5. 27 Décembre 3453

  Vingt-quatre. Tel était le nombre définitif de partants. Était-ce suffisant ? Ou seraient-ils, au contraire, trop nombreux ?

   Veronica n'avait pu parler avec tout le monde, mais elle avait aperçu deux-trois têtes familières durant la soirée de la veille, dont celle de Marie. Cette jeune femme aux cheveux châtains-roux travaillait dans le même établi que la petite brune. Toutes deux ne se supportaient pas, faisaient de leur mieux pour surpasser l'autre. Sur une simple chaise, elles pouvaient passer des heures à la rénover, juste pour que le résultat soit supérieur à celui de l'autre. Peter, leur patron, n'aimait pas particulièrement qu'il y avait des tensions dans son atelier, mais il se taisait, les deux femmes étant ses meilleures rénovatrices.

   Leur réciproque détestation, n'était rien, comparée à la haine ressentie par Marie à l'égard de Yona. Elles ne pouvaient se voir sans faire d'horribles commentaires envers l'autre, se parler sans s'insulter ou hurler. Personne ne savait, avec précision, pourquoi les deux Inventeuses se détestaient ; mais Veronica avait entendu parlé d'une tragique histoire opposant leurs familles.

   De tout cœur, Veronica espérait que leurs disputes régulières ne troubleraient pas le voyage. Et, parmi les autres partants, y aurait-il aussi des tensions ? C'était certain, mais seraient-elles suffisamment importantes pour que le groupe ne dysfonctionna ?

   Durant l'exil, des années auparavant, les discordes avaient été multiples, pourtant, il n'y avait eu aucune guerre ou dysfonctionnement majeur. Les exilés avaient conscience qu'à la moindre erreur, la cohabitation souterraine serait remise en question.

   L'abandon de leurs vies à la surface de la Terre, avait déjà été assez compliqué pour qu'ils ne se compliquent la vie avec d'inutiles disputes, querelles. Sur quinze milliards d'humains, seuls trois millions n'avaient pas été contaminés.

   En 2400, des dizaines de villes avaient été construites sous terre, pour diverses raisons, dont une épidémie majeure, mais seule celle se trouvant en Bolivie pouvait contenir autant de personnes, ainsi que les générations à venir. Tout avait été prévu, jusqu'à des champs éclairés par une lumière artificielle pour que les habitants puissent se nourrir si jamais les réserves s'épuisaient.

   Le virus s'était répandu partout, dans tous les continents, pays, en moins de deux ans, causant la panique de la population entière. Fluctussia dévorait ses victimes de l'intérieur, les rendant folles, dangereuses, avant de les achever en douleur.

   Pour sauver l'espèce humaine, les scientifiques de l'époque avaient effectué de multiples tests sur les contaminés, et sur ceux qui ne l'étaient pas, réalisant qu'il y avait des immunisés à qui le cerveau n'avait pas été suffisamment abîmé par les ondes dans le passé. Ils vivaient souvent dans des coins reculés du monde, tel de nombreux peuples ne vivant pas entourés d'écrans. Après que tous les immunisés eurent été répertoriés, ils avaient été amenés, contre leur gré, dans la ville souterraine bolivienne, pour la survie de la race, où ils avaient vécu, enterrés du reste du monde et de l'horreur qui s'y passait, durant mille ans.

   Les grands-parents de Veronica, décédés depuis bien des années, faisaient partie de la première génération à être retournée à la surface terrestre. La jeune femme ne les avait jamais vraiment connus, que ce fut du côté paternel ou maternel, ce qui fit qu'elle n'avait pas été touché pas leurs morts.

   Les pensées de la brunette dérivèrent peu à peu vers la réunion de la veille ; elle plongea dans le souvenir récent.

   Là depuis une trentaine de minutes, Veronica discutait en compagnie de Yona, Shawn et Kiara, une jolie jeune femme aux cheveux rouges, lorsque la réunion débuta. Ils se trouvaient dans un ancien supermarché vide de toute nourriture , en périphérie de la ville, éloigné de la plupart des habitations.

   La jeune brune monta sur l'une des nombreuses vieilles caisses poussiéreuses, tournant le dos aux rayons, et contempla les vingt-trois personnes présentes à ses pieds. Il était rare de voir autant de personnes venant des trois clans, réunis dans un même endroit.

   « Bonsoir à tous ! Si nous sommes réunis ici, c'est pour parler plus en détails de mon plan. De notre plan pardon. La dernière fois, n'étant pas sure que tout le monde se joigne à moi, et ayant peur que quelqu'un ne nous trahisse, je n'ai pas pu m'approfondir plus que ça. Mais, à présent, je suis -presque- certaine que personne ne nous dénoncera, confia-t-elle, sur le ton de la confidence. »

   Voyant plusieurs hochements de tête positifs, et entendant quelques ''oui'' de parts et d'autres de l'immense salle, Veronica fut soulagée, et son cœur lui sembla tout à coup plus léger. Un sentiment de confiance s'empara d'elle.

