•Chapitre 23•
-Fais attention, ce sont les petits détails qui nous trahissent. Me préviens Cristal qui se tenait toujours à côté de moi. Cela faisait plus de dix minutes que j'étais debout au milieu de la chambre sans savoir ou m'asseoir. Je m'étonnai d'ailleurs que Gideon n'ait pas encore remarqué mes hésitations. A chaque fois que je posais mes yeux quelques parts, le fantôme de la brune s'y opposait farouchement et je me demandais pourquoi je continuais de l'écouter. Prise d'une pulsion de rebelle, je posais les yeux sur la place libre aux cotés du jeune homme. Après tout c'était mon lit non ?
-Al ! Al ! Al ! Soupira théâtralement Cristal en secouant la tête de droite à gauche.
-Ne pense même pas à t'assoir à côté de lui, ou alors demande-le directement en mariage nous irons plus vite ! Et puis j'adorerai voir comment Monsieur Gray s'occuperait d'une épouse ! S'exclama ironiquement la brune. Finalement le psychopathe des roses finit par se rendre compte de mon trouble mais au lieu d'en rire comme je m'y attendais il se proposa de partir. Mon rire se coinça dans ma gorge, incapable de parler je me contentai de le regarder en arquant un sourcil.
-Je ne voudrais m'imposer... dit-il en riant doucement tandis que je partais dans un rire franc.
-Depuis quand ... Depuis quand tu ne veux pas... Tu ne veux pas t'imposer toi ? J'en bégayais tant la situation me paraissait absurde.
-Disons ... disons que tu as l'air dispersée, je ne voudrais pas que ça fausse les résultats de l'expérience. Expliqua t-il en se levant de mon lit et en m'envoyant une œillade. Mon sourire se figea lorsque je remarquai son pied qui était à peine à deux centimètre de la couverture noire du cahier.
-Mais évidement si tu veux que je reste, je resterai. Tu sais bien que je ne peux rien te refuser. Plaisanta le brun tandis que je me faisais de nouveau hypnotisée par son regard. Soudain, une ombre apparut dans ses yeux, obscurcissant tout son visage. Le garçon de la serre se mit à trembler de tous ses membres, je n'arrivai pas à me détacher de l'observation de ses traits. C'était comme si l'ombre d'un géant ne se reflétait que sur sa figure. Ses mains attirèrent mon attention tellement elles tremblaient, puis mes yeux remontèrent sur ses avants –bras meurtris. Surprenant mon coup d'œil, il les cacha en croissant les bras sur sa poitrine. Piteuse, je regardais mes ongles priant intérieurement pour qu'il reste. De son côté, Cristal se délectait de l'étude d'un Gideon en proie à un démon dont il ne semblait pas pouvoir se débarrasser.
-Fascinant... Je ne l'avais jamais vu comme ça... Souffla Cristal, je la regardais d'un œil sévère qui lui passa au dessus de la tête.
-Est-ce que tout va bien ? Demandais-je à Gideon dont je m'approchai lentement tandis qu'il secouait la tête de droite à gauche, de plus en plus vite.
-Oui. Trancha t-il d'une voix froide comme une lame d'acier. Mon cœur se serra lorsque je le vis se lever puis s'éloigner de quelques pas.
- Oui. Tout va bien. Ajoutait-il une nouvelle fois comme pour se convaincre lui-même. Les yeux du jeune homme reprirent une teinte normal et durant un quart de seconde, il sembla déboussolé. Son visage tout entier traduisait le fait qu'il ne comprenait plus vraiment ce qu'il faisait debout au milieu de la chambre. Finalement, le garçon à la serre rebroussa chemin et partit finalement s'allonger sur mon lit. Je souris pour moi-même en imaginant l'odeur de menthe qui m'imprégnera une fois la nuit tombée. Cette perspective était très réjouissante. Ça sera comme être dans ses bras. Cristal fit mine de vomir, je l'ignora et laissa mes yeux glisser sur le psychopathe du chêne. Gideon m'observait en silence.
