chapitre 8
Les mois passèrent. Chaque jour, nous nous levions aux aurores. Nous profitions du lever du jour pour aller chasser. Chaque archer avait des qualités connues de tous que nous utilisions dans nos stratégies. Plusieurs fois, nous avions quitté la cité. Nous accomplissions toutes sorte de mission, que ce soit de l'escorte, du pillage, ou tout simplement pour la protection du camp. Nous devions empêcher les cavaliers de trouver le camp. Ceux qui parmi nous avaient survécu à l'une de leurs attaques les surnommaient les cavaliers de la mort. En effet, leur chevauchée amenait la mort et la destruction des territoires qu'ils traversaient.
Un jour, l'un des dirigeants du camp regroupa tous les nouveaux archers. Il nous fit passer une épreuve afin de déterminer les meilleurs d'entre nous. Il ne garda que les dix meilleurs, et congédia les autres. J'eus une égoïste satisfaction de me trouver dans la liste des sélectionnés. Sélectionnés pour quoi, c'est ce que l'homme au masque de fer nous expliqua :
"Recrues. Vous êtes les meilleurs archers de votre division. La mission que vous allez devoir effectuer sera sans nul doute l'une des plus périlleuses de votre carrière. Mourir en l'effectuant ne sera pas un honneur. Si vous mouriez, vous accompliriez votre devoir. Vous manquez encore d'expérience pour pouvoir partir seuls. C'est pourquoi, vous allez être accompagnés par la plus talentueuse archère de ce monde"
La filature avait commencé. Depuis trois heures, nous suivions deux cavaliers. Notre mission était d'infiltrer leur base afin de récupérer tous informations sur la localisation de leur quartier général. L'archère nous accompagnait. Depuis le premier jour, je ne l'avais revue qu'en de trop rares occasions. Elle m'avait appris tout ce que je savais sur la maîtrise de l'arc. Mais depuis plusieurs semaines, elle avait disparu. Une ombre s'était emparée de mon cœur. J'étais meurtri de cette absence, car sans elle, ma vie n'avait plus de sens.
A chaque fois que l'un des cavaliers se retournait, je sentais un frisson glacé parcourir mon échine. Dans les dernières lueurs du jour, ils semblaient plus menaçants encore. Mes compagnons tremblaient de peur, bien qu'ils ne l'auraient jamais avoué. Dans les herbes hautes, nous étions presque invisibles. Seul un œil aguerri aurait pu nous débusquer. Pourtant je n'étais guère rassuré. Je ne me faisais aucune illusion sur la qualité de la vue des cavaliers. Il aurait suffi d'un bruit, d'une branche qui craque, d'un bruissement de feuille pour attirer leur attention, et signer notre arrêt de mort.
L'archère disparaissait de temps à autre. Elle revenait quelques minutes plus tard, et nous donnait des indications sur le chemin à prendre. J'étais impressionné par son courage. Elle ne se contentait pas de ne ressentir aucune peur. Elle nous insufflait ce sentiment. Si ma vie s'était achevée ce jour-là, j'aurais été heureux d'avoir passé mes derniers instants à ses côtés.
Nous finîmes par atteindre une bourgade. Le cavalier adressa à quelqu'un qui se dérobait à ma vue une série de paroles qui échappèrent à ma compréhension. Les portes s'ouvrirent à leur passage. Je m'apprêtai à les suivre, lorsqu'une main m'agrippa fermement à me retint. L'archère m'avait stoppé dans mon élan. Je fulminai quelques instants, avant de comprendre qu'elle m'avait sauvé la vie. En effet, un garde lourdement armé guettait au sommet des murs d'enceinte. Une discussion s'engagea entre nous :
"Si tu veux passer, tu devras donner le code d'accès au garde."
-"Je ne connais pas ce foutu code d'accès"
-"Ce n'est pourtant pas bien difficile à connaître. Le cavalier vient de le dire au garde n'as-tu donc pas entendu ?"
