7 : Un choix
Média : Gally
10/05/2226, 21h34
Oryane
"- Me fais chier, transmit Thomas.
- T'es pas obligé de jurer, le réprimanda Teresa.
- Pardon maman.
- On va bientôt pouvoir y aller, dit Oryane. Il faut juste attendre que la patrouille soit passée.
- Franchement ils abusent à vouloir nous montrer LE truc ce soir, on a bossé toute la journée sur le Labyrinthe, je suis crevée, se plaignit la brune.
- C'est sûr que concevoir ce fichu ciel artificiel détruit nos neurones.
- Moi je suis contente qu'ils nous le montrent enfin. C'est pour ça que Sam est venu nous chercher pour la première fois il y a neuf mois. Ça veut dire qu'ils nous font confiance.
- Parce qu'ils ne savent pas la vérité."
Thomas avait toujours tendance à gâcher l'ambiance. Ils se turent.
Au bout d'une quarantaine de minutes, Oryane n'en pouvait plus de se retourner encore et encore dans son lit.
- C'est bon.
Elle jeta ses draps et se leva, retirant son pyjama à la hâte pour révéler ses vêtements. Elle avait pris l'habitude de se préparer le soir avant de se coucher, pour éviter de perdre un temps précieux à s'habiller.
Effectuant à la perfection sa routine bien huilée, elle se glissa près de sa porte et l'ouvrit lentement. Il n'y eut aucun grincement. Elle se dirigea à pas de loup vers le bout du couloir, où Thomas et Teresa l'attendaient, aux aguets. Ils se mirent en route vers leur QG.
Mais survint alors quelque chose qui n'était pas habituel.
Un couinement.
Ils se transformèrent en statues de sel.
Puis ils entendirent un léger bruit de sanglots, et un ricanement.
"- T'as peur, gros lard ?
- Laisse-moi... Je t'ai rien fait..."
C'était des voix d'enfant. Qui n'étaient pas celles de leurs amis.
Oryane, Teresa et Thomas échangèrent un regard lourd avant de se rapprocher.
Ici à l'angle du couloir, un garçon de onze ou douze ans avait acculé un petit de six ans aux joues rondes, barbouillées de larmes.
"- Tu sais qui c'est mon père ? susurra le grand d'une voix mielleuse. Le chancelier Anderson. Le chef de WICKED. Ce qui veut dire que j'ai le droit de tout faire.
- Pourquoi tu me fais ça ? gémit le petit. Je suis juste perdu...
- Ce qui ne serait pas arrivé si tu étais resté dans ta chambre comme un p'tit nouveau bien obéissant. Je suis en droit de sévir.
- Et pourquoi toi t'es pas dans ta chambre ?" rétorqua courageusement le brunet.
Oryane retint son souffle. Le visage de l'ado se tordit en une grimace hideuse, ce qui le défigurait. Il était plutôt joli garçon à la base, avec des bouclettes noires et un sourire captivant, bien que cruel. Mais la méchanceté qui suintait par tous ses pores le faisait plus tenir du monstre que du prince charmant.
- Tu oses me répondre ?
- Yo les gars, vous êtes là !
Les trois espions se retournèrent en quatrième vitesse, catastrophés, pour voir Alby, Minho, Sam et Kat se diriger vers eux.
- On vous voyait pas arriver, on venait vous cher...
- Ferme-la ! siffla Teresa.
Trop tard.
Le silence s'était fait de l'autre côté du mur.
Soudain, il surgit devant eux.
- Qu'avons-nous là ? murmura-t-il.
Derrière lui, toujours collé au mur, le petit leur adressa un regard suppliant.
- Des garçons, nota le brun avec mépris en faisant couler son regard sur Alby, Minho, Thomas et Samuel. Du groupe A, j'imagine.
Puis son regard se posa succinctement sur Teresa, Oryane et Kat, et un rictus haussa le coin de sa bouche.
-... et des filles.
- Andrew, lâcha Minho avec haine.
Oryane et ses deux acolytes fixèrent le dénommé Andrew avec dégoût, mais ce n'était rien par rapport à Kat et aux autres gars. La rancune brillait dans leurs yeux.
"- Kitty, souffla Andrew à Kat en souriant. Encore plus belle que dans mes souvenirs.
- Je t'ai déjà interdit de m'appeler comme ça, gronda la brune.
- Ça te va tellement bien pourtant...
- Tu t'en prends aux petits maintenant ? cracha Minho. Tu as le double de l'âge de ce gamin !
- Quoi, on n'a pas le droit de s'amuser ? Même moi, je m'ennuie dans mon immense chambre...
- C'est toi qui as refusé le dortoir commun, renifla Alby. Qu'est-ce que tu as dit à ton père déjà ? Ah oui, qu'on s'en prenait à toi à cause de ton ascendance...
