Chapitre 5

Un dimanche après-midi ennuyeux, fade, nul, Jehan aurait sûrement préféré être à la messe avec sa famille, que d'être endormi dans son lit. Zénaïde s'ennuie, elle joue à la console dans le salon de leur appartement. Elle est en pleine partie de jeu de course quand on frappe à la porte. C'est Mehmed qui vient leur rendre visite et voir si Jehan va bien, il est encore habillé de sa blouse blanche. 

- Salut, il n'est pas avec toi ? Ashlynn l'a ramené.

- Il dort dans sa chambre, il est très fatigué. Vu ce qu'il a subi c'est normal, si on retrouve le coupable, j'espère qu'il va payer.

L'étudiant en médecine s'avance dans l'appartement et montre un message à Zénaïde, un message de leur ami blond. Elle est étonnée, elle n'a pas reçu de message, son forfait doit encore faire des siennes. 

- Attends… Ça me dit quelque chose ce nom… C'est la fille blonde là ?

- Je ne la connais pas du tout, mais Jehan oui d'après ce que m'a dit Léopold, explique Mehmed. 

Un bruit de porte les coupe dans leurs conversations, Jehan s'est réveillé, il se frotte les yeux avant de remettre ses binocles sur son nez. Il a l'air dans les vapes, il s'assoit à table en silence, le jeune homme à la peau mate vient lui parler.

- Ça va mieux depuis hier ? 

- Oui, d'ailleurs le suspect, je le connais. Enfin, la suspecte.

Zénaïde plisse ses yeux verts, elle fait mine de réfléchir, elle se rappelle bien du moment avant la soirée, où elle avait cru voir un fantôme. 

- Frédégonde, ajoute Jehan.

- Je ne la sentais pas cette fille, trop douteuse, répond Zénaïde. 

Il y a trop de preuves pour que ce soit elle qui ait fait du mal à Jehan. 

- Ce n'est plus une suspecte, c'est vraiment elle qui a fait ça, elle a été interrogée par la police, puis elle le sera par une instance judiciaire, affirme l'Égyptien.

- Oh la pétasse, s'écrie Zénaïde.

Le brun à lunettes ne sait pas quoi dire, il ne peut pas y croire, cette fille innocente qui le drogue, c'est irréaliste. Ses questions sur son supposé couple avec Zénaïde étaient louches et elle le suit partout, jusqu'à chez lui. 

- Comment elle a trouvé la maison du beau-père de Léopold, c'est ça qui me chiffonne, avoue Mehmed.

- Léopold avait fait une page Boobook pour sa fête, elle a dû chercher, pourtant il n'y a pas l'adresse. dit Jehan.

Plus ils en parlent, plus cette fille les fait flipper, d'ailleurs pendant la messe, elle fixait le jeune homme à lunettes mais il se concentrait sur sa bible. Ses yeux bleus en devenaient terrifiants, bleus comme le produit WC, ils pouvaient aspirer son âme. Jehan en ferait des cauchemars, il a lui aussi les yeux bleus, mais ils ne sont pas globuleux et Zénaïde ne l'a jamais pris pour un fantôme. Vu les événements récents, il pense que le diable a dû la posséder et que les paroles de son père sont des mensonges.  

- Léopold Dubé, c'est quoi ce bazar ? Pourquoi y a les flics ?

Séraphin vient de rentrer avec sa femme, il voit les voitures blanches et bleus garées devant chez lui. Et quand il crie le nom de famille, ce n'est jamais bon signe.

- Je peux t'expliquer… Une meuf a drogué un des mes amis. Les policiers sont venus faire une enquête.

- J'aurais préféré un truc de cassé qu'une personne droguée…

Il se tourne la tête et voit la vitre du salon brisée, le rideau rouge volant à l'extérieur avant de revenir à son emplacement initial. Il a parlé trop vite. Léopold argumente qu'il va payer et qu'il travaille au Carrouf lundi soir, il est confiant. Le prix d'une fenêtre est élevé, mais il pense s'en sortir, comme à chaque fois. 

- J'espère que ton ami va mieux, il y a vraiment des mauvais dans ce monde.