-"Non"
Elle s'approcha, puis elle murmura quelques mots au creux de mon oreille. J'étais comme électrisé par cette proximité. Je fus troublé à tel point que je crus oublier le code. Mais, le souvenir de sa voix chantante, douce comme une brise d'automne restera gravé dans ma mémoire jusqu'à mon dernier soupir.
Ce jour-là, je fus très heureux d'avoir refusé de prendre l'habit des archers, car mon manteau et ma capuche noirs comme le jais me permirent de me faire passer pour un cavalier. Le garde me demanda le mot de passe. Grâce à l'archère, je lui répondis :
"Longue vie à l'Empereur, souverain de tous les peuples."
Il me demanda qui étaient tous les individus qui m'accompagnaient. Je lui répondis, comme convenu, qu'ils avaient tenté de m'attaquer, mais que j'avais réussi à les capturer. Je dis également que je souhaitais les escorter moi-même jusqu'à la prison de la cité. Je dus être convaincant, car quelques instants plus tard, nous étions entrés.
Nous nous dirigeâmes jusqu'à la citadelle. Une fois que nous fûmes arrivés aux portes de citadelle. Je servis le même scénario à la sentinelle, qui nous laissa rentrer. Il m'indiqua la direction des geôles afin d'enfermer les dangereux criminels dont j'avais la charge. Lorsque nous fûmes seuls, je libérai mes camarades des cordes attachées aux poignets dans un souci de crédibilité. Pour la première fois, je touchai la peau de l'archère. Une peau plus douce que la soie. Une peau au teint pâle. Une peau unie à la vue comme au toucher dans un idéal de beauté.
Nous nous séparâmes en deux groupes. L'un d'entre eux, sous ma direction, fut chargé de libérer les prisonniers. L'autre, aux ordres de l'archère, avait pour mission de trouver des informations sur la localisation d'une tour de communication des Elus.
Nous suivîmes les directives de la sentinelle, et nous trouvâmes sans difficulté la prison. Il n'y avait que trois gardes. Ce ne fut que l'affaire d'une poignée de secondes. Ils s'effondrèrent au sol. Transpercés par des tirs frôlant la perfection. Nous fouillâmes leurs cadavres jusqu'à trouver le trousseau de clés ouvrant les portes des cellules. Nous fîmes sortir les prisonniers. La plupart ne firent preuve d'aucune hostilité à notre égard. Certains avaient un désir de mort gravé dans leurs chairs. Ils tentèrent de voler nos armes, mais se calmèrent à la vue des pointes de nos flèches. Ces dernières scintillaient d'une lueur meurtrière à la lumière de la lune.
Lorsque nous remontâmes vers la sortie, d'autres gardes tentèrent de nous stopper. Malheureusement pour eux, ils furent emportés par le flot de fureur des forçats. Ils s'emparèrent de leurs matraques, piques et autres couteaux. Nous savions que nous n'allions pas tarder à avoir de la compagnie. Notre passage ne pourrait pas rester bien longtemps inaperçu. Nous décidâmes de cacher les corps des gardes. Pour cela, rien de plus simple que d'échanger les vêtements des prisonniers avec les tenues des sentinelles. Puis, nous jetâmes les corps dans les cellules. Personne ne s'intéresserait à eux. Lorsque quelqu'un remarquera l'absence des gardes, il pensera certainement qu'ils avaient pris une pause, et mettra du temps à réaliser que rien n'était normal dans cette situation.
Nous avions réussi à remonter lorsque l'alarme retentit. Nous n'étions pas inquiétés. En apparence, nous n'étions qu'un groupe de gardes accompagnés par un cavalier de la mort. Des rebelles jaillirent d'un couloir. Ils s'étaient fait prendre en train de fouiller dans les dossiers du maître des lieux. L'archère n'était pas avec eux. Ils me dirent qu'elle était restée derrière pour finir la mission.
Je quittai le groupe l'un de mes camarades me demanda pourquoi je lui dis :
"Fuyez. Retournez au camp."
Il me demanda où j'allais. Je lui répondis :
"Je vais la chercher."
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