38. Benjamin

Benjamin D.
Enregistrement skype du 26 novembre 2008


- Mary ?

- Hey Benji, comment tu vas-tu depuis hier à soir ? Ta soirée s'est-tu bien passée ?

- Merveilleuse.

- C'est vrai que tu es rayonnant ce matin ! Pas de troubles d'insomnies ?

- Non.

- C'est quoi ce sourire béat Benji ? T'as-tu soupé avec Nozaki hier à soir ?

- Mary, je suis amoureux !

- Nozaki ?

- Oui.

- Vous-autres, vous êtes-tu remis ensemble ?

- Oui ... peut-être ... non ... je ne sais pas !

- Mon doux ! Et Ketut ?

- Ketut ? Il n'y a plus de Ketut. Evanouie ... C'est drôle que tu m'en parles, car en fait c'est grâce à elle.

- Grace à elle ?

- Et puis à toi aussi !

- A moi ? Ben voyons donc !

- Oui, tu te souviens que Noz est arrivée hier, quand on était ensemble sur Skype.

- C'est ça.

- Alors voilà : elle trouvait que ma voix était trop douce pour parler avec un homme, alors elle a conclu que je skypais avec une fille. Tu connais son côté détective, elle adore s'imaginer toujours plein de choses à partir d'un fait.

- Tu y'as pas dit que c'était moi ?

- Oh non, je n'avais pas vraiment envie d'entendre ses petites remarques du genre « Oh my god ! Mary is calling you. Why ? Benji tell me why ! ... No, don't ! You didn't write her about Quebec, right ? ... Oh-my-god ! You didn't write her, Benji you didn't ! That's not nice of you !»

- Tu l'imites bien !

- Oh j'ai l'habitude ! Je pensais qu'elle se douterait quand même que c'était toi, parce que je parlais français, et la seule autre femme avec qui je parle français, c'est ma tante, mais avec elle, on ne skype jamais, et ça, c'est le genre de chose qui ne passe pas inaperçu pour un Sherlock Holmes comme Noz !

- C'est certain !

- Sauf que Noz est toujours aussi mauvaise en langues étrangères et elle n'a même pas reconnu le français !

- En plein ça ! Quelle tête carrée !

- Oui, pauvre Canada ! Well, elle a conclu que je parlais à ma petite amie. J'ai essayé de lui dire qu'elle se trompait, elle ne m'écoutait pas : elle était bloquée sur cette idée que je skypais avec ma petite amie, en indonésien probablement.

- Ben ça !

- Du coup, elle m'a posé plein de questions sur Ketut : comment elle était, si elle était belle, si elle avait de l'humour, si elle était intelligente, ce qu'elle aimait, ce qu'elle mangeait, quelle taille elle faisait, quelle religion elle avait, si elle avait des frères et des sœurs, tu vois un peu le style.

- Ouais. Pis t'as-tu répondu ?

- Je n'arrivais pas à répondre, elle le faisait pour moi avec des « évidemment qu'elle est belle », « et je suppose qu'elle sait cuisiner, elle ». Elle se comparait totalement à Ketut, en se l'imaginant plus à partir de ce qu'elle pensait que ce que j'arrivais à dire. Elle se trouvait trop nulle à côté de Ketut. Elle flippait totalement.

- Mais ça a pas d'bon sens toute ça ! Tout l'monde y'aurait été bin cave à côté de c'te blonde là qu'y existait pas !

- Oui, mais je n'arrivais pas à lui dire que la vraie Ketut n'était pas aussi parfaite. Alors pour qu'elle arrête de se dévaloriser, je l'ai complimenté sur sa beauté, sur son énergie et tout ça. Ce n'était pas difficile à dire, parce que tout ça, je le pense vraiment.

- Pis ?

- Cette fois, elle m'a enfin écouté et quand j'ai fini, elle m'a dit avec un air triste « mais c'est avec elle que tu es, pas avec moi ».

- Mon doux !

- Oui, comme tu dis. Je lui ai rappelé que nous deux, on n'avait pas réussi à être heureux ensemble, mais que je pensais très souvent à elle. Et j'ai ajouté « parce que je t'aime. Et tu le sais, ça. Mais on a nos vies. »

- Wahou ! A dit quoi ?

- Elle retenait ses larmes depuis un moment, mais là, ce n'était plus possible pour elle. Alors je l'ai pris dans mes bras.

- Tu l'as ...

- Oui je sais, je n'aurais pas dû après ce que je venais de lui dire, mais ça m'a brisé le cœur de la voir pleurer comme ça. A cause de moi, tu comprends ?

- Oui. Oui je comprends.