   « Commençons, par une chose dont nous sommes surs, le départ aura lieu durant la nuit du 14 Janvier. En revanche, les informations suivantes ne sont pas encore certaines, et restent approximatives. Nous n'avons pas de destination précise pour le moment, mais plutôt une direction. Nous partirons vers l'Ouest, vers l'océan Pacifique ; donc, pour ceux et celles qui connaissent, le pays anciennement appelé Chili. »

   Les petites exclamation de certains personnes firent sourire la jeune oratrice, heureuse que la destination plut. Le voyage leur permettrait de voir de magnifiques paysages sauvages, d'immenses villes abandonnées, de beaux lacs entourés de forets.

   « Comme vous le savez certainement, nous nous trouvons actuellement à Surial, qui, dans le temps, ne s'appelait pas comme cela. Elle se nommait La Paz, et était l'une des deux capitales de la Bolivie, le pays dans lequel nous vivons. Bref, je ne suis pas ici pour vous faire un exposé sur l'ancien monde, mais bel et bien pour vous parler du nouveau. Celui que nous allons bientôt découvrir ensemble ! »

   De discrets « hourras » parcoururent la foule, pendue aux lèvres de Veronica. Tous se taisaient, l'écoutant d'une oreille attentive.

   « Aujourd'hui, est le jour de notre dernière réunion tous ensemble, avant le grand départ ! Pourquoi, devez-vous vous demander, et bien tout simplement parce que ça ne sert à rien de courir des risques inutiles. Les informations et les futures décisions, vous seront communiquées par le biais de Yona pour les inventeurs, par Shawn pour les guerriers, et par Tony pour les guérisseurs. Un pour chaque clan, pour ne pas que les gens s'imaginent de multiples choses, en vous voyant parler avec une personne d'un autre clan. »

   La petite brune vérifia que son amie brune, que le guerrier aux cheveux blonds platines, et que Kiara étaient bien à leurs places, attribuées avant que la réunion ne commença, avant de poursuivre.

   « Maintenant, fini de parler théorique, passons au pratique ! Durant le voyage, nous aurons besoin de nous défendre contre les menaces extérieures, out tout simplement de chasser pour nous nourrir. Il nous faudra donc des armes. Nous ne pourrons nous procurer seulement quatre types d'armes différents ; les armes à feu, les armes blanches, celles pour tirer, et les armes brutes. Pour ceux qui veulent un fusil, ou un pistolet, allez voir Shawn, le blond habillé de noir, là-bas, dit-elle en montrant du doigt le jeune homme. Pour une arbalète, ou un arc, c'est avec Kiara, la fille aux cheveux rouges, qu'il faut en discuter. Si vous êtes plus corps à corps, c'est à dire dague ou poignard, venez me voir ! Pour finir, allez voir Yona, si vous souhaitez un gourdin ou un marteau. C'est la grande brune vêtue de gris, là-bas. »

   Alors que tous se dirigeaient vers la personne possédant l'arme de leur choix, Veronica descendit du comptoir où elle était perchée, pour accueillir la demi-douzaine de personnes arrivant vers elle. Il n'y avait que deux hommes, entourés de quatre femmes. La brunette remarqua qu'elle était la seule inventeuse ; il n'y avait seulement que des guerriers et guérisseurs, parmi lesquels deux visages familiers : ceux de Sam et Violette.

   Le couple que le jeune homme formait avec Lolita, lui avait plu, et elle le trouvait sympathique, après les quelques mots échangés avant la réunion. Les deux guérisseurs semblaient s'aimer plus que tout au monde, et leur complicité était telle, qu'ils se comprenaient sans échanger de mots.

   La seule fois où Violette et elle avaient discuté, sa gentillesse et sa douceur l'avaient conquises. Ses grands yeux brillants, d'une couleur violette due aux restes de radiations, ressemblant à deux améthystes, lui donnaient un air innocent.

   Les quatre autres jeunes lui étaient inconnus ; elle les avait, dans le passé, peut-être déjà croisé, mais elle n'en gardait aucun souvenir. Les trois femme devaient se connaître, comme le suggérait leur proximité que des inconnues ne se permettraient pas.

   « Salut ! Avant de parler armes, dîtes-moi d'abord quels sont vos noms.

   - Samira, sourit une immense femme, ayant une chevelure blanche qui contrastait avec sa peau mate, presque noire.

   -Moi c'est Clarisse, se présenta une fille aux beaux cheveux violets, parsemés de mèches noires. Et voici Lee.

   - Salut ! s'exclama la soi-disant Lee, une jolie asiatique. »

   Le jeune ne s'étant pas présenté , possédait des yeux d'un bleu métallique semblable à ses cheveux. Son aura mystérieuse attira l'attention de Veronica sur son visage, marqué par une profonde tristesse.

   « Will, grogna-t-il, se méprenant sur le sens du long regard de la petite brune.

