Il me manque...

-On change les rôles ?

Sa voix joueuse fait flipper. Il est terrifiant quand il agit comme ça... Par contre je ne comprends pas, il m'a sincèrement défendu ? Je reste méfiant mais je ne peux m'empêcher de me sentir en sécurité, le savoir pas loin me calme. J'arrête enfin de trembler. Par contre mon cœur continue de battre le tocsin, je stresse...

-Casse toi maintenant.

Comment il fait pour parler aussi calmement ? Je dirais que c'est ça qui est le plus effrayant dans son attitude, c'est la manière dont sa voix est posée et détendue. Mais malgré le fait qu'elle soit calme, elle garde cette amertume et c'est angoissant. C'est difficile de sonder ce qu'il pense réellement et ce qu'il ressent du coup.

-Tu attends quoi ?

Je me mordille la lèvre inférieure, épiant cette scène avec une curiosité malsaine. Je sais que je devrais partir mais je ne sais pas pourquoi, j'ai envie de rester et de voir ce qu'il va se passer.Je veux voir ce que va faire Gabriel. Celui qui s'amusait à m'emmerder s'en va aller et retourne à sa table. Je suis content et satisfait que Gabriel lui ait rabattu son caquet. Gabriel se retourne vers moi et son regard emplit de dédain m'empale. Il passe à côté de moi.

-Tu fais pitié sérieux, défends toi un peu. Crache-t-il

Il vient de dire ça à voix basse pour que je sois le seul à entendre. Ça me blesse un peu. Je sais très bien que je fais pitié il est pas obligé de me le rappeler à chaque fois qu'il me voit... Parfois j'aimerais bien être comme lui, me faire respecter et savoir me défendre à la perfection mais c'est très clairement loin d'être le cas. Gabriel s'en va à son tour. Je suis planté au milieu du self avec de nombreux regards braqués sur moi. Je me sens très mal à l'aise. Petit à petit, les conversations reprennent et on arrête de me fixer. Je suis déçu qu'il parte comme ça et que son geste si gentil se transforme finalement en un pic méchant. Je me relève d'un coup et me dépêche d'aller vers lui pour le rattraper. Je le tiens fermement par l'épaule il se retourne d'un coup et me toise intensément. Il paraît légèrement surpris.

-T'es pas obligé de me rabaisser à chaque fois que tu me vois.

Il a un regard un peu méchant. Je sais qu'il n'aime pas que je lui réponde mais je ne peux pas faire autrement. C'est beaucoup plus fort que moi et en plus je déteste quand il se croit supérieur comme ça. Il m'attrape par le col de ma chemise et m'attire vers lui. Il me fait mal cet abruti !

-Tu veux encore avoir des ennuis ? Alors fiche moi la paix.
-Non !
-Va manger dehors idiot. C'est plus calme.

Ce qu'il vient de me dire me surprend. Je ne sais pas trop quoi répondre alors la seule chose que je trouve à dire est :

-Mais mon plateau...
-Je m'en occupe, casse toi maintenant.


Il me relâche et me pousse assez violemment au niveau du torse. J'arrive à garder mon équilibre. Il est pas capable d'arrêter d'utiliser la violence bordel ?! J'aime pas quand il fait ça !Il veut pas être un peu plus tendre avec moi après ce qu'il s'est passé entre nous ce week-end ? Je reste planté là, à le fixer.

-Putain mais casse toi !

Je viens de sursauter. Il m'a fait peur. Je peste contre lui dans ma barbe.

-Tu vas vraiment avoir des problèmes si tu restes. Crois moi, tu préfères les éviter.

Je râle contre lui et décide de partir pour de bon, les poings serrés. Il me donne parfois des envies de meurtre, c'est fou quand même. Je jette un bref coup d'œil dans sa direction et ressens une certaine colère à son égard. Pas grande mais légère, elle me titille.

-Qu'est-ce qu'il se passe ici ?! C'est quoi tout ce bordel ?

Un pion ? Bah il était temps merde ! Il arrive après la guerre comme d'habitude j'ai envie de dire...

-Encore vous Gabriel ?! J'aurais dû m'en douter...

Alors que je sors du self, je continue à regarder à travers les grande baie vitrée, étant comme d'habitude, bien trop curieux. Je suis alors surpris de voir qu'il s'agit en réalité du proviseur. Gabriel semble passer un seul quart d'heure, je grimace. Alors c'est pour ça qu'il m'a dit de partir ? Il aurait pu le faire plus gentiment et délicatement, ça ne lui coûtait rien de m'expliquer les choses. Je me sens mal de le laisser seul dans cette merde alors qu'il n'a rien fait mais en même temps je peux pas rentrer et dire au proviseur que c'est de ma faute, ça n'est pas non plus de la mienne. Qu'est-ce que je suis censé faire ? Je me mords la lèvre inférieure. Je suis désolé pour lui... Sincèrement...

