu'il n'avait pas vraiment l'intention de rentrer pendant la nuit) et il s'allongea à son tour, se remettant à la lecture de son magazine et jetant de temps à autre des coups d'oeil aux jumelles qui jouaient au bord des vagues. Il n'arrivait plus à se concentrer sur les lignes de sa revue alors il finit par le poser dans le sable et se redressa. Sa mère s'était visiblement endormie et il se leva pour aller retrouver ses soeurs.
Elles s'amusaient à creuser le sol pour construire des baignoires qui se remplissaient à chaque vague un peu plus téméraire que les autres. Louis s'assit en tailleur près d'elles et se mit à les aider, tentant misérablement de faire rire Phoebe qui lui en voulait apparemment toujours. Il jetait parfois des regards vers les vagues, et se surprenait à se demander ce que faisait Harry. C'était si... Etrange. Il y avait une vie sous la mer, une vie insoupçonnée qui n'avait rien à voir avec celle des poissons. C'était une vie quasiment humaine. Louis avait encore envie de parler avec Harry et à contempler les vagues en espérant apercevoir sa tête émerger de l'eau, il regrettait presque d'avoir accepté l'invitation de Malek. Une partie de baise alors qu'il pouvait être le SEUL homme AU MONDE à parler avec une sirène. Il eut brusquement envie de demander aux filles de creuser une baignoire à sa taille, de s'y allonger et d'attendre de se faire recouvrir par la prochaine vague.
Il finit par se relever et alla réveiller sa mère pour qu'elle surveille à son tour les jumelles, en prétextant qu'il voulait aller nager un peu plus loin. Il traversa la plage et escalada quelques rochers. Derrière, il y avait une sorte de petite crique où les couples venaient très souvent s'embrasser à l'ombre des rochers. Louis avait eu son premier baiser ici et lorsqu'il marchait sur le sable tiède, il avait encore le souvenir d'un goût de sel dans sa bouche, de mains mouillées le long de son torse et d'yeux aussi bleus que l'océan Atlantique.
Il traversa rapidement, ne s'attardant pas et marcha jusqu'au petit ponton de bois qu'utilisaient les anciens pêcheurs. A cette heure-là il n'y avait personne, les gens étant tous sur la plage principale et il s'assit en tailleur sur les planches vermoulues. Tout avait une odeur de coquillage, de sel, d'eau réchauffée par le soleil. C'était sans doute l'odeur qu'il aimait le plus avec celle de la pluie d'orage sur la lande.
Il laissa tomber ses pieds dans la mer, regardant l'eau transparente lécher le bord de ses chevilles. Est-ce qu'il y avait un moyen d'appeler Harry ? Est-ce qu'il viendrait ? Il aurait sûrement peur de se montrer en pleine journée, quoi qu'il fasse pour l'amadouer.
Louis finit par s'allonger sur le ponton. Il fixe longtemps le ciel, jusqu'à ce que le soleil lui fasse mal aux yeux et que le monde entier devienne jaune. Alors seulement, il ferma les paupières et se laissa envahir par le bruit lent de la mer venant clapoter contre le bois sec. Il posa ses deux mains sur sa poitrine, là où le coeur résonnait fort de temps en temps. Il attendit. Il s'imagina comme un enfant du vent, fait d'eau de mer et la peau en galet blanc poli par le sable. Il s'imagina éternel avec un coeur qui prendrait la place des veines, avec milles âmes sous ses paupières. Il s'imagina très grand et invincible, il s'imagina profond comme un trou noir dont on aurait jamais percé les mystères. Il s'imagina dans les bras de Malek, il s'imagina en train de lécher sa peau et puis il s'imagina partir sous l'océan en tenant la main de Harry et il s'imagina ne plus jamais revenir et vivre avec lui dans une grotte aux murs de jade.
Il sortit subitement de sa torpeur lorsque quelque chose effleura son pied.
Il se redressa, un peu étourdi par la chaleur du soleil et par le rêve étrange qu'il venait de faire et mit quelques secondes avant de réussir à fixer son regard sur la surface calme de l'océan. Rien. Pourtant... Il se mit à genoux et se pencha sous le ponton.
Il sourit.
Presque caché dans l'ombre, deux yeux verts le fixaient.
Harry avait touché la cheville de Louis.
Harry avait touché LA CHEVILLE de Louis.
Harry. Avait. Touché. La. Cheville. De. Louis.