- Et c'est la vérité. C'est un affront rien que de vous côtoyer. Quand je pense que j'ai supplié mon père de me mettre à la place d'Aris... Non, je me suis juste retrouvé avec 50 pauvres gars pouilleux plutôt que des jolies demoiselles... Ne le prends pas mal, Kitty."
Il fit un clin d'œil aux trois filles.
- Je n'ose même pas imaginer ce que tu aurais pu leur faire, grinça Samuel. C'est vrai que c'est tellement dur d'avoir un papa vivant et puissant en plus de ça.
- C'est sûr que pour toi ce serait le grand luxe Samuel. C'est pas toi qui vivais dans une cave avec ta sœur ? C'est pour ça que tu passes ta vie dans les conduits d'aération, les rats ça te parle."
Alby et Thomas employèrent toutes leurs forces pour empêcher le blond de se jeter sur Andrew.
- J'ai vu ta sœur il y a pas longtemps d'ailleurs. Elle est mignonne dans son genre. Faut croire que le charme a sauté une génération.
Oryane dut se retenir pour ne pas rétorquer que Samuel était le plus beau garçon qu'elle avait jamais rencontré, et elle vit Kat pincer les lèvres elle aussi.
"- Tu t'approches d'elle, je te tue, aboya le blondinet.
- C'est ça gringalet, touche un de mes cheveux et mon père te fera déraciner.
- Je trouve que t'es quand même vachement loyal envers ton papounet... lâcha sournoisement Kat. J'ai rarement croisé de père prêt à sacrifier son fils avec les autres enfants parce qu'il était Immune. Il répond à tes désirs pour se donner bonne conscience, non ? Il semblerait que le remède passe avant toi..."
Le coup bas, violent, enveloppa le groupe d'une chape de plomb. Tout le monde retint son souffle. Andrew vacilla, blêmissant, alors que passait une seconde dans ses yeux une vive douleur. Puis il reprit contenance et il se rua sur Kat.
- Ne me touche pas, ordonna simplement celle-ci.
Elle était plus jeune et petite que lui, mais son ton était si calme, ses yeux si glacés, qu'elle paraissait soudain avoir grandi. Andrew se figea.
- Plus. Jamais. articula Kat. Si tu recommences à menacer des gens on se charge tous ensemble de ton cas. Tu restes éloigné de moi et tes amis. Parce que Kitty a des griffes, et crois-moi... (Elle fit un tout petit pas vers Andrew qui bondit presque en arrière) personne ne viendra t'aider. Parce que personne ne t'aime.
Le garçon trébucha et des larmes de rage perlèrent à ses yeux.
- Vous le regretterez, chuchota-t-il. Le premier ou la première sur qui je tombe... je vous promets que vous ne l'oublierez jamais.
Puis il se retourna et prit la fuite.
Tous toisèrent sous le choc Kat, qui se détendit un peu et soupira.
"- J'aime pas menacer des gens... J'ai joué sur l'aspect de groupe, c'est lâche.
- Non... Moi je t'ai trouvée très courageuse" dit Samuel.
Il regardait Kat sans flancher, les yeux emplis d'admiration et de...
Oryane ne pouvait se résoudre à le penser.
- Oh... Bah merci, répondit Kat en piquant un fard et en perdant tout à coup sa belle assurance pour octroyer à Sam un sourire timide.
La rouquine détourna les yeux. Elle avait terriblement mal tout à coup.
- T'as géré Kat, assura Minho. Il se faisait dessus.
Alby s'approcha du petit garçon, toujours à l'écart.
- Comment tu t'appelles, petit gars ? lui demanda-t-il avec bienveillance.
- Ch... Charles, bredouilla le garçonnet, nerveux mais les yeux écarquillés de gratitude. Vous m'avez sauvé. Merci.
- De rien, on insulte pas les copains ici, assura Minho en lui donnant une accolade si forte que les genoux de Charles flageolèrent. Tu es des nôtres à présent.
Le brunet rayonnait tellement de bonheur et de reconnaissance qu'il aurait pu illuminer le bâtiment tout entier.
- Merci... merci... bredouilla-t-il. Je suis nouveau ici... alors je voulais explorer un peu. Je me suis dit que ça m'aiderait à surmonter ma peur.
Tous échangèrent un furtif regard lourd que Charles ne vit pas.
- T'inquiète mon gars, ils vont bientôt te transférer dans les baraquements avec nous. Tu verras... c'est l'éclate.
Oryane n'avait jamais entendu d'aussi gentils mensonges.
- Charles ça craint trop comme nom, décida Thomas. Nous, on t'appellera Chuck.
*******************
Une fois que Chuck eut terminé de les saouler de paroles et de remerciements, ils le ramenèrent dans sa chambre et descendirent au QG.