-Katherine ? M'interpella-t-il finalement d'une voix cajoleuse qui ravit mon cœur.
-Oui Gideon ?
-Je... Mon cœur s'emballa avant même qu'il ne poursuive sa phrase. Cristal semblait retenir son souffle autant que moi.
-Il ne le dira pas. Jamais il ne le pensera. Affirma la brune en hochant la tête, des veines noirâtres émergeaient du col de sa robe, se tendant de plus en plus vers son visage. Sa colère me faisait dire qu'elle n'en savait rien.
-Je crois que tu es en train de voler le peu de raison qu'il me restait. Ses yeux grisants, fouillaient mon âme à la recherche d'une réponse à cette demi-déclaration.
-Te faire voler ta raison par une folle, quelle ironie ! Je me haïssais de dire une chose aussi stupide mais je ne trouvais rien à lui répondre sans tout lui déballer. Sans lui faire part de l'incohérence et le chaos qu'il faisait régner au sein de mon esprit et de mon cœur. Deux parties de moi-même qui se battaient à propos de lui. Je ne pouvais pas lui dire ça sans trop en dire...
-Non... Confirma Cristal au bord des larmes. Tu ne peux pas lui faire part de tout ça, c'est exactement ce que ce manipulateur attend... Ajouta t-elle juste avant de se lever, durant un instant j'eus peur qu'elle n'arrive à frapper Gideon mais au lieu de cela, elle disparut simplement. Passa la porte close et ne revint pas. Un éclat de rire me ramena à Gideon qui déclara en secouant la tête :
-Tu n'as rien d'une folle Katherine. Je ne répondis rien et me plongeais dans les lignes manuscrites de son recueil. Mon cœur battait si fort que j'eus peur qu'il ne sorte de ma poitrine. Dans mon ventre des centaines de papillons dansaient au rythme de mes respirations rapides. Je n'arrivais pas à croire que tout cela était réel et n'avais pas l'audace de demander au brun de répéter.Mais j'étais certaine d'une chose. Il fallait que Gideon soit réel. C'était maintenant une question de vie ou de mort. De son coté, l'objet (magnifique) de mes pensées, laissa échapper un rire hystérique puis un soupir auquel je ne m'attendais pas, puis il murmura quelque chose que je ne compris pas.
-J'ai choisi ! M'exclamais-je cinq minutes plus tard, le faisant sursauter alors qu'il s'était presque assoupi sur mon lit. Je m'excusai avec autant de douceur que je le pus, le garçon des roses répondit par un grognement incompréhensible et se redressa et les paupières à demi-closes. Il attendait que je lise.
Aucunes émotions Alice. M'encourageais-je mentalement. C'est une expérience. Une simple expérience. Rien qu'une expérience.
Après avoir adressé un dernier regard au visage de statue du brun, je me concentrai sur les arabesques que formaient ses lettres.
-"La nuit n'est jamais complète.
Il y a toujours, puisque je le dis.
Puisque je l'affirme,
Au bout du chagrin une fenêtre ouverte.
Une fenêtre éclairée.
Il y a toujours un rêve qui veille.
Désir à combler, faim à satisfaire." Je m'arrêtai ici, et jetai un coup d'œil au locataire de mon lit qui, maintenant avait les yeux grands ouvert.
-Continue, s'il te plait... Me pria-t-il, d'une voix tremblante. Après une nouvelle inspiration je repris ma lecture :
- "Un cœur généreux.
Une main tendue, une main ouverte.
Des yeux attentifs.
Une vie, la vie se partage." Terminais-je. Lorsque je relevai la tête du carnet je remarquai que le brun s'était rapproché. Beaucoup rapproché. Comment ne l'avais-je pas entendu bouger ? Nous restâmes tout deux silencieux, mon cœur battait vite, et fort. Très fort. Mon visage me semblait brûlant alors qu'il glissait ses lèvres vers mon oreille pour chuchoter d'une voix de velours :
-Ta voix est si douce, que je me damnerai avec plaisir pour l'entendre lire un tel poème une nouvelle fois.
