Chapitre 4
Le week-end, le repos, la détente sont enfin arrivés, ainsi que la soirée que Léopold est en train de préparer. La maison est déserte, il réfléchit à comment arranger le mobilier pour éviter le bazar. Le salon est assez grand, avec un canapé au centre, une télévision cathodique et une bibliothèque près de la cuisine. Le blond appelle Jehan pour lui dire d'apporter des gâteaux, Zénaïde aussi, car il apporte la vodka.
- Y a pas de coca ? dit Zénaïde.
- Bah si pour la vodka t'es bête ou quoi, répond le stapsien.
Elle éclate de rire derrière Jehan, en toussant bruyamment. Léopold se rappelle de la vodka et il a oublié d'en acheter, il se frappe le front de désespoir.
- Je vous laisse les intellos, je vais au Carrouf.
Le jeune homme fait tout au dernier moment, il fallait bien qu'il oublie quelque chose. Il quitte la maison de Séraphin pour aller dans le magasin où il travaille habituellement, il est en congé ce week-end.
Arrivé dans le fameux supermarché, il se dirige vers le rayon alcool, comme tous les jeunes lors de soirées. Ils font du binge drinking et c'est dangereux, certains font des comas éthyliques et frôlent la mort. Léopold fouille dans le rayon pour trouver son bonheur, il fonce dans quelqu'un sans faire attention, il s'excuse.
- Oh pardon, hey Tim !
- Ah salut toi.
Tim est son collègue, mais aussi son ami, ils travaillent ensemble depuis un moment. Le blond en profite pour faire sa publicité à propos de sa soirée, s'il peut ramener des gens. L'autre jeune homme aux cheveux noirs a l'air intéressé, c'est son ami. Tim éclate de rire et ajoute :
- Evidemment que je viens, je suis ton pote ! Par contre, mon mec peut venir ?
- T'es gay ? Et oui, il peut venir ! Ça va être ouf cette fête !
Les deux étudiants se regardent un instant, Tim ajoute, pour rafraîchir la mémoire courte du blond :
- Mais oui je suis gay, t'as oublié ?
- Oui, oh et puis je fais pas attention à ça, on s'en fout de l'orientation t'sais.
- C'est beau ce que tu dis, un vrai philosophe, blague Tim.
Léopold prend enfin sa bouteille de vodka, il répète qu'il est en préparation de la soirée et qu'il avait oublié l'alcool. Une voix nasillarde annonce que le magasin va fermer, il ferme plus tôt le dimanche, Tim est soulagé, il peut enfin rentrer. Il en avait marre de ranger du papier toilette, après des mioches bordéliques. Le noiraud explique que c'est toujours mieux de surveiller des gamins, que des Cohn-Bendit qui viennent le faire chier autant qu'ils font dans leurs couches, d'après ses dires.
- T'es énervé contre les vieux Tim.
- Les boomers du Carrouf me saoulent je te jure, "gngn vous n'avez pas des TENA ?" Le rayon est juste à côté !
Léopold rigole, même si la situation enrage son collègue, il ne peut s'empêcher de pouffer de rire, il aurait déjà pété un câble depuis longtemps. L'étudiant en STAPS s'occupe des caisses, il n'a pas de ce problème, il range rarement les rayons.
De leurs côtés, Jehan et Zénaïde se préparent pour la soirée de leur ami, il met son costume, la grise l'attend.
- Tu en mets du temps.
- Je suis perfectionniste.
Il ajuste bien sa cravate noire puis ses lunettes sur son nez.
- Oublie pas les gâteaux, rappelle Zénaïde.
Jehan soupire, il a tout mis dans le sac, des chips, des gâteaux apéritifs, tout y est. Il a fini sa toilette, il quitte la salle de bain et rejoint Zénaïde dans le salon, il agrippe le sac en passant. Il est dix-neuf heures, ils sont dans les temps, les archéologues quittent l'appartement. Ils rangent le sac dans le coffre, ou Zénaïde le balance plutôt, une personne se rapproche de la voiture. L'étudiante lâche un cri, Jehan se retourne, il allait s'installer au volant.
- Qu'est-ce qui se passe encore ?
- J'ai vu une ombre. Un fantôme.
- Jehan, répond ladite ombre.
