⛁ ~ ℂ𝕙𝕒𝕡𝕚𝕥𝕣𝕖 𝟚 ~ ⛁


J'avais créé le plan parfait. Alors qu'Anne allait partir faire les courses, j'allais l'accompagner, et lorsqu'on sera sorties, je prétexterais avoir oublié quelque chose, et de laisser la servante passer devant. Je partirais alors dans des petites rues en retirant mon tablier et en déchirant ma robe. Avec un peu de chance, j'arriverais à m'éloigner assez pour retourner dans l'hôtel Rêverie et sortir dans une autre planète... Si j'arrivais à me glisser dans un vaisseau. Mais de toute façon, le "Maître" sera bien trop occupé à me chercher dans le rêve pour sortir de son bain. Je devrais donc avoir quelques jours de répit, sans doute.
L'heure fatidique approchait, et je me mis à chercher Anne. La connaissant, elle acceptera mon aide avec plaisir. Je déambula dans les couloirs sans trop me presser, en me dirigeant vers la porte de service. Par chance, Anne était déjà là, ses sacs à la main. Je l'interpela en faisant un grand signe de main, et la jeune femme leva la tête.

« Eh, Anne ! Tu vas faire les courses toutes seule ? demandais-je.
- Oh, bonjour (T/P)... Oui, pourquoi ?
- Laisse moi t'accompagner ! Tu risques d'avoir du mal, toute seule ! »

La jeune femme me regarda un instant, presque méfiante.

« Le Maître m'a interdit de me montrer à ses invités pendant la semaine, il faut bien que je m'occupe.
- Oh, je vois, pas de soucis alors. Enfait, je... je pensais que tu voulais encore t'échapper...
- Moi ? M'échapper ? Mais voyons Anne qu'elle idée farfelue ! »

J'éclata de rire alors que la jeune femme fit la moue, peu convaincue.

« Bon, d'accord, avouais-je, j'y ai pensé. Mais il y a trop de risques, je préfère être prudente. »

Ce n'était qu'un demi mensonge; je ne lui disais juste pas que je comptais vraiment m'échapper. Anne ouvrit alors la porte et je la suivis, de bonne humeur. Cette journée s'annonçait brillante ! Pendant le trajet, j'admirais le paysage, tentant de faire abstraction des joueurs et des jeux qui m'exaspéraient au plus au point. Dans chaque homme qui jouait, je revoyais mon père, qui m'avait vendu sans scrupule pour pouvoir continuer à jouer. Est-ce que j'aurais eu une meilleure vie si j'étais resté avec lui ? Certainement pas, si je regarde la vérité en face. J'ai eu un toit et de la nourriture, ce que je n'avais pas avec mon père. Mais quand tu depasses largement la majorité, ce genre de vie n'est pas convenable, pour quelqu'un comme moi. J'avais besoin de courir, de crier, de m'amuser sans dépenser d'argent. M'amuser d'être en vie et de pouvoir en profiter jusqu'au temps venu. Mais pour ça, je devais sortir de là.
J'aidais Anne à prendre ce dont ont avait besoin; par chance, peu de choses, donc son sac suffirait. J'aurais été embêtée si je devais porter un sac, moi aussi. Elle discutait à peine avec moi, et cela m'attristait. Les autres servantes avaient du, elle aussi, la prévenir que j'essayais de m'enfuir régulièrement. Alors, en sortant du magasin, je poussa le soupir le plus profond que je n'avais pas poussé depuis des semaines. Anne me jeta un regard, inquiète, et je lui souris pour signifier que tout allait bien. Nous reprenons la route vers le manoir, et je regardais attentivement chaque rue qui me serait probablement ou non propice à l'évasion. Je trouva la rue parfaite, et attendis un peu avant de passer à l'action.

« Ah ! m'exclamais-je. Je crois qu'on a oublié de la crème ! Par devant, je te rejoins après, t'en fais pas ! »

La jeune femme jeta un œil au sac et hocha la tête pendant que je faisais demi tour. Après quelques mètres, je me retourna et constata avec satisfaction qu'Anne avait disparu. Je tourna alors à la rue que j'avais choisi et retira mon tablier avec un sourire, avant de déchirer ma robe en courant. Je retira mes épingles dans mes cheveux et les jeta aussi vite que possible, laissant mes cheveux virevolter. À moi la liberté !
J'heurta soudain quelqu'un et tomba fesse par terre.

