8. Souvenirs merveilleux
« Vas revoir les roses. Tu comprendras que la tienne est unique au monde »
Antoine de Saint Exupéry
✨✨✨✨
Grégoire
Après le déjeuner, j'ai laissé Constance à mon appartement. J'ai déposé ses bagages dans la chambre d'amis, lui ai expliqué où se trouvait tout ce dont elle pourrait avoir besoin et lui ai remis un double des clés. Elle n'a pas prononcé un seul mot depuis la sortie du restaurant et est restée enfermée dans son mutisme en s'asseyant sur le canapé sans même me regarder.
vais retourner au Domaine travailler un peu. Je devrais rentrer assez tard ce soir, ne m'attends pas pour dîner. Fais comme chez toi, il a tout ce qu'il faut pour te faire à manger. Et si tu as besoin de quoique ce soit, passe-moi un coup de fil ou envoie-moi un message. D'accord ?
Voila quel a été le contenu de mon monologue. Depuis, je n'ai aucune nouvelles. Mais je ne peux pas lui en tenir rigueur, je vais la laisser tranquille. Elle a besoin de respirer et d'assimiler tout ça.
Je suis toujours au Domaine. Il est dix-huit heures et il commence à faire nuit.
Taper dans les murs m'a détendu. J'avais vraiment le cœur lourd d'avoir fait souffrir Constance mais je ne pouvais pas continuer cette relation. Encore moins après avoir revu Éloïse. Une autre femme que j'ai dû faire souffrir aussi tiens. Je pense sans cesse à elle depuis lundi et ça me fait chier. Vraiment chier. Elle est mariée et j'ai eu ma chance, même si on me l'a tout de suite retirée.
Je me souviens de cette soirée comme si elle s'était déroulée hier. L'une des plus douces que j'ai vécues.
Je suis assis dans le canapé du salon, chez Nicolas, un de mes potes qui organise une fête, comme tous les week-ends quasiment. Sa maison ressemble d'ailleurs plutôt à une fraternité qu'à une demeure familiale mais ses parents lui laissent en faire ce qu'il veut, alors c'est beuverie et baisodrome tous les samedis.
On joue à la Play Station. Les soirées débutent souvent par un tournoi de foot. Mais je vais tous les pulvériser, je suis imbattable à Fifa.
J'attrape une bouteille de bière et en avale une gorgée quand je vois une silhouette que je reconnais tout de suite passer dans le couloir. Éloïse est là ce soir ! Tiens-donc, c'est bien la première fois que je la vois dans une soirée.
Je ne suis pas le seul à l'avoir remarquée d'ailleurs, cet enfoiré de Damien me tape sur l'épaule et la montre du doigt.
— Regarde qui voilà !
Je ne détourne pas ma tête de l'écran de télévision.
— Et alors, qu'est-ce que tu veux que ça me fasse ?
Bien-sûr que ça me fait quelque chose mais j'essaye de paraître indifférent devant mes potes et encore plus devant ce crétin dont le plus gros kiff est de me faire chier en prouvant à tout le monde qu'il est meilleur que moi, pour pécho des filles notamment. Alors si je lui montre que la petite Éloïse ne me laisse pas totalement de glace, il va tout faire pour la draguer et je vais être obligé de lui rentrer dedans. Non pas que ça me dérangerait, j'en ai envie depuis tellement longtemps que j'en serais soulagé, mais je ne veux pas faire de vague et créer davantage de soucis à mon père.
Je me replonge dans la partie de foot et bien-sûr, je gagne. 3-0 !
— Allez. Entraînez-vous un peu les blaireaux et quand vous aurez le niveau, vous viendrez me chercher !
J'entends les gars commencer à m'insulter gentiment mais je ne les écoute pas. Je balance la manette au prochain joueur, me lève en les saluant d'un doigt d'honneur victorieux et pars à la recherche d'Éloïse. Je parcours la maison - qu'est-ce qu'elle est grande cette baraque bordel ! Rien au rez-de-chaussée ni au premier étage. Je redescends et recommence mon petit tour mais je ne la vois toujours pas. Et je ne peux demander à personne où elle se trouve, les gens se foutraient de ma gueule ou iraient le reporter aux autres et cela reviendrait aussitôt aux oreilles de Damien.
