Chapitre 25
Assise sur le canapé, je fixe le Cryptex entre mes mains. Jamais je ne trouverai ce code, c'est impossible. Et puis, Jayden lui-même ne voulait pas vraiment que je le trouve. Je n'ai pas effectivement tout compris mais je crois que c'est un message secret, quelque chose qui me concerne et qu'il avait besoin de livrer. Même si jamais je ne trouve la réponse, je pense que ça lui fait du bien de savoir que malgré tout, c'est possible. Qu'un jour je saurais peut-être. C'est comme s'il se délivrait d'un poids.
En même temps, ce n'est pas comme si j'arrivais à réellement me concentrer avec les jumeaux qui s'engueulent dans la pièce d'à côté. C'est à peine si je m'entends penser et même si je les aime, j'ai des envies de meurtres par moment. Surtout qu'ils se disputent toujours pour des raisons futiles. Aujourd'hui, je crois que c'est parti d'un débat sur qui avait le plus d'amis avant de dériver sur tous les reproches possibles qu'ils pouvaient se faire. Et franchement, je suis épatée par la créativité de ces petits. Si j'avais un jour sorti de telles insultes à Jayden avant qu'on devienne amis, je crois même pas qu'il aurait encore voulu m'adresser la parole. Et peut-être que dans un sens...ç'eût été une bonne chose même si j'en eusse sûrement souffert . Mais je vois mal comment ça aurait pu être pire que la douleur que je ressens depuis plusieurs mois.
Je relève la tête en voyant Lexie pointer la tête hors du salon pour leur ordonner « gentiment » de baisser le volume. Mais rien à faire, ils continuent.
— De tout façon, Shawn, tout ce qui sort de ta bouche est con !
Un instant de silence s'installe entre eux jusqu'à ce qu'il lâche de but en blanc :
— Mackenzie.
Ma mâchoire m'échappe et je dois plaquer une main sur ma bouche pour ne pas exploser de rire.
Mon père qui lisait jusque là sur le canapé repose son journal et se tord le cou pour tenter de les voir. Delilah les rouspète pour leurs insultes mais je vois bien qu'elle a envie de rire.
Soudain, mon père décide d'endosser son rôle de père autoritaire et hurle :
— ON NE CRIE PAS DANS LA MAISON !
Puis il grimace et pivote vers Delilah qui pince les lèvres pour ne pas sourire.
— Crier de ne pas crier envoie peut-être un message un peu confus ?
Elle lui tapote gentiment l'épaule avec un sourire contrit, comme si elle compatissait avec lui pour son absence de logique.
Je rigole. J'adore ma famille. Avec eux, le temps passe toujours plus vite, si vite que la nuit tombe avant même que je ne m'en rende vraiment compte. Mes parents partent déposer les jumeaux à une fête d'anniversaire avant d'aller dîner au restaurant en tête-à-tête. Et moi, je nous fais livrer le repas.
Je mets la table quand, enfin, la pizza arrive. Je vais la chercher puis appelle Lou et Lexie.
— À table les blondasses !
Elles accourent comme des folles, le regard presque fou, ce qui me fait rire.
— Vous avez un peu de bave au coin de la bouche.
Lexie me répond par un geste obscène tandis que Lou prend ma blague au pied de la lettre et s'essuie le menton.
Je ris et m'installe à ma place puis me sers une part. Le repas va de bon train. Les filles parlent des avancées du mariage, rigolent de leurs anciens camarades qui ont dû retourner en cours et se réjouissent de vivre ici. Lou parle aussi de sa famille qui lui manque. On parle de tout et de rien. De rien et de tout. Comme avant.
Vient alors le sujet d'Halloween. Aux États-Unis, les décos pour la fête sont déjà en rayon et mes amies n'ont pas manqué de le remarquer.
— J'ai tellement hâte de fêter Halloween ! Je suis sûre que c'est quelque chose ici ! s'extasie Lou.
Lexie croque dans sa part avant de baragouiner :
— Moi, je veux surtout voir la parade d'Halloween de New York. Il paraît qu'elle est incroyable. On pourrait y aller toutes les trois. Et puis... si tu y tiens, on emmènera ton ami mangeur de chien.
Je lui lance un regard moqueur. Décidément, elle ne se remettra jamais de cette mauvaise blague.
Puis je me rappelle ce qu'elle a dit avant et mon visage s'assombrit.
— Je ne sais pas si ça va être possible. Le Times organise une fête d'Halloween au bureau et je ne suis pas sûre que ce soit bien vu de ne pas y aller.
Lou soupire.
— Dommage... Je voulais qu'on se déguise en « Les trois petits cochons ». Mais à deux, ça n'aura plus aucun sens...
Lexie lui lance un regard acéré.
— N'y pense même pas. C'est sans moi.
