_ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝟙𝟜_
Image : Tourbière du Jura
« Alors, qu'avez-vous attrapé, les apprentis ? » demanda Cœur de Châtaigne en se penchant vers les novices.
« Nuage de Brume a attrapé deux lézards, Nuage Bistre une souris, Nuage de Serpent un crapaud et moi un lapin, marmonna Nuage Sauvage.
- Fantastiiiiiiiique, que de belles prises ! Ooooh, pourquoi donc as-tu un bleu sur le crâne ?
- Ça ? Euhm, je suis juste tombé sur une branche en courant après ma proie.
- On pourrait demander à Croc de Ratel de vérifier, tu ne penses pas ?
- Pas b-
- Si si si, Nuage Bistre, vas donc accompagner ton ami chez la guérisseuse » ordonna la chatte enveloppée.
Le novice calico se renfrogna. Qu'il aille accompagner le matou qui se tapait sa frangine se faire soigner ? Puis quoi encore ? Devoir choisir les noms de leurs chatons ?
Petit Erreur, Petit Non-Désiré, Petite M- pourquoi est-ce que je pense à la future marmaille de ma sœur ?
Arrivés devant l'antre de Croc de Ratel, cette dernière sortit le museau et fit la grimace en voyant les apprentis.
« Vous vous êtes battus ou quoi ?
- Nan, il est tombé sur la tête pendant qu'il chassait, répondit Nuage Bistre. »
La femelle grise plissa ses paupières, peu convaincue, mais installa Nuage Sauvage sur une des litières de sa tanière. Elle prit un peu de mousse et soigna la bosse, tandis que le patient fixait d'un air mauvais l'autre novice. Ce dernier lui feula dessus et partit plus loin, ne voulant pas rester si près de l'énergumène qu'il avait cogné pour s'être farci Nuage de Brume.
« Nuage Bistre ! Qu'est ce que tu fiches là ?
- Ah ! Pas de Jaguar, arrêtes de me faire peur comme ça !
- Tu n'as pas répondu à ma question, saligaud.
- Je dois accompagner Nuage Sauvage. Il s'est fait un bleu en forêt. Pourquoi tu ne restes pas dans la tanière des anciens ? Tu n'es plus guérisseur.
- Œil Azur est malade, et il doit rester ici. Vu que croupir dans un nid de mousse sans camarade à mes côtés n'est pas une partie de plaisir, j'ai décidé de rester ici le temps qu'il se rétablisse. De plus, Croc de Ratel a besoin d'aide ; avec la saison des neiges qui approche, il faut avoir le plus de remèdes, et j'en ramasse.
- Ça fait longtemps qu'on ne s'est revus ... les entraînements de guerriers sont épuisants !
- Encore plus quand tu es adulte. Tu dois t'habituer à chasser, combattre, patrouiller ... et surtout, de ne plus être prioritaire pour manger. Alors ça, c'est horrible. »
Nuage Bistre sourit en entendant son grand-père se plaindre. Ce dernier commençait à avoir des poils blancs sur tout le museau, annonçant son vieil âge.
« Mais donc, Nuage Sauvage est tombé ? Il est très adroit d'habitude.
- M'enfin, ça arrive à tout le monde de perdre l'équilibre.
- Tu es sûr de toi ? »
L'ancien avait un flair infaillible pour reconnaître les mensonges. Il fixa froidement son petit-fils, qui finit par miauler de culpabilité.
« Bon, d'accord, d'accord ... c'est moi qui l'a cogné. »
Nuage Bistre s'attendit à ce que le noiraud le sermonne, et qu'il rajoute cyniquement qu'il s'en fichait un peu, mais à la place de cela, il ne vit que de la frayeur dans son regard.
« Je ... je pensais que tu n'avais que son regard, Nuage Bistre, enfin ...
- Q-quoi ? Comment ça ? trembla le novice.
- Tu ... tu ne peux pas être comme lui ...
- De qui ?
- Ton paternel enfin !
- Ténèbres Féroces ? »
Le jeune chat calico ne croisait pas souvent son père. Depuis sa dispute avec sa mère, le lieutenant évitait ses enfants, ne les croisant que pour le partage et aussi quand Nuage Bistre suivait Nuage de Serpent. Il essayait de ne pas parler avec eux, et inversement. Le tricolore avait lâché son enquête pour comprendre pourquoi sa mère détestait son père, ne voulant pas se prendre une baffe de la part d'un d'eux.
« Oui, lui ! Comment ... je croyais que tu n'étais pas comme ça Nuage Bistre ...
- De quoi parles-tu Pas de Jaguar ?!
- Bon ... promets moi de ne le dire à personne. Seuls Croc de Ratel et moi le savons.
- Je te jure.
- Alors voilà ... lorsque nous avons nettoyé le corps de Pas de Blaireau, nous avons étudié les blessures. Elles était brutales, mais portées pour faire souffrir le lieutenant et être sûr que cela allait le tuer. Les mutilations étaient trop précises et nettes pour que ce soit un gros prédateur, comme un blaireau, un rat ou un renard. Seul un félin pouvait être capable de telles griffures petites et adroites. Nous avons pensé à un chat errant, car aucune odeur des autres Clans n'étaient là. Seulement celle des ombreux et d'autres effluves inconnus, venant sûrement du Charnier, là où il a été retrouvé. C'est alors qu'une touffe de poils a été retrouvée dans sa gueule. Il s'était débattu, et avait mordu son adversaire, lui arrachant de la fourrure. Cette dernière était grise sombre, presque noire. Elle se confondait dans la nuit. Seul un félin avait le poil ainsi. Ténèbres Féroces. »
Nuage Bistre sentit son cœur battre si fort qu'il eut l'impression qu'il allait exploser. Il avait le sang d'un tueur dans ses veines ? Ses yeux se fixèrent sur sa patte, la même avec laquelle il avait frappé Nuage Sauvage. Devenait-il comme son père ? Et ... une minute. Pas de Blaireau était le père du novice gris.
Je me comporte comme Ténèbres Féroces ! Je ... non, non ...
« Voilà pourquoi j'ai peur. Peur que tu ne sois pareil. Je ne sais pas si ce matou est ainsi pour le plaisir, ou si une maladie le contrôle. Je n'ose pas lui demander, la peur me triture le ventre. Mais s'il est vraiment malade, j'ai peur que ce ne soit génétique. Je ne veux pas que tu sois touché de sa folie, ni toi, ni Nuage de Brume » marmonna l'ancien guérisseur.
Il serra son petit-fils contre lui, tandis que ce dernier pleurait de peur.
« Je ne veux pas sortir de cette tanière ! Et si Ténèbres Féroces me tuait ?
- Ne penses pas à ça. Tu ne seras pas comme ton père.
- Ce n'est pas mon père ! Tu ne te souviens pas ce que m'a dit Ramée de Laurier ?
- Quoi ? ...
- Elle disait qu'il n'était qu'un géniteur, et un fils de quelque chose ...
- Je dois parler avec ta mère. »
Total : 1090 mots
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