Chapitre 19 - Sonya
PDV INTERNE NEWT
Dimanche 28 septembre
Je me réveillais, un mal de crâne s'emparant de moi. Je me levais et allais prendre un Doliprane dans la salle de bain. Des flashs de la veille me revenaient en me tournant vers la douche. On avait failli s'embrasser. Comme tellement de fois en réalité. Je chassais ces images qui me faisaient rougir et sortis.
Je vis Thomas s'agiter et l'entendis gémir. Je m'assis sur mon lit de façon à être en face de lui.
"Tu es content j'espère ?"
"Gnegnegne monsieur Parfait !" Protesta t-il.
Je ris.
"C'est ça, allez prépare toi et viens manger. Je te laisse la place, je me doucherais après." Dis-je tout en me levant.
"Tu es de bonne humeur aujourd'hui, c'est rare en ce moment."
"Et toi, tu es sarcastique, c'est rare en ce moment !"
"Gnegne." Ronchonna t-il.
Il partit se doucher et claquait la porte derrière lui. Je levais les yeux au ciel et souris. J'étais heureux de le retrouver, malgré le froid qui s'était installé entre nous ces derniers jours, on s'était réconciliés comme toujours.
Cependant, le problème restait existant. Qu'est-ce que Thomas voulait vraiment ? Et qu'est-ce que JE voulais vraiment ? Je n'arrivais pas à saisir ce qu'il attendait de moi. Depuis qu'il avait embrassé cette fille j'avais tout remis en question. Tout me semblait si simple avant, pourquoi est-ce qu'il avait tout gâché ? Ou peut-être que je m'étais laissé séduire par cette douce illusion ? On avait pas le même âge, pas les mêmes objectifs. Il fallait que j'arrête de me poser autant de questions.
Je soufflais et attendis que Thomas sorte pour prendre sa place. Je pris mon livre et m'assis sur le lit. Je l'ouvris à l'endroit où j'avais laissé mon marque page ; une photo de ma sœur et moi, skate dans sa main et casque sur sa tête pendant que je l'aidais à tenir en équilibre. Je souris tristement. Elle me manquait quand même beaucoup mais, la douleur partait doucement. Thomas m'y avait aidé sans s'en rendre compte. J'allais peut-être lui rendre visite aujourd'hui. Je refermais mon livre, incapable de me concentrer pour lire. J'entendis l'eau se couper et la porte s'ouvrir. Il avait encore piqué mes habits !
"Je sais, tes chemises me vont mieux qu'à toi." Il fit un tour sur lui même et je souris.
"Mais oui, elles te vont très bien." Déclarais-je, le plus honnêtement possible.
Il s'attendait sûrement à ce que je lui fasse une réflexion sur le fait qu'il avait encore pris mes vêtements sans me demander, vu sa tête. Je me levais et le pris par la taille.
"C'est fou comme tu parles beaucoup quand tu es bourré, tu le savais ?"
Il rougit, incapable de prononcer quoi que ce soit. Son regard plongé dans le mien.
"Tu ne t'en souviens plus, évidemment." Dis-je en baissant la tête et en coupant le contact visuel.
Je retirais ma main de sa taille et me dirigeais vers mon armoire pour prendre ma tenue du jour. Je faisais mine d'être déçu pour voir sa réaction, le fait d'être imprévisible était d'une extrême satisfaction depuis toujours pour moi mais, encore plus, quand il s'agissait de Thomas.
"Attends ! Qu'est-ce que.. Enfin.. Qu'est-ce que j'ai dit exactement ?" Demanda t-il, nerveux.
"Seulement que tu étais désolé pour tout et que tu étais perdu. Ah oui, on a faillit s'embrasser aussi. Tu m'as tiré dans la douche où tu étais tombé." Dis-je, feignant l'indifférence.
"Oh.. Je.. Je suis désolé." Bredouilla t-il.
"L'alcool peut aider à exprimer certaines choses qu'on ose pas dire en temps normal, alors ne t'excuse pas. Seulement, j'aimerais bien qu'on ait pas besoin d'en venir à ce genre de moyen pour se parler honnêtement."
