Chapitre 3 - voler hors de sa cage

Le monde avait semblait se mouvoir au ralenti autour de moi. Après cette annonce qui avait résonné telle une sentence à mes oreilles, je n'ai que su dire. Ça y était. Ce jour tant redoutait était arrivé. Il les avait prononcé, ces fameux mots et l'horloge de mon existence semblait, depuis, avoir cessé.
Je suis restée coite dans ce salon, la joue en feu aussi douloureuse que la morsure de mon cœur brisé. Ma mère m'a guidé telle une automate, pour prendre ma place à cette table. Au fond, je m'y attendais, je savais que ce jour viendrait, mais je n'avais pas imaginé que se retrouver face à sa fatalité était autant douloureux. Mon destin m'a attrapé par la gorge, sans douceur ni empathie et a serré si fort que lorsque le repas, suivant cette annonce s'est déroulé, je suis restée prostré dans le silence, avec la vision de la mort en voisine de table. Je pouvais sentir sa main sur la mienne et je n'ai pu m'empêcher de penser qu'elle, au moins avait l'air tendre.
La scène était absurde, mon géniteur avait balayé notre altercation d'un revers de main et rejoint ses acolytes pour leur partager, autour d'un bon repas, la nouvelle. Il s'exclamait à l'idée d'un grand mariage, d'une alliance nouvelle qui lui permettrait de rester un parrain puissant, tout en garantissant de nouveaux postes juteux à ses collaborateurs.
Arthur avait levé son verre puis mon père avait enchaîné sur le trafic de prostitution qui s'essoufflait et qu'il ne manquerait pas de redresser avec mon futur beau père.

Cléo a grimacé aux mots de notre père tandis que Zéna a pouffé vers son mari avec un petit « enfin, ça va lui rabattre son clapet »
Pour tous, cela semblait être une aubaine.
Les affaires de mon père marchait bien mais il lui fallait réaffirmer sa position.
L'année dernière, il s'est dégoté un poste de sénateur afin de s'attirer les bonnes grâce de nos dirigeants. En début d'année, une autre famille mafieuse a gagné en puissance après avoir mis la main sur une usine d'armes au Mexique, qui leur permettait d'accroître leur commerces illégal d'un pays à l'autre. Un gros coup qui a fait doubler leur bénéfices et prolouser leur nom comme une des nouvelles références dans le monde mafieux. Notre père a enragé, les murs de la maison ont presque failli trembler ce jour là. Il avait déjà un ennemi juré à abattre : la famille Samaras.
Malgré ses informateurs, mon père ne sait rien de plus d'eux que leur nom de famille et leur signature, un logo en forme de flèche. Ce sont des ombres redoutables et opulentes qui ne cessent de lui mettre des bâtons dans les roues. Encore le mois dernier, ils ont fait exploser le navire, commanditait par mon père, qui devait livrer une nouvelle cargaison de drogue. Il attendait ce stock comme le graal, nous ventant la qualité. Mais ils ont fait couler l'affaire, sans mauvais jeu de mot et personne ne sait comment ils ont su. S'en ait suivit une longue traque dans nos rangs, Vladimir Vlachos convaincu qu'on l'avait trahis. Je ne sais combien de tête il a fait tomber pour cela, mais sûrement beaucoup trop...
Mon père ne pouvait donc pas se permettre d'avoir un nouvel ennemi, il a rapidement créé des liens avec cette nouvelle famille, qui avait le mérite d'afficher clairement ces membres, tout droit émigrée d'Italie : Les De Luca. Et cela tombait bien, il avait un fils à marier.
Fraîchement trentenaire, formé dès son plus jeune âge, à la tête du réseau tout en étant investisseur à côté, ce qui lui permet de blanchir l'argent du business de son père, il a tout du gendre idéal pour mon paternel.
Notre union scellée, je deviendrais la future femme du parrain de la famille De Luca et cela permettrait à mon père, grâce a mon utérus, de continuer à proliférer son sang et sa chair pour s'enrichir en écartant le danger.
Ce qu'il ne sait pas, c'est que j'ai entendu Cléo murmurait, un soir, qu'il était redoutable. Pourquoi avait-elle posé ces mots, elle si indulgente envers ce milieu ? Je ne sais pas. Et je n'ai aucune envie de le découvrir.