Des connards même, pense fort Léopold. Il n'arrive pas à trouver les mots, si personne n'avait vu Jehan, des choses dramatiques auraient pu se produire. Le jeune homme rigole quand des gens chient dans sa piscine mais là non, il veut être sûr que l'affaire soit prise au sérieux. 

- T'étais dans la lune, intervient Séraphin. 

- Oui, il va mieux, désolé je pensais à plusieurs choses.

Il lui donne une tape amicale dans le dos et l'invite chez lui pour prendre un café, la maison est propre et rangée, le Congolais voit l'aspect positif. Il allume la télévision, ça parle politique, le maire annonce des mesures. 

- Nous devons arrêter le crime dans la ville de Pépinville. 

Ironique, vu ce qui s’est passé à la soirée… Ce maire ne fait que raconter des salades, il avait dit qu’il allait baisser le prix des fruits et légumes, rien n’a été fait. Le propriétaire du Carrouf a d'ailleurs tenté de baisser les prix au maximum, pour que les gens puissent encore en acheter. 

Au commissariat de Pépinville, Frédégonde est encore interrogé, sa mère est venue l’aider, c’est aussi une dame aux cheveux blonds bouclés comme sa fille. L'atmosphère est angoissante, il n'y a pas de bruit dans la salle, la voix de Frédégonde brise le silence. 

- Je vous jure que ce n’est pas moi, je suis une trop bonne croyante pour faire ça. 

Les policiers ne réagissent pas, ils ont les preuves, l’équipe scientifique a analysé la mèche retrouvée. Ils savent aussi que la jeune femme est attirée par Jehan et c’est possible qu’elle l’ait suivi. 

- Nous savons que vous aimez beaucoup cet homme, nous allons devoir faire une perquisition pour trouver d’autres preuves. 

- Ma fille ne ferait jamais ça, nous l’avons toujours bien élevée, elle aime un garçon mais elle ne va pas le droguer, c’est ridicule ces accusations, insiste la femme. 

Les policiers ne sont toujours pas convaincus, l’habit ne fait pas le moine comme on dit. C’est un des meilleurs commissariats de police de Pépinville, ils prennent les affaires au sérieux, c’est pour ça que Léopold y est allé directement. Une des agentes pose une autre question :

- Comment avez-vous su l’adresse de la fête ? Vous ne connaissez pas ce Léopold. 

Frédégonde ne peut plus rester dans le mensonge, si elle révèle tout, peut-être qu’elle passera moins de temps dans le purgatoire et Dieu acceptera son erreur. On lui a toujours appris à ne pas mentir et à dire la vérité, car le Seigneur la juge. 

- J’ai créé un faux profil Boobook pour pouvoir aller dans le groupe privé et avoir l’adresse… 

La mère de Frédégonde est pétrifiée, elle ne s’attendait pas à entendre ça, elle fond en larmes en prenant sa fille dans ses bras. 

Léopold se rend au Carrouf après ses cours, il finit plus tôt ce jour-là, il pense au remboursement de la fenêtre brisée. Il y va l’esprit tranquille, il va retrouver Tim et ils vont rigoler ensemble comme d’habitude. Même si le noiraud n’a pas le temps de rire, il doit gérer les clients casse-pieds du magasin. Léopold ne le voit pas même pas en passant par l'entrepôt, il rejoint très vite sa caisse. Il remplace une caissière qui part plus tôt, ils ont réussi à s'arranger et le patron n’était pas contre. Le blond va s’installer, il fait en sorte de désinfecter l’endroit comme d’habitude, il veut éviter une épidémie de gastro-entérites, qui avait ravagé la ville. Des personnes âgées arrivent vers sa caisse, il se met aussitôt au travail, il ne peut s’empêcher de se rappeler de ce que disait Tim, il a envie de rigoler. Léopold ne doit pas se déconcentrer, des clients se précipitent vers sa caisse en voyant qu'il ouvre. Le blond passe les articles machinalement sur la caisse, il essaie d'aller vite, les gens ont l'air pressés. Le jeune homme remarque un homme plutôt agité derrière les autres clients, il n'y fait pas plus attention. Léopold enchaîne les clients, en balançant leurs articles sur le tapis roulant. 