Un feu d'artifice éclata en moi, me dépossédant de toute capacité mentale. Longtemps –du moins assez pour que j'ai arrêté de compter- nous, nous étions fixés l'un, l'autre comme s'il n'y avait rien de plus important au monde. Comme s'il n'y avait plus de monde en dehors des iris de l'autre. Je l'avais regardé dans les yeux, je l'avais épié, l'avais détaillé encore et encore comme si c'était la première et dernière fois que je le voyais. Comme si je voulais graver ses traits sculpturaux à jamais dans ma mémoire. Je voulais qu'il puisse lire dans mes yeux que mon corps souffrait, que chaque parcelle de mon cœur, chaque bout de mon âme souffrait. Je voulais qu'il voie que je commençais à tomber amoureuse de lui et que je ne le voulais pas. Je voulais qu'il m'aide et me dise que tout allait bien se passer. Mais je voulais aussi qu'il ne dise rien et disparaisse. Il n'avait dut voir qu'une seule chose et c'était la folie. La folie amplifiée par des sentiments incompréhensibles qui menaient la guerre à ma raison déjà en retrait. Je voulais voir ses yeux argentés briller de cette flamme que je ne lui voyais que dans la serre, je voulais voir ses lèvres s'étirer dans un sourire qui me ferait fondre plus encore. Je voulais qu'il me surprenne en me disant qu'il m'aimait. Je voulais qu'il perde ses mots et finisse par se taire. Je voulais lui présenter mon cœur torturé et mon esprit fissuré, qu'il les prenne et les panse comme s'il s'agissait des siens. Mais je voulais aussi qu'il arrête de me faire perdre mes mots et mes idées, je voulais qu'il arrête de me donner cet espoir qui me faisait me raccrocher aux branches. Je voulais qu'il disparaisse de mon ciel pour que je puisse allumer les étoiles mais je voulais aussi qu'il soit à côté de moi lorsque je les observerai.
C'est donc ainsi que Cristal nous retrouva lorsqu'elle se rematerialisa dans ma chambre.
-Pourquoi j'ai la désagréable impression de vous déranger dans votre flirt... Soupira Cristal d'un air acerbe.
-Nous ne flirtons pas ! Ne pus-je m'empêcher de répondre à voix haute en regardant Cristal - rompant la première notre contact visuel- qui nous toisait de toute sa hauteur. Ma phrase lançait sans le moindre préambule (du moins pour lui) sembla faire rire Gideon qui profita de mon instant d'inattention pour se rapprocher plus encore.
-Ah bon... Nous ne flirtons pas ? C'est étrange, j'aurais parié que nous, nous étions lancés dans ce jeu. Susurra-t-il à mon oreille, son souffle chaud s'écrasait comme un ras de marée contre ma joue. Ses lèvres vinrent frôler la courbe de ma gorge tandis que je restai stoïque.
Un jeu. Tout n'était pour lui qu'un vulgaire jeu.
Je n'étais qu'un jouet malléable dans ses mains de manipulateur ! Cristal –qui devait avoir suivi le fil de mes pensées, me regarda d'un air désolé.
-Et désolé je le suis Alice... Chuchota t-elle doucement en fusillant du regard la tête du brun.
-Non. Nous ne flirtons pas. Et c'est loin d'être un jeu Gideon. Crachais-je en me levant sous son air déboussolé. Maintenant je te demanderai de sortir de ma chambre. Ajoutais-je rapidement sans le regarder de crainte de voir dans ses yeux une émotion qui ferait flancher ma volonté de le mettre à la porte. Évidement, un sourire aux coins des lèvres il me suivit jusqu'à la porte de bois rouge et ne pensa pas une fois à s'excuser ou à reformuler sa phrase précédente. Le psychopathe passa l'encadrement de la porte et alors que j'allais refermer le battant sur lui, le brun se retourna et s'installa contre l'entrée de manière à ce que je ne puisse pas la fermer, même en le voulant très fort.
