6 : WICKED is good

"- On n'a aucune preuve. Pourquoi devrions-nous vous faire confiance ?

Oryane se sentit ployer sous le regard accusateur de Minho. À côté d'elle, Thomas n'avait pas l'air franchement à l'aise non plus. Teresa, elle, leva les yeux au ciel.

"- On ne fait rien de dangereux, Minho. C'est quand même pas notre faute si WICKED s'intéresse à nous !

- Peut-être, mais vous travaillez avec eux maintenant, éructa Alby. Ces gens préparent un sale coup, et vous refusez de nous en avertir !"

Thomas soupira.

"- Il n'y a rien à dire. On a pas le droit d'en parler.

- Et bien vous devriez, rétorqua Samuel. On est entre nous ici. WICKED nous a enlevé à nos parents, ils ont même tué les miens ! Je dois faire l'impossible pour voir ma soeur. Vous n'avez pas le droit de faire copain avec eux."

- Newt...

- Samuel, insista-t-il en foudroyant Teresa du regard.

Il posa ses yeux sur Oryane. Celle-ci se mordit les lèvres avant d'avouer :

"- Nous non plus, on sait même pas sur quoi on travaille.

- Oryane ! s'emporta Teresa.

- Quoi ? C'est la stricte vérité. On nous a mis devant des écrans pour élaborer des casse-têtes, mais on sait même pas à quoi ça va nous servir.

- Peu importe, c'est forcément pas bon, maugréa Alby.

- De toute façon, je maintiens ce que j'ai dit, déclara Minho. Dès que je trouve un moyen, je me barre d'ici. Leur "WICKED is good", ils peuvent se le foutre là où je pense.

- Amen mon frère, acquiesça Samuel. Maintenant, allons voir ma soeur."

Tous échangèrent un regard, mais il ne fallait jamais discuter avec Samuel quand il s'agissait de Lizzy."

Oryane se redressa brusquement dans son lit.

Le cerveau encore embrumé, elle tenta de se rappeler son rêve. Hélas, comme d'habitude, seul le fameux "WICKED is good" planait dans sa mémoire. Cela allait faire plusieurs semaines qu'elle avait des réminiscences sans s'en souvenir au réveil.

Oryane soupira et se ré-enfouit sous le drap. Elle y réfléchirait demain.

********

- Et comment va ma rouquine préférée ?

Contre toute attente, Minho et Oryane s'étaient incroyablement bien entendus. Ils étaient devenus meilleurs potes, se connaissant limite comme des frères et soeurs, et passaient leur temps à se taquiner mutuellement.

"- Ca va, et toi ?

- Encore une journée à runner pour rien, on aime."

Une idée germa soudain dans la tête d'Oryane.

"- Minho, est-ce que tu as déjà vu... je sais pas moi, des affiches ou des trucs de ce genre dans le Labyrinthe ?

- Pour ça, s'esclaffa Minho. Il y a des écritures sur certains murs, un mot chelou... WICKED je crois."

Le coeur de la jeune fille s'arrêta.

"- Tu sais ce que ça veut dire ?

- C'est marqué en dessous... Écoute, je vérifie et je te dis ça ce soir OK ?

- Merci beaucoup !

- Pourquoi tu t'y intéresses ?

- Euuuuh..."

L'arrivée de Newt provoqua une distraction bienvenue. Il avait encore un air ensommeillé sur le visage, ce qui le rendait encore plus mignon que d'habitude. En s'approchant, il fit grise mine.

"- Eh mec, l'accueillit Minho, avec une grande tape dans le dos. T'as l'air déprimé comme Oryane devant une brosse à cheveux, ça va ?

- Va te faire foutre" marmonna l'adolescente.

Pour sa défense, il était facile pour Minho de se moquer de ses boucles en bordel, il n'y avait PAS de brosse à cheveux au Bloc. Logique, tout le monde avait les cheveux courts. Et même décoiffés, Oryane était la seule à ressembler à un singe.

"- Je vois que tu es déjà là, marmonna Newt sans regarder Oryane.

- Oui, pourquoi ?