Le tour du client agité arrive, Léopold n'est pas trop confiant, il le trouve bizarre. Il ne dit même pas bonjour. Il a juste acheté un paquet de chewing-gum Bollywood, le blond passe l'article à la caisse, l'homme le fixe. Léopold annonce le prix, l'individu met sa main dans une de ses poches de manteau, potentiellement pour prendre son argent. Sauf que l'objet qu'il en sort est une arme brillante, reflétant les lumières du Carrouf, Léopold pense à une blague. Il essaie de se rassurer, quelqu'un achète des chewing-gums puis sort un faux flingue, sûrement une caméra cachée. C'est courant sur les réseaux sociaux, songe Léopold. L'homme charge l'arme, c'est donc un vrai pistolet, l'étudiant commence à avoir peur, il regarde les autres clients, qui ne bougent plus. Un lourd silence se pose dans le magasin, comme si tout le monde savait ce qui se passe. L'ambiance est si tendue, ils n'entendent plus la musique qui sort des enceintes ou des promotions sur les poireaux Carrouf.

- Donnez-moi le contenu de la caisse sinon je tire, lance le sombre individu.

- Je... bégaie Léopold.

- Maintenant ! 

Il lève ses mains en l'air ne sachant que faire, il essaie d'appeler la sécurité mais il se fait menacer à nouveau par le cambrioleur. 

- Tu appelles la sécurité et je te pète la tête.

Léopold a envie de pleurer, il a peur de mourir, son cœur bat tellement vite qu'il a l'impression de faire un malaise. Son corps devient aussi mou que de la guimauve, il reste assis sans bouger. Le blond serre les jambes, il a envie de se faire dessus, une arme est pointée en face de lui. Les secondes se transforment en heures, ça devient vite insupportable et étouffant pour Léopold. 

Soudain, une vieille dame se rapproche de l'homme armé, elle tente de discuter, de râler plutôt, avec lui, puis avec Léopold, il ouvre grand les yeux.

- Ce n'est pas bientôt fini ce cirque, je dois rentrer chez moi.

Le caissier ne répond rien, ce n'est pas un cirque, ce hold-up est réel, même si pour lui c'est un cauchemar et il espère se réveiller. La vieille dame continue de parler, le cambrioleur se tourne vers elle et lève son arme vers elle. Léopold retient son souffle, même s'il a déjà retenu assez longtemps, après avoir pris une légère inspiration.

- Cette arme est chargée et je n'hésiterai pas à l'utiliser si vous ouvrez encore votre bec de vieille harpie. 

- Et bien…

Elle ne peut finir sa phrase, le plomb lui traverse la cervelle, elle tente de s'accrocher à la caisse pour ne pas tomber. Sauf qu'elle est déjà morte, le sang dégouline partout sur ses cheveux blancs puis sur sa veste verte et sa capuche en fourrure de loup. Son crâne tombe contre le tapis roulant en faisant gicler le liquide rougeâtre, Léopold est terrorisé par la scène. Il la regarde tomber au sol dans un bruit lourd et étouffé, à l'instar des autres clients, paralysés par ce qui se déroule sous leurs yeux. Un enfant se met à pleurer, l'angoisse des personnes présentes grimpe de plus en plus, quelqu'un essaie de le calmer. Le criminel se rapproche de Léopold, puis lui colle son arme sur la tempe gauche, et lui dit : 

- Tu as intérêt à faire ce que je te dis, sinon tu vas finir comme cette vieille peau, compris ?

Le blond opine, il déglutit avant d'ouvrir la caisse, il pleure sans s'en rendre compte. Il pense à son patron qui est si fier de son Carrouf, il se sent fautif de donner l'argent à ce type. 

- Arrête de chialer et donne l'argent.

L'homme au pistolet sort un tote bag de sa poche et le présente pour y mettre l'argent, Léopold le trouve culotté de faire ça. Le jeune homme préfère donner l'argent pour éviter de finir le crâne brisé en deux, il le met dans le sac avec regret. Il se demande où est Tim, il n'est pas intervenu, ou alors, il s'est caché. 

Il continue de mettre les billets et les pièces dans le sac de l'homme au pistolet, un gros bruit le fait sursauter, la police de Pépinville arrive. Léopold est soulagé.

- Police, lâchez votre arme ! 