HARRY AVAIT TOUCHE LA CHEVILLE DE LOUIS.
Ensuite il avait immédiatement disparu sous l'eau pendant quelques minutes, attendant une réaction de la part du jeune homme qui n'était pas venu.
Il tremblait un peu. Sa peau était si... Délicate. Ses pieds. Tout. Harry n'avait jamais imaginé que cela puisse être un endroit si magnifique. Il avait contemplé pendant de longues secondes sa propre queue et ses jambes inexistantes et il avait eu mal au coeur. L'envie d'aller se faire déchiqueter le bas du corps par les hélices d'un bateau.
Il avait fini par remonter lentement à la surface. Louis dormait toujours, semblant curieusement apaisé, un sourire sur le visage. Il était sublime. Harry voulait lui offrir le monde entier.
A la place il avait à nouveau tendu une main un peu hésitante vers sa cheville. Il y avait un os, juste là, qui faisait un petit rond et Harry y passa son pouce. C'était miraculeux. Louis ne bougeait toujours pas. Alors il s'approcha encore et il embrassa sa peau, juste à cet endroit-là, et il ferma longtemps les yeux pour se souvenir de la sensation sur sa bouche, de la chaleur, de la douceur, de l'os de Louis en dessous et de sa peau si fine à cet endroit.
Louis bougea.
Harry recula et se cacha sous le ponton, espérant passer inaperçu dans l'ombre.
Pourtant, quand les yeux bleus de Louis rencontrèrent les siens il ne put s'empêcher de lui offrir un sourire timide et de s'avouer intérieurement qu'il n'attendait que ça depuis le début.
Louis était vraiment beau, même la tête à l'envers. Il lui souriait.
-Hey. Tu vas bien ?
Harry hocha la tête. Il avait du mal à parler à Louis. C'était... Bizarre. S'imaginer avoir une conversation avec un garçon de son âge et pourtant si différent.
-Je peux venir près de toi ?
Harry hésita quelques secondes. Il avait un peu peur que Louis ne veuille l'approcher de trop près et lui fasse du mal mais en même temps... il en mourrait d'envie. Alors il finit par acquiescer et le jeune homme se laissa glisser dans l'eau et nagea vers Harry, toujours abrité sous le ponton, mais respectant une certaine distance entre eux deux. Un petit silence s'établit durant lequel ils s'observèrent, ne sachant pas quoi dire.
Là, en pleine lumière, tout était si différent que sous le couvert de la lune.
La peau d'Harry n'était plus si pâle, elle avait sûrement la couleur du sable des fonds marins, un peu écorchée. Une peau dont les bords auraient été façonnés par le remous incessants des vagues. Il avait des yeux tout aussi verts cependant, immenses, bordés de cils sombres. Il était beau, là, si près, et le coeur de Louis battait douloureusement.
Aurais-je le droit de te toucher un jour ? Je voudrais mettre ma main sur ta poitrine et savoir si toi aussi, tu as quelque chose qui bat en dessous, ou si ton souffle vient d'ailleurs.
Quand je te regarde tu n'es pas si différent de moi, et pourtant je crois que j'ai peur.
Peut-être qu'Harry pensait la même chose. Ou peut-être pas. Il se contentait de fixer Louis, son corps aux aguets, sûrement prêt à s'enfuir si le jeune homme faisait le moindre geste suspect.
Louis tendit seulement la main et s'accrocha à une des planches de bois vermoulues du ponton. Il ne pouvait pas rester immobile dans l'eau sans risquer de se noyer, au contraire de Harry.
-Je suis content que tu sois là.
Il se sentait vraiment timide.
Harry aussi à vrai dire. Il esquissa un petit sourire et baissa légèrement la tête. Ses joues avaient tendance à devenir presque roses, pigmentées de petits points comme des grains de sable lorsqu'il rougissait.
-Je ne voulais pas te faire peur.
-Tu ne m'a pas fait peur, je dormais.
Harry releva la tête. C'était assez étrange parce que Louis lui parlait avec naturel, comme si il n'y avait pas de différence entre eux. Il avait une voix très douce, un peu aigue par moment, mais elle plaisait à Harry. Il voulait l'entendre toute sa vie. Alors il bafouilla n'importe quoi simplement pour que Louis parle encore :
-Tu es fatigué ?
-Non... Pas tellement. C'est le soleil. Je ne sais pas si ça te fais ça à toi aussi ? Ca endort.
