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Nous avons deux heures de repos devant nous avant de reprendre les cours. Je m'allonge sur la pelouse, Romane à mes côtés. Chacune sa musique dans les oreilles. Le ciel est bleu, les nuages forment des animaux, ou autre chose, tout dépend du point de vue. Le soleil chauffe mon pantalon noir, je sens le vent caresser mes bras nus, je me sens bien.
Je pense à Aurélien, ça fait déjà une semaine que nous ne nous sommes pas parlé, il ne répond plus aux messages et on n'a pas vraiment pu se croiser. Je commençais à avoir l'habitude de nos discussions tous les soirs, mais il faut croire qu'il m'a déjà oubliée...
Je vois Joe, ses cheveux bruns et son air blagueur, qui arrive et s'assoit auprès de Romane. Il n'a pas l'air de vouloir me dire bonjour. Tant pis, de toute façon je n'ai pas très envie de lui adresser la parole. Romane et Joe s'aiment, et ça se voit, mais ils ne veulent pas se l'avouer.
Je repose ma tête sur ma veste par terre, prête à m'endormir, quand quelqu'un arrive et me caresse les cheveux. Brusquement je me retourne prête à insulter l'auteur de ce dérangement.
— Oh, salut !
Un grand sourire nait sur mon visage. Je fixe les yeux bleus d'Aurélien, qui me rendent cette complicité.
— Ça va ?
— Oui, et toi ?
— Oui... J'avais envie de te voir, me confie-t-il.
Mon cœur bat un peu plus fort quand il se rapproche de moi.
— Je n'en reviens pas qu'on ne se soit pas parlé pendant trois ans. ! s'exclame-t-il un grand sourire aux lèvres.
— Oui, c'est long... Tu te souviens pourquoi ?
— Aucune idée... On ne se voyait plus, tu ne sortais plus... il fait la moue, puis sourit.
— Tu rigoles ? répliqué-je en lui donnant un coup de coude. Je sortais, c'est toi qui ne venais plus ! Et quand on se voyait tu m'insultais.
Des membres de sa famille habitaient non loin de chez moi, c'est quand il venait qu'on se voyait. Nous passions nos mercredis après-midi ensemble. Les souvenirs remontent effaçant peu à peu mon sourire devant tant de nostalgie.
Le son de nos rires quand nous jouions, la saveur des bonbons et des goûters pour lesquels on se battait, la beauté de nos sourires quand nous venions de passer tout ce temps ensemble.
Nous restons silencieux quelques secondes, envahis par la douce mélancolie du passé. La musique continue de tourner dans mes oreilles, mais le temps s'est déjà arrêté.
— T'écoutes quoi ? me demande-t-il soudainement.
— De la musique, triste.
— Ah bon ? Pourquoi ça ? Je peux écouter ?
Je souris et lui donne le deuxième écouteur, il doit se rapprocher de moi pour écouter. Je sens des frissons me parcourir lorsque son bras frôle le mien.
— Ça me fait réfléchir à la vie...
— Faut que j'arrête la musique triste, moi, je vais finir par pleurer. rit-il.
Je pose ma tête sur la pelouse et mes yeux finissent par se perdre dans le vide.
— Elle est belle l'herbe hein !
— Ouais, il m'adresse un sourire espiègle. Plus belle que toi.
Il sourit et me tape gentiment. Je le regarde s'allonger dans la même position que moi, et il trouve un morceau de fer par terre.
— Je parie que je peux te faire une bague avec !
— Ah oui ?
Il me prend la main et essaie de me faire une bague, il galère. Nos mains se sont touchées ainsi pendant plus de 5 minutes.
— Bon... Je laisse tomber, c'est impossible !
— Ouais... Avoue plutôt que t'es trop nul !
Je lève les yeux au ciel, admirant au passage la bleuté de celui-ci, et les quelques oiseaux qui se promènent. Puis mon regard redescend sur ses iris couleur cyan, nos yeux se croisent.
Nous restons quelques secondes en silence, puis je baille et déclare :
— Je suis fatiguée...
— Moi aussi !
Un rayon de soleil apparaît, Aurélien retire son pull. J'aperçois quelques cicatrices au niveau de ses biceps. J'espère que ce n'est pas ce que je pense. Il suit mon regard et déclare tristement :
— J'ai arrêté. Depuis une semaine. J'ai jeté toutes mes lames.
Des frissons me parcourent le corps, il va mal dans sa vie pour arriver à ce point-là.
— Tant mieux. Pourquoi tu le faisais ?
— C'est la vie...
J'ai envie de lui dire que non, mais je n'ai pas envie de le frustrer. Alors, je ne dis rien, laissant mon cœur se serrer et une boule se former dans ma gorge.
— Mais faut que j'aille en cours moi ! Je suis en retard ! A plus.
— A bientôt.
Nous échangeons un sourire, il enfile son pull en vitesse et s'en va sans se retourner, au contraire de ce que j'aurais fait. Je l'observe partir, tête baissée, les mains dans les poches. Je me rends compte, que j'ai de la chance de l'avoir retrouvé : ce n'est pas tout le monde qui retrouve ses amis d'enfance...
Je me retourne vers Romane et Joe, toujours en train de parler tous les deux. Je ne sais même pas si elle a remarqué qu'Aurélien était venu.
Je ferme donc les yeux paisiblement, oubliant le monde qui m'entoure. Une brise légère soulève doucement mes cheveux.
J'ai toujours admiré les yeux des personnes, Romane, elle, a les yeux verts. Aurélien, lui, a des yeux bleus si profonds, que j'aimerais y plonger, et même m'y noyer ne me dérangerait pas. Pour moi, les yeux sont le miroir de l'âme. Et je ne sais pas si je suis la seule, mais j'arrive à ressentir ce que les gens ressentent au travers de leurs yeux. J'en avais déjà parlé à ma mère. Mais personne d'autre ne sait comment je vois le monde.
Ma mère, depuis ce qu'il s'est passé, ne prend plus soin ni d'elle, ni de moi. On n'a pas eu de vraie discussion depuis longtemps, elle me manque, mais on s'y habitue.
Je finis par m'endormir sur la pelouse, la musique d'Angèle tournant en boucle dans mes oreilles.
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Heyy, merci d'avoir lu ! J'espère que l'histoire te plaît ^^ n'hésite pas à lâcher un petit vote ça fait toujours plaisir x)
Merci, Ambre.
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