Lou lève les yeux au ciel et je manque de recracher mon eau dans la bouche. Ça m'avait manqué leurs disputes !
— Alors en quoi tu vas te déguiser, hein ?!
Lexie sourit et dit fièrement :
— En Harley Quinn. La femme la plus badasse qui soit !
Lou grimace.
— Je préférais l'idée des Trois petits cochons.
Puis soudain, comme si elles n'étaient capables de se mettre d'accord que sur le fait de m'emmerder, elles pivotent vers moi.
— Et toi ? En quoi tu vas te déguiser ?
Je pince les lèvres. Alors là, bonne question.
— Heu... Quelque chose qui ne fait pas peur. Ici, Halloween ne rime pas avec peur. Et... je préférerais éviter d'être effrayante.
Lou esquisse un sourire taquin.
— Pourquoi ? T'en as marre que les gens fuient en te voyant ?
Lexie est prise d'une quinte de toux, morte de rire.
Je les fusille du regard. Je ne fais pas peur. C'est juste que, quand je veux quelque chose, je fais en sorte de l'obtenir. Peut importe qui il y a sur ma route. Point.
Lexie me fixe intensément, signe qu'elle a une bouffée d'inspiration.
— Déguise-toi en La princesse Belle. Au moment où elle a la belle robe jaune évidemment, pas la robe de paysanne.
Je pince les lèvres.
— Je ne suis pas sûre. Est-ce que je ne vais pas passer pour une pétasse ou une gamine ?
Les filles secouent la tête.
— Non ! Ce serait Cendrillon ou Blanche Neige, je dis pas. Mais Belle est différente. Elle est comme toi. C'est une fille intelligente et déterminée qui rêve d'aventure au tour du monde ! C'est une passionnée de lecture et elle se bat pour la justice et ceux qu'elle aime. Ce n'est pas une princesse en détresse. Et tu as son nom et sa nationalité.
Je souris. Je n'avais jamais vu ça comme cela, et malgré tous les souvenirs négatifs qui sont associés à elle, j'aime l'idée. Après tout, La Belle et La Bête n'est pas mon Disney préféré pour rien...
Mais je ne veux pas leur dire oui, ne serait-ce que parce que je ne sais pas où trouver la tenue et qu'elles vont s'emballer.
— On verra.
Elles échangent un sourire complice, ce qui m'arrache un soupir. J'ai peur qu'elle ne comprennent pas le sens de ma réponse... Je sais d'ores et déjà que peu importe ce que je pourrais dire, je serai déguisée en Belle.
Les filles commencent à parler d'autre chose et je ne les écoute plus. Mes pensées dérivent vers Jayden, Bruce Payne, mon faux copain, tous mes problèmes. Comment vais-je m'en sortir ?
Mon cœur se serre et je décide de prendre mon cachet quotidien.
Je sors ma boîte et avale mon comprimé avec de l'eau. Alors que je repose mon verre, je croise le regard suspicieux de Lou.
— Je t'ai déjà vue en prendre plusieurs fois depuis qu'on est là. Qu'est-ce que c'est ?
Je me mords la lèvre et grommelle :
— Du paracétamol. Lexie m'arrache la boîte des mains et la tourne sous tous les angles.
— Et pourquoi il n'y a rien ? Ni étiquettes, ni inscriptions, ni photos, ni instructions ?
Elle relève la tête et pose sur moi un regard perçant. Lou la lui prend des mains.
— Hum... c'est que... je devrais pas... mon médecin n'est pas...
L'expression de Lexie se durcit et toute trace de malice quitte son regard.
— Tu ne devrais pas en avoir, c'est ça ? Tu sais que falsifier une ordonnance est puni par la loi ?! Tu peux encourir de la prison et une lourde amende, Belle !
Je pince les lèvres et hausse les épaules.
— C'est juste une ordonnance... pas un chèque.
Lexie ouvre la boîte et prend quelques comprimés dans le creux de sa main pour les observer.
— Du paracétamol, Belle ?
Sa voix monte d'un octave.
Elle relève la tête et rive un regard meurtrier sur moi.
— Du paracétamol !? Tu te fiches de moi, Belle ! Tu te fous de notre gueule !? Ma mère en prenait, je les reconnaîtrais entre mille ! Tu sais ce que provoquent ces merdes !? Ce sont des opiacés, des médocs qui contiennent de l'opium ! Tu ne peux pas t'en servir comme antidépresseurs ! C'est de la drogue, putain !
Mes doigts se crispent sur la nappe et ma vision se brouille. Avant même que je ne m'en rende compte, ma lèvre se met à trembler, bientôt suivie de tout mon corps.
— Je t'en supplie, rends-les moi.
Elle se lève si brusquement que sa chaise tombe en arrière.
— Non ! Il est hors de question que je continue à te regarder t'autodétruire !