- Et puis, il y avait toute cette conversation d'hier qu'on a eue ensemble toi et moi à propos de Tom et ça m'a remémoré nos moments de bonheur avec Noz. J'étais complètement nostalgique, mais je n'y pouvais rien. Et puis j'étais fatigué, ça aide la fatigue. Pas autant que l'alcool, mais ça aide bien.

- Me dis pas ...

- Si. Je me suis fait piéger à mon propre jeu, parce que l'avoir dans mes bras, c'était impossible de ne pas craquer. Surtout quand elle m'a susurré dans l'oreille « je t'ai toujours aimé » et qu'elle m'a demandé un dernier baiser, « juste un ».

- T'as-tu faite ça ?

- Elle était là dans mes bras, son corps si fin tout chaud, son parfum de vanille sur moi et ses cheveux fins sur mes doigts : c'était impossible de lui refuser. Et puis, j'en avais tellement envie moi aussi. Alors je me suis dit qu'un dernier baiser, ce n'était pas si grave, n'est-ce pas ?

- En théorie oui.

- Oui en théorie. Parce que ce baiser là, c'est un des plus beaux baisers que j'ai eu de ma vie. Il y avait dans ce baiser le goût de la première fois et toute la nostalgie de nos années passées ensemble. Il y avait de la douceur et de la passion. Il y avait de la tristesse et du plaisir. Il y avait du souvenir et de l'espoir. C'était un feu d'artifice, tu vois ! J'avais oublié la saveur des baisers de Noz. Mais comment j'ai pu oublier ? Comment j'ai pu vivre sans ? Well, ce baiser a duré longtemps. Je ne voulais pas qu'elle s'arrête, tant pis si on mourrait à cause du manque d'oxygène !

- Ben voyons donc !

- Après tout est allé très vite, je n'ai pas contrôlé, j'ai oublié Ketut et j'ai retrouvé le goût sucré de Noz, la douceur de sa peau, son parfum vanille et sa couleur dorée. J'étais comme dans un rêve, ou plutôt dans mes souvenirs mais en mieux. Et quand je me suis réveillé ce matin, well, tout à l'heure vers dix heures, à la place de son corps tout chaud, il y avait ce petit origami en forme de fleur. Regarde : dedans, elle a écrit :

I'd like to spend my entire life getting last kisses from you.
I'm off to work. Call me if you want
Call me if you love me
Call me if you like me
Call me if you can
Call me anyway.

- Enwoille !

- Tu comprends pourquoi je suis amoureux ?

- Mets-en ! C'est beau, même avec les ratures !

- Surtout avec les ratures !

- Pis tu faites quoi maintenant ?

- Je ne sais pas. Déjà je vais continuer à te parler des Beaux Lacs, comme ça tu vas pouvoir avancer ton étude.

- Ah oui, merci !

- Je l'ai promis à Noz hier soir.

- Ah, tu lui as-tu dit que c'était moi sur skype ?

- Oui. Ca l'a bien fait rire !

- Pis ?

- Elle n'a pas eu le temps de me faire la morale, je l'ai embrassée avant qu'elle commence.

- Mais là, c'est une bonne stratégie !

- Alors on s'y remet ?

- Ok.

- On en était où ?

- Matt.

- Ah oui Matt. Matt l'australien. Ses poissons me manquent ! Pas toi ?

- Mets-en ! C'était un très bon pêcheur.

- Well, surtout il était sympa de nous pêcher du poisson presque tous les jours. Et surtout de le nettoyer. Et de s'occuper du feu aussi. Heureusement qu'il était là, parce que je ne sais pas qui l'aurait fait ! Il aurait été un bon candidat à Survivor. Tu connais ?

- Mais là, je regarde Koh Lanta, la version française sur internet ! Je manque pas un épisode ! Tu sais, c'est très smart d'un point de vue sociologique. Pis j'aime assez ça, c'est sûr, regarder des niaiseries de même ! Mais là Matt, y'aurait pas pu gagner, c'est çà, là, y'était trop fort. Tu sais, dans ces shows, les meilleurs sont éliminés avant la fin.

- Oui tu as raison. Un autre qui aurait pu y participer, c'est Jo. Sauf qu'il aurait été meilleur pour le sport que pour nourrir son équipe.

- Jo, tu le trouvais-tu comment ?

- C'était un bon gars. Je m'entendais vraiment bien avec lui. En fait, il était comme mes potes.

- Ah ouain ?

- Tranquille, drôle, sympa, sportif, fêtard et toujours de bonne humeur. Même quand une fille refusait ses avances. Et plus d'une fois !

- Qui ?