- Pauvre gamin, soupira Alby. Il sait pas ce qui l'attend...
- Je connaissais pas cet Andrew... s'étonna Teresa.
- Et ben comme il l'a répété à tort età travers, c'est le fils du chancelier. Il a une gigantesque chambre pour lui-seul parce qu'il supportait pas les "clochards". Mais il fait quand même partie du groupe, il a ses cours avec nous. Il est perfide, manipulateur, tricheur...
- Bref c'est un enfoiré, coupa Minho.
- Sans compter qu'il est obsédé par les filles, ajouta Samuel. Et... dans un sens qui m'effraie un peu. Que ce soit un charo c'est une chose, mais là j'ai l'impression qu'il cherche... à les rabaisser. Ça l'amuse, de les briser comme des poupées. Lizzy m'a parlé d'une fille qui s'était privée de manger pendant des semaines parce qu'il lui avait dit qu'elle n'était pas assez fine.
- Et comme je suis la seule fille du groupe il tourne autour de moi, raconta Kat. C'est terrible, parce que j'ai l'impression que si je baisse ma garde... je perdrais tout ce qu'il me reste.
- Mais je ne le laisserai pas te faire du mal. Lui, ou n'importe qui" déclara abruptement Newt, ses prunelles noires brillantes d'intensité plongées dans celles de Kat.
Tchac. Second coup de couteau dans le cœur d'Oryane.
Pourquoi avait-elle mal ? Pourquoi cela la consumait-elle intérieurement qu'ils se rapprochent de plus en plus ?
- Bon ! s'exclama soudain Thomas. Normalement on devait vous rejoindre pour que vous nous montriez un truc. Allez-y, balancez !
Les regards solennels convergèrent alors vers Minho, qui se racla la gorge.
- OK... Vous le savez, des fois on rigole, on s'imagine la vie dehors. Mais moi j'y pense vraiment. Et aujourd'hui... je crois que j'ai un plan pour qu'on s'évade pour de bon.
Un silence stupéfait retomba. Minho se tourna alors vers l'obscurité pour appeler :
- Allez viens ! Il y a que des gens cool ici.
Oryane observa avec stupéfaction un garçon sortir timidement d'un coin de la pièce. Elle ne s'était même pas rendue compte de sa présence.
Il était blond, les yeux bleus, avec des taches de rousseur et des sourcils plutôt... longs.
- Je vous présente Gally, déclara Minho. Lui et moi on s'est beaucoup rapprochés ces derniers mois. Lui aussi il veut se barrer d'ici. Et ensemble, on a un plan.
Gally offrit un sourire un peu maladroit à ses compagnons.
- Salut les gars. Ravi de vous rencontrer.
Il inspira immédiatement confiance à Oryane. Elle sentait au fond d'elle-même qu'il était un type bien.
"- Je crois je t'ai déjà remarqué, dit Samuel, songeur. Mais on est tellement nombreux que je t'ai jamais abordé, désolé.
- T'inquiète pas. Mais c'est vrai que je suis assez seul. Alors je me demandais si... si vous vouliez bien être mes amis.
- Plus on est de fous plus on rit, clama Minho.
- Ouais mec, sans souci" acquiesça Thomas.
Gally leur offrit un sourire heureux et soulagé.
"- Merci. Donc le plan... En fait, il existe bien un tunnel qui permet d'accéder à la sortie.
- Quoi ? s'étonna Alby. Mais on n'en a jamais trouvé !
- Moi si, corrigea Sam. Mais je voyais pas l'intérêt d'en parler parce qu'on se ferait tomber dessus dès qu'on pointerait la tête dehors.
- Justement, affirma Gally. Il y a une serre dans l'enceinte. Ils arrivent à faire pousser des fleurs par je sais quel miracle, et du coup j'ai eu une idée.
- Quoi, tu vas transporter Minho dans une brouette ?" railla Teresa.
Thomas ricana avant de se reprendre.
- Pardon, marmonna-t-il. J'avais l'image en tête.
Gally leva les yeux au ciel.
- Non. Mais il y a des outils, des planches de bois... Pendant des mois, j'ai construit petit à petit... un chariot.
Il laissa planer un blanc le temps que tout le monde, ahuri, digère l'info. Il ajouta :
"- Je l'ai laissé pile dans la serre, qui est à côté de l'entrée du tunnel. Si on se grouille, on peut l'atteindre avant les gardes et se casser à toute vitesse en leur faisant des grands "au revoir".
- Oui, en le poussant à bout de bras, ironisa Teresa.
- T'as fini de me prendre pour un con ? Je suis doué en bricolage et mécanique. J'y ai mis un vieux moteur, il devrait pouvoir tenir au moins cinq heures."
Oryane n'y croyait pas.
Ils avaient l'opportunité de s'évader. Une vraie opportunité.