Les paroles du dîner ont défilé dans mes oreilles en résonnant contre les parois morte de mon cœur, mes tympans vibrant, je n'ai rien pu entendre. Une seule pensée tournait : s'enfuir ou périr.
C'était le moment, ma dernière carte à abattre et tant pis pour mon téléphone.
Je n'avais plus le choix, je devais tenter le coup.

J'ai alors fait profil bas, les lèvres pincées, quoi que je puisse dire n'aurait rien changé, mon père avait cet air si fier et déterminée que toutes tentatives aurait finies en drame. Je l'ai assassiné un nombre incalculable de fois dans mon esprit. Je devais agir dans le silence afin d'éviter un nouveau monstre à qui je serais liée à vie.

Les yeux finalement meurtris à force d'avoir trop pleuré, j'abandonne la résignation dans le placard de ma chambre à mesure que je fourre tout un tas de vêtement dans un grand sac à dos. La main tremblante, milles questions absurdes me traversent. Aurais-je besoin de vêtements chauds ? Quelle paire chaussure serait nécessaire ?
Un tas d'interrogation qui se résume à une seule optique : fuir.
Et le plus vite possible.
L'organe dans ma poitrine quasi mort parvient cependant, en me surprenant, à battre dans un rythme effréné.
La maison est bien silencieuse en cette nuit, les effusions de ce midi que mon père pense tassé semblent bien loin et enfuit dans les tréfonds de ce manoir.
Mon silence du dîner l'a ravit, je lui ai semblé finalement docile, comme s'il avait enfin trouvé la solution pour me dompter.
La latte du plancher de ma chambre que je fais sauter démontre tout le contraire.
J'ai pris soin de cacher la petite caméra qu'abrite ce traitre de Botticelli afin que ma fuite ne soit pas filmée.
Mon père nous fait suffisamment confiance pour ne pas poster un homme toute la nuit devant les écrans de surveillance, demain matin, lorsqu'ils découvriront mon lit vide, j'aurais gagné un peu de temps. Du moins je l'espère.
Sous la lumière de ma lampe de chevet, mon parquet révèle une petite cachette dans laquelle repose une boîte à musique, symbole de l'innocence que je n'ai jamais voulu quitter.
À l'intérieur, toutes les économies que j'ai pu garder s'y trouve, il n'y a pas grand chose, juste de quoi prendre quelques billets de bus et si j'ai de la chance peut être d'un train.
Je glisse précautionneusement ces précieuses pièces dans la poche de mon jean et leur tintement entre elles sonne le commencement de, ce que je l'espère, être ma liberté.

- Il ne me reste plus qu'à passer par la fenêtre, je murmure pour me donner du courage.

Un moindre pas.
Les lattes s'enclenchent entre elles et je prends une profonde inspiration pour calmer l'ivresse de l'adrénaline.
Je ne parviendrais à rien si je me laisse emporter par l'émotion...
Mais au fond, n'est ce pas la seule chose qu'il me reste ?
J'éteins rapidement la petite lumière et vérifie que mon sac à dos est bien en place sur mes épaules avant d'ouvrir en grand ma fenêtre.
Chaque grincement du bois me paraît faire un bruit capable de réveiller la maisonnée.
J'ai l'impression qu'à tout instant, mon père pourrait fracasser la porte de ma chambre et ruiner mon plan.
Alors sans plus réfléchir, j'enjambe le pourtour.
L'air frais de la nuit m'accueille et caresse mes joues où les larmes ont trop coulée avec tendresse.
Sous ce ciel noir, avec les étoiles comme témoins, j'entreprends une longue descente le long du mur.
Cette bâtisse a le mérite d'avoir gardé ses pierres anciennes, s'étant effritées par endroit avec le temps, les prises bien que peu sûres sont parfois évidentes. Je l'ai déjà fais, c'est presque un jeu d'enfant.
Mes paumes s'égratignent alors que mes pieds s'enfoncent dans la pierre. Je dois avancer vite, la moindre hésitation et la pierre pourrait s'effriter, me faisant chuter ainsi de plusieurs mètres. Mes ongles raclent et s'enfoncent dans la pierre, ils s'y cassent parfois alors que la pulpe de mes doigts s'abîme à mesure que je descends. Lentement.
Je m'autorise à respirer de nouveau lorsque mon pied droit finit par se poser sur le rebord d'une des fenêtres du rez-de-chaussée.

J'y suis !