-Yoongi !!

Je me retourne d'un coup. Mat arrive rapidement dans ma direction. Il m'attrape par les épaules, il paraît relativement inquiet. Il me détaille complètement et s'empresse de parler :

-Ça va ?! Il t'a fait mal ?! Qu'est-ce qu'il t'a dit ?! Et puis c'était qui ce connard ?!! Tu vas bien ?

Mon cerveau n'a pas réussi à imprimer toutes les questions qu'il m'a posé. Je bégaie quelque peu puis me ressaisis et réponds de manière globale :

-Je vais bien, t'inquiète pas pour moi.
-J'ai tout vu et j'ai vraiment voulu venir t'aider mais on m'empêchait de passer. C'était bondé de monde dans la queue, j'étais coincé. Je suis vraiment désolé !
-T'inquiète, c'est pas grave. Je vais bien.

-C'était qui ce connard ?
-Aucune idée...

-Et Gabriel ? Il lui a pris quoi ?
-Je sais pas vraiment...

J'ai l'impression qu'il laisse un peu tomber son masque par moment. Je veux vraiment qu'il se laisse aller et qu'il sorte de ces merdes,qu'il aille mieux. J'aimerais être là pour lui peu importe l'histoire et le passé qu'il traîne derrière lui.

-Je suis jamais là quand tu as besoin d'aide, je m'en veux un peu.
-Arrête de dire n'importe quoi et puis je t'en veux pas de toutes façons.

Je lui souris un peu. Il n'a pas à se sentir mal cet idiot ! Il n'y est pour rien. Par contre j'ai faim... Mon estomac me le fait rapidement comprendre en grognant. Mathéo semble l'entendre puisqu'il ricane et me propose :

-Tu veux qu'on aille manger dehors ? Je pense pas qu'aller manger au self soit une bonne idée après ce qu'il s'est passé.

Je hoche positivement la tête. Mieux vaut éviter le self effectivement, je risque d'avoir de gros problèmes et je préférerais clairement éviter. J'ai assez donné pour aujourd'hui... Pour ma vie entière même j'ai envie de dire.

-T'as de l'argent sur toi ?
-Ouais.
-Alors allons-y. Au fait ! Les gars ont déjà mangé vu qu'ils avaient un cours d'art appliqué qui a été déplacé.

-On mangera ensemble une prochaine fois, c'est rien.

Il passe son bras par dessus mon épaule et on commence à s'en aller.Je tourne une nouvelle fois la tête vers le self. Gabriel se fait encore crier dessus j'ai l'impression. Le proviseur a l'air d'avoir quelque chose de personnel contre lui... Je me pince les lèvres et détourne le regard. Après tout ce qu'il m'a fait, ça lui fera pas de mal... J'essaierai quand même de lui parler ce soir ou demain pour m'excuser.

On sort du bahut et nous dirigeons vers un snack juste à côté. On entre à l'intérieur. J'avoue que je sais pas trop ce que je peux prendre. Je regarde un peu tout ce qui est proposé. Je meure pas non plus de faim donc un sandwich devrait me suffire. On passe commande et allons nous asseoir à une table. Je détaille mon meilleur pote et alors qu'il pianote sur son portable, notre conversation de ce matin me revient à l'esprit. Je me décide alors à le questionner :

-Dis Mat, t'avais pas dit que tu m'expliquerais comment ça se fait que tu aies le numéro de Simon ?
-Ah euh en effet...

Il a l'air un peu gêné. C'est rare qu'il le soit. Il pose son portable et me regarde intensément. Il s'éclaircit la voix :

-T'es mon meilleur ami ?
-Évidemment, quelle question ?
-On le restera tout le temps ? Peu importe ce qu'il se passe ?

-Oui... ? Qu'est-ce qu'il se passe ?
-Tu peux me promettre que tu me trouveras pas répugnant ou quoi que ce soit d'autre ?

Il a fait une connerie ? Je le regarde l'air inquiet et fais quelques signes des mains pour lui faire comprendre que j'attends la suite mais il reste muet. Je me décide à lui répondre :

-Bien que sûr que je te trouverais pas répugnant ou ce que tu veux d'autre ! Qu'est-ce qu'il y a ?
-T'es sûr, hein ? On restera pote ?