Je vais chercher dans le jardin et là, enfin je l'aperçois. Elle est avec sa copine, celle qui lui colle toujours au train. En même temps, ça m'arrange qu'elle soit à l'abri des regards indiscrets, je vais pouvoir lui parler sans m'occuper de surveiller les alentours.
Je m'approche d'elle.
— Salut.
— Euh ... salut, me répond-elle timidement avant de questionner du regard sa copine, toute aussi surprise qu'elle que je vienne l'aborder. Normal, ça fait des mois que j'ignore ses œillades. En apparence du moins.
— T'as cinq minutes ?
Elle ne me répond pas immédiatement et se tourne de nouveau vers sa pote qui cligne une fois des yeux comme pour lui donner son accord. J'hallucine ou elle a besoin de sa permission ?
— Ok.
— Cool! Viens, suis-moi.
Je l'emmène encore plus loin, je veux être tranquille pour lui parler. Et comme je viens ici toutes les semaines depuis bientôt deux ans, je connais la propriété par cœur.
Je m'arrête une fois que j'ai atteins la cabane de jardin. Les parents de Nico ont vraiment du fric et ce qui ressemble à une vulgaire cabane en bois posée à même le sol chez le commun des mortels, s'apparente chez eux à vrai petit chalet. J'ai choisi cet endroit car je sais qu'il a été spécialement aménagé au premier étage pour que la petite sœur de Nico puisse y faire ses pyjamas party avec ses copines. Je vais donc y trouver de quoi nous installer confortablement, loin de tous ces crétins.
Je pousse la porte, allume la lumière et monte les escaliers, Éloïse sur mes pas. Une fois là-haut, j'allume la télé et choisis une chaîne musicale que je laisse en fond sonore.
— Vas-y. Assieds-toi
Elle s'exécute, venant s'installer timidement sur le bord du canapé, et ne dis pas un mot.
— Tu n'es pas très bavarde, je constate en allant m'asseoir à mon tour.
— Je ... je ne l'ai jamais été.
Ok, tu m'excuses deux secondes là, je vais sortir les rames, je reviens...
— Je suis étonné de voir ici. Tu ne viens jamais aux soirées.
— Je pensais que tu ... tu ne serais pas là ce soir ... en fait.
Elle me fuit ?? Impossible, elle passe son temps à me reluquer !
Je ne lui cache pas mon incompréhension.
— Attends, tu es venue parce que tu pensais que je n'y serais pas ?
— Bah ... ouais.
Ma bonne humeur vient de s'envoler d'un coup. Même son bégaiement face à moi ne parvient plus à m'amuser.
J'avance mes fesses sur le bord du canapé pour être à sa hauteur et je reprends.
— Mais pourquoi ?
— Tu sais ... tu es souvent très bien entouré dans ce genre de soirée, alors...
Eh merde ! Je suis un connard. Elle parle des nanas. C'est vrai que je finis rarement la nuit tout seul, il m'est impossible de le nier.
— Et puis, continue-t-elle avant que le malaise ne s'installe, avec cette semaine... je me suis dit que tu ne viendrais pas.
— Bah non, tu vois j'suis là. Ça peut paraître bizarre je sais mais à quoi ça va me servir de rester à déprimer tout seul dans ma chambre ? Ça ne va pas la faire revenir. Et puis, ce n'est pas ce qu'elle aurait voulu. Elle aurait préféré me voir sortir et essayer de m'amuser un peu, même deux jours après son enterrement, plutôt que de me disputer une énième fois avec mon père... Alors, voila, je suis venu. Mais pas d'alcool. Je veux garder les esprits clairs, elle n'aimerait pas que je fasse trop de conneries. Enfin, pas plus que d'habitude.
Elle sourit. Et je me surprends à lui avoir débité tout ça; moi qui ne me livre jamais. En même temps, ce soir personne d'autre ne s'est étonné de ma présence ici. Alors, quelque part, ça me fait plaisir qu'elle l'ait soulignée.
— Comme te battre ?
— Par exemple.
Son sourire s'agrandit.
— Je fais beaucoup d'autres conneries mais pas celle là, c'est ça que tu sous-entends ?
Elle hausse les épaules.
— Bah, tu bois souvent. Tu sors avec beaucoup de filles aussi. Alors il reste la bagarre.