Il allume les phares et voit une jeune femme blonde, Frédégonde, il la reconnaît. Zénaïde se calme enfin, elle rejoint Jehan, la blonde aux cheveux bouclés regarde les deux amis d'un air étrange. Le jeune homme à lunettes ne sait pas quoi dire, il ne s'attendait pas à la voir là. Elle lance sans tact, avec de l'amertume dans sa voix :
- Je ne savais pas que tu étais en couple.
- On n'est pas en couple, c'est ma colocataire et amie, et je ne sortirai pas avec ce diablotin.
Zénaïde lui donne un coup sur la tête, elle s'en fiche de le décoiffer. Frédégonde est rassurée, elle essaie de ne pas le montrer. Jehan se demande vraiment ce qu'elle fait là, elle lui avoue que c'est Pétronille qui lui a donné son adresse.
- Bon on doit y aller, intervient Zénaïde.
- Oui, à bientôt Frédégonde.
Ils entrent dans la voiture du brun et ils partent aussitôt après avoir prononcé ces mots. La catholique blonde est toujours sur le trottoir, elle fait le signe de croix et pense :
- Que Dieu te protège Jehan. Je pense aussi à toi.
L'entrée de chez Léopold est déjà bondée de voitures, Jehan galère à trouver une place, il a déjà un mauvais pressentiment. Son amie le rassure, pourquoi ça irait mal, lui dit-elle.
- Il y a combien de personnes, c'est pas possible ça, râle-t-il.
Il s'insère dans une petite place, quelle chance. Zénaïde sort la première pour porter le sac et tenter de garder une partie des gâteaux pour elle durant la soirée. Ils ont à peine frôlé le seuil de la porte que Léopold leur bondit dessus. La musique se fait entendre de l'intérieur, Jehan se dit qu'il aurait dû prendre ses bouchons d'oreilles. Zénaïde entre dans la maison avec son sac sans réfléchir, il la suit, le salon est bondé, des étudiants discutent, Léopold les pousse jusqu'au mini-bar, qui est une simple table avec des verres dessus.
- Eclaté ton bar un peu, raille Zénaïde.
- Je n'entends pas les rageux, répond Léopold, en se bouchant les oreilles.
Son excuse est légitime, avec le brouhaha en plus de la musique à fond, Jean-Michel le DJ est concentré dans son activité. Des jeunes se déhanchent au rythme de la techno, certains sont déjà presque bourrés.
- Vous buvez quoi les jeunes, propose Léopold.
- De l'eau, nan je déc' du coca, dit Zénaïde.
Elle est tellement bavarde que Jehan ne peut en placer une, il préfère se faire discret. Le brun observe autour de lui, ce genre d'ambiances lui est inconnu, tout le monde se connaît, c'est son impression. Une jeune femme aux cheveux noirs arrive vers lui, il ne sait pas comment réagir.
- Salut, tu es nouveau ?
- Euh, oui.
Jehan ne sait vraiment pas quoi répondre face à cette noiraude au style gothique, elle est un peu plus grande que lui, à cause de ses longues bottes noires à talons.
- Oui il est nouveau, il est timide, il ne vient pas souvent aux soirées, intervient son amie.
- Je suis nouvelle aussi, vous êtes à l'université Pépin le Bref, je vous ai vu je crois bien.
- Ouais on est archéologues, c'est trop bien, tu es dans quelle filière ?
L'historienne aux cheveux gris enchaîne la conversation sans réfléchir, elle est très bavarde, Jehan essaie de suivre ce qui se raconte.
L'étudiante aux cheveux noirs en dévoile plus sur elle :
- Je suis Ashlynn, je suis en droit, c'est moi qui étais entrée dans votre salle par erreur, vous avez Monsieur Laban comme professeur.
Un homme aux cheveux noirs marche vers eux, avec son copain, Jehan les fixe, Ashlynn s'exclame :
- Voici Tim mon frère, il est en France depuis plus longtemps que moi.
Tim salue le groupe d'amis et sourit, il prend des chips dans le bol sur la table, Zénaïde en profite pour se servir. Le brun aux yeux bleus continue la discussion avec Ashlynn :
- Vous venez d'où, j'ai remarqué que tu as un accent, demande Jehan.
- On vient du pays de Galles, une partie de notre famille vit en France et je suis venue étudier ici.
Zénaïde opine, elle ne peut répondre avec ses chips dans la bouche, Jehan s'apprête à continuer la conversation, mais la jeune femme est emmenée par son amie ailleurs. Il n'entend plus que sa meilleure amie mâcher ses chips près de lui, Léopold a disparu de son champ de vision. Tim et son compagnon sont toujours en face de lui et discutent.