J'atterris dans l'herbe fraîchement coupée, un sourire depuis longtemps éteins se permet d'éclater sur mes lèvres et mes poumons se gonflent entièrement. Un sanglot de joie pourrait m'échapper si ma gorge n'était pas aussi serrée, je me contente alors d'un petit rire nerveux en prenant le temps de fermer les yeux et d'écouter les bruits alentours. Il ne semble pas y avoir de mouvement, je perçois uniquement le bruissement des feuilles des grands arbres.
Je suis à l'extérieur.
Enfin.
Mes lèvres s'entre-ouvrent alors que je laisse l'air me caresser, mes cheveux volettent et je n'ai jamais autant apprécié ce taquinement qu'à cet instant.
Je fige ma réussite dans mon esprit, les mains moites en pensant que, finalement, ma vraie vie commence ici.
Mes jambes me portent à peine sous l'adrénaline, je pourrais pleurer de joie si il me restait des larmes.
Mais c'est trop tôt.
Tout ne fait que commencer.
Je fais un dernier effort pour me remettre en mouvement, le buste courbé, je trottine vers l'avant de la maison.
Il me reste le grand portail à passer et son ascension risque d'être plus délicate.
Les mains fermement accrochées aux lanières de mon sac, je jette un dernier coup d'œil à cette maison de l'horreur qui n'est pas parvenue à me briser totalement. Un dernier filament d'espoir vit en moi, celui que j'ai chéri tout ce temps et que les coups n'ont pas réussi à atteindre. Il se réveille et m'inonde de sa puissance en me susurrant.

Tu peux le faire Psyché.

Un dernier regard dans un flot de souvenir et...

Je me fige. Mon cœur chute dans mes talons et mon souffle se coupe.
Il y a quelqu'un.
Sur le perron, une silhouette se détache dans l'obscurité avec ce qui semble être, une cigarette fumante entre les doigts.
Le néon du bout de la rue me permet à peine de la distinguer.
Pourtant, je reconnaîtrais ces longues jambes entre mille et ces courbes élancées.
Cléo...

Merde, merde. Merde...

Mon regard doit peser lourd sur elle puisqu'elle finit par redresser le menton et cracher la fumée de sa cigarette dans ma direction.
Je suis incapable de tout mouvement, elle me voit elle aussi et je sais que je suis foutue.
Elle ne lui ai pas entièrement dévouée mais elle soutient la cause.
Quel destin cruel bordel, me laisser le droit de respirer une fraction de seconde la liberté pour au final me l'arracher aussi tragiquement.

- Psyché ? Elle murmure.

Pourtant j'ai l'impression qu'elle le crit.
Ça semble avoir les mêmes conséquences à mes oreilles.
Elle m'a vue.
C'est injuste, la némésis ne s'acharne que sur les innocents. Pourquoi ?
En un rien de temps, je sais que je serais de retour dans cette maison, avec un peu de chance, elle m'ordonnera de me recoucher sans parler de mon escapade à notre père...
Dans le pire des cas, mon corps se teintera une nouvelle fois de bleu.

Elle écrase sa cigarette de la pointe de son talon avant de me rejoindre en de grandes enjambées.
Je suis foutue.
Elle devine non sans mal, désormais tout près de moi, mon sac et il ne doit pas lui falloir bien longtemps pour comprendre mon projet.
Mes mains se crispent à en faire blanchir les jointures, mes ongles abîmés par mon escalade se plantent dans ma paume à m'en faire mal. Elle pourrait facilement attraper mon poignet pour me tirer à l'intérieur.
Que devrais-je faire alors ? Me battre contre elle ?
Je n'ai aucune notion de combat, c'est ce qui arrive quand on vous élève pour devenir une princesse docile.
On tente de rendre vos pensées stériles et on vous laisse sans arme pour vous défendre.
Parce qu'un homme le fera toujours mieux que vous.
Foutaise.

Mon corps se met à trembler, j'essaye de me souvenir des techniques de combat que j'ai vu dans des films mais cela me semble bien ridicule. Je suis certaines qu'à cet instant, mes yeux sont tellement écarquillés qu'ils doivent paraître exorbités. Au loin, un hululement de chouette sonne le glas de ma défaite, tandis que la frustration me gagne.
Ça ne peut pas se finir comme ça. Pas avec elle.