Il appuie sur la gâchette, le blond s'apprête à crier, mais rien ne se passe. La gâchette est cassée, l'étudiant en STAPS lâche un soupir de soulagement, il a eu de la chance. Les policiers remarquent la vieille dame morte et ensanglantée au sol, ils comprennent vite la situation. Le cambrioleur réussit à tirer une balle dans le vide, un des agents fait de même sur lui, pour éviter qu'il fasse encore des misères. Du sang se répand à nouveau sur le carrelage blanc du magasin, Léopold n'en peut plus de l'odeur de ce fluide ferré, ça lui donne la nausée. Il est devenu pâle, la police l'aide à sortir de sa caisse, il ne tient plus sur ses jambes. 

- Vous allez bien ? demande un policier.

- Non j'ai peur. J'ai failli mourir, je vais me pisser dessus.

La famille de la vieille dame morte arrive vers la caisse, son petit-fils se met à hurler de terreur, Léopold a mal au cœur. Il sort du magasin escorté par les policiers, il n'entend plus les cris du jeune adolescent dans le Carrouf. Le jeune homme est assommé de questions, il ne sait que faire, il passe sa vie au commissariat de Pépinville. Tim arrive vers lui, il annonce que c'est lui qui a appelé la police.

- Tu m’as sauvé la vie, mais t’étais planqué où ?

- Dans la réserve, personne ne m’a vu et j’ai réussi à appeler la police, mon téléphone s’est déchargé juste après, explique Tim.

- Pourquoi il nous arrive autant de merdes, c’est dingue ça, quand c’est pas Jehan, c’est nous, un génie nous a lancé une malédiction ? s’interroge Léopold.

Tim explose de rire, malgré la situation, c’est nerveux, il ne peut s’en empêcher, il est dans un cauchemar et il va se réveiller. Il se pince le bras pour être sûr, il est pleinement éveillé, et sur terre :

- Tu délires frérot, un génie ? On devient zinzin après ce qu’il s’est passé… Ça coûte combien un psychologue à Pépinville ?

- Cher, ils en profitent ces escrocs, d’après ce qu’on m’a dit, ils donnent juste des bonbons pour réconforter les enfants quand ils ont des traumatismes. Apparemment, « c’est trop durs leurs problèmes », raconte le blond.

- C’est une blague ? En même temps, le maire ne fait rien pour changer ça, il s’en fout des structures psychologiques, t’as entendu parlé d’un enfant qui a sauté d’un pont ? Il était abusé par sa mère.

Les deux amis se regardent, ne sachant que faire, ils ont l’impression d’être dans une ville de fous, qu’ils passent leur vie au commissariat pour faire les témoins. Léopold a envie d’aller au tribunal gueuler, mais le noiraud lui dit que ça ne va servir à rien.

- Bof, autant essayer… Peut-être que ça va faire un scandale et faire réagir. Déjà le maire ne fait rien pour améliorer le tribunal.

- Bon courage, déjà qu’ils ne veulent pas changer mon genre sur mes papiers, alors parler de crimes et d’enfants en danger, c’est foutu. Appelle la mairie.

- Super, ça va être une partie de plaisir…

Il s’apprête à partir avec un policier, pour être questionné une énième fois, il n’a plus la force de compter, Tim l’avertit d’une chose :

- Certains juristes sont bizarres dans ce tribunal, ils voulaient savoir si j’avais fait des opérations pour changer de genre, ils demandaient des photos.

- C’est interdit de faire ça ! On est là et ta famille, ça suffit comme preuve non ? Ta sœur est en droit en plus, demande-lui. 

- Venez monsieur, on doit vous interroger pour l’affaire Carrouf, intervient le policier.

L’affaire Carrouf, une nouvelle affaire glaçante qui va faire la une des journaux papier et télévisés pendant un moment. 

Tim retourne chez lui, sans Léopold, ils n’ont même pas eu le temps de discuter, il est en colocation avec sa sœur. Ashlynn n’est au courant de rien, elle lit ses cours sur son lit, en écoutant de la musique, ses écouteurs dans les oreilles. Il frappe à sa porte, elle vient lui ouvrir, elle est déjà en pyjama chat noir, elle lui demande comment a été sa journée.

- T’es rentré plus tôt, c’est bizarre…

- Oui, il y a eu un cambriolage et une mémé a été tuée, la police a flingué le meurtrier.

