Les dieux, l'étoile et la science 2/2
Soudain, une voix les retint. Ils passaient devant la maison du maître, et ce dernier les invitait à entrer.
Une fois qu'ils furent installés confortablement sur les klinês, Oros demanda enfin ce qui les tracassait tous : « Maître, savez-vous ce qu'est cette lumière dans le ciel ? »
Trois regards avides posés sur lui, il réfléchit un instant et répondit :
- « Alexandre, as-tu fais part à tes amis de ta découverte ? »
Face à deux regards pleins d'incompréhension, le vieil homme expliqua de quoi il retournait, et exposa sa théorie.
- « Imaginez un instant... Si cette étoile qu'avait aperçu Alexandre était un morceau de métal, tombé depuis l'Olympe ? Il y a une description semblable au phénomène observé aujourd'hui dans un vieux manuscrit que je possède, mais j'avais cru au témoignage d'un fou. Selon lui, une lumière, visible de jour comme de nuit, descendit du ciel et tomba sur le continent. Il prétend aussi que, au point d'impact, il y avait un cratère au fond duquel se trouvait un morceau de fer pur... »
« C'est impossible ! Tout le monde sait que le fer se trouve à l'état de minerai, qu'il faut fondre et forger pour obtenir du fer pur ! »
Chimon se recroquevilla, prenant soudain conscience qu'il avait interrompu le maître. Celui-ci claqua sa langue, mécontent.
« Je disais donc qu'il trouva ce morceau de fer pur, vraisemblablement tombé du ciel. Il s'agissait donc d'un morceau de fer olympien, tombé de la demeure des dieux. Et l'étoile que tu as observée cette nuit, Alexandre, ne devait être que le reflet du char solaire, à ce moment là derrière la terre, sur le métal, conclut le professeur. »
« Êtes-vous sûr que ce métal soit sans danger ? dit Oros, inquiet, en regardant le ciel dans la cour. Il devait se trouver dans un cratère qu'il avait creusé. Et s'il tombait sur une maison ? Ou s'il était assez gros pour faire de grands dégâts ? »
Le maître secoua la tête.
- « Les dieux nous protègent, et c'est une occasion inestimable d'observer ce phénomène rare. Vous pouvez partir si vous le désirez, mais j'irai chercher ce métal dès qu'il sera tombé. »
Un long silence incertain suivit, et tous sortirent dans la cour pour observer la lumière. Peu de temps s'était passé depuis que la lumière avait fait son apparition dans le ciel, et elle semblait grossir de plus en plus, quand soudain elle se scinda. Les deux morceaux descendaient maintenant à vue d'œil, et la panique commença à gagner l'île d'Atlantis. De nombreuses personnes commençaient à voir en la lumière une punition divine et non un cadeau. Les plus virulents disaient que Zeus les punissait d'avoir voulu étendre leurs conquêtes, que c'était un acte d'Hubris, l'orgueil. En effet, cette lumière ne rappelait-elle pas celle de la foudre du roi des dieux ?
Atlas était une cité de science et de savoir. Ce phénomène, nouveau et soudain, inconnu de tous, la plongea dans le chaos. Beaucoup de gens voulurent embarquer vers le continent, et seuls quelques fanatiques ou scientifiques restèrent tranquillement chez eux. Les premiers voulaient subir la punition divine, les seconds n'y croyaient pas. La mère d'Alexandre, elle, resta pour permettre à ses fils d'embarquer dans les bateaux bondés. Ils étaient serrés dans un coin de la cale, derrière les rameurs. Alexandre rassurait ses jeunes frères, terrifiés par le bruit et la cohue régnant sur la trière. Tout en les réconfortant, il attendait la fin.
*
Ce qui se passa ensuite fut en somme très scientifique, de cette science si chère aux atlantes. Les deux fragments de roches stellaires tombèrent, l'un sur l'île, l'autre dans la mer. Le premier fragment rasa une partie de l'île. La ville d'Argos fut soufflée. Le temple de Poséidon, rempli de prêtre et de fidèles, qui pensaient y trouver un abri, fut entièrement détruit. Les fines colonnades, les fresques ouvragées, les statues, les fontaines, tout fut réduit à néant. Les bateaux furent violemment secoués, et les plus légers renversés. Sur l'île, seuls quelques paysans loin du point d'impact survécurent.
Jusqu'à ce que le deuxième fragment prenne le relais. Ce dernier avait percuté la surface de l'eau, puis le fond marin. Pas de quoi en faire un drame me direz-vous. Et si je vous disais que, suite à cet impact, de l'eau avait bougé ? Beaucoup, beaucoup d'eau. Des quantités si astronomiques que toutes les terres d'Atlantis furent submergés, et que, près des côtes, une immense vague détruisit toute la flotte atlante, ainsi que de nombreux villages barbares.
Un dicton atlante dit... enfin, disait : « La nature n'est pas cruelle, mais implacable ». Il fut une nouvelle fois vérifié, car rien ne subsista d'Atlantis la magnifique, la plus riche et plus grande force de l'époque...
Toutefois quelques doutes perdurent sur la disparition de tous les Atlantes. Sans la science d'Atlantis, comment les égyptiens auraient-ils pu construire les pyramides sur le nombre Pi ? Sans leur génie astucieux, comment les lignes de la Nazca auraient-elles pu voir le jour ?
Génies en avance sur leur temps, et au savoir pourtant disparu... Nous ne pourrons jamais savoir qui étaient vraiment les atlantes, mais il y a une chose qui nous relie encore à eux... Nous regardons les mêmes étoiles.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top