Mais évidemment ! Je fronce les sourcils et demande :

-Mais qu'est-ce que t'as fait ?
-
Euh... Il se mord la lèvre en silence
-Tu peux me le dire Mat...

-Ok euh... par où commencer ?

Parle début, ça paraît logique non ? Je commence m'impatienter.

-Tu sais quand on était à la soirée, j'étais un peu saoul.
-J'ai cru comprendre.

Je soupire. Je savais déjà qu'il avait trop bu. Et d'ailleurs j'aurais dû rester avec lui au cas où parce que sait-on jamais...

-Bref, Simon m'a ramené.
-Ça aussi je le sais.

Et là quelque chose me frappe l'esprit. Est-ce qu'ils ont... ? Je tente de ne rien laisser paraître de mon étonnement et j'écoute tout simplement la suite de son récit.

-Quand on est arrivé chez moi il m'a aidé à aller jusque dans ma chambre vu que j'arrivais pas à monter les escaliers. Et arrivé dans ma chambre bah euh... Je sais pas trop comment dire ça (Il marque une pause)J'ai essayé de lui sauter dessus quoi.
-Lui sauter dessus ?

J'en étais sûr !! Ma bouche manque de se décrocher malgré tout.

-Enfin tu vois quoi.
-Oh oui je vois très bien ! Et... ?
-« Et » ?

-Bah il s'est passé quoi après ? Je veux la suite !
-Rien, il m'a repoussé en me disant que j'avais trop bu.

Au moins il a pas profité de mon pote. Si Simon a refusé uniquement parce que Mat était saoul ça veut dire que Simon est attiré par mon pote ? C'est croustillant comme histoire ça.

-C'est là où il m'a donné son numéro. Il m'a dit de lui envoyer un message si j'avais encore envie qu'on ''s'amuse tous les deux'' quand je serais sobre.
-Sérieux ?!
-Ouais.

Il sourit timidement. Alors comme ça il lui a donné son numéro pour qu'ils deviennent des sex-friends ? Mat frotte ses mains entre elles et triture ses doigts, certainement à cause du stress. Il me demande doucement :

-Ça va, ça te pose pas de problème ?
-Bien sûr que non, idiot ! T'es mon meilleur pote et tu le resteras ! Et puis tu sais très bien que je suis pas dégoûté par ça.
-J'avais eu peur que ta réaction soit pas très positive sur le sujet.

-Tu me connais pourtant.

Depuis quand je suis homophobe de toute façon ?! J'ai envie de lui poser mille et unes questions. Je me mords la lèvre et me lance finalement sur ce terrain :

-Il te plaît ?
-Disons qu'il est pas moche. Mais je suis perdu aha...
-Pourquoi ?

-Bah avec ce qu'il m'a dit, maintenant j'hésite à lui envoyer un message.
-Pour faire une partie de scrabble ++ ?
Commençais-je à le taquiner.
-Non !
Rit-il.Juste pour discuter, il est sympa. J'ai juste un peu peur qu'il croit que je veux qu'on fasse un mot compte triple si tu vois ce que je veux dire...
-C'est un peu le cas, non ?

Il regarde autre part. Ça fait longtemps qu'on a pas parlé de ce genre de choses. Je crois même qu'on a jamais réellement parlé de sexe tous les deux. On est pas conservateur sur le sujet mais on reste pudique dans notre mesure. On considère que ça relève du privé même si en parler nous dérange pas non plus. Mat finit par me répondre après s'être éclairci la voix :

-Je sais pas vraiment...
-Je peux te demander quelque chose ?
-Bien sûr !

-Tu l'as déjà fait ?
-Non, c'est pour ça que j'hésite beaucoup. Et toi ?

-Non plus.

Je me demande ce que ça fait. Je suppose que le ressenti doit être incroyable, quand on fait ça avec une personne qu'on aime, même si la performance est nulle, les sentiments doivent prendre le pas et la première fois ça doit être particulier. Je repense malgré moi à la soirée où Gabriel et moi avons était assez proche tous les deux. Rien que là, c'était déjà spécial, pas niais mais intense.Je ne saurais comment décrire ce que j'ai ressenti mais j'ai bienaimé, même si j'ai un peu honte de l'avouer dans le fond.


********


La journée vient tout juste de se terminer. Je vais enfin pouvoir rentrer chez moi. Il était temps ! Cette journée était réellement horrible, j'en peux plus. Franchement je suis à bout à force...

-On rentre ensemble ?
-Ouais si tu veux !

J'ai pas envie de rentrer tout seul ce soir. Je sais pas trop pourquoi mais j'ai envie d'être accompagné, j'ai besoin de compagnie. Je suis en manque d'affection. C'est bizarre mais je ressens réellement comme un manque depuis cette fameuse soirée. Je rougis et me sens idiot.