Cléo ne dit rien, me laissant baigner dans un silence pesant, sa sentence prête à me trancher la gorge. Je fixe ma sœur aînée, celle qui tient dans le creux de ses paumes mon destin.
Finalement, elle tend la main vers moi comme je l'avais redouté.
Son mariage est sacré, elle ne comprend pas pourquoi je refuse le mien.

« Mais il nous permet d'être heureuses en fin de compte ! »

Mais elle ne prend pas mon poignet.
Sa main délicate se pose sur mon épaule et avant que je n'ai pu protester, elle me tire contre elle. Ses bras s'enroulent autour de mes épaules et mon nez se retrouve dans son cou.

- Psyché...

Une étreinte bien plus vraie que ma mère ne le pourrait.
Mes bras à moi restent en suspend, je ne sais sur quel pied danser.
Elle dépose un baiser sur le sommet de la tête et me berce un instant contre elle. Je sens son cœur battre contre moi, dans un rythme bien trop agité.
Elle a comprit, pourquoi ne me crit elle pas dessus ?

Je suis incapable de prononcer ne serait-ce qu'un mot, ses cheveux chatouillent mon nez et je ne parviens pas à savourer cette tendresse.
Elle finit par me repousser à bout de bras, j'ai la stupeur de remarquer, sous la faible lumière, quelque chose miroiter sur sa joue, une traînée qui s'étend jusqu'à ses lèvres, miroitante.

- Fuis ma sœur chérie, elle susurre, part le plus loin possible.

Mon cœur s'arrête.

- Cléo...

Je ne comprends pas. Que se passe-t-il ?
Elle attrape ma main et y glisse sa paume. Mais ce n'est pas pour me traîner vers la maison, non, elle m'entraîne vers le haut portail.

- Je ne t'ai pas vu, elle me rassure, la voix imprégnée d'un sentiment d'urgence, mais tu dois faire vite.

Je l'observe, prostrée dans le silence, le cerveau au ralentit tant la scène est peu croyable, fouiller dans la poche de son bas de pyjama en soie.

- J'ai les clefs, part sans te retourner.

Je ne pensais plus être capable de pleurer, pourtant, les larmes roulent face à ce retournement de situation.
Elle qui semblait si dévouée, si conquise par ce mode de vie.
Mon promis doit être plus terrible que je ne pourrais l'imaginer pour qu'elle se décide à m'aider.
Quelques soient ses motivations, elle est un ange tombé du ciel à cet instant. Ma protectrice de l'ombre. Petite, c'était vers elle que je me tournais pour me défendre. Elle pestait à mes côtés sur les camarades qui m'embêtaient à l'école. Tard la nuit, ces dans son lit que je me réfugiais lorsque je ne pouvais plus supporter les cauchemars. Le temps et nos espoirs nous ont séparé mais il semblerait que l'amour, lui, n'est jamais diminué.

Le portail s'ouvre sans rechigner et ma sœur m'offre ma dernière porte de sortie.
La rue passante est déserte, j'y suis le seul chat désespéré.
L'espoir enfle en moi et fait battre le sang fort dans mes oreilles. Les jambes flageolantes, je ne peux m'empêcher de la serrer une dernière fois dans mes bras. Longuement. Perdant sûrement de précieuses minutes. Mais à cet instant, elles valent le coup.
Mes mains l'agrippent et j'espère lui transmettre toute ma gratitude.

- Merci Cléo, merci...

Je pleure dans son cou et j'aimerais que le temps s'arrête juste pour pouvoir savourer comme il se doit ce rare instant.

- Tu as toujours été la plus courageuse, elle me complimente. Ta vie t'appartient. Ensemble rien ne nous brise.

Ce dicton prend une nouvelle tonalité et dans sa bouche, je jure d'y trouver une nouvelle saveur.
Peut être voit elle en moi la rébellion qu'elle n'a jamais pu achevé, peut être m'a-t-elle transmit ses espoirs.
Elle me laisse partir après m'avoir couverte de baisers.

- Je t'aime Cléo.