- Toutes ! Il a essayé avec toutes les filles, mais pas une n'a voulu de lui. Je ne comprends pas, c'est un beau gars, bien musclé, bien fort. J'ai cru qu'avec Fred, ça pouvait marcher, comme ils étaient souvent ensemble. Mais non, Fred est une fille difficile. Et puis il ne pouvait pas lutter contre Tom.

- C'est certain !

- En fait, je me rends compte que cette forêt, c'était un vrai site de rencontre ! Entre les histoires d'amour, les histoires de cul et les histoires platoniques et en comptant les after comme Noz et moi, je crois bien qu'il n'y a que Jo qui n'y a pas eu droit !

- T'es-tu sûr de d'ça ?

- Ecoute : Livia et Fred sont rentrées en Europe, Noz est restée à Vancouver, reste que Rapha. Et je la vois mal se retrouver avec lui l'année d'après ! A moins que toi ...

- Comment ça moi ?

- Toi et Jo ...

- N'importe quoi, Benji ! Anyway, ce que j'veux dire : t'es-tu certain de ce que tu me contes à propos de Jo aux Beaux Lacs, pas après ?

- Ah ! Non, c'est juste un souvenir. Mais il faudrait que j'en parle à Noz, elle qui aime mener les enquêtes, elle doit tout savoir. Et puis, c'est le genre d'événement qu'elle a dû noter dans son carnet qu'elle écrivait tous les soirs. Elle t'a parlé de son carnet ?

- Pour tout te dire ...

- ... Ah oui, c'est vrai, l'éthique de l'étude !

- Non, c'est pas ça. Son carnet, a m'en a faite une copie.

- Une copie ? Mais pourquoi ?

- C'est sa contribution.

- Comment ça ?

- C'est ce qu'a m'a envoyé.

- Son carnet, celui qu'elle a écrit aux Beaux Lacs ?

- Oui.

- Il y a dix ans ?

- Oui.

- Tu ne voulais pas justement qu'on te donne nos impressions actuelles sur ce qui s'est passé il y a dix ans ?

- Oui, c'est correct.

- Mais, elle ne répond pas à ta demande ! Tu nous avais bien précisé que ce qui t'intéressait, c'était l'évolution de nos ressentis, n'est-ce pas ?

- En plein ça !

- Et alors ?

- Tu connais Noz mieux que moi. Ca fait que me semble que je pourrai pas obtenir mieux, là !

- Oh la chipie, elle a osé ! Moi qui pensais qu'elle allait me niaiser (c'est ça ?) à cause de skype !

- Oui, c'est ça !

- Et alors, il y a des révélations dans son carnet ?

- Ben voyons donc, ça j'ai pas le droit de te le dire. L'éthique de l'étude !!!

- OK, je vois, tu ne veux pas coopérer. Mais je le saurai, tu sais maintenant, j'ai une stratégie pour approcher son carnet !

- Tu sais-tu faire les origamis ?

- Non, mais je sais les défaire. Et il n'y a pas que ça que je sais défaire !

- Je veux pas savoir ça Benji, c'est rendu que ce genre de détails ne fait pas partie de mon étude.

- Je croyais que tu étais intéressée par les histoires de « cœur » aux Beaux Lacs ?

- Ben oui, mais là-bas, y a dix ans. Pas chez toi hier à soir !

- Tu sais, maintenant que j'y repense, c'est étonnant qu'il n'y en ait pas eu plus.

- De quoi ?

- Je veux dire, tu mets six beaux garçons et quatre jolies filles pendant un mois et demi perdus en pleine forêt 7 jours sur 7, 24 heures par jour, tu t'attends à du croustillant. Enfin, tu fais ça maintenant avec cette génération TV réalité, ce serait beaucoup plus trash. Nous on a été très romantique finalement dans l'ensemble.

- Vu de même, c'est correct. Mais là, on n'est pas non plus une génération d'anges !

- Alors c'est peut-être à cause de la durée.

- Comment ça ?

- Oui, on était ensemble pour un mois et demi et ça on le savait dès le départ. Si le séjour avait duré une semaine, penses-tu que ça aurait été aussi tranquille ?

- Tu crois-tu c'aurait été la fête du slip ?

- Possible. La preuve, j'ai vite fait marche arrière avec Rapha. Les autres ont sûrement eu le même réflexe que moi, sauf qu'ils ont réfléchi avant.

- Correct. Pis Noz aux Beaux Lacs ? Me semble que tu ne veux pas m'en parler, là ?

- Non, c'est juste qu'étonnamment, Noz aux Beaux Lacs, je n'ai pas grand-chose à t'en dire.

- Ben voyons donc !