- Je suis venu te réveiller ce matin, mais t'étais pas là. Mais en fait, t'étais déjà en bonne compagnie.

- Mec....

- C'est bon Minho, je vais y aller."

Newt, ses yeux noirs coléreux, se retourna pour s'éloigner. Oryane le regarda partir avec sa patte folle et sentit son coeur se serrer.

Minho émit un long sifflement.

- Notre blondinet nous fait une crise de jalousie...

- Tu crois ?

- Je t'avais dit qu'il flashait sur toi lui aussi."

Oryane se maudit intérieurement d'avoir révélé ses sentiments pour Newt à l'asiatique. Il était devenu encore plus chiant.

"- Tu sais très bien que ce n'est pas le moment d'être en couple avec ce que l'on vit et que....

- Oui je sais, l'interrompit Minho. Tu sais que si tu te fais friendzoner, votre relation ne sera plus jamais la même et gna gna gna, et c'est la dernière chose que tu souhaites... Mais sérieusement ma grande, il est intéressé moi je te le dis. Tu comptes attendre qu'une autre meuf débarque et mette le grappin dessus ?

- On est déja suffisamment dans la merde au quotidien, sans rajouter un couple en plus.

- T'as pas tort. Mais tu sais que j'ai aussi raison. J'ai beau tout faire pour vous rapprocher et être le supporter n°1 du Newtyane....

- Le Newtyane ?

- Votre nom de ship. C'est mignon hein ?

- Nan mais ferme ta gueule, ce sera mieux."

Minho ricana avant d'entrer dans le Labyrinthe avec un "À ce soir, rouquine !"

Des fois, elle détestait vraiment son meilleur ami.

********

"- Euh, l'aspirine ne se range pas là.

- Quoi... ? Ah oui..."

Jeff et Clint échangèrent un regard mais ne firent aucun commentaire. La jeune fille avait été distraite toute la journée.

Elle avait tenté de parler à Newt, mais celui-ci passait son temps soit à la fuir, soit à la rembarrer sèchement.

"Minho n'a pas raison quand même ? Il n'est pas... jaloux ?"

Non, elle se faisait des idées. Newt était simplement de mauvais poil, et ne pas effectuer leur rituel quotidien en réveillant Oryane avait aggravé son humeur, c'est tout.

La jeune fille soupira en posant son front moite de sueur sur le bois frais de l'étagère à médicaments. Tout cela ne lui disait pas comment se réconcilier avec....

Des hurlements retentirent dehors.

Jeff, Clint et Oryane sortirent en quatrième vitesse.

Il y avait un attroupement devant le Labyrinthe, des gars paniqués penchés sur quelque chose... ou quelqu'un ?

Newt boitilla le plus vite possible vers les Medjacks.

- Venez, vite !

Ils se précipitèrent vers le rassemblement, bousculant sans ménagement tous ceux sur leur passage.

- DÉGAGEZ, TOCARDS ! hurla Oryane.

Tout le monde s'écarta aussitôt, révélant Minho agenouillé au sol. Il tenait dans ses bras Ben, un coureur blond. Celui-ci paraissait vraiment mal en point : il était rouge de transpiration, les yeux roulant dans ses orbites, et se débattant comme un fou en hurlant d'un air enragé. Son T-shirt était relevé. Sur son ventre, Oryane aperçut un réseau de veines noires se diffusant par un énorme trou sombre béant au dessus du nombril.

Clint expira un souffle tremblant.

- Il s'est fait piquer.

*********

Oryane contempla avec circonspection la seringue de liquide bleu qu'elle tenait dans les mains. Ce sérum allait déclencher la Transformation chez Ben.

- Je peux le faire si tu veux.

La rousse secoua la tête, déclinant la proposition de Clint.

- C'est bon, t'inquiète.

Elle se retourna et d'un geste vif, enfonça l'aiguille dans le bras de Ben, avant de presser le piston.

L'effet fut immédiat. Le garçon cessa brusquement de bouger et ferma les yeux, sa respiration se calmant peu à peu. Le silence retomba sur la cabane.

"- Et c'est parti pour 3 jours où il va gueuler sa race, déclara Alby, lugubre.