   - Enchantée ! affirma-t-elle, d'une voix trop enjouée pour être convaincante. »

   Tous tournèrent la tête, en entendant des cris énervés, dans un coin de la salle. Veronica soupira, en voyant Marie et Yona se disputer sous le regard gêné de vingt-deux personnes. La brunette les rejoignit, ses yeux lançant des éclairs. Elle les attira à l'écart des autres, et s'enquit sur la raison de leur discorde.

   « Elle est venue dans mon groupe, comme par hasard, cracha Yona, de sa voix forte.

   - Excuse-moi de préférer me battre avec un gourdin, plutôt qu'avec un cure-dent !

   - Mais fermez-la bon sang ! Ça ne vous dérange pas de vous disputer sous les yeux de tout le monde. Et pour rien en plus ! Yona, c'est pas parce que tu la vois que tu dois t'énerver. Et toi Marie, ça sert à rien de la chercher. Je sais que vous vous détestez, mais faites un effort, et mettez vos différents, le temps d'une soirée, de côté. S'il-vous-plaît.

   -D'accord, susurra la grande brune. »

   Après les avoir remerciés de leur effort futur, elle rejoignit son groupe, et leur expliqua les caractéristiques du poignard et de la dague, comme si ne rien n'était. Les deux armes possédaient une multitude de différentes lames, actionnables grâce à un petit bouton se situant sur le manche. L'un de leurs seuls inconvénients était que, si l'on appuyait sur le bouton, ce n'était pas toujours la lame souhaitée qui s'actionnait, et il fallait alors rappuyer, jusqu'à ce que celle voulue apparaissait.

   Son explication finie, elle remonta sur la caisse poussiéreuse, après avoir noté le choix de chacun, et attendit que le silence revint.

   « Bien, merci à tout le monde d'être venu ! N'oubliez pas que les informations vous seront communiquées, soit par Yona, soit par Shawn, soit par Tony, et bien-sûr, ne parlez à personne de ce qui a été dit cette nuit. Bref, nous ferions mieux de partir, la prochaine patrouille passe dans une quinzaine de minutes. Bonne soirée à vous !

   Veronica s'endormit à la fin du récent souvenir, d'un sommeil profond et réparateur.

   Traînant des pieds, Veronica marchait, lentement, peu désireuse de rejoindre le bar à sa mère qui, pour la première fois depuis qu'elle l'avait surprise dans les bras de Carl, n'avait pas tenu à l'accompagner. Mais, au plus grand regret de sa fille, Sarah l'avait obligée à se rendre au bar, une fois qu'elle eût fini de travailler.

   La jeune femme vêtue de gris, traversait une grande rue, dans laquelle de nombreuses personnes portant la tenue verte des guérisseurs marchaient. A Surial, ils possédaient le plus rand territoire ; ils habitaient toute la partie Nord de la ville, et les agriculteurs avaient la totalité des champs pour eux. Les bâtiments où ils vivaient étaient presque tous rénovés, à l'inverse des autres clans.

   Alors qu'elle allait tourner pour se rendre dans une avenue menant au terrain neutre, un éclat familier apparut dans son champs de vision. Une touffe de cheveux dorés, tel ce qu'ils appelaient dans le passé du blé. Elle reconnaîtrait cette coupe et couleur de cheveux entre mille. Carl. Il était là, plus près d'elle qu'il ne l'avait été durant les deux dernières semaines. Ce n'était donc pas lui qui avait été aperçu, embrassant une femme d'un clan différent au sien. Des larmes de soulagement lui montant aux yeux, elle s'empressa de se diriger vers lui, après avoir vérifié qu'il était seul.

   Sentant la foule se densifier, elle accéléra, pour ne pas le perdre de vue. Essoufflée, un point de côté lui barrant l'abdomen, Veronica pensa qu'il était temps de se mettre au sport, si elle était dans l'incapacité de courir cent mètres, sans paraître avoir couru un marathon. Elle s'arrêta, lorsqu'elle le vit pénétrer dans la porte coulissante d'un immeuble, au-dessus de laquelle il était inscrit en grandes lettres vertes « HOPITAL ». Ses yeux noirs suivirent sa fine silhouette musclée, jusqu'à qu'il eut complètement disparu.

   Refoulant les larmes de rage et déception qui lui étaient montées aux yeux, elle se composa un masque neutre, persuasif. Elle allait trouver un moyen pour qu'ils discutent, au moins une dernière fois avant le départ, afin qu'il lui expliqua les raisons pour lesquelles il n'était pas présent aux réunions, ou pour lesquelles il n'avait pas tenté de reprendre contact avec elle.

   Tournant les talons, elle repartit vers le bar d'un bon bas, décidée de ne pas arriver en retard.

***

Heyyyy ! Me voici avec un nouveau chapitre ! 

Carl est de retour ! Mais on ne l'a pas vu très longtemps.

Voilà, bye !

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