- C'est pourtant vrai. Tu sais, les souvenirs que j'ai d'elle là-bas, ce sont des souvenirs de groupe. Je n'en ai aucun d'elle seule. C'est bizarre quand même.

- A ton avis ? Tu ne l'appréciais-tu pas trop ?

- Non, comme je te l'ai dit, j'aimais tout le monde. Je crois plutôt que c'est parce qu'elle ne parlait pas français et moi j'avais envie de le parler. J'étais déjà fluent, mais tu sais, quand tu ne pratiques pas, tu oublies les mots.

- C'est certain.

- Et puis, il y avait trois français de France. Ce n'est pas que je ne vous aime pas, vous les Québécois, mais là c'était une occasion en or de parler le vrai français, celui que j'ai appris avec ma tante. Et ça, j'adorais.

- Me niaise pas Benji !

- Ne fais pas la tête, je vous aime bien aussi ! La preuve, je passais autant de temps avec Tom qu'avec Pierre et Fred. Ceci dit, on était tout le temps ensemble tous les quatre, parce qu'en plus, on s'entendait vraiment bien. Alors pour revenir à ta question, j'avais moins de temps à consacrer aux anglophones. Je faisais quand même l'effort d'aller vers eux, parce que je n'aime pas qu'il y ait des groupes à l'intérieur d'un groupe, si tu vois ce que je veux dire.

- Oui oui.

- Mais finalement, en y repensant, je crois que là aussi, parmi les anglophones, j'avais des préférences : Jo parce qu'il me rappelait mes potes, Matt parce qu'avec lui j'apprenais pleins d'astuces pour se débrouiller dans la nature et puis aussi Rapha, parce qu'au début, elle me plaisait, et après, parce que je ne voulais pas créer une tension malsaine et faire comme si rien ne s'était passé. Du coup, c'est vrai que Noz et Livia, je les ai un peu laissées tomber.

- Ca fait que tu n'avais pas d'attirance particulière pour Noz, même pas au bout d'un mois ? Me niaise pas là Benji !

- Non. Et même pire : quand je suis rentré à Vancouver après les Beaux Lacs, j'ai repris mes activités habituelles, sans chercher à la revoir. Si Pierre n'était pas venu étudier à Vancouver et si Noz ne lui avait pas proposé une place dans sa colocation, elle serait restée un souvenir comme Livia ou Rapha.

- Elle aurait peut-être cherché à te revoir, elle.

- Ca je n'en suis pas si sûr. Ce n'est pas trop son genre. Et puis, il aurait fallu que je lui plaise, et ça non plus je n'en suis pas sûr. Son type idéal, il est grand et musclé, donc plus Jo que moi. Alors un grand merci à Pierre, même si c'est involontaire de sa part. Quel phénomène quand même ce Pierre.

- A qui le dis-tu !

- Désolé Mary !

- Non, pas de trouble. Coudonc, c'est fou pareil ce que tu me racontes là, à propos de Noz.

- Oui quand on y pense : cette fille, avec qui j'ai partagé trois années de ma vie, et qui m'a encore envouté hier soir, j'ai passé un mois et demi en pleine forêt avec elle, et rien. Comme quoi ...

- Ca fait que la fille avec qui tu étais le plus souvent, c'était Fred ?

- Oui, tu as raison. Mais avec Fred, on se considérait plutôt comme des frères et sœurs. C'était très sain comme relation. On était très proche, mais c'était juste de l'amitié. Je ne crois pas non plus que j'étais son genre. Elle, c'est plutôt les grands maigres avec une vie compliquée !

- Mets-en ! Tu la trouvais-tu comment ?

- Fred ? C'est une fille entière. Elle ne faisait pas dans le compromis. Un peu comme Tom finalement. C'est peut-être ce qui les a attirés ces deux-là.

- C'est certain !

- Moi ce que j'aimais, c'était parler avec elle. Comme elle était franche, tu savais tout de suite à quoi t'en tenir. Et puis, elle aimait parler géopolitique et économie. Elle était intéressante, pas girly comme les copines de mes potes. Mais c'est vrai que pour elle, c'était blanc ou noir.

- Comment ça ?

- Si tu es son amie, elle te donne tout ce qu'elle a, mais sinon, elle t'ignore. Où même carrément elle te hait. Tu te souviens de ses relations avec Rapha ?

- Ouain, pas terrible !

- A vrai dire, je ne me souviens même pas les avoir vues discuter ensemble, c'est dire !

- Enwoille !

- Et Noz m'a dit qu'elle la trouvait très distante les premières semaines. Je me souviens qu'au début, elle était plutôt sur ses gardes. Elle se mettait sur la défensive en se justifiant de tout, même du choix de Jo comme équipier de canoë. Franchement, nous on s'en fichait de ses raisons soit disant techniques.