- Vraiment ? Il est tout calme pourtant...

- Pour le moment tocarde. Mais celui qui va dormir ici va passer une sale nuit."

Les deux Medjacks jetèrent un regard gêné à Oryane. Le message était équivoque. L'adolescente soupira :

- Bon d'accord, c'est moi qui resterais ici.

- Dégonflés, marmonna Newt dans son dos.

À présent qu'ils avaient paré l'urgence, tous sortirent pour répondre aux questions des Blocards ou reprendre leurs activités. Oryane agrippa Minho par le bras avant qu'il ne quitte la hutte.

"- Attends. Il s'est passé quoi avec Ben ?

- J'en sais foutrement rien. Chaque coureur s'occupe de sa section. J'étais à côté, je l'ai entendu hurler, et quand je suis arrivé, il était par terre dans un sale état, et le Griffeur s'était déjà cassé. On a dû s'y mettre à cinq pour le maîtriser et le ramener."

Oryane réfléchit un instant avant de demander :

"- Tu as pu trouver pour WICKED ?

- Ouep !"

Minho sourit fièrement.

- Ça veut dire "World In Catastrophe : Killzone Experiment Department."

"Monde Sinistré : Département Experience de la Zone Mortelle."

"- Monde sinistré... répéta Oryane. Tu crois que dehors, le monde est en guerre ?

- Aucune idée. J'étais plus inquiété par "expérience" et "zone mortelle", tu vois, ironisa Minho.

- Tu penses qu'on est ici dans le cadre d'une expérience et que la Zone Mortelle est le Labyrinthe ?

- J'en suis même sûr. Mais le problème tu vois, c'est que même en Troisième Guerre Mondiale, ça m'étonnerait beaucoup que j'ai signé pour faire partie de ce truc tout en me faisant effacer la mémoire.

- Si la situation dehors est vraiment catastrophique...

- Oh, je pense qu'ici on attend le même niveau d'horreur qu'à l'extérieur. C'est pas pire, mais c'est loin d'être mieux."

Minho observa Oryane avec attention.

"- Tu n'as pas répondu à ma question ce matin. Pourquoi tu t'intéresses à WICKED comme ça ?

- Oh et bien... J'essaie juste de comprendre comment on est arrivés ici."

Excuse très moyenne. Bien que méfiant, Minho parut s'en contenter.

- Allez, viens prendre l'air.

Il saisit Oryane par la main et l'entraîna dehors.

Tous les deux ignoraient qu'un certain blondinet avaient observé de loin leur proximité d'un air sombre.

*********

Ce fut un râle qui tira Oryane du sommeil.

Surprise, elle se redressa sur la chaise sur laquelle elle s'était assoupie. Tout était calme, dans la cabane des Medjacks comme dans le Bloc. Tout le monde dormait.

De nouveau, un râle. Oryane se tourna vers Ben.

Allongé dans son lit, celui-ci poussa encore une plainte gutturale. La jeune fille s'agenouilla à son chevet. Le front du coureur était trempé de sueur, et sa main prise de tremblements frénétiques. Soucieuse, Oryane posa sa main sur sa tempe pour évaluer sa chaleur corporelle.

Les yeux de Ben s'ouvrirent tout à coup, et il saisit le bras d'Oryane, le serrant à mort, en lâchant un sifflement animal.

Ce contact brusque réveilla de terribles souvenirs en Oryane.

"On va jouer un peu toi et moi."

Elle se mit à crier, et à tenter d'arracher son bras, mais Ben avait une poigne plus que solide. Il la contempla, les yeux révulsés, les veines saillant sur son front. Puis son regard s'alluma d'une fureur bestiale, et il se mit à hurler :

"- Toi... TOUT EST DE TA FAUTE !

- ARRÊTE !!"

Oryane entendit un bruit de course, un choc sourd, et le poignet de Ben se relâcha.

Stupéfaite et tremblante, Oryane releva le regard vers Newt, qui avait décoché un coup de poing dans la joue au garcon.

"- Calme-toi mec ! siffla-t-il en retenant fermement le blond.