- Oh merde… Ça craint cette ville, c’était plus calme chez nous, sinon, tu veux parler d’autres choses ? demande Ashlynn.

Il s’assoit sur son lit, il lui raconte ses mésaventures avec le tribunal, il n’a jamais osé lui en parler, il est tombé sur un juge désagréable qui ne lui a pas donné suite. Tim est désemparé, il n’a même plus envie d’essayer les démarches.

- Je vais t’aider Timmy, je ne suis pas juriste pour rien. Tes autres amis savent que tu es un mec transgenre ? Le catholique, euh, Jehan ?

- Pas vraiment, il y a que Léopold et Zénaïde qui savent, les autres pensent juste que je suis un « vrai » gars.

- Bah t’es un vrai gars, t’es mon frère. T’as plus de couilles que certains mecs, tu sauves tes amis, t’es drôle, t’as un mec, vraiment t’es cool, s’exclame Ashlynn pour le valoriser.

Tim est rassuré par sa sœur, il s’entend mieux avec elle qu’avec ses autres sœurs, elle est plus ouverte sur différents sujets. Ashlynn lui raconte son cas pratique qu’elle doit faire et qu’elle a un stage au tribunal en tant que greffière. 

- C’est génial ça ! Mais tu ne pourras pas faire grand-chose pour moi.

- Si, j’ai baisé le juge, alors il va vite contacter le procureur de la République pour tes papiers.

Tim reste interdit, il n’arrive pas à savoir si sa sœur blague ou non, son expression reste neutre.

- Euh, tu rigoles, j’espère ? panique Tim.

- Évidemment, tu croyais quoi ? Je ne touche pas ce vieux croûton, en plus il était désagréable pour le stage, gngn master de droit, dis-moi si ça te gêne, râle Ashlynn.

Ils vont ensuite dans la cuisine, ils regardent dans le congélateur, ils n’ont pas le courage de cuisiner, ils prennent une pizza Tubioni, Ashlynn prend la boîte en carton des mains de son frère.

- Ah mais touche pas, ce sont les pizzas empoisonnées !

- Ca suffit les blagues !

- Non là c’est vrai, dit Ashlynn, l’air grave, des gamins ont chié leurs tripes en mangeant ces merdes.

Léopold sort du commissariat, en même temps que Frédégonde, qui était restée en garde à vue, elle vient lui parler, mais il ignore. Savoir ce qu’elle a fait est impardonnable pour lui, ce n’est pas son genre. Le blond a envie de lui demander pourquoi elle n’est pas en prison, mais il préfère partir. 

- Comment va Jehan ?

Léopold ne répond rien, il reste muet comme une carpe, il rentre chez lui le pas rapide. La jeune femme aux cheveux bouclés reste sans bouger, sa mère la rejoint :

- Je te crois et que tu es innocente, la justice peut se tromper des fois et je suis sûre que Jehan t’aime bien, il te partageait son goûter au catéchisme.

- Je ne suis pas innocente, tu ne comprends pas, je voulais vraiment le droguer pour qu’il m’aime et c’est répandu de faire ça aux fêtes, argumente Frédégonde.

- Et bien, ce n’est pas grave, tu iras en enfer si ce que tu as fait est vrai, tu en discuteras avec le diable.

Sa mère tourne les talons et repart à l’opposé de la rue, sans regarder sa fille, elle a comme eu un déclic, droguer quelqu’un pour profiter de lui est juste affreux à son avis. 

Le lendemain, Jehan est plus reposé mais il est incapable d’aller en cours, il se lève pour écrire à Monsieur Laban mais Zénaïde l’arrête.

- Je vais lui dire, je le vois ce matin, il va comprendre tu es un élève sérieux. Repose-toi.

- Non, je dois lui dire avant et aller chez le médecin pour avoir un justificatif de maladie. Ça m'a fatigué cette soirée et cette histoire… Ça fait des années que je ne l’ai pas vu et elle revient comme ça vers moi, c’est absurde, s’énerve le brun.

- Ne te stresse pas avec ça, je vais prévenir le prof, il comprend très bien, il est loin d’être bête. Et puis laisse cette meuf, elle est trop conne sérieusement, elle a trop cru qu’on était en couple ça me fait rire.