-Dis, c'est dans combien de temps les vacances ?
-Presque deux mois peut-être même plus.
-Quoi ?!! Tu te fous de moi ?

-Et non mon cher Mat.
-Ho non l'horreur...
-T'inquiète ça va passer vite.
-Mais oui bien sûr.

-Rien à voir mais tu comptes lui envoyer un message ?
-
Il tourne la tête et me regarde étonné. Euh...
-Pas pour le faire forcément aha. Juste pour que vous parliez tous les deux.
-J'ose pas et puis je suis pas sûr de vouloir devenir pote avec lui.

-Pourquoi ?
-A la base c'est le genre de personne que j'aime pas et puis je déteste vraiment Gabriel, j'ai pas confiance.

-Tu le connais même pas.
-Et alors ? Il prend tout le monde de haut et t'as vu comment il te traite ? Il agit comme si on était tous de la merde à ses yeux donc je veux pas le côtoyer... Et puis je veux pas avoir une mauvaise réputation non plus en leur parlant.

Je ne réponds rien. C'est vrai que sur ce point il a raison... Par moment Gabriel est un pur con et il me traite comme une merde mais quand il veut il sait être plus sympa. Dans le fond j'ai envie de le revoir, j'avais honte de ce qu'il s'était passé entre nous mais enfin de compte j'ai juste envie de passer du temps à lui parler.Enfin, plutôt à me faire engueuler par sa petite personne mais bon.C'est déjà un début je suppose.

Mathéo et moi nous séparons, chacun va de son côté, je lui fais un signe de main et reprends tranquillement ma route. Je ne m'étais même pas rendu compte qu'on avait autant marché. Je ne vais pas  tarder à arriver dans cette fameuse ruelle sombre.

Je sors mon téléphone de ma poche et m'éclaire un peu. Et s'il était encore là ? Dans le fond je l'espère. Et si jamais il est là qu'est-ce que je dois faire ? Mon cœur commence à s'accélérer au fur et à mesure que je me rapproche du lieu où il était les deux fois où je l'ai vu. Je m'avance un peu et baisse la tête vers là où il est presque tout le temps assis mais ce soir, il n'est pas là. Dommage... Comment ça se fait que je me sente déçu ?J'ai vraiment du mal à me comprendre en ce moment. Je ressens plein de choses et je n'ai aucune idée de ce dont il peut s'agir.


******

On est jeudi et là c'est le milieu de l'après. Je suis en cours de chinois à côté de Mat. Je n'ai pas vu Gabriel de la journée par contre j'ai croisé Simon et Jin et ils étaient pas avec l'autre idiot qu'est Gabriel... Et c'est pas normal parce qu'ils sont toujours collés ensemble. Donc ça veut dire que Gabriel n'est pas venu en cours. Je soupire en silence, il ne devrait pas sécher les cours. Je pose ma tête sur ma main et réfléchis. J'aimerais savoir si il sèche vraiment où s'il est simplement malade ou je ne sais quoi mais j'ai aucun moyen de le savoir... D'un coup je me rends compte de quelque chose. Je souris fortement et tapote le bras de Mathéo :

-Tu pourrais me rendre un service ?
-Ouais bien sûr, quoi ?
-Tu peux envoyer un message à Simon pour lui demander pourquoi Gabriel était pas là aujourd'hui ?

-Je le peux mais pourquoi tu veux savoir ça ?
-Je te promets que je t'expliquerai mais pas maintenant.

-Ok.

Il me regarde étrangement puis se re-concentre sur ce que le prof raconte. Il n'a pas l'air d'avoir l'esprit tranquille. Je sais très bien que Mat l'aime pas et qu'il ne doit pas comprendre pourquoi je lui parle mais je peux pas lui expliquer ou du moins pas pour l'instant. Pas tant que je comprends pas ce qu'il se passe dans ma tête et que j'arrive pas à l'amadouer un peu. J'ai un rictus, on dirait que je parle d'une bête féroce aha...