"Ca vaux aussi pour toi je te signale." Répondit-il, sur la défensive.
"Si tu parles de cette histoire avec la fille, je pensais que ça n'arriverais jamais, je ne m'y attendais pas, pas venant de toi en tout cas. Je me suis sentis comme trahi et déçu. Tu peux comprendre ça ?"
"Oui, je suis désolé, encore, mais je ne peux pas tout faire par rapport à toi. Je ne savais pas que ça t'affecterais autant."
"Bien sûr que si, comment tu veux que ça ne m'affecte pas Thomas ? C'est justement le fait que tu n'y ai pas pensé une seconde qui me blesse. Tu n'as pas la même vision de moi que j'ai de toi. Tout était si simple avant ça, mais je me suis peut-être trompé sur ton compte."
"Tu ne peux pas me demander d'être quelqu'un d'autre, j'ai le droit de vivre, c'était juste un baiser pour un défi."
"Donc, ça t'amuse d'embrasser des filles pour des défis ? Je pensais que tu étais différent."
"Pourquoi tu me mets tant de pression sur les épaules ? J'ai le droit de m'amuser."
"Mais ce n'est pas 'amusant' Thomas. Tu n'as même pas pensé, ne serait-ce qu'un instant, à moi."
"Tu n'es pas le centre du monde Newt." Dit-il en haussant le ton.
Une larme coula sur ma joue, puis une deuxième. Je pus lire dans ses yeux du regret et de la surprise. Il posa sa main sur sa bouche mais c'était trop tard, c'était dit. Il ne méritait pas mes larmes. Je les essuyais d'un revers de manche.
"Tu sais, ta mère m'a confirmé que tu étais parti de chez toi parce que.. Tu m'aimais et que ton père ne l'acceptait pas. La bonne blague. Qui fait ça à la personne qu'il aime ? Tu t'es bien foutu de ma gueule." Déclarais-je froidement.
Je rentrais à toute vitesse dans la salle de bain, ne pouvant retenir mes larmes. J'avais eu le temps d'apercevoir le regard désolé de Thomas qui essayait de me rattraper mais je n'en avais plus rien à faire. Je laissais mes larmes se confondre dans l'eau de la douche et m'effondrais sur le sol. Comment j'avais pu en arriver là ?
Après que j'ai évacué ma peine, je me dépêchais de m'habiller et de sortir de cette maison dans laquelle j'étouffais désormais. Mes pensées obscures s'accumulaient dans mon esprit sans trouver de sortie. Je dévalais les escaliers entendant Thomas sur mes talons. Je claquais la porte croisant le regard de sa mère remplit d'incompréhension et de détresse. Plus rien n'importait maintenant en dehors de ma peine.
"Newt ! Attends !"
Ses cris bourdonnaient dans mes oreilles. Je ne voulais plus l'entendre. Mes larmes reprirent sans que je le veuille et j'arrivais bientôt au cimetière où je m'effondrais sur la tombe de ma sœur. Je touchais la pierre froide et vis les fleurs, désormais fanées. Quelle charmante et sinistre métaphore.. Je ne prêtais plus attention à mon environnement. Je restais immobile, tremblant comme une feuille et pleurnichant comme un enfant ayant vu un fantôme.
"Si tu savais comme j'ai essayé Sonya, j'ai essayé si fort de t'oublier puis de faire comme si de rien n'était. J'ai essayé de l'accepter, de reprendre une vie normale. Pourtant ça ne fait même pas un mois que je suis là et je gâche déjà tout. Tu me manques tellement ! Si tu avais été là, à mes côtés, peut-être que les choses auraient été différentes. Tu aurais trouvé les mots justes."