- Léopold m'a parlé de toi, tu fais quoi comme étude déjà ?
- Des études en archéologie, avec ma collègue Zénaïde.
- C'est ouf, je ne fais pas d'étude, je travaille au Carrouf avec Léopold. Genre tu fais des fouilles et tu trouves des trucs bizarres ?
Jehan lui explique qu'il a fait des fouilles dans un château médiéval et qu'en allant dans les oubliettes, il a trouvé un cadavre, posé par terre. Sauf que ce n'était pas un cadavre du Moyen Âge, mais bien actuel, il y avait eu un crime quelques jours plus tôt.
- Ah oui chaud.
- On a dû appeler la police et annuler le chantier. On n'a jamais su comment le cadavre s'est retrouvé là et...
Il ne peut finir sa phrase, Jean-Michel fait péter le son, comme dirait Léopold, le jeune homme voit un groupe de personnes venir dans le salon pour danser. Ils sont si heureux d'être à la soirée et ils s'amusent, des garçons derrière eux lancent des confettis en criant. Zénaïde se joint à eux, elle les connaît, Jehan reste toujours à l'écart. Il voit la noiraude avec son amie rousse, elles dansent en se tenant la main, le jeune homme va s'asseoir dans le canapé pour regarder. Il est dans l'antre de la dépravation et des déboires, des jeunes enchaînent le punch de Léopold. Jehan est hypnotisé par les mouvements des danseurs, c'est si particulier, ils gesticulent si vite que leur âme manque de s'envoler. La rousse murmure quelque chose à Ashlynn, l'historien n'est pas en mesure de l'entendre, la noiraude se tourne vers elle, confuse.
- Mais non Mélanie, il est nouveau, je suis allée lui parler, répond Ashlynn.
Mélanie pense qu'elle le draguait, alors que pas du tout, elles rigolent ensemble dans le brouhaha ambiant. Ashlynn a surtout remarqué qu'il avait une croix sous sa cravate, elle ne pense pas qu'elle puisse sortir avec lui. Léopold est dans la cuisine, il fait cuire des pizzas surgelées, il a la flemme de cuisiner. Tim lui fait des blagues à propos des contaminations de produits surgelés, ça ne fait pas trop rire son ami.
- J'ai tout géré, il n'y aura pas de problème, assure le blond.
Dès que les pizzas sont prêtes, des étudiants se réunissent dans la cuisine, certains fument dans la maison. Leurs fumées nauséabondes font hurler intérieurement Zénaïde, qui se bouche le nez en grimaçant. Des jeunes hommes remarquent le brun à lunettes tout seul, ils vont lui demander s'il ne veut pas se joindre à eux.
- Allez viens, ne sois pas timide.
Il reste méfiant, ils sont bizarres, il se lève pour chercher Zénaïde, il ne la voit plus. Ses amis disparaissent quand il les cherche.
- On va juste faire un tour dehors, ajoute un gars.
Jehan les suit, ils vont derrière la maison, dans le jardin, il y a un petit banc vert près du potager, il fait nuit noir. Un gars nommé Paul utilise son téléphone pour éclairer, ils s'assoient et discutent, le jeune homme aux yeux bleus se retrouve au milieu du banc. Il pense à quand il va rentrer et retrouver son lit douillet, la musique se fait entendre de l'extérieur. Au moins, il est au calme ici, ses oreilles tambourinent encore.
- Tu fais quoi dans la vie ?
C'est reparti pour les questions, pense Jehan. Il aimerait juste parler du dernier livre sur la poterie Jomon qu'il a lu. Il répète ce qu'il fait dans la vie, d'une monotonie si forte qu'il s'ennuie lui-même. Les autres poussent un "wow" intéressé, ça les intrigue, ils continuent de lui poser des questions, au moins le jeune homme à lunettes n'est pas dépaysé à cette soirée. Jehan demande à ces gars ce qu'ils font, le métisse du groupe, Basile, répond :
- On bicrave.
- Qu'est-ce que ça veut dire ? questionne Jehan, confus.
- On vend de la drogue, non je rigole évidemment, on est en STAPS comme Léopold.
Il soupire, soulagé, il n'est pas tombé avec des voyous, il a ce cliché en tête, Paul assis à côté de lui sort une cigarette, mais pas comme les autres. Basile s'esclaffe et lui prend la clope des doigts :
- T'es sérieux toi ? Demande-lui s'il fume déjà, abruti va.