-Je peux encore t'aider ? Lui demandais-je quelques peu agressive, sous les acclamations de Cristal qui ne perdait pas une miette du spectacle.
-Mon recueil. Dit-il en désignant d'un doigt le livret que nous avions laissé sur le sol.
-Je te le rendrais plus tard. Bégayais-je alors que mes yeux tombèrent par inadvertance sur les lèvres rouges du garçon de la serre. Un sourire charmeur se dessina au coin de la bouche du jeune homme qui avait suivi le chemin de mon regard.
NE TE CONCENTRE PAS SUR CES LÈVRES ! IDIOTE ! Hurla ma conscience, tandis que tout mon esprit était en alerte catastrophe. Derrière moi Cristal poussa un gémissement de dégoût.
-Inutile de nier Miss Langford, je sais que je vous fais un certain effet. Certifia t-il juste avant de se retourner et de disparaître au coin d'un couloir.
« Tu penses vraiment que c'est le moment d'être arrogant ?! » Voulus-je lui hurler, mais le temps que je rassemble toutes mes pensées, il était déjà loin.
-Pauvre, pauvre petite Alice amoureuse... Soupira Cristal en posant une main compatissante sur mon épaule pendant que je fixai le vide du couloir qui s'étendait derrière ma porte encore ouverte. Cinq minutes après que j'ai refermé cette satanée porte, quelqu'un toqua. S'en prendre le temps d'étudier les coups portés je sautai sur la poignée et l'ouvrit à la volée –sous le regard peu amène de Cristal. Je m'attendais à découvrir Gideon, mais je tombai sur Finn à qui je tentai de cacher ma déception. A mon grand étonnement, le blond devient aussi pâle qu'un cachet d'aspirine juste après que j'eus ouvert le battant. Des trémolos dans la voix, mon ami leva l'index vers le fond de la pièce. Je me retournai et découvris qu'il désignait la fenêtre contre laquelle Cristal était nonchalamment adossée.
-Elle... Elle... est là... Bafouilla Finn, il était si pâle et si tremblant que j'eus peur qu'il ne s'effondre au milieu du couloir. Un bras passé sous ses épaules je le traînais jusqu'au centre de ma chambre, ou il se laissa tomber, ses yeux clairs fixés sur une brune qui lui rendait son regard.
-Il te voit ? Demandais-je bien que cela passa plus pour une affirmation. La jeune fille hocha la tête en tournant lentement autour de Finn. M'approchant du jeune peintre, j'essayais de le sortir de sa transe mais il semblait incapable de toute autre chose que de répéter « Elle est là » d'une voix sourde.
Il fallut à Finn, un quart d'heure pour se reprendre, puis on arrivait plus à stopper le flot de questions qu'il adressait à une Cristal qui se délectait de cette attention.
-Qu'est-ce que ça fait d'être un fantôme ? La questionna le blond. Depuis mon lit je les observai sans comprendre vraiment la situation. Une crise hallucinatoire collective était-elle possible ?
-En vérité, je ne sais pas si je suis un fantôme, je ne sais même pas si je suis morte. J'ai juste l'impression de m'être endormie longtemps puis de m'être réveillée et qu'entre temps tout avait changé. Exprima le spectre d'une voix brisée au blond qui la fixait, plus attentif que jamais. Ses yeux brillaient d'une excitation indescriptible.