Un instant, elle se prit à imaginer à quoi la vie pourrait ressembler.
Eux, seuls, libérés de WICKED, traçant leur vie comme ils l'entendaient, tous ensemble...
- Je vous l'avais dit : "Un jour, quand on sera plus grands, on s'enfuira loin d'ici et un matin on se réveillera tous ensemble au bord de l'océan." Je le pensais vraiment, je le pense toujours. Et on peut le faire. C'est notre chance, insista Minho, la voix tremblante.
Oryane chercha ce qu'elle pourrait perdre en quittant WICKED. Elle ne trouva que l'identité de ses parents.
Mais après tout, ils l'avaient abandonnée. À quoi bon courir après des gens qui ne voulaient pas d'elle ? Ils étaient probablement morts de toute façon.
Et maintenant, elle avait des amis. C'était eux, sa famille.
- Et si on ne veut pas partir ? demanda brusquement Teresa.
Ils tournèrent tous lentement les yeux vers elle. Elle soutint leurs regards.
"- Je suis sérieuse. Où voulez-vous aller dehors ? Ce plan est foireux.
- On pourra survivre tous ensemble, répliqua Minho. On construit un radeau, et ciao ce monde de tarés.
- Vous seriez égoïstes à ce point ? On ne tiendrait pas deux jours dehors. Alors qu'ici on est en sécurité, et en plus on peut aider les malades !
- T'es pas sérieuse ? la questionna Kat. Me dis pas que tu penses vraiment à rester ici ?
- Bien sûr que si. Je veux pas tout lâcher pour un truc qui nous perdra. C'est complètement stupide. Vous êtes sans cœur.
- Teresa... souffla Thomas.
- Réfléchis, Tom. Tu es intelligent et empathique, tu sais que j'ai raison.
- Je t'ai jamais aimée de toute façon" grogna Minho.
Teresa tourna un regard implorant vers Oryane.
- Je t'en prie Ory... Dis-leur qu'ils se trompent !
La rouquine se mit à trembler, mais elle tint bon.
- Je suis désolée Teresa... mais je ne peux plus vivre comme ça.
Le visage de la brune s'affaissa alors qu'elle contemplait ces visages hostiles.
- J'espère que vous vous rendrez compte de votre erreur, déclara-t-elle d'une voix lourde en se dirigeant vers la porte.
Elle quitta la pièce.
"- Elle va pas cafter ? s'enquit Sam.
- Elle est pas comme ça" leur assura Thomas.
Oryane se sentait coupable. Comment pouvait-elle laisser sa plus proche amie derrière elle ? Mais c'était son choix. Elle ne déciderait pas pour elle.
- OK, déclara Gally. Si tout le monde est d'accord, je crois qu'on peut y aller.
Si on avait dit à Oryane qu'en une soirée elle allait quitter WICKED, elle ne l'aurait pas cru. Elle fut tout à coup pleine d'excitation. Les choses prenaient un nouveau tournant.
- Et Chuck ? dit Thomas.
Minho hésita longuement avant de secouer la tête.
- On a pas le temps, dit-il, la voix rauque.
Ils se glissèrent dans les conduits. Gally les menait habilement, durant un bon quart d'heure. La lueur de la lune luit soudain devant eux et Oryane retint sa respiration en se rendant compte qu'elle allait mettre les pieds dehors pour la première fois de sa vie.
Gally abaissa cérémonieusement la grille et un vent chaud s'engouffra dans le passage.
Puis on les empoigna brutalement et ils furent jetés dehors. Ils relevèrent la tête, stupéfaits, et surent alors que tous leurs beaux rêves venaient d'éclater en morceaux.
Cinq gardes imposants se tenaient devant eux, accompagnés de Mr. Ramirez, le chef de la sécurité.
Ils étaient pris.
Ils savaient. Oryane ignorait comment, mais ils savaient.
Et tout était fichu.
- Vous n'avez rien à faire ici, dit doucement le chef des gardes. Vous êtes d'horribles gosses ingrats. Vous ne partirez pas d'ici.
Il parlait d'un ton détaché, mais ses yeux flamboyaient d'une telle rage que tous se ratatinèrent, stupéfaits de tout ce qui se passait en si peu de temps.
- Celui-ci n'est pas immunisé, dit l'homme, les narines frémissantes, en montrant Samuel du doigt. Ramenez-le immédiatement à l'intérieur, testez-le, et mettez-le à l'isolement.
Il se tourna vers les autres.
- Il est temps de vous donner une petite leçon et vous montrer que le monde ne tourne pas autour de vous, et que vous êtes des petits chanceux d'avoir ce que vous avez. On vous a laissé jouer assez longtemps. Vous allez être punis.
Il se redressa et ordonna :
- Emmenez-les à la fosse aux Fondus.
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