Elle remue nerveusement ses pieds et j'adore sa timidité. Elle ne bégaye plus mais bon sang ce qu'elle est stressée, et allez savoir pourquoi, ça me donne envie de la titiller un peu.
— Ou la drogue ?
Elle relève subitement les yeux vers moi, ils sont tout écarquillés ! Je suis un branleur mais j'adore ça.
Elle remue la tête.
— Je n'y crois pas une seule seconde!
Je ne réponds rien et me mords la langue pour garder mon sérieux.
— Enfin, dis-moi que non ?
Elle rougit. J'explose de rire et elle me pousse gentiment avec un geste de sa main sur mon épaule.
— Ta tête était trop drôle.
— Pfff !!!!
— J't'assure ! Trop mignon.
Quand j'arrête de rire, un silence gênant s'installe entre nous et je n'ose pas aborder la raison de sa présence, ici, avec moi. Je sais que je vais devoir le faire mais je ne sais pas trop quoi lui dire. Cela paraissait évident quand je l'ai vue dans la maison mais maintenant qu'elle est à côté de moi, les choses sont différentes. Alors j'enchaîne sur des banalités.
— Ça se passe bien le lycée ?
— Le lycée ? Tu m'as faite venir ici pour qu'on parle des cours ?
Bien-sûr que non, je m'en fiche royalement et je connais déjà la réponse de toute façon mais c'est la première connerie qui me soit venue à l'esprit.
— Bah je sais pas, tu veux parler d'autre chose ?
— Tu as besoin que je t'aide pour un devoir c'est ça ?
— Non, je réponds du tac au tac. J'me débrouille tout seul, c'est bon.
— Ok, ok. Ne t'énerve pas. C'est juste que je ne comprends pas trop pourquoi tu m'as emmenée jusqu'ici...
— T'as raison en fait, laisse tomber. On va retourner avec les autres.
Je me lève, pensant qu'elle en fera autant, mais elle me surprend.
— Non, attends. Je n'ai pas dit que je voulais m'en aller. Je voudrais juste savoir ce que je fais là en fait.
Je me rassois.
— Je sais pas. Je t'ai aperçue dans la maison et t'es jamais là aux soirées alors ...
Putain. Pourquoi je n'arrive pas à lui dire simplement que j'aimerais traîner un peu avec elle, apprendre à la connaître et puis surtout l'embrasser. À peu près tout le restant de la soirée. Je n'ai jamais eu à le faire, les filles m'accostent en me sautant dessus d'habitude. Mais bien-sûr, Éloïse est différente et moi je suis en train de passer pour un gros débile qui n'arrive même pas à sortir une phrase correcte.
— Je dois te paraître totalement idiot.
— Tu sais bien que non.
— C'est vrai, je réplique un sourire en coin, même si je pige pas trop pourquoi.
— Pourquoi quoi ?
— Pourquoi tu t'intéresses à moi. Je veux dire, tu n'es pas comme les autres filles qui me tournent autour juste pour paraître cool au lycée. Toi tu te fiches de tout ça.
— Complètement.
Nouveau blanc.
— Mais tu n'es peut-être pas comme les autres garçons non plus, finit-elle par lâcher les yeux toujours obnubilés par ses pieds.
Je rigole jaune.
— Je traîne avec eux pourtant. Et je couche aussi avec toutes ces filles. Bien plus qu'eux d'ailleurs.
Elle inspire fortement. Aïe !
— Un peu trop direct peut-être?
— Un chouïa, ouais, répond-elle d'une grimace avec son nez.
Énième blanc qui me semble interminable. Je me concentre sur les clips à la télé, cherchant quoi dire pour effacer ma stupidité mais c'est elle qui me sauve et qui rompt le silence en premier.
— Alors dis-moi pourquoi le fais-tu si tu désapprouves tant que ça? me demande-t-elle en me regardant réellement pour la première fois depuis que nous sommes assis là.
— Je sais pas. J'suis comme ça.
Et tu ferais mieux de t'éloigner de moi, devrais-je ajouter en toute honnêteté.
— Tu serais comme ça, t'essayerais déjà de me tripoter.
— Pas faux. Mais qui t'a dit que tu me plaisais ?
Je ne peux pas m'empêcher de la titiller. J'ai envie de voir si elle a du répondant. Et je suis aux anges quand je vois qu'elle ne se démonte pas.
— Tu ne m'aurais même pas adressé la parole ce soir si ce n'était pas le cas.