Lou fronce les sourcils.
— S'il te plaît ! je la supplie, la voix rauque. J'en ai besoin !
— Non, Belle ! T'en as pas besoin ! coupe Lou. Si c'était le cas, le médecin t'en aurait prescrit !
Un sanglot traverse mes épaules et je tends une main agitée de soubresauts vers ma boîte de médicaments qu'elle éloigne vivement de moi. Elle peut pas me les prendre... Je survivrais pas sans eux...
— J'en ai besoin ! gémis-je.
À travers mes larmes je vois Lou se lever, le visage déformé par la colère et la peine.
— Ils ont été au centre d'une crise sanitaire importante il y a peu. Ces médocs rendent accro ! Ils tuent aussi. Des milliers de gens sont morts d'overdose à cause de ces merdes !
Je saute sur mes pieds.
— C'est faux !
Elles reculent d'un pas, surprise par tant de véhémence. Et malgré la colère et la peur qui font rage en moi, je lis de l'inquiétude dans leurs regards. Mais je ne peux pas céder. Je ne peux pas...
Les larmes dévastent mon visage et j'enroule mes bras autour de mon corps tremblant. Je ne peux pas... Je ne survivrais pas sans eux...
Ma respiration s'accélère et je me laisse tomber par terre, en proie à une crise de panique. J'ai l'impression de mourir, que l'étau se referme autour de moi et que je manque d'air. La pièce tourne, les murs se rapprochent, m'écrasent. Partout où je pose les yeux, je vois des étoiles. Et j'ai beau tenter de réguler ma respiration, celle-ci continue d'être de plus en plus saccadée.
Je remonte mes genoux contre ma poitrine et me balance d'avant en arrière.
Soudain, une paire de cuissardes et une paire de baskets apparaissent dans mon champ de vision, puis ce sont les visages de mes deux amies qui se sont baissées. Et finalement, je ne vois plus rien, le visage enfoui dans leurs bras.
— Belle... Je sais que tout ce qui t'est arrivé était très dur. Beaucoup trop pour une seule personne. Mais tu n'as pas besoin d'antidouleur. Si ce n'est pas déjà trop tard, tu risques de développer une dépendance, mais la vérité, c'est que tu n'en as pas besoin.
Je relève la tête et fusille Lou du regard.
— Qu'est-ce que t'en sais !?!
Elle pose une main sur ma joue pour essuyer mes larmes.
— Tu es intelligente et je sais que tu vas comprendre ce que je vais te dire... Ces médicaments, tu les as eus illégalement. Tu ne sais pas s'ils sont vraiment efficaces contre la dépression, ni même si tu es vraiment dépressive. Tu ne sais pas non plus quel médicament te correspondrait vraiment, quelle dose et pleins d'autres paramètres que seuls connaissent les professionnels. Alors, oui, je suis sûre que ça t'a aidée, mais maintenant, ça te détruit plus qu'autre chose. Et si aujourd'hui tu tiens encore debout, c'est parce que tu es la personne la plus forte, courageuse et déterminée que je connaisse. Mais aussi parce que tu es entourée de personnes qui t'aiment et te soutiennent. Ça n'a rien avoir avec ces médocs.
Mes larmes se tarissent et je renifle.
A-t-elle vraiment raison ? Et si je n'étais pas réellement dépressive ?
Lexie m'attrape la main.
— Mais on ne saura jamais la vérité si tu ne vas pas voir un médecin. Et je t'interdis d'avoir honte. La dépression, les crises d'angoisse, les troubles ou je ne sais quel autre problème..., ce ne sont pas des faiblesses de caractère, Belle. Ce sont de véritables maladies, alors tu n'as pas à avoir honte. Surtout avec tout ce qui t'est arrivé. Pas avec nous.
Je ferme les yeux et pose ma tête sur l'épaule de Lexie, me laissant bercer.
— Maintenant, je vais reprendre ta boîte et la vider dans les toilettes. Et tu vas me laisser faire car tu peux t'en passer, car tu dois t'en passer. Et après, je vais prendre rendez-vous avec un médecin pour toi, d'accord ?
Je hoche doucement la tête.
Lou dépose un baiser sur ma joue et continue de me caresser les cheveux.
— On est là maintenant. Ça va aller.
Je me laisse aller dans ses bras et m'endors.
J'ai tellement envie de la croire.
—————————————————-
Hey !!
Maintenant vous savez ce qu'était ces fameux cachets ! Vous en pensez quoi ?
Vous pensez que Lexie et Lou ont agit correctement ?
Et à votre avis, que va t-il se passer à Halloween?
Question du jour :
Quel a été votre pire déguisement d'Halloween?
Pour ma part, j'hésite entre la robe de Raiponce et la robe de sorcière. 😂
———-fin————
Pleins de bisous pailletés et merci d'être encore là!!
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