La jeune femme aux cheveux gris repart dans sa chambre préparer son sac à la dernière minute, Jehan reste dans son lit, en espèrant que son amie arrive à gérer la justification de son absence. Zénaïde n’est pas intéressée par les relations amoureuses de toute façon, même chose pour Jehan, qui ne pense qu’à préparer son mémoire. Et ses parents lui disent de ne pas penser à ça, c’est quand il faudra se marier que ce sera l’occasion de réfléchir. Pétronille et Donatien aimeraient que Jehan se marie avec la fille de la voisine catholique comme eux, ils se connaissent bien. Ils ont tenté maintes fois de les faire se rencontrer, sauf que le brun à lunettes n’arrêtait pas de parler de ses études, ce qui a fatigué la voisine.

Zénaïde manque d’arriver en retard, la porte est encore ouverte, Monsieur Laban attend devant son PC, qui n’arrive pas à démarrer. Il voit la jeune femme aux cheveux gris entrer en vitesse dans la salle vers lui.

- Bonjour, Jehan ne peut pas venir aujourd’hui. 

- Pourquoi donc, si ce n’est pas indiscret, il n’est jamais absent. Il faudra un justificatif médical, explique le professeur. 

- En fait, c’est une longue histoire, une fille a une soirée a essayé de le droguer et il est fatigué depuis.

Le professeur d’archéologie ne sait pas comment réagir, il comprend l’absence du colocataire de Zénaïde, il ne rate pas un seul séminaire. Elle va s’asseoir à sa place et le cours peut commencer, l’ordinateur de Justinien Laban fonctionne.

Zénaïde a enfin fini son cours, elle appelle Jehan pour lui raconter de quoi ils ont parlé et elle raconte sa vie. Elle a tenté de tout noter, malgré qu’elle soit tête en l’air, elle manque de foncer dans quelqu’un dans le couloir. C’est une jeune femme aux cheveux noirs, l’historienne la reconnaît :

- Oh salut Ashlynn, ça va ?

- Oui, et toi ? D’ailleurs, Jehan n’est pas avec toi ?

- Non, il est encore absent à cause de cette connasse, euh fille là bref… répond la grise.

La noiraude lui parle à son tour de son problème, elle doit aller au tribunal, Zénaïde trouve ça étrange. Peut-être que Frédégonde l’a attaquée aussi ?

- Ils ne veulent pas changer le genre de Tim sur son état civil, il y est encore en tant que fille, du coup, je vais essayer de faire bouger les choses. 

Elle est juriste, elle espère avoir un avantage et tomber sur un autre juge, elle n’hésite pas à tenir tête en cas de problème. Ashlynn continue sa route en attachant ses cheveux noirs mi longs, Zénaïde rappelle Jehan.

- Désolée je parlais avec Ashlynn, elle est sympa, du coup je vais bouffer des frites !

- Il n’y a pas de frites, j’ai regardé le menu ! rigole Jehan.

Elle est déçue, elle ne mange que ça le midi, sans grossir, ça étonne tous ses amis. L’université Pépin le Bref ayant peur de la malbouffe et de l’obésité des jeunes, décide de supprimer les frites tous les midis, malgré les plaintes. 

Ashlynn arrive devant le tribunal, il n'est pas si loin de l'université à pied, il n'y a personne dans le parking. Idem pour le secrétariat, la noiraude souffle, elle ne veut pas rester là à les attendre. Elle oubliait que c'était l'heure du repas, elle regarde les horaires, c'est censé être ouvert, elle va dans la salle d'attente. Ashlynn pose son sac et regarde ses documents, elle veut prouver que c'est bien son frère et non sa "sœur", qui n'existe plus depuis longtemps. Ils sont six filles de base, selon ses parents, rien ne pourrait changer leurs chéries, en réalité, il y a Tim. Il a commencé sa transition mais le tribunal ne suit pas, une voix la sort de ses pensées :

- Madame ? Avez-vous rendez-vous ?

- Non, c'est pour mon frère… 

La dame qui l'accueille l'emmène vers son bureau, elle lui explique que le juge n'est pas là. Ashlynn est embêtée, ça va être compliqué pour sa demande. 

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