— Je vais peut-être te tripoter alors finalement? Je peux?
Elle sourit et roule des yeux.
Qu'est ce qu'elle est jolie.
— Tu n'oserais pas!
— Tu me mets au défi ?
— Parce que je suis un défi pour toi?
Putain! Qui peut m'expliquer comment j'ai pu passer à côté de cette fille avant ce soir?
— Tu réponds souvent aux questions par d'autres questions?
— Et toi?
C'est officiel, je la veux. Je ne sais pas encore comment mais je la veux.
— T'as du caractère.
— Ah ! Désolée, je ne suis pas aussi docile que tes conquêtes habituelles.
— Non c'est sûr. Je n'ai pas besoin de perdre du temps à discuter en général.
— Bon, je vais prendre ça pour un compliment, me répond-elle en se levant.
Merde, elle est vexée?
Et elle fait quoi là ? Elle se barre? Oui, elle se barre! Mais non!
— Qu'est-ce que tu fais?
— Je ne voudrais pas te faire perdre plus de temps et Emilie doit me chercher de toute façon. Alors salut, ajoute-t-elle avec un mouvement de main avant de s'en aller.
Je ne comprends pas ce qu'il se passe et j'ai le stupide réflexe d'attraper la télécommande pour éteindre la télé avant de réaliser que je dois me bouger le cul et lui courir après. Et quand je dis courir je ne mens pas car, punaise, elle va vite. Elle est déjà dehors. Je ne veux pas crier son prénom pour ne pas attirer l'attention sur nous, même si le jardin est désert, et je me sens soulagé quand je réussis finalement à la rattraper.
Je tire sur son poignet, la forçant ainsi à se retourner. Et pour l'empêcher de s'échapper à nouveau, je plaque sans ménagement mes lèvres sur les siennes.
Je la sens résister, ses lèvres restent figées comme si elle ne voulait pas me rendre ce baiser. Mais je ne m'arrête pas. Je veux vraiment qu'elle m'embrasse également. J'en ai besoin en fait. Et j'ai raison d'insister car je sens sa bouche se détendre et s'ouvrir peu à peu, me donnant ainsi accès à sa langue. Et je ne vais pas m'en priver. Oh non. Je viens la caresser avec la mienne, rendant notre baiser de plus en plus passionné.
Avant ce soir, je n'avais pas osé imaginer ce que cela serait d'embrasser Éloïse, sans doute avais-je admis trop vite que cela ne se produirait jamais. Mais bon sang que j'ai eu tort. C'est juste divin. Et mon corps tout entier réagit à ce baiser. Pour le lui montrer, j'abandonne son poignet et pose ma main droite dans le bas de son dos, la gauche venant se placer naturellement derrière sa nuque. Et je la colle à moi. Je veux qu'elle sente l'effet qu'elle a sur moi.
Sans rompre le lien qui nous unit, je nous fais reculer jusque dans la cabane d'où nous venons. Une fois à l'intérieur, je referme la porte d'un coup de pied et la plaque contre. Je lâche à contrecœur ses lèvres délicieuses et me recule légèrement, j'ai besoin de la regarder. Je veux voir si elle est aussi excitée que moi. Ses yeux ne me quittent pas un instant, sa respiration est saccadée et elle ne peut écarter son corps du mien. Oui, elle l'est.
— Viens, on remonte.
Elle me suit sans objecter tandis que je prends note du fait qu'elle peut être docile quand elle veut
Nous nous rasseyons sur le canapé et je la fais glisser sur mes genoux en la positionnant à califourchon sur mes cuisses. Avant qu'elle ne reprenne possession de mes lèvres, je la contemple de nouveau. Je mets mes mains de chaque côté de son visage et plonge mes yeux dans les siens. Elle ne détourne pas le regard comme je m'y attendais.
Elle est vraiment magnifique. Je ne m'en étais pas rendu compte à ce point avant ce soir.
Je l'attire un peu plus vers moi et recommence à l'embrasser. Mais elle me surprend une nouvelle fois en se faisant rapidement plus audacieuse. Elle ouvre ma chemise et glisse ses mains à l'intérieur pour venir me caresser le torse par dessus mon tee-shirt. Je meurs d'envie d'en faire de même mais je ne veux pas aller trop vite. Je m'échappe ainsi de sa bouche tout en posant mes mains sur les siennes, toujours collées à mon torse.