J'ai du mal à lâcher sa main, j'aimerais qu'elle vienne avec moi, qu'elle me guide dans cette vie que je ne connais pas. Alors, sa vision refermant le portail derrière moi est de loin la plus douloureuse. Je pars mais elle, reste prisonnière de ce monde.
Perdue depuis bien longtemps.
Un pâle sourire éclôt sur ses lèvres et sans m'adresser un mot de plus, elle tourne les talons.
Je m'assure, en observant les fenêtres, qu'aucune lumière ne se soit allumée à l'intérieur et je la suis du regard alors qu'elle disparaît dans cet endroit où j'espère ne plus remettre les pieds.
Elle m'a sauvé.
Cléo a été ma rédemption.
Et dieu que je peine à respirer.

Je dois faire vite, c'est ce qu'elle m'a conseillé, pourtant je reste un moment à observer la porte close de notre chez nous, là où elle a disparu.
C'est atrocement douloureux de se détourner alors je recule sur le trottoir.
Je manque de trébucher lorsqu'il s'arrête et c'est le signal qu'il me fallait pour me détourner sans jamais revenir en arrière.

Mes pas sur le goudron sont rythmés par mon cœur et à mesure que j'avance, mes foulées s'accélèrent.
Je traverse le quartier à toute vitesse, avec pour métronome, mon sac qui bat contre mon dos.
Je dois trouver Leïla.
Mon amie habite sur le campus de notre université et si les trajets silencieux avec mon chauffeur qui m'y conduisait m'ont appris une chose, c'est bien à mémoriser le chemin.
Je n'ai pas besoin de mon téléphone pour ça, j'espère juste qu'elle est belle et bien dans son petit studio. Dans mon malheur, cette absence de portable, me permet de ne pas être géolocalisable.
Alors je m'enfonce dans la nuit noire, sur les petits chemins menant au centre ville.
J'ignore la douleur de mes plantes de pieds qui me ferait grimacer en temps normal.
Je ne sais pas combien de temps je marche, en voiture cela paraît bien moins long, mais j'ai compté trois feux rouges avant de rentrer pleinement dans la ville alors je sais que je ne me suis pas perdue.
La nuit ne fait que commencer, aussi je passe devant de nombreuses terrasses à l'esprit joyeux et aux clients bien trop éméchés. Je ne peux m'empêcher de penser que nous ne sommes pas si différent, nous n'avons pas la même source d'ivresse, pourtant ce soir, nous laissons derrière nous les tourments de la vie, dompter par des émotions bien trop puissantes pour être contrôlées. Si je m'arrêtais un instant, ma tête tournerait également à cause de l'adrénaline, mes jambes me portent déjà à peine, j'ai le cœur au bord des lèvres mais un sourire sur les lèvres. Nous ne sommes pas si différents...

Je baisse la tête et accélère le pas jusqu'à temps que je trouve enfin ce fichu panneau qui indique le campus. La brise fraîche de la nuit me fait frissonner par moment, mes pas sont le seul bruit que j'entends et je ne cesse de me retourner pour vérifier que je ne suis pas suivit.
Un étrange sentiment me colle à la peau, j'ai l'impression que deux yeux sont braqués entre mes omoplates et suivent chacun de mes mouvements.
J'ai l'impression que le bruissement des buissons est causé par un corps qui s'y cache, que les lumières automatiques du devant des maison, que je longe sont déclenchées par quelqu'un d'autre que moi.
Pourtant la nuit ne semble cacher personne d'autre, juste ma paranoïa. Alors je tente de me rassurer, je calme mon imagination fertile. Mon père ne peut déjà pas être sur ma trace et qui pourrait bien me suivre ?

Je ne compte plus les réverbères une fois passé une douzaine et je ne relève le menton que lorsque l'université se dresse devant moi.
Ses immenses pelouses m'accueillent alors que je peine à retrouver un semblant de souffle régulier.
Mes poumons sont en feu, mes muscles engourdit mais je me raccroche au bonheur que sera de la voir, à la chance qu'elle représente pour moi.
Alors je traverse la fac, comme je l'ai tant fait, du parking jusqu'à après la petite cafétéria.
À certaine pause repas, lorsque le temps avait décidé de nous rafraîchir, ils nous arrivaient de nous regroupaient chez elle.
Je sais donc immédiatement qu'elle résidence choisir.
Je laisse les amphithéâtres derrière moi, un pincement au cœur en espérant un jour y remettre les pieds et me glisse dans le hall de son immeuble.