- Soit disant ?

- Oui, je pense qu'en fait, elle avait choisi le plus musclé. C'est ce que j'aurais fait à sa place ! Surtout que placée derrière lui, elle pouvait se permettre de ne pas trop se fatiguer !

- Y sont smarts, ces maudits français ! Pierre y'était de même.

- Non, Pierre, lui, il voulait en faire le moins possible, c'était très clair. Elle, c'était différent. En fait, je crois qu'elle pensait avoir quelque chose à prouver pour pouvoir s'intégrer au groupe.

- Mets-en !

- C'est vrai que c'est elle qu'on a rencontré en dernier, une fois arrivés à la cabane, alors qu'on avait déjà tous eu le temps de faire connaissance pendant le trajet depuis Montréal. Et comme elle n'est pas du genre à aller vers les autres, comme Noz ou moi par exemple, ça n'a pas arrangé les choses.

- Mais elle, a s'est bien intégrée pareil.

- Oui, mais je pense que sans Pierre, ça aurait été beaucoup plus difficile pour elle ... En fait, je suis en train de réaliser que Pierre a joué un rôle primordial dans notre groupe. Peut-être même sans s'en rendre compte ! C'est ce que tu voulais me faire comprendre, n'est-ce pas ?

- C'est comme ça que toi tu l'analyses. Mais Pierre, y'est pas le seul à avoir joué un rôle important. Toi de même, tu as occupé une place majeure, sans t'en rendre compte, juste parce que c'est ta façon d'être.

- Laquelle ?

- A ton avis ?

- ... Je ne sais pas. Organisateur peut-être ?

- Oui. Pis surtout médiateur. En faite, pour simplifier, dans un groupe social, chacun occupe un rôle.

- Comme chez les animaux ?

- Mets-en Benji, nous sommes des animaux !

- Tu as raison, on l'oublie trop facilement !

- Ca fait que quand le groupe y fonctionne bien, c'est que les rôles sont bien répartis.

- C'est ce que tu montres avec ton étude ?

- Non, ça c'est la base. Fait que moi, j'étudie vos représentations à vous-autres, pis j'essaie de corréler toute ça avec votre type de personnalité.

- C'est ce que tu appelles nos représentations de l'acte de faire société ? C'est bien comme ça que tu avais présenté ton étude sociologique dans ton e-mail ?

- En plein ça !

- Ah, c'est un peu plus clair maintenant ! Je t'avoue que je n'avais pas tout compris !

- Pas de troubles !

- Mais dis-moi Mary, les entretiens que tu as faits avec nous là-bas en 98 pour ta thèse, ce n'était pas suffisant pour répondre à cette étude ? Ce n'est pas que cette conversation me dérange, au contraire, c'est très agréable de discuter avec toi ...

- Merci, j'trouve ça l'fun aussi de jaser avec toi, pour de vrai. Pour te répondre, fait que mon étude, elle intègre aussi le facteur temps. C'est pour ça que c'est rendu que je vous interroge dix ans après. Parce que le ressenti pis les impressions, y évoluent au fil du temps.

- Mais alors Noz, elle est vraiment hors sujet !

- Théoriquement oui, mais son cahier y est crissement en plein ça dans le ressenti. Y a beaucoup plus que ce qu'elle m'avait dit. T'as l'air pensif présentement.

- Je cherche le rôle de Noz dans le groupe des Beaux-Lacs ... Clown ? Ou alors Venus ?

- Ca, c'est pour toi. Pas pour le groupe.

- Tu as raison ... Fée clochette alors ?

- Je te laisse y réfléchir.

- ...

- Tu souhaites-tu ajouter de quoi ?

- Non je crois que je t'ai tout dit. Merci de m'avoir fait un traitement de faveur. Je n'aurais pas été capable de te mettre tout ça par écrit.

- Merci à toi d'avoir pris le temps de me répondre. Je te souhaite du bonheur avec ta fée clochette, mon cher Peter Pan.

- Merci Wendy ! Je te tiendrai au courant.

- Tu l'embrasses de ma part, OK ?

- Oui, sans problème. Et toi tu me tiens au courant pour ton étude, OK ? Je n'ai pas tout compris, mais ça a l'air intéressant.

- OK, promis.

- Et si tu passes à Vancouver et que je suis là, ça me ferait très plaisir de te revoir.

- Je retiens l'invitation, merci.

- Ou à Bali d'ailleurs, si j'y retourne !

- Malade !

- Je t'embrasse bien fort Mary. See you.

- Babaille.

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