— Attends Éloïse. Si on continue comme ça, je ne pourrai plus m'arrêter et je ne veux te forcer à rien.
— Oh.
Elle n'objecte rien de plus et recule, mais je ne lâche pas ses mains, je refuse qu'elle s'éloigne de moi.
— Non pas que je n'en ai pas envie, au contraire. Mais je ne voudrais pas que tu penses que je n'attends que ça de toi ni que tu fasses quelque chose que tu regretteras.
Elle rougit à mes paroles mais c'est vrai, j'ai très envie d'elle et je n'ai pas honte de lui avouer. Elle est tellement différente des filles que j'ai connues jusqu'alors. Je suis certain qu'elle est encore vierge et je ne voudrais pas qu'elle pense devoir coucher avec moi pour que je m'intéresse à elle. On ne se connaît pas mais je ne pense pas me tromper en affirmant qu'elle éprouve quelque chose pour moi. Pour l'avoir moi aussi observée, sans qu'elle ne s'en soit jamais douté, je mettrai ma main à couper que c'est une sentimentale. Tout ce que je ne suis pas... Et que se passera-t-il si nous franchissons le cap et qu'elle se rend finalement compte que je ne lui plais pas tant que ça et qu'elle a gâché cette étape si importante avec un crétin ? Car elle réalisera tôt ou tard que j'en suis un. Et puis, j'ai aussi besoin de comprendre un peu ce qui est en train de se passer. Jamais je n'ai embrassé une fille en y prenant autant de plaisir, bien au-delà du désir sexuel en fait.
— Tu ne me forces à rien tu sais. Si je suis là, c'est que j'en ai envie aussi et...
Depuis la poche arrière de son jean, son téléphone vibre, mettant trop vite fin à sa confidence.
Elle essaye de descendre de mes cuisses mais je la maintiens fermement en place. Elle n'insiste pas et attrape son portable d'une seule main.
— C'est Émilie qui s'en va et qui me demande où je suis.
Je ne sais pas pourquoi elle m'explique ça ni ce qu'elle attend de moi mais je sais que je n'ai pas envie qu'elle parte.
— Je peux te raccompagner si tu veux. Je n'ai bu qu'une seule gorgée de bière.
Elle garde les yeux rivés sur son téléphone et réfléchit en plissant son nez. C'est la deuxième fois ce soir qu'elle fait cette grimace.
— Et je n'ai pas envie que tu partes.
Elle détache aussitôt les yeux de son téléphone pour les poser sur moi. Elle semble à la fois surprise et soulagée, et je suis à peu près sûr de lui renvoyer la même expression.
— D'accord, conclue-t-elle simplement.
Elle tape vite fait une réponse à sa copine, pose son téléphone sur le canapé et me demande :
— Alors que veux-tu faire?
— Je ne sais pas. Parle-moi de toi!
— De moi? reprend-elle étonnée. Ma vie est tellement intéressante que tu risquerais de me ramener chez moi plus vite que prévu. Non, toi plutôt, parle-moi de toi.
— Parce que tu ne connais pas toute ma vie déjà ?
Elle sourit.
— Une grande partie, oui. Mais je ne sais pas ce qu'il se passe là-haut, me dit-elle en désignant de son index le haut de mon crâne. Dis-moi comment tu te sens après cette semaine?
Je relâche ses cuisses et elle s'assoit à côté de moi, sur le canapé. Je commence le récit de ces derniers jours difficiles et de ma vie en général pendant qu'elle m'écoute attentivement. Nous parlons ainsi durant une grande partie de la nuit. Elle rit de mes disputes idiotes avec mon père et fronce les sourcils quand je lui raconte les motifs de mes renvois du lycée.
Une fois que nos bouches sont trop sèches pour continuer à bavarder et que nos estomacs commencent à crier famine, il est déjà bien tard. Je la laisse seule quelques minutes, le temps d'aller chercher quelque chose à boire et à manger dans la maison.
Bien-sûr, à cette heure avancée de la nuit, il n'y a plus grand monde à la fête et les seules personnes encore présentes sont trop bourrées pour me calculer.