-Le soleil est moins fort sous l'eau, je crois.
-Oui c'est vrai... Tu... Tu as le droit d'être là ?
Harry secoua lentement la tête, ses yeux s'écarquillant légèrement comme lorsqu'il avait eu peur de Louis, le premier soir. Il répondit dans un souffle angoissé :
-Non.
-Tu veux aller à la crique peut-être ? Je veux dire, c'est un peu plus abrité.
Louis avait l'air si gentil. Harry avait envie de se blottir contre lui et de s'abandonner contre la chaleur de son sourire. Il hocha la tête.
-Je veux bien.
Louis recula.
-D'accord. Je vais remonter là haut et t'y retrouver alors. J'y serais dans, hm, quinze minutes environ. Ca va ?
Harry n'avait pas envie que Louis s'en aille. Et puis peut-être qu'il allait lui arriver quelque chose en chemin. Quinze minutes c'était long. Alors il nagea jusqu'à lui et sans réfléchir davantage, attrapa son bras. Il murmura :
-Je peux t'y emmener moi.
Louis avait les yeux encore plus bleu qu'il ne le pensait. Et sa peau si douce. Il était... Merveilleux. Encore plus quand il accepta la proposition.
Harry n'avait jamais fait ça.
Il n'avait jamais parlé à un humain.
Il n'avait jamais pris la main d'un humain.
Il n'avait jamais nagé avec un humain.
Et il le faisait avec le plus beau du monde.
Harry emmena Louis jusqu'à la crique. C'était facile pour lui. Il lui avait suffit de tenir la main de Louis entre la sienne et de fendre les flots à une vitesse hallucinante. Louis avait eu un peu peur mais il ne l'avouerait pour rien au monde. C'était plus fascinant qu'autre chose, au final.
Ensuite il s'était assis sur la roche et Harry s'était accoudé près de lui, le corps toujours dans l'eau parce qu'il préférait.
Ils discutaient.
C'était... Agréable. Louis n'avait pas d'autres mots. Il aimait la voix d'Harry. C'était une voix profonde et basse, mais aussi très douce, un peu timide. Il avait envie de le toucher aussi. Louis n'était pas très tactile habituellement mais là... C'était sûrement la curiosité. Une envie dévorante d'effleurer les épaules du jeune homme, de perdre sa main dans ses cheveux. De savoir si il était fait comme lui, ou si sa peau était d'une autre matière. Mais il ne le touchait pas, et se contentait de poser des questions, réellement curieux.
-C'est comment de vivre sous l'eau ?
-Je ne sais pas... Je veux dire, je pourrais te poser la même question. Tu me répondrais sûrement que c'est seulement vivre comme chaque être humain vit.
-J'avoue que... je suis un peu stupide.
-Non ! Non, pas du tout...
Harry se passa nerveusement la main dans les cheveux. Il était vraiment adorable... Pourquoi Louis pensait ça ?
Hm.
-Tu dois te poser les mêmes questions que je me pose finalement.
-Sûrement, oui... Qu'est-ce que tu te demandes ?
-Je ne sais pas. Trop de choses. Je suis en train de remettre toute ma vie en question là.
Louis se mit à rire et Harry esquissa un sourire, émerveillé par ce son là, et par le cou de Louis qui se renversait légèrement vers l'arrière. Il avait envie de se redresser pour respirer cet endroit de son corps.
-Imagine, si les sirènes existent, alors peut-être que le Père Noël aussi. Et Pégase. Et les dragons. Et la petite souris. Est-ce que je suis une sorte... D'élu ?
-Qu'est-ce que c'est Pégase ? demanda simplement Harry.
-Un cheval avec des ailes.
-J'aime bien le mot.
Louis sourit.
-C'est vrai. Je ne m'en étais jamais rendu compte, mais c'est joli.
-Tu connais d'autres jolis mots ?
-Hm... J'adore le mot ciel, le mot lumière, mélancolie, rivière, sirène, piano, assonance, océan...
-Sirène ?
-Sirène. Maintenant oui, j'aime ce mot.
Harry resta quelques secondes sans rien dire et puis il esquissa un sourire, avant de poser lentement sa main sur la cuisse de Louis. Chaud contre froid. Il frissonna. Et puis il murmura :
-Mon mot préféré, c'est Louis.
----
Chapitre empli de Larry ihihi.
Merci d'avoir lu. <3
ps : 7 AVRIL 7 AVRIL 7 AVRIL
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top