Une toute autre ambiance m'accueille. Ici, la vie semble battre son plein, le temps ne s'est pas arrêté à une époque archaïque. Les tracas du quotidien semblent ne pas exister.
De la musique s'élève dans la cage d'escalier, ainsi que des vives conversations. L'immeuble est animé de la furieuse envie de ses habitants de vivre.
Un large sourire étire mes lèvres. J'ai réussi.
Voilà ma récompense, un soupçon de ce à quoi j'aspire.
Ici, on ne me connaît pas et pourtant, lorsqu'on me croise dans les couloirs on me salut franchement, quoique un tantinet éméché.
Un son clair s'échappe de mes lèvres sèches lorsqu'une jeune femme aux cheveux roses trébuche, rattrapé de justesse par son amie.
Je les contourne en leur souhaitant une bonne soirée, j'ai l'air d'être une étudiante normal, s'apprêtant sûrement à rejoindre une des soirées qu'abritent ces studios.
Je suis normale.
Pas une fille de mafieux à qui pend au nez un mariage arrangé.
Je suis moi.
Psyché.
Avec comme seule arme, mon espoir furieux.

Je grimpe les escaliers quatre à quatre jusqu'à arriver au cinquième étage.
Deuxième porte à gauche, et j'y suis.
J'arrive devant chez Leïla. Enfin...

Et je vais devoir tout lui expliquer, pour la première fois de ma vie, je vais pouvoir me confier sur le monde qui m'a élevé. Pour la première fois de ma vie, je vais me fier à quelqu'un plus qu'à moi même.
Et c'est terrifiant.

C'est pour cela que mon poing hésite un instant avant de frapper, il reste en suspend dans l'air alors que je relis encore et encore le numéro floqué sur la porte : 515.
J'entends du bruit de l'autre côté et mon cœur éclate.
Elle est là.
Et je vais sûrement condamner sa vie à une nouvelle tournure dès que j'aurais passé le pas.
Égoïstement, je vais l'entraîner avec moi dans un monde digne des romans qu'elle lit.
Je m'en sens coupable et pourtant, je me remémore ce jour là, où nous nous sommes rencontré.
J'étais assise en haut de l'amphi, faisant cliqueter furieusement mon stylo sous mon pouce, l'air renfrognée. Elle s'est glissé à mes côtés et m'a demandait.

- Qui as tu décidé de tuer ? Si tu te débrouille bien, un coup dans la jugulaire ça peut le faire.

Elle avait ce côté étrange qui ne fait pas s'arrêter n'importe qui. Pourtant, avec cette simple phrase, je savais que j'allais l'adorer. Et je ne me suis pas trompée.
Chaque matin, elle me ramenait un muffin de la cafétéria avec un grand café, et chaque journée, nous échangions les potins de notre promotion.
Elle m'a aidé à rattraper mon retard lorsque je loupais les cours à cause de mon père.
Elle a toujours été à mes côtés.
Aujourd'hui j'espère que ce sera toujours le cas.

Je toque finalement, mais mon appel se perd dans le brouhaha de l'intérieur. J'attends de longue minute en zieutant le couloir, la nervosité au creux de mon estomac m'intimant qu'on m'observe.
Je dois entrer. J'ai la sensation que je ne serais à l'abris que entre ses quatre murs.
J'appuie sur la poignée et la porte n'oppose aucune résistance.
Elle me révèle son intérieur dans une invitation conviviale. Comme si j'étais une étudiante de plus à élire domicile, ici, pour la nuit, tout comme les cinq autres, étalés sur le canapé bien trop gros pour cette petite pièce que représente le salon.
Des rires leurs échappent, ils semblent en grande conversation entouré d'une épaisse fumée.
La musique est poussé à un volume juste suffisant pour être agréable sans embêter les voisins.
Les bières s'entassent sur la table basse et semblent être annonciatrice d'un pack déjà bien entamé.
Je ne vois pas Leïla dans cette douce euphorie.
On me remarque à peine également et pour cause, je ne reconnais aucune tête.

Je referme la porte délicatement derrière moi et je me tords les doigts nerveusement.
À être isolée toute sa vie, on finit par avoir peur des inconnus.

- Excusez moi, où est ce que je peux trouver Leïla ?

Je me racle la gorge, pas certaine d'avoir parlé suffisamment fort pour me faire entendre avec la musique.
Pourtant, une jeune femme à la peau claire se tourne vers moi en avalant sa dernière goulée de bière.

- Ouhla...on pourrait te le dire mais je suis pas certaine que ce soit le bon moment.