« Aïe... ! »

Je leva la tête et poussa un hoquet de surprise en voyant Anne.

« Anne ! Haha, quelle bonne surprise... !
- Je savais que tu allais encore t'échapper... Si je te ramène, le Maître me donnera une récompense. »

Je lâcha un soupir et me releva.

« Tu peux aussi me laisser partir en pretextant m'avoir perdu de vue. Ou ne m'avoir jamais vu, enfait.
- Tu es la seule gagnante dans ce lot, (T/P).
- Mh, oui, tu as raison... Mais tu vois, c'est comme dans les jeux, il y a un gagnant et un perdant. Et aujourd'hui, je suis la gagnante, et ton Maître un perdant ! »

Je lui tourna le dos mais elle m'aggripa fermement les bras pour me les coller dans le dos, me faisant pousser un cri de douleur. Je la sentis attacher mes poignets avec du tissu et j'essaya de me dégager, sans succès. La jeune femme me donna un coup de pied pour que j'avance et les larmes me montèrent, sous le coup de la douleur et de l'humiliation. Mon plan était parfait ! J'avançais alors, poussée par Anne, qui était fière de son coup. Allais-je encore me faire punir ? J'avais déjà le dos en sang, où est-ce qu'il allait bien pouvoir me frapper...? Une idée traversa mon esprit, et je pria les Aions pour qu'elle ne se réalise jamais. Arrivées au manoir, Anne me jeta au sol, avant de partir retrouver le "Maître". Je lâcha un soupir las, et tenta de me redresser malgré la douleur et mes poings liés. J'espérais tomber sur Marie ou Jeanne qui pourrait me libérer et m'emmener je ne sais où à l'abri de ma sentence. Mais rien, et Anne revint rapidement, et je compris à son regard presque gêné et plein de pitié que je venais d'être envoyée en cellule. Les cellules se trouvaient au sous sol, et étaient réservées aux servantes qui avaient commis de grave fautes, ou celles dont le "Maître" ne pouvait pas s'en occuper tout de suite. Ce qu'elles subissaient ? Personne ne le savait, elles n'avaient jamais ouvert la bouche. Elle me prit alors par le bras et sortit le trousseau de clé des cellules. Je voulais lui subtiliser mais je soupira en me souvenant que j'avais les poings liés. Nous descendons l'escalier en colimaçon, et l'air se fit plus rare, plus froid; cela n'augurait rien de bon. Je posa le pied par terre et je sentis de l'eau. Génial, le sol était trempé. Il faisait noir. Je ne savais pas d'où venait le peu de lumière qu'il y avait, et je préférais ne pas savoir. J'avança, regardant les cellules, avant de constater qu'elles étaient vide. Ben oui, sinon pourquoi le "Maître" aurait laissé une servante assister à l'horreur de cet endroit ?
Elle ouvrit une cellule et m'y emmena, avant de retirer mes menottes de tissus. Son regard me supplia de ne rien tenter, et elle accrocha mes mains aux menottes qui étaient au plafond. Là, elle me tourna le dos en chuchotant une prière et ferma la porte avant de partir. J'écouta ses pas s'éloigner, puis disparaître. Je prenais de grandes inspiration et tenta de lutter contre le froid qui mordait déjà mes membres. Si je devais attendre que les invités soient partis... Il me faudrait attendre encore 6 jours... Par les Aîons... Je savais faire preuve de sang froid, mais là, ma punition dépassait mes capacités. Je secoua mes cheveux pour qu'ils tombent bien sur mes oreilles et me protègent un peu le visage. Il fallait que je dorme, sinon j'allais passer des jours infernaux. Ouais, voilà, il faut que j'hiberne. Je lâcha un rire qui résonna dans le sous-sol et me donna la chair de poule.
Ma liberté me sembla soudain aussi loin que les souvenirs de ma mère.

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