Chaque mots m'arrachaient le cœur, chaque souffles me brûlaient les poumons. Je grimaçais et compressais ma main sur ma poitrine. Pourquoi je souffrais autant ? J'entendis des bruits de pas assourdissants, je plaquais mes mains sur mes oreilles et fermais les yeux, crispé. Je sentis quelqu'un derrière moi, poser les siennes sur les miennes et les détacher de mes oreilles. Je remuais la tête de gauche à droite, pris de panique. Il m'enlaça simplement en attendant que je me calme. Mon anxiété se transforma vite en apaisement et je fus frappé d'une grande fatigue. Je m'allongeais dans les bras de Thomas, et il me caressa les cheveux en murmurant des mots rassurants. Mes larmes dévalaient toutes seules sur mes joues.
"Je ne.. Je ne voulais pas.. Tu sais.. T'enfermer dans mes angoisses.. Je suis désolé d'être entré dans ta vie.." Bégayais-je entre mes sanglots qui affluaient de moins en moins.
"Ne dis pas ça. Depuis que tu es entré dans ma vie, j'ai une raison de me lever chaque matins." Me consola t-il.
J'affichais un sourire triste et ris nerveusement.
"Tu sais, moi aussi, j'ai fait ce genre de défis quand j'avais ton âge, avec ton beau-père."
Un silence s'installa avant que je n'entende un léger rire.
"Alors comme ça, tu m'as fait une crise alors que tu faisais la même chose."
"C'est pas si simple, tu sais, ce jour là, j'avais ramené ma sœur, elle avait beaucoup insisté et je n'avais pas pu résister. Malheureusement, l'un de mes 'amis' de l'époque a dû embrasser ma sœur, comme tu l'as fait avec cette fille, et je l'ai retrouvé quelques minutes après, complètement ivre, prêt à la violer." Je déglutis difficilement. "J'ai toujours beaucoup culpabiliser de l'avoir ramené à cette soirée. Je me souviendrais toute ma vie de son visage remplit de larmes, elle était terrorisée.." Je soufflais, la voix tremblante. Je fermais les yeux et la main de Thomas enlaça la mienne. Mon cœur s'affola. Je ne sais si ça augmenta mon anxiété ou si ça la calma.
"Je suis désolé, je ne savais pas.. Si j'avais su.." Murmura t-il.
"Arrêtons de nous excuser, d'accord ? Restons en là."
"Qu'est-ce que tu veux dire ?"
"Il faut qu'on avance, prenons notre temps mais arrêtons de tourner en rond."
"D'accord."
Un silence doux s'installa et j'étais ravi qu'on reparte sur de bonnes bases. Je me retournais pour voir son beau visage. Ses lèvres s'étiraient pour former un sourire triste. J'effleurais ses lèvres de mes doigts.
"Prenons notre temps." Répéta t-il en saisissant délicatement mon poignet et en embrassant ma paume.
Je souris, convaincu que, dorénavant, tout irait mieux. Enfin, aussi bien que ça pouvait aller. Je me tournais vers la tombe de ma jeune sœur et l'indiquais d'un geste de tête. Thomas se tourna pour voir ce que je montrais.
"Elle t'aurait aimé, c'est sûr.." Dis-je en soupirant.
"Tu veux m'en parler ?"
"J'avais prévu de te la présenter alors pourquoi pas maintenant." Je pris une grande inspiration. "Elle était discrète mais quand on la connaissait vraiment, c'était une vraie boule d'énergie. Un peu l'opposé de toi en fin de compte." Un rire s'échappa d'entre nos lèvres.
"Quand elle a eu cet accident, j'étais au lycée, en terminale. Mon professeur principal m'avait.. prit à part dans le couloir et, comme tu peux t'en douter, je me suis littéralement écroulé. Je peux encore ressentir la douleur que j'ai eu ce jour là. Mon cœur s'est serré et mon souffle s'est coupé. Une fraction de secondes, j'ai cru que c'était faux, que c'était une blague mais cette idée s'est vite évanouie quand j'ai vu l'expression froide et sérieuse de mon professeur. Des larmes ont roulé sur mes joues et j'ai dû me retenir au mur, me sentant partir." Je fermais les yeux et soufflais, mes larmes étaient prêtes à couler. Thomas prit mes mains dans les siennes et mon regard croisa le sien.