*****


Je suis chez moi, dans mon lit. Je m'ennuie et j'ai mal au cœur. Je sais pas ce qu'il m'arrive mais je me sens pas bien du tout... c'est de pire en pire depuis le début de semaine. Je ferme les yeux. C'est bizarre parce que je vois Gabriel dès que je ferme les yeux, c'est vraiment déstabilisant. Il hante mes pensées, en fait il m'obsède carrément. Mon téléphone vibre. Je regarde mon portable, c'est un message de Mat. Je souffle un peu et essaie de calmer mes émotions.
Je me fais de l'air et lis son message :
«Simon m'a dit que Gabriel avait été exclu du lycée jusqu'à lundi. »

Mais pourquoi ? Qu'est-ce qu'il a encore fait cet idiot ?! Je soupire, consterné et réponds immédiatement :
« Il t'a dit pourquoi ? »

Donc je ne vais pas le voir de toute la semaine... Pourquoi je suis autant déçu ? JE vais vraiment pas bien ma parole !
« Non. Il m'a juste dit que c'était pas important. »

Pas important ?! Il a quand même été exclu ! C'est pas rien ! S'il est exclu c'est pas juste parce qu'il a pas fait ses exos de maths. J'ai un nouveau message :
« Pourquoi tu veux savoir tout ça ? »

J'avoue que je sais pas trop en fait. Qu'est-ce que je peux lui répondre ? En réalité, ce gars m'obsède. Depuis que je l'ai rencontré je ne fais que penser à lui. Je ressens des choses très différentes de d'habitude. Ça me perturbe tellement ! Je réponds :
« Pour rien, juste comme ça. Du coup vous avez parlé avec Simon ? »

Oui, j'essaie de dévier la conversation sur autre chose vu que je ne veux plus parler de Gabriel. J'ai peur de dire un truc qui pourrait me trahir. Je sais bien que Mat ne sera pas dégoûté parce qu'on a fait mais il n'aime vraiment pas Gabriel, en fait c'est limite si il le déteste pas. Je soupire. Comment je vais faire sérieux ? Je vais juste le garder pour moi je pense.
«Ouais un peu. »

Ah bah ça avance !! C'est un peu grâce à moi quand même. Je suis sûr qu'en fait ça l'arrangeait que je lui demande de lui envoyer un message, c'est pour ça qu'il a pas rechigné plus que ça même quand je lui ai demandé de le faire. Même si c'était pour avoir des nouvelles de Gabriel.
« Ok ! Du coup, il se passe quoi ? Vous êtes pote ? Ou autre ? »
« Rien de tout ça, je te l'ai dit : je suis pas sûr de vouloir être mêlé à leur bande. »

Leur bande ? Je suis sûr qu'il a tort de mal les voir. Autant Gabriel je peux comprendre qu'il l'aime pas parce qu'il est très froid. Mais les deux autres sont très gentils ! Il faut juste leur laisser une chance et ne pas partir avec des à priori.
« C'est pas leur bande c'est juste Simon. Et puis, il te plaît,non ? »
« Je sais pas... Bon, c'est pas que je veux pas discuter mais ma mère a besoin de moi. A demain. »

Mouais,tu évites la conversation surtout ! Il est sans doute un peu perdu. Je le suis encore plus que lui, tellement la situation dans laquelle je me suis foutue est complexe, dès que j'y pense j'ai mal au crâne. Je ne dois pas y repenser sinon je vais encore avoir mal à la tête !
« A demain ! »


******


On est enfin vendredi, j'ai hâte que cette semaine étrange se termine.

-Tu fais quoi ce week-end ? Me demande Louys.
-Je sais pas pourquoi ?
-On pourrait passer le week-end tous ensemble !

Me dit-il en souriant. Pourquoi pas, je n'ai rien de prévu dans l'absolu.

-Ah non désolé, ça va pas être possible pour moi.

Vient de dire Mat. Ah bon ? Depuis quand il a quelque chose de prévu ce week-end celui-là ? Je le regarde comme pour lui dire « Ah oui ? » et sa seule réponse est un sourire. Il a dû comprendre ce que je voulais dire mais non son beau sourire n'est pas une réponse à ma question ! Quelque chose me dit qu'il va peut-être voir Simon. Je souris en coin.

-Tu as quelque chose de prévu ?
-Ouais désolé aha...

Il cache quelque chose, ça s'entend dans le timbre de sa voix et ça se voit surtout. Sauf que je le connais trop bien et que je suis sûr d'avoir percé son secret. Je me décide malgré tout à ne pas le outer devant nos amis et à ne pas le taquiner alors qu'il est déjà perturbé par la situation.

-Ok et sinon les autres ?
-Attends j'essaie de me souvenir...
Prononce Antonin.

Toujours une aussi bonne mémoire à ce que je vois... Parfois ils sont désespérants. Et moi je traîne avec eux, c'est ça le pire.

-Ah je me souviens ! Bah ouais en fait, ma mère veut que j'aille à l'enterrement de mon oncle.
-Comment tu as pu oublier l'enterrement de ton oncle ?
M'offusquais-je.
-Pfff je le connaissais même pas ce gars. Je l'ai jamais vu, je sais même pas à quoi il ressemblait en fait.