- Je ne fume pas en effet, ajoute Jehan.
- T'es pas du genre grenouille de bénitiers ? lance Paul.
Un lourd silence s'installe, ils se fixent sans un mot, les stapsiens ne savent pas que Jehan est un catholique pieux. Ils se rendent compte de leur erreur, ils se sentent stupides, Paul avait déjà remarqué qu'il était distingué à cause de son costard cravate.
La porte du garage s'ouvre dans un grand fracas, c'est Léopold avec des pizzas, l'historien se lève pour en prendre un morceau, prétexte pour fuir ce malaise. Il retourne dans le salon pendant que le blond donne des pizzas à ses potes, il croise Zénaïde, elle parle avec plusieurs personnes inconnues. Jehan se balade dans la maison en mangeant sa pizza, il ne regarde pas où il va et sursaute en voyant Ashlynn devant lui.
- Oh je t'ai fait peur, je reviens des toilettes.
- Non ce n'est rien.
Elle repart comme elle est venue, cette jeune femme l'intrigue, y compris les autres invités de la soirée. L'historien ne connaît personne d'autre, il rejoint Zénaïde, il entend Ashlynn parler de son village natal, avec un nom incompréhensible pour les français. Les autres rigolent tels des otaries, la noiraude assure que ça existe.
- Cherchez par vous-mêmes sur internet, vous verrez, c'est Llanfairpwllgwyngyllgogerychwyrndrobwllllantysiliogogogoch.
Son accent gallois ressort quand elle prononce ce nom, le brun à lunettes se surprend à l'apprécier. C'est limpide et fluide, Ashlynn le dit avec tellement d'aisance, les autres jeunes sont interloqués et essaient de répéter après elle. Tim le prononce à la perfection, pour narguer les gars qui draguent sa sœur, enfin qui tentent.
- Oh le crâneur, lâche un type.
- Je suis son frère, tu crois quoi, assène Tim.
Jehan rigole devant la scène qui s'est produite, l'autre homme est embarrassé. Tim prend son meilleur accent gallois pour ajouter :
- And I'm gay.
Certains explosent de rire, soit parce qu'ils trouvent ça hilarant, soit parce qu'ils sont complètement bourrés. Il n'est même pas vingt-deux heures, des cadavres de bouteilles d'alcool jonchent déjà sur la table basse en bois.
Jehan prend part à la conversation malgré lui, c'est toujours moins gênant que les grenouilles de bénitiers. Il sent une présence derrière lui, il se retourne, personne, son regard se retrouve face au rideau rouge de style oriental. A l'autre bout du salon, Léopold revient et lui donne un verre de soda, il en boit une gorgée, c'est de la limonade. Il prévient son ami de la présence derrière lui quelques minutes plus tôt.
- C'est bizarre ça... Je n'ai rien vu quand je suis arrivé en face. Tu n'as rien bu ?
- Non, juste ta limonade.
Léopold pensait que Jehan hallucinait, il retourne dans la cuisine, il vérifie qu'il n'y a pas de connerie, la musique s'arrête un moment, ça fait du bien aux tympans de tout le monde, Jean-Michel prend sa pause. Mélanie se plaint que c'était fort, le DJ rétorque qu'il est sourd et vieux, en riant. L'hôte est en parfait état, contrairement à certains de ses invités, il court dans les escaliers pour vérifier que personne ne va dans les chambres. Il entend déjà la voix de Séraphin hurler dans sa tête. Personne en haut, tant mieux, le stapsien blond descend et voit Jehan qui l'attend, il ne sait pas où sont les toilettes.
- Là-bas, près de l'entrée, y a un petit couloir.
- Merci !
Léopold reprend son activité de surveillance, en mode fétiche de Karaba la sorcière. Jean-Michel revient aux platines et est prêt à mettre l'ambiance jusqu'au bout de la nuit. Tout le monde s'amuse et rigole, Jehan revient du petit coin pour reprendre son verre, les gens sont distraits par diverses discussions ou activités. Ashlynn et son amie jouent à la console de jeux vidéo avec un autre jeune homme de leur âge.
Il est hypnotisé par leur partie de jeux, ça lui rappelle ses courses de voiture avec Zénaïde, la noiraude n'arrête pas de gagner.
- Haha, je vous défonce tous !