-Tu as vécu à Hallow ? Une pointe de jalousie me serra le cœur quand je vis avec qu'elle douceur elle répondait au blond. A côté de lui elle se comportait comme une jeune adolescente fragile alors qu'avec moi elle était absolument infecte ! Bien qu'elle captait très certainement l'entièreté de mes pensées ainsi que mes ressentis, elle ne fit aucun commentaire et répondit à Finn :
-Oui, au cinquième, mais ils ont laissé ma chambre tomber en ruine. Prise d'une pulsion énergique, mon ami sauta sur ses jambes et s'exclama que nous devions absolument aller fouiller le cinquième étage
-Imagine Alice ! Cet étage doit habiter tous les fantômes qui hantent Hallow ! Peut-être que les directeurs sont au courant et que c'est pour ça que nous n'avons pas le droit d'y monter ! Alors qu'il continuait de crier sa théorie du complot, Cristal l'arrêta et d'une voix blanche lui fit remarquer que s'il y avait d'autre fantômes elle les aurait sûrement déjà rencontrés.
-Pas forcément. Tu as dis que tu as l'impression de t'être réveillée d'un long sommeil, ça ne m'étonnerait que les autres t'aient évitée. Répliqua Finn qui semblait avoir réponse à tout sur ce sujet. Je ne pensais pas que c'était possible, mais la peau de Cristal se fit encore plus pâle, presque translucide. Elle mordit sa lèvre inférieure si fort qu'un humain l'aurait eu en sang.
-Et puis, si la partie sur Cristal est vraie peut-être que le reste de la légende l'est aussi. Lança Finn d'un air désintéressé en époussetant son pantalon couleur rouille.
-Quelle légende ? M'écriais-je
-Personne ne te l'a raconté ? S'étonna Finn en venant s'asseoir à côté de moi sous le regard –étrangement- attendri de Cristal.
-Non. Donc maintenant dis moi. Le priais-je sèchement en me décalant légèrement pour nos deux mains ne soient pas en contact. Mon geste sembla exaspérer l'esprit qui vient se placer entre nous. Le blond ouvrit la bouche, puis la referma sans rien ajouter, il se racla la gorge et se mit à conter :
- Il parait que c'est arrivé en 2014, d'après les bruits qui courent, il y avait un gars qui était là depuis son dixième anniversaire et qui cette année-là venait de passé le cap des quatorze ans. Malgré son jeune âge, on disait qu'il était beau comme une statue, doué dans tous les arts mais avait un cœur de marbre et l'esprit le plus tordu qu'on ait vu ici.
-La personnification même du péché mortel ! Plaisantais-je d'une voix enrouée alors que les images de Gideon parlant seul dans sa serre me glaçaient le sang.
-Tu ne crois pas si bien dire. Confirma Cristal en hochant la tête d'un air atrocement las.
-Ce qui était étrange avec ce garçon c'est qu'il ne se mélangeait pas aux autres pensionnaires. Il n'avait pas peur eux, simplement il ne semblait pas désirer leur compagnie et quand on lui demandait pourquoi, il se contentait de répondre qu'il ne voulait pas perdre son temps avec des gens qui rendaient le monde si laid. On le voyait rarement et les seuls témoins –en dehors des docteurs- qui le décrivent disent qu'on entrapercevait sa silhouette qu'une fois la nuit venue. Poursuivit Finn sans faire attention à nos commentaires ou aux frissons qui me parcouraient le corps.
"Qu'une fois la nuit venue.". Comme Gideon.... Chassant cette idée de mon esprit je me reconcentrai sur ce que disait mon ami :
-Et puis cette même année, une fille est arrivée. Il lança un regard incertain de Cristal avant de poursuivre : Comme pour le garçon nous n'avons pas énormément d'information sur elle, nous savons juste qu'elle était brune, avait des yeux noirs et avait entre quatorze et quinze ans.
-Quatorze. Le reprit la fille. J'ai quatorze ans et lui, il... était grand, brun et avait les plus beaux yeux qu'il m'eut était donné de voir. Mon cœur rata un battement, puis un bourdonnement très désagréable se fit entendre dans mes oreilles.