Je comprends mieux du coup. En effet c'est plutôt logique. Ça doit être étrange d'aller à l'enterrement de quelqu'un juste par principe alors qu'en réalité tu ne la connaissais pas...

-Yoongi...
-Oui ?

Louys me parle. Il a l'air intrigué et limite inquiet. Je regarde rapidement autour de moi. Certaines personnes nous regardent de travers. Génial, ça m'avait pas manqué, j'ai passé ma semaine à être regardé comme une bête de foire.

-Qu'est-ce qu'il se passe ? T'as fait une connerie ?
-Alors là, moi-même j'aimerais le savoir.
-Si jamais tu avais des problème tu nous le dirais, hein ?

-Oui,t'inquiète pas.

Il n'a pas l'air très convaincu. J'avoue qu'à sa place je l'aurais pas été non plus. Je veux pas qu'ils aient des problèmes à cause de moi en plus. Je lui offre un grand sourire pour tenter de le rassurer. Il hausse les épaules et regarde à nouveau face à lui. Je parle un peu avec les gars. Pour une fois qu'on peut être un peu ensemble, c'est cool. Nous marchons tranquillement dans les cours à la rechercher d'une éventuelle table libre pour s'asseoir.

-Ah !

Un gars vient de me rentrer dedans et sa boisson s'est renversée surmoi. Elle est épaisse et rose grenadine. Ma belle chemise toute blanche !

-Ahaha désolé.
-C'est rien mais c'est pas franchement drôle pour être honnête...
Râlais-je.
-J'ai cru que c'était la poubelle.

Ajoute-t-il. Je relève la tête, ne comprenant pas cette réaction. Cette semaine est vraiment la pire ma parole ! Alors que je commence à bouillir de l'intérieur, Mat s'interpose entre nous deux :

-Tu t'es pris pour qui ?! Ça va pas ou quoi ?!

J'ai pas envie qu'il prenne ma défense et qu'il se fiche dans la merde pour moi... Même si c'est très gentil de sa part et que ma touche qu'il vienne me défendre.

-C'est bon, c'est rien.
-Non, c'est pas rien ! Arrête de laisser tout le monde te marcher dessus !
-Arrête s'il te plaît. Sois mature et réponds pas...

-Je suis mature ! Et c'est justement ce qui me pousse à lui répondre !
-Hey le mioche ! Ça va je te dérange pas là ?
S'interpose celui qui m'a renversé sa boisson dessus.
-Si et un peu trop d'ailleurs.
-Mat !!

Je le pousse un peu. Je ne veux pas qu'il s'en mêle. Ce ne sont pas ses affaires et il a pas à être dans la galère à ma place cet idiot.Il me regarde froidement. Oui, je sais, tu m'en veux de te repousser et de ne pas te laisser m'aider. C'est très sympa de sa part de vouloir le faire mais je ne veux pas qu'il fasse quoi que ce soit. Finalement, la personne rit en coin et commence à s'en aller, sous le rire de certaines personnes présentes dans le couloir. Antonin le rattrape alors :

-T'as cru que tu allais où toi ?!
-Allez bouge, me fais pas perdre mon temps.
-Tu vas ramasser et nettoyer... C'est pas une décharge ici.

-Tu m'as pris pour une bonne ou quoi ?
-Et nous on l'est peut-être ?!

-Ton pote là, ouais.
-C'est pas ta pute, ok ?

Il a pas à me défendre lui non plus, je suis assez grand pour le faire tout seul ! Je reviens à leur niveau pour m'interposer.

-C'est bon Antonin !
-Ouais voilà c'est ça. Gentil haha.

Il me pousse avec son indexe en appuyant sur mon front puis s'en va.Vous pouvez pas savoir à quel point j'ai envie de le castrer à ce moment précis. Il a osé me toucher où j'ai rêvé là ?! Mes poings tremblent de colère.

-Je peux me défendre tout seul, vous avez pas à le faire ! Vous en mêlez pas, ok ?
-On est tes potes ! C'est normal qu'on réagisse !
-Oui mais non ! Je veux pas. J'ai juste un peu de fierté.

-T'es sado-maso ouais.

Ça sonne. Bon et bien nous ne pourrons pas nous poser à une table tranquillement avant le début des cours de l'après-midi. Louys et Antonin nous disent au revoir en me frottant amicalement les bras puis ils se dépêchent de rejoindre leur salle. Je me sens tellement énervé ! Je suis tâché et je me sens sale.