"Si tu veux t'arrêter.."
"Non, non, c'est important que j'en parle."
"Comme tu le sens."
"En rentrant chez moi, mes parents étaient effondrés, autant que moi. Ma mère m'a prise dans ses bras tout de suite et m'a dit de ne plus jamais boire d'alcool. Au début, je n'ai pas compris mais, j'ai su peu de temps après que Sonya avait loupé un virage alors qu'elle était trop alcoolisée."
Thomas baissa les yeux, il repensait sûrement au moment où je lui en avais voulu de s'être bourré la gueule. Ce n'était pas juste pour le plaisir que je l'avais sermonné même si j'admet que le responsabilisé un peu ne faisait pas de mal.
"Certaines choses s'expliquent.." Dit-il seulement.
"Après les funérailles, je suis parti pour mes études. J'étais dans le déni total. Je m'étais imaginé qu'elle m'attendait à la maison. Après que cette phase se soit finis, je suis entré dans une grande déprime. J'ai cru que j'allais louper mon année pourtant, je l'ai eu. Beaucoup de gens m'ont soutenu là-bas. J'ai décidé de revenir pour ma première année, me pensant guéri, comme je me trompais. Et pourtant 6 ans sont passés et la douleur est toujours aussi intense. Tu m'as beaucoup aidé, tu sais ? Tu n'en as sûrement pas conscience et c'est bien normal. Grâce à toi, il y a certains jours où je ne pensais plus à elle de la journée. J'aimerais seulement réussir à avancer et soulager le poids qui subsiste dans mon cœur. Je suis en train de remonter la pente, je le sens, mais ça reste long." Je sentais la frustration dans ma voix. Cette envie d'avancer n'avait jamais été aussi forte que depuis que j'avais rencontré Thomas.
Il attrapa ma main et se releva.
"On va remonter la pente ensemble mais, en échange, tu dois me laisser plus d'espace et promis l'alcool restera loin de moi un bon bout de temps."
Je me relevais à mon tour et on retourna à la maison. Sur le chemin du retour, il tenait fermement ma main comme s'il avait peur que je m'échappe à nouveau. M'être confié à quelqu'un pour la première fois m'hottais un poids dans la poitrine. Quand on passa le seuil, la mère de Thomas nous attendait.
"Vos cafés vont refroidir." Dit-elle seulement.
On éclata de rire avec Thomas et on s'assit autour de la table de la salle à manger.
La journée se passa sans encombre et le soir venu, on se retrouva de nouveau tous les deux.
"Je vais me préparer." Déclara Thomas avant de pousser la porte de la salle de bain.
Je restais silencieux toute la soirée et, ne trouvant pas le sommeil, je me redressais pour aller me faire une tisane. Je descendis les escaliers et, je remarquais la présence de Thomas.
"Toi aussi tu n'arrives pas à dormir ?" Questionna t-il.
"Pas vraiment."
"Des cauchemars ?"
"Pas vraiment."
"Tu es très énigmatique ce soir."
"Plus que d'habitude ?"
"Plus que d'habitude."
"Je ne veux seulement pas que ta façon de me voir change après ce qu'il s'est passé aujourd'hui."
"Elle ne peut que changer mais, il n'y a rien de mal à ça. J'en ai seulement appris d'avantage sur toi et, j'en suis heureux. Tu as beaucoup de mal à t'ouvrir parce que tu as peur du rejet, le fait que tu ai réussi à le faire avec moi me rend très fier de toi."
Je me contentais de sourire.
"Merci."
"Allons, tout le monde aurait dit la même chose."
"C'est parce que c'est toi qui me l'a dit que ça a autant d'impact sur mon moral."
Il sourit à son tour. Je montais pour boire ma tisane et me coucher. Cette nuit fut une nuit sans cauchemars.
Note de l'auteur :
Est-ce que vous aviez déjà émis cette hypothèse pour la mort de Sonya ? Votre avis ?
Xoxo
{2467 mots}
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