- Tout est de sa faute, répéta Ben, les yeux écarquillés. Sa faute, sa faute, sa faute...

Il se recroquevilla sur lui-même, comme en transe, en continuant de murmurer en boucle "sa faute, sa faute, sa faute..."

Et il retomba soudain endormi.

Newt aida Oryane à se relever, inquiet.

"- Ca va ?

- Ou... Oui..."

Newt ne savait que trop bien ce à quoi la jeune fille pensait. Il pressa ses mains dans les siennes.

"- Je t'avais dit que la Transformation pouvait être violente. Heureusement que je t'ai entendu crier, ils ronflent tous dans le coin.

- Oui mais... Je ne m'attendais pas à ça."

La jeune fille soupira.

"- Quoi qu'il ait vu, je suis dedans. Et apparemment...

- Tout est de ta faute, termina Newt.

- Tu penses que c'est vraiment le cas ?"

Entre Gally, Ben et ses rêves, elle commençait sérieusement à flipper sur ses potentielles actions passées.

Elle aurait voulu que Newt la réconforte, lui assure que c'était impossible qu'elle y soit pour quelque chose. Mais le blondinet se contenta de souffler :

- Je ne sais pas.

Les deux adolescents se dévisagèrent un instant. Perdue dans la douce noirceur de ses yeux, Oryane eut tout à coup envie de tout lui révéler. Mais elle avait trop peur de sa réaction. Et s'il s'éloignait d'elle, car il la tenait pour responsable lui aussi ? Elle ne voulait pas le mettre en danger. Elle avait déjà commencé à inclure Minho dans l'histoire.

Newt lui sourit.

- Tu devrais essayer de dormir.

Le geste était clair : il ne lui faisait plus la tête. Et Oryane lui en voulut.

Car c'était la preuve qu'il était trop parfait.

Elle ne le méritait pas.

*********

- Aïe, putain !

Pour la quatrième fois de la journée, Oryane s'était donné un coup de bêche dans la jambe.

"- Heureusement que tu n'es pas devenue sarcleuse en fait, ricana Newt. Dans un jardin, tu es une catastrophe ambulante.

- La bêche veut pas coopérer.

- T'as raison, inculpe la bêche."

Oryane lui tira la langue pour toute réponse, et Newt rit.

- Allez, on va se faire engueuler sinon.

Ben n'avait pas refait de crise depuis hier soir. Comme Jeff et Clint veillaient sur lui, Oryane s'était dit qu'elle allait se rendre utile au potager, parce que c'est important pour la santé les légumes quand même, (et plus encore passer du temps avec Newt...)

Aucun des deux n'avait mentionné l'incident de la veille, quand aux Blocards, ils avaient l'habitude des pétages de plombs dus à la Transformation.

- Fais gaffe, tu écrases les carottes.

Oryane dégagea son pied avec une grimace d'excuse. Newt saisit dans son dos son couteau (Oryane avait été très soulagée quand elle avait compris qu'il ne l'utilisait pas pour perpétrer des meurtres en série), et trancha le lierre un peu trop envahissant qui poussait sur les serres de bois.

Il avait retiré sa chemise blanche crasseuse à cause de la chaleur et l'avait nouée autour de sa taille. Son débardeur orangé laissait donc voir à la perfection ses bras à la fois fins et musclés.

"Il est tellement sexy..."

Oryane, adossée rêveusement sur sur sa bêche en contemplant le jeune homme mine de rien, trébucha quand une alarme stridente retentit soudain dans tout le Bloc, se retenant de justesse aux tuteurs en bambou.

- Qu'est-ce que...

La sirène lui rappelait vaguement quelque chose.

Le visage de Newt s'éclaircit d'un sourire.

"- J'avais oublié que ça faisait déjà un mois que tu étais ici.

- Et donc ? C'est quoi ce boucan ?

- Ça, Oryane, c'est la Boîte.

- Mais elle fait pas de bruit d'habitude...

- Parce qu'elle n'apporte pas que des provisions."

Newt lâcha son râteau pour se diriger vers la Boite, où tout le monde se précipitait déjà.

- C'est au tour d'un nouveau bleu de débarquer ici.








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