Impossible. Il était là. Je l'ai vu, je l'ai touché et je l'aime bien... Ce n'est pas lui dont elle parle. Pleins de gens ont de beaux yeux...
On n'aime pas bien un fantôme ! S'il n'existait pas je le saurais ! Tentais-je de me convaincre silencieusement en me balançant d'avant en arrière sous les yeux étonnés de Finn et ceux compatissants de Cristal. Cristal dont la voix se fit d'ailleurs entendre dans ma tête :
"C'est possible... Alice... Tout est possible avec ce garçon."
SORS DE MA TÊTE ! Hurlais-je mentalement en retour. Ou peut-être l'ais-je dis tout haut vu le mouvement de recul qu'avait eu Finn. Après lui avoir adressé un sourire d'excuse je l'encourageai à reprendre le fil de son histoire :
-Donc, elle... tu... Dit-il à l'intention de l'esprit qui repoussa son hésitation d'un geste désinvolte de la main. Elle, je ne sais pas pourquoi elle était internée, mais il parait que ce n'était pas très grave et qu'elle aurait facilement pu s'en sortir. Les gens qui l'ont vue du coin de l'œil disait qu'elle avait toujours l'air triste d'être seule mais qu'elle n'allait jamais voir personne. Le fantôme écoutait Finn avec la plus grande des attentions, comme si elle ne se souvenait plus de ce à quoi il faisait référence. D'un coup d'œil elle me fit comprendre que j'avais raison.
- Et puis, évidement ils se sont rencontrés, sans qu'on ne sache où, ni à quel moment mais on sait qu'ils se sont rencontrés et qu'après ça ils ne se quittaient plus...
-Ça, je peux y répondre ! Le coupa Cristal. C'était, dans le kiosque au font du parc. Je lisais tranquillement, je crois me souvenir que je venais de prendre mes calmants et qu'il fallait que j'attende qu'ils fassent effet. C'était au mois de... mars je crois... Lui, il est simplement passé devant moi, plusieurs fois en souriant puis il est venu. Nous étions en plein printemps, le printemps c'est joli pour parler d'amour vous ne trouvez pas ? Nous demandait-elle, d'une voix rêveuse, ses yeux noir brillant d'une étincelle d'amour. Une boule se forma dans ma gorge alors que le merveilleux visage de Gideon me hantait. Avais-je moi aussi cette expression quand je parlais de lui ? Quand je pensais à lui ? Finn, inconscient de mon trouble, sourit rêveusement et hocha la tête juste avant de reprendre sa narration :
- Finalement, ils étaient beaux ensembles. Le garçon ressemblait de plus en plus à un adolescent amoureux de quatorze ans et la fille, elle n'avait plus l'air si triste. Tout le monde se réjouissait de les voir se tenir la main, se balader au milieu des couloirs ou d'entendre leurs rires joints raisonner dans tout Hallow. Puis décembre est arrivé, et le garçon a totalement perdu les pédales entraînant sa copine –qui était devenue si joyeuse- dans sa chute. Personne ne sait exactement ce qu'il s'est passé mais, le 25 décembre au soir, une ambulance stationnait devant le portail d'Hallow et repartait avec deux énormes sacs noirs.
Le 25 décembre, jour ou Gideon plantait ses trois-cent-soixante-cinq roses annuelles. Un soupir triste m'échappa, croyant que c'était la fin de cette histoire, mais Finn termina sur une toute autre phrase :
-Le 28 décembre, soit trois jours plus tard, un pensionnaire a juré avoir vu le garçon en train de pleurer au milieu du terrain de construction de l'actuel serre. C'est de là qu'est née la légende du couple de fantômes, bien que personne encore n'avais jamais vu la fille. Un poids énorme me tomba sur l'estomac quand je repensai à la crise qu'avait faite Finn il y a plusieurs semaines. Il avait parlé de trois personnes. Cependant je n'osais pas lui poser la question et laissa le silence retomber sur la chambre.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top