-Tu veux qu'on passe aux toilettes avant ? Me demande mon meilleur ami.
-Non c'est bon... De toute façon ça changera rien, elle est foutue.

Je n'ai bien évidemment pas de vêtement de rechange. De toute manière je n'aurais même pas pu porter ce que je voulais étant donné que l'uniforme est de rigueur dans cet établissement. Pour mon plus grand plaisir d'ailleurs...


******


Je marche pendant de longues minutes en regardant par terre, c'est bizarre j'ai l'impression que le trajet est plus long que d'habitude. J'ai hâte de rentrer chez moi et de me changer, je suis sûr que je sens la grenadine. Je me perds dans mes pensées et réfléchis à une et mille choses. Quand je relève la tête pour regarder autour de moi je fronce les sourcils et m'arrêter abruptement. Comment est-ce que j'ai atterri ici ?! Je suis juste à côté de chez Gabriel... Il me manque à ce point ? Je me suis même pas pas rendu compte que j'étais même pas en train de rentrer chez moi. Mon corps a décidé tout seul de venir ici sans même me demander mon avis...

Est-ce que je dois aller sonner chez lui ? Je secoue vivement la tête,mais je suis tarée ou quoi ?! C'est super bizarre si je fais ça ! Mais d'un autre côté, j'ai froid et il me manque... Je pourrais juste prétendre que je m'inquiétais ? Comme un automatisme je me dirige vers le palier de sa porte. Je respire fort et appuie mon doigt d'un coup sur la sonnette sans réfléchir.

Qu'est-ce que je viens de faire ? Je me suis foutu dans la merde là, on est d'accord ? Je suis abruti ! Je suis pas normal du tout ! Le stress et le froid me font fortement trembler. Même si je me maudis et que je me trouve stupide je me surprends à sonner à nouveau, espérant au fond de moi, le voir. Je me sens triste et j'ai envie de chaleur... C'est probablement pas chez lui que je la trouverai mais par moment il sait m'apaiser à sa manière... Aussi étrange cela soit-il. Dans l'absolu je me sens en effet pas très bien, le fait que tout le monde me méprise et que je me prenne des remarques, moqueries ou des boissons en pleine face n'est pas très agréable. Ça fait mal au cœur...

Aucune réponse. Alors il compte pas me répondre ? Si ça se trouve il n'est tout simplement pas là. Je devrais peut-être attendre un peu ? Je me décale, me mets contre le mur et me laisse tomber par terre.

Je ne sais pas quoi penser de moi-même. Je suis ridicule, il a raison sur ce point : Je fais vraiment pitié. Je suis le seul taré sur terre à vouloir voir le gars qui le refoule. Je pose ma tête sur mes genoux et bouge plus. Je vais juste l'attendre. Je crois que c'est la première fois de ma vie que j'attends quelqu'un sur le palier de sa porte. Je ferme les yeux. Il fait horriblement froid.J'aime l'hiver mais pas quand il fait moins six dehors.

Ça doit bien faire une demie heure ou peut-être trois quart d'heure de que je suis là. Je suis en train de me transformer en bonhomme de neige. Je commence à somnoler.

-Qu'est-ce que tu fais là ?

Je relève d'un coup la tête. C'est Gabriel ! Ça faisait trop longtemps que je l'avais pas vu. Un tout petit sourire apparaît sur mon visage. Il me détaille de haut en bas et a un regard un peu froid pour ne pas changer. Il se met devant sa porte et sort ses clés de sa poche. J'aurai voulu qu'on discute... Je perds mon sourire et le regarde fixement.

-Tu ferais mieux de rentrer chez toi, tu vas tomber malade.

Tomber malade ? Probablement, je suis littéralement glacé. J'entends un ''CLIC'', il ouvre la porte. J'ose finalement parler :

-Gabriel...

Il tourne la tête vers moi sans rien dire. Je n'arrive pas à décrypter son visage. Il a une expression impassible et il finit par détourner le regard :

-Va t-en.

Il vient de dire ça de façon très lasse. Je baisse un peu les yeux.J'avais oublié que parfois il était apathique au possible. Je serre les poings et me mordille la lèvre inférieure à cause du stresse. Je colle mes mains entre elles et ose répondre :

-Non, j'ai pas envie.
-Il fait froid, rentre chez toi.
-Je veux pas partir.

-Ok, fais comme tu veux. Je t'aurais prévenu.
-T'es toujours aussi aimable à ce que vois.

-Tu croyais que j'allais te faire rentrer ?