Je reviens dans notre petite planque et constate qu'elle s'est assoupie sur le canapé. Je la regarde dormir quelques minutes me demandant de nouveau comment une fille comme elle peut s'intéresser à un mec comme moi, puis je pose ma veste sur elle pour ne pas qu'elle attrape froid. Je lui fais un bisou sur la joue et me lève pour m'asseoir à ses côtés, prêt à passer le reste de la nuit à regarder la télé, mais elle se réveille en sursaut. Je lui ai fait peur je crois. Bien joué Grégoire! Je me penche vers elle pour la rassurer.
— Eh, ce n'est que moi.
Elle se redresse, glissant quelques mèches de cheveux derrière ses oreilles.
— J'ai dormi longtemps?
— Non, une petite demi-heure. Mais tu as ronflé.
— Menteur.
— Et aussi crier mon prénom d'une façon assez suggestive.
Elle me regarde, incrédule, et j'explose de rire.
— Désolé, mais c'est trop tentant de te taquiner! Ça marche à tous les coups.
Elle plisse les yeux comme pour me gronder et moi j'ai envie de lui déposer un baiser sur le front. Mais je me retiens.
— Tiens, du jus de fruit et des chips. J'ai pas trouvé mieux!
Elle sourit et attrape le paquet. Je la regarde manger avec appétit, content qu'elle ne soit pas comme toutes ces filles que je côtoie, anorexique et obsédée par son poids. Et quand elle se lèche le bout des doigts pour enlever le sel qui s'y est déposé, mon instinct primaire de mâle lambda refait aussitôt surface.
Je me penche vers elle pour l'embrasser de nouveau, écrasant par mon poids le paquet de chips qu'elle laisse tomber. Je m'en contrefous et je suppose qu'elle aussi car elle ne me repousse pas. Alors je continue. Je descends dans son cou, ravi de sentir des frissons l'envahir. Je l'incite à s'allonger sur le dos, en poursuivant mes baisers sur son décolleté, me risquant jusqu'aux abords de sa poitrine. Elle ne proteste pas. Bien au contraire, elle frémit, m'encourageant ainsi à descendre plus bas, vers son ventre. Je m'autorise à soulever son pull et son tee-shirt pour déposer une série de baisers tout autour de son nombril. Là où sa peau est si fine que je me rêve à découvrir l'entièreté de son corps dans son plus simple appareil. Sans pouvoir m'interrompre, je me place d'ailleurs sur le haut de ses cuisses et continue de l'embrasser à travers le tissu de son jean. Elle remue nerveusement ses jambes mais ne me demande à aucun moment de m'arrêter. Pourtant, je me redresse et découvre son expression inquiète.
— Je suis...
— Je sais, je l'interrompt aussitôt.
— Mais je ne sais pas comment....
— Je sais, ne t'inquiète pas.
Je remonte jusqu'à son visage et la regarde droit dans les yeux.
— Tu me fais confiance ?
Elle me le confirme par un rapide mouvement de paupières.
— Alors laisse-moi te donner du plaisir Éloïse. Je ne te demande pas d'aller aussi loin que tu le penses ce soir mais de me laisser de te montrer comme il est agréable d'être caressé.
Elle inspire profondément et je l'embrasse de nouveau, avec douceur, j'ai besoin qu'elle se sente rassurée. Je lui ôte son pull et son tee-shirt, en entier cette fois-ci. Je prends le temps de contempler sa poitrine parfaitement moulée dans son soutien gorge noir.
— Tu es magnifique Éloïse.
Et je le pense, elle est sexy. Sans même essayer de l'être, juste comme ça, au naturel, les joues rouges et les yeux aussi désireux qu'anxieux de cette nouvelle expérience.
Je la débarrasse de son pantalon et constate avec bonheur qu'elle porte une culotte assortie à son soutien-gorge. Elle n'a rien à envier aux autres filles, son corps est superbe. Je dois d'ailleurs faire appel à tout mon self-control pour me contenir.
Je dépose un léger baiser sur le haut de sa culotte, la descendant lentement. Je m'arrête à la limite de son pubis, intrigué par le dessin que j'aperçois sur sa peau si douce. Une rose rouge y est dessinée, là, à quelques centimètres, dans le pli de l'aine. Je ne peux m'empêcher de la questionner.
— Une rose ?