- Je peux te défoncer dans un autre domaine, répond l'homme d'un air pervers.
Ashlynn lui flanque une énorme gifle, Mélanie éclate de rire, il l'a bien mérité. Ce n'est pas la première fois qu'il fait des remarques, la juriste le ramène à l'ordre :
- T'es vraiment chiant Marc. Je ne vais pas baiser avec toi.
Basile et Paul passent derrière eux en faisant "oooh", le brun à lunettes est rassuré qu'il ne s'est rien passé, il finit sa limonade. Marc décide de s'éloigner de la galloise, bien décidé à ne pas la toucher, Zénaïde revient dans le salon en voyant la console de jeux. Petit à petit, Jehan se sent fatigué, il ne comprend pas ce qui lui arrive, il s'allonge dans le canapé, son amie le remarque.
- Qu'est-ce qui t'arrive ? Tu es bizarre d'un coup !
- Bizarre en effet, c'est comme si je ne pouvais plus bouger.
- Attends, je reste avec toi, prévient Zénaïde.
Léopold ne voit rien de tout ça, il prépare des cocktails pour ses invités, sauf que Jehan commence à perdre connaissance, Ashlynn vient au-dessus de lui, inquiète.
- Il faut appeler les secours, ajoute la rousse.
- Merde, je n'ai plus de batterie, râle Zénaïde.
Ashlynn appelle l'ambulance sans réfléchir, la grise trouve ce malaise étrange. Il n'a pas de problème de santé et il n'a jamais fait de malaise à sa connaissance.
La hantise de Léopold se réalise, il y a eu une péripétie et c'est son meilleur ami qui en est victime, il s'en veut déjà. Les ambulanciers arrivent, ça attire la curiosité des autres fêtards, Zénaïde et le blond reconnaissent une personne qu'ils connaissent bien, Mehmed. Il est très étonné de voir Jehan inconscient sur le canapé en cuir rouge recouvert d'une couverture beige. Les autres ambulanciers et lui-même mettent le jeune homme sur un brancard pour l'amener à l'hôpital, l'Egyptien soupçonne un empoisonnement avec une drogue.
- Il faudra faire des prises de sang en urgence, avertit Mehmed.
Ils soulèvent le brancard et ils quittent le salon, les trois amis les suivent, Léopold est persuadé que quelqu'un l'a empoisonné.
- Par contre, la police risque de te questionner si Jehan a été victime d'empoisonnement, c'est toi qui a organisé la soirée, ajoute Mehmed.
- Je pense bien...
Il se rappelle mot pour mot ce que lui a dit le Congolais "Je veux bien, mais à une condition, je ne veux pas qu'il y ait de problèmes à cette soirée, s'il y a quoi que ce soit, tu vas devoir rembourser les dégâts". Léopold aurait préféré un gars qui chie dans la piscine, plutôt qu'une personne mal intentionnée qui drogue son ami.
Jehan se réveille dans une pièce inconnue le lendemain, une odeur étrange lui emplit les narines, il est à l'hôpital. Ses yeux bleus scrutent la chambre, il voit flou, ses lunettes rectangulaires sont posées sur la table de chevet.
- Qu'est-ce qui s'est passé ?
Ses amis ne sont pas là, ça l'inquiète, il se rappelle s'être senti mal, puis plus rien. Le brun essaie de se remémorer son malaise, impossible, un médecin entre dans la pièce.
- Bonjour, vous êtes réveillé, votre ami Léopold est questionné par un agent de police à propos de ce qui s'est passé hier. Vous avez été drogué au GHB.
- Mon Dieu, dites-moi ce qui s'est passé après exactement s'il vous plaît, panique Jehan.
- Vos amis ont appelé une ambulance et on vous a emmené ici et un interne a proposé de faire une prise de sang directement.
Il repense à cette présence derrière lui durant la soirée, il est sûr que c'est ça. Jehan veut prévenir directement Léopold, il doit déjà être en plein interrogatoire. Le médecin quitte la pièce, une autre personne le remplace aussitôt, c'est Ashlynn. Il s'agite dans son lit pour l'avertir.
- Ashlynn, tu sais précisément où est Léopold ?
- Du calme binoclard, il m'a dit que la police est chez lui pour enquêter et trouver des traces du suspect. Il m'a dit de te ramener chez toi.
"Binoclard", la dernière personne à avoir utilisé ce nom était le type et son coca. Jehan n'ose pas rétorquer, il sait que ce n'est pas méchant avec elle.