Il rit doucement et entre chez lui. Je m'attendais à quoi sérieux ?! A ce qu'il me fasse rentrer et qu'on parle tranquillement ?J'aurais dû me douter que ça se passerait comme ça. Au moins j'ai pu le voir. Je soupire et replonge ma tête entre mes genoux. Je me sens idiot et triste aussi. Mon cœur me fait un peu mal. Ça me chier de me faire tout le temps rejeter ! Je veux vraiment qu'il accepte mon aide ! Je fais quoi maintenant ? Je rentre chez moi ? J'ai pas envie et puis si c'est pour être seul chez moi et ne rien faire autant rester ici. J'en ai vraiment marre d'avoir personne qui partage ma vie. Ok, j'ai mes potes mais ils ont leur propre vie je veux pas m'imposer tout le temps et les faire chier... Ma mère bah elle est pas souvent là et vu qu'on est vendredi bah elle travaille de nuit donc je vais juste rester ici comme un imbécile. Ouais un imbécile, c'est clairement ce que je suis.

Je sais même pas depuis combien de temps je suis là. Une vingtaine de minutes peut-être ? Je ne sais pas trop. En tout cas j'ai beaucoup trop froid. Je me recroqueville un peu plus pour essayer de me réchauffer et je frictionne mes mains entre elles. Le froid prend possession de mon être tout entier.

-Encore là ?
-Ouais...
-Rentre chez toi sérieux.

-Non.
-Pourquoi ?

-Parce que.
-Si t'as pas de raison particulière rentre alors.

-Tu m'énerves.
-Et alors ?

-T'es abruti...

Il a un rictus et ne dit plus rien. Quand il est là je perds tous mes moyens et je n'arrive à lui répondre que des trucs nuls. Il se met contre sa porte, croise les bras contre son torse et me regarde intensément. Je le détaille et serre mes genoux entre mes doigts. Il penche légèrement la tête sur le côté et balance :

-T'attends quoi ?
-Pour quoi ?

Il me regarde sans rien dire. Son regard devient intense. J'essaie de ne pas fuir du regard mais c'est plus fort que moi... En plus je sais pas quoi lui dire. C'est drôle, je suis complètement gelé mais mes joues me brûlent.

-Pour entrer.

J'ouvre grand les yeux et le regarde de façon incrédule. Qu'est-ce qu'il vient de dire là ?!

-Sérieux ?
-Tu vas te transformer en Mister Freeze sinon. J'ai pas envie d'appeler les pompes funèbres demain matin parce que t'as cané sur mon pas de porte.
-Je serais plus là au matin, je suis pas fou à ce point...

Il a un rictus et rentre chez lui sans refermer la porte derrière lui,ce que je prends clairement pour une invitation à entrer chez lui. Je me relève d'un coup et entre rapidement. Il est adossé contre le mur à côté de la porte. Je le détaille puis m'attarde sur l'intérieur de la maison.

-Ferme la porte, ça vaut cher le chauffage.
-Tsss c'est pas comme si j'allais te faire perdre beaucoup d'argent en la laissant ouverte deux minutes...

Je mets un coup dans la porte pour la fermer avant qu'il ne râle une nouvelle fois. Je veux pas risquer de le mettre en colère. Je détaille sa maison, elle est très belle, et assez raffinée d'ailleurs, il vit tout seul ici ? Je me demande... Je n'ai pas le temps de vraiment de continuer à observer la pièce qu'il m'attrape l'avant bras et qu'il me traîne derrière lui. Je ne sais pas quoi répondre, je suis juste bouche bée et le suis machinalement. La chaleur de la maison picote doucement ma peau gelée. On monte des escaliers. J'essaie de regarder un peu tout ce qui nous entoure sans vraiment prendre le temps de les analyser. Mon cœur bat plus fort et je tremble légèrement.

-Tu fais quoi là ?

Il ne répond rien. J'ai comme une impression de déjà vu. Il ouvre une porte, entre dans la pièce et m'y fait entrer à mon tour. Nous tombons dans sa chambre. Je l'admire, elle est grande, rangée et propre. Je ne pensais pas qu'il était quelqu'un de soigneux. Ou peut-être qu'il ne m'a pas laissé entré de suite car il nettoyait ? Ça serait drôle. Cette pensée me décroche un petit sourire.

Gabriel me balance quelque chose au visage, je me débats pour m'extirper de ce tas de tissus. Je me rends alors compte qu'il s'agit d'un plaid bien chaud. Il me regarde, arquant les sourcils.

-Ton nez est à deux doigt de tomber.

Je me frotte ce dernier et m'enroule dans le plaid qu'il m'a passé. Il est attentionné quand il veut. Je lui souris tout doucement.


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