— Une rose, confirme-t-elle. Quelqu'un m'a dit un jour " La vie est une rose dont chaque pétale est une illusion et chaque épine une réalité". J'ai trouvé ces mots tellement justes que j'ai tanné ma mère pendant des mois pour obtenir le droit de me faire tatouer. Et à force de bulletins irréprochables, elle a fini par céder, même si j'ai gardé secret la signification et l'endroit.
Bordel ! J'ai le souffle coupé. Elle vient de résumer en une phrase ce que je ressens depuis que ces foutues machines de l'hôpital ont enlevé, dans un son strident que je ne suis pas prêt d'oublier, les derniers souffles de vie de ma mère.
Toujours positionné au dessus de son sexe, je prends une profonde inspiration pour repousser cet horrible souvenir et me concentre sur celle qui me surprend davantage à chaque minute.
Si je la savais plus expérimentée, je la goûterais mais je ne veux pas la mettre mal à l'aise. Je reviens à hauteur de son visage et l'embrasse le long de sa mâchoire jusqu'à atteindre le point sensible situé juste au-dessous de l'oreille. Comme je m'y attendais, elle frissonne et j'en profite pour introduire avec délicatesse un doigt en elle. Je la sens se raidir. Alors, pour qu'elle se détende, je la couvre de baisers et de compliments. Elle reste tendue mais je sens qu'elle commence à aimer ça. J'accélère doucement le va et vient de mes doigts et commence à dessiner des cercles autour de son clitoris. J'ai du mal à me contenir tellement j'ai envie d'elle.
Cette fille magnifique s'offre à moi, pas uniquement de façon sexuelle, je sais que cela signifie bien plus pour elle. Elle m'accorde sa confiance, m'offre son corps et m'ouvre une partie de son cœur. Je ne sais pas ce que je suis prêt à lui donner en retour mais pour le moment j'ai besoin de la sentir s'abandonner totalement. Grâce à moi. Je veux que son premier orgasme soit mémorable alors j'observe les réactions de son corps à mon toucher. Et lorsque plus de gémissements s'échappent timidement de sa gorge et que ses mains agrippent le rebord du canapé sur lequel nous sommes allongés, je l'encourage à se laisser aller et lui répète à quel point je la trouve magnifique. Elle se contracte autour de mes doigts et de petits sons délicieux sortent de sa bouche.
Je la contemple le temps qu'elle retrouve ses esprits puis me redresse pour venir l'embrasser, tendrement. Mais elle m'étonne une fois de plus en augmentant l'intensité de notre échange, me prenant totalement au dépourvu. Elle tire sur mes cheveux avec ses mains et vient entourer ma taille de ses jambes.
— Si tu continues, je vais devoir t'abandonner quelques instants pour aller me soulager tout seul.
— Tu pourrais le faire avec moi, lâche-t-elle en enfouissant son visage dans mon cou.
Ne me tente pas trop bébé!
— Je ne suis pas sûr que ça soit une bonne idée. Je te l'ai déjà dit, je ne veux te forcer à rien.
— Je ne te fais pas envie ?
— Comment peux-tu imaginer ça après ce que je viens de te faire?
Elle ne répond pas.
Je me recule pour lui faire face. Je veux qu'elle voit toute la sincérité que peuvent dégager mes yeux.
— Éloïse. Tu es une fille magnifique et crois-moi, je vais me maudire demain d'avoir laissé passer ma chance ce soir. Mais je ne veux vraiment pas que tu aies de regrets. Tu n'as pas à faire ça par envie que je m'intéresse à toi.
— Ce dont j'ai vraiment envie pour l'heure Grégoire, c'est que tu me montres comment on fait l'amour.
Elle ancre ses prunelles aux miennes, ses deux billes me suppliant de céder.
Eh merde Éloïse, je ne suis qu'un homme...
Je reviens dans le présent et constate qu'il n'est pas loin de minuit ! Ce flash-back m'a complètement fait perdre la notion du temps. Et il ne va pas m'aider à arrêter de penser à elle non plus. Bien au contraire. J'avais jusqu'alors enfermé dans ma mémoire le moment le plus sincère que j'ai vécu ces quinze dernières années, mais maintenant qu'il a ressurgi, je suis fichu.
Et la seule solution que je vois s'imposer à moi pourtant tenter de me calmer un peu, au moins ce soir, est de rentrer et de m'infliger une bonne douche. Froide. Pour ce qui est demain, je verrai bien.
✨✨✨✨
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