Léopold est avec un agent de police en train de discuter, un membre de la police scientifique fouille la pièce. Le blond remarque quelque chose de louche, pourquoi la fenêtre du salon est brisée ?
- Attendez, je viens de capter un truc, la vitre est brisée.
L'ombre derrière Jehan, il était juste devant la fenêtre, tout explose dans sa tête, une personne est venue de l'extérieur. Qui en veut au brun ? Le stapsien pense à l'historien fan de Napoléon Bonaparte, il est peut-être jaloux de lui, ce n'est pas possible, il est parti plus tôt car sa mère faisait une tarte à la rhubarbe. Le policier scientifique trouve une preuve au sol, il fait un tour sur lui-même et fixe Léopold.
- Regardez ce que j'ai trouvé.
Il lui montre une mèche de cheveux blonde, le jeune homme trouve ça bizarre. Il a passé l'aspirateur dix fois pour être sûr de ne pas laisser de crasse avant l'arrivée des invités. Et Léopold n'est même pas passé par là dans la soirée, il arrivait toujours en face.
- C'est à vous, non, vous êtes blond, assure le policier.
- Je suis peut-être blond, mais pas frisé, regardez de plus près, ça fait des boucles.
- Vous avez le souvenir de quelqu'un de blond et bouclé à la soirée ?
L'étudiant en STAPS répond à la négative, l'agent scientifique met la mèche bouclée dans un sachet pour continuer l'enquête. Léopold décide d'en informer Jehan par message, Ashlynn a dû lui ramener son téléphone.
Le brun à lunettes sort de l'hôpital, accompagné d'Ashlynn, il n'est pas trop en état de conduire, il est trop fatigué. Il reçoit un message de Léopold, ils ont trouvé une mèche blonde bouclée près de la fenêtre. Ça lui rappelle quelqu'un, ça ne peut pas être ça, la noiraude l'emmène à sa voiture et le sort de ses pensées.
- Ça va ?
- Je pense... Je n'ai plus trop envie d'aller aux soirées, dit Jehan.
- Je comprends, c'est inquiétant ce qui t'est arrivé.
Le jeune homme savait qu'il y allait avoir de la merde, sauf que ce n'est pas la faute de son ami, il a tout fait pour éviter ça. Jehan pense que Dieu lui a mis une épreuve, il a été à une soirée alors que ce n'est pas dans ses mœurs. Il essaie de trouver une explication, Ashlynn le trouve étrange. Le paysage défile devant ses yeux, il ne réfléchit plus, il est ailleurs.
- J'espère qu'on trouvera le suspect avant qu'il fasse d'autres victimes, chuchote Jehan.
Il ne connaît qu'une seule personne aux cheveux blonds bouclés, ça le perturbe. Ils sont arrivés, il manque de se cogner la tête contre la vitre.
À peine sorti de la voiture, il reçoit un appel de son père, il repart sans regarder la jeune femme gothique.
- Allo papa ?
- Tu étais en soirée hier ?
Nom de Dieu, comment il sait ? pense Jehan. Le seigneur est vraiment en train de le regarder et informe son père, il lui a tellement parlé du fait que Dieu observe tout le monde quand il était petit. La réponse ne tarde pas à se faire savoir, il ne s'y attendait pas.
- C'est Frédégonde qui m'a dit.
- Pardon, mais comment elle sait, je ne lui ai rien dit, c'est trop étrange.
Ça devient trop louche pour l'archéologue, il commence à comprendre certaines choses. Donatien est énervé, il ne pensait pas que son fils irait en soirée alors qu'il a eu une éducation religieuse stricte. Il rétorque que Frédégonde est une bonne catholique, qu'il devrait prendre exemple sur elle. Le père continue son speech, Jehan est habitué, il répond par "oui" pour montrer son intérêt. Il lui parle comme s'il était un enfant, l'étudiant a vingt-trois ans. Plusieurs messages de Léopold apparaissent sur l'écran, écrits en majuscule et des points d'exclamation partout "La police a trouvé un suspect !". Jehan trouve l'excuse de répondre à un message urgent et il peut enfin couper l'appel avec son père, le stapsien ajoute :
- C'est pas quelqu'un que tu connais ?
Il ne voulait pas se l'admettre, mais c'est bien ce qu'il imaginait. Jehan a encore du mal à se remettre de ce qu'il a subi, il rentre à l'appartement et il va dormir.
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