De quoi parle-t-elle ?
Un rouquin étouffe un rire en calant un joint entre ses lèvres pour l'allumer. Il tire une longue bouffée et elle s'échappe de ses lèvres lorsqu'il ricane.

- Si, si, elle est dans sa chambre tu peux y aller.

Pourquoi il me regarde avec ses yeux aussi pétillant.
Oh non, ne me dite pas que...
Bon sang.
Je devrais effectivement attendre, me glisser dans ce canapé à leur côté et attendre patiemment, en espérant que ça ne dure pas toute la nuit.
Avec lequel est-elle ? J'ai entendu parler de Finn, le capitaine de l'équipe de foot. Mais aussi d'Edward, le gars un peu étrange du fond de l'amphi mais également de Mark, Dorian....
Mais il n'y a pas de bon moment dans une fuite. C'est maintenant ou jamais et j'espère sincèrement qu'elle n'est pas avec le meilleur coup de sa vie.
De toute manière, si j'attendais sagement, elle me traiterait d'imbécile pour ne pas avoir saisi l'urgence de la situation.

- Tu permets ?

Je tends les doigts vers le rouquin pour lui piquer le joint qu'il ne semble pas décider à faire tourner.
Au moins ça me donnera un peu de courage.
J'en inhale une profonde bouffée qui tapisse mes poumons en feu.
Instantanément, ma tête chavire un instant, mon cœur ralenti et les muscles de mes épaules se détendent d'un poil.
Je le lui rends avec un petit sourire tandis qu'il hausse un sourcil.
Je ne dois pas avoir fière allure, j'ai gardé mon survêtement depuis ce matin, mes cheveux doivent être en bataille et mes yeux déjà rouges. On dirait une folle venue demander l'hospice.

- T'es qui au juste ? Il me demande suspicieux.

L'autre garçon à sa droite appuie sa question d'un petit hochement de tête et en une fausse révérence, je m'incline en leur lançant.

- Personne, juste un soucis en plus.

Je les plante là, les laissant à leur musique alors que la jeune femme roule des yeux.
Une assurance nouvelle agite mes membres alors que je me dirige vers la porte au fond du petit salon.
Celle dans laquelle je me suis allongée de longues minutes durant l'année, en discutant avec elle de tout et de rien en regardant le plafond.
Elle a toujours était entière et moi, je lui contais une vie qui ne m'appartenait pas et créait de fausses anecdotes auxquelles elle rigolait.

Ce soir, notre amitié sera plus sincère que jamais. Du moins, de mon côté.
Je place tout mes espoirs dans l'amitié qu'elle me porte. Désormais, je n'ai plus qu'elle et c'est plus facile de me libérer de mon angoisse si elle est partagé.
Égoïstement, je l'entraîne avec moi, lorsque je pousse la porte de sa chambre, dans l'option que j'ai choisis.

M'enfuir.

___________

Et coucou !

Comment allez vous ??

Je remarque qu'à la fin de l'écriture que mes chapitres sont nettement plus longs que ceux que j'ai l'habitude d'écrire !
C'est bizarre et à la fois fluide quand j'écris, du coup, je ne m'en rends pas compte !

Est ce que vous les trouvez trop long ?
Je peux déjà vous dire que ce roman sera un gros bébé.

N'hésitez pas à me dire en commentaire quelle est la longueur de chapitre idéale pour vous.

Bon celui ci était critique !
Est ce que vous aussi il vous a tenu en haleine ?
Je l'ai réécris plusieurs fois parce que j'étais tellement happée par l'action que j'en oubliais pleins de détails !

Psyché a réussit à s'échapper purée !
Quand je serais grande j'aimerais avoir sa force d'esprit.

Et le revirement de Cléo, qu'en avait vous pensez ?

Avez vous hâte de découvrir Leïla et pensez vous qu'elle aidera, comme l'espère Psyché, son amie ?

La suite risque de promettre....

On se retrouve pour le prochain chapitre lundi et pas dimanche. Je rentre de vacances dimanche et ça risque d'être la course aussi, je préfère décaler à lundi pour que vous ayez le chapitre comme il faut !
J'espère que vous me pardonnerez 🫶🏻

En attendant, prenez soin de vous !
Et n'hésitez pas à voter et commenter, c'est un réel plaisir de lire vos commentaires ❤️

Love.

Marie

Instagram : marie__frns

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