CHAPITRE 20 (2)
Chapitre 20-Partie 2
Audacieux_
C'est seulement à la pause de midi que je peux mettre mon plan à exécution. En effet, puisque j'ai décidé de me réconcilier complètement avec Ashley et Lewis puis de me rapprocher de Matthew pour enfin être capable d'offrir à Andréas l'aide dont il a besoin, je dois moi-même élargir mes capacités et stabiliser mes émotions.
Et surtout, je dois trouver qui je suis. Un peu plus et je me croirais dans un Disney.
Pour ce faire, j'ai décidé que mon premier objectif sera le suivant ; essayer de sympathiser avec toutes les personnes de ma classe. Ainsi, je serais probablement plus ouverte d'esprit et je pourrais donc améliorer ma personnalité.
Cela se rapporte à laisser de côté les vestiges de la team décalée mais je suis persuadée que ce n'est pas un abandon définitif et que ça en vaut la peine.
Mais aussi, cela veut dire que je dois pour de bon laisser tomber mon masque. Et ça, ça me terrifie.
De la sorte, le regard décidé et la respiration profonde, je me retrouve au milieu du hall principal, à la recherche d'une proie facile pour le début de ma quête. Pour ce faire, je plisse les yeux et m'aide de ma vision prédatrice, pareillement à un agent secret à la recherche d'un suspect.
Je passe en revue plusieurs petits groupes avant d'en trouver un plutôt alléchant. En effet, deux jeunes filles qui sont dans ma classe, enfin je crois, se trouvent appuyées contre les casiers des terminales.
La première est plutôt courte sur pattes et sa frange trop longue dissimule son visage dodu de moitié. Mais son petit sourire timide me fait directement penser à un petit hamster sans défense et son accoutrement un peu particulier me rappelle celui d'un personnage qui appartiendrait à un manga. C'est presque si l'indication « otaku confirmée » flotte au-dessus de sa tête.
L'autre, au contraire, est tellement mince que j'ai l'impression qu'un courant d'air pourrait l'envoyer valdinguer entre les nuages, parmi les oiseaux migrateurs ayant manqué l'annonce de l'hiver. Ses cheveux lisses sont si longs que je me surprends à l'envier, et ses yeux bridés lui apportent un charme sans pareil. Aussi, ses gestes amples, gracieux et sa pose impeccable me font comprendre qu'elle pratique la danse classique depuis longtemps.
Je souris avec prétention, heureuse d'avoir décrypté les grandes lignes de leur caractère aussi facilement, et me décide à aller leur parler.
Je bombe un peu le torse, mais ne relève pas trop le menton ; je veux avoir l'air confiante, pas supérieure. Un peu hésitante, je m'avance finalement dans leur direction.
Il faut quelques secondes aux deux filles pour s'apercevoir de mon arrivée, et elles se stoppent dans leur conversation pour me jauger, dubitatives.
Une fois devant elles, mon cœur tambourine si fort contre ma cage thoracique que j'ai l'impression qu'il veut remonter le long de ma trachée à l'aide de mon intestin en guise de grappin, et je me mords vigoureusement l'intérieur de la joue pour ne rien laisser paraître.
Elles me dévisagent en silence, intriguées, et attendent que je leur donne la raison de ma venue. Pourtant, je reste muette.
Mince, mince et mince ! Comment elles s'appellent déjà ?! Je me mords désormais la langue. Cela a beau faire bientôt deux ans que nous sommes dans la même classe, je n'ai jamais pris le temps de m'attarder sur autre chose que leurs faces gribouillées par une sorte de flou, vague et impersonnel. Après tout, je les ai ignorés depuis que je les connais, comme tous les autres d'ailleurs.
Ils n'étaient que des pions insignifiants qui auraient tout de suite aperçus la fille recroquevillée de douleur derrière les fissures de mon masque. Alors la seule chose que je pouvais faire était de les snober et les ignorer afin d'être sûre que de telles personnes ne cherchent jamais à me connaître en profondeur.
Je pince les lèvres. Quelle affreuse égocentriste j'étais ! Ah parce ce que ce n'est plus le cas ? rétorque une voix ironique dans mon esprit.
Super ! Maintenant, je deviens encore plus folle que je ne le suis déjà.
Cependant, même si c'est face au vent et pieds enfoncés dans la boue, je suis résolue à avancer. Je prends donc une profonde inspiration et me lance finalement.
-Euh...salut ! Vous...vous avez déjà mangé ? Parce que c'est la pause de midi et que...euh bah...C'est bon la bouffe.
La fille manga fronce les sourcils en posant ses poings sur ses hanches pour me reluquer de haut en bas, et je comprends que le hamster à des griffes. Des griffes plutôt acérées même.
-Qu'est-ce que tu nous veux, Heaven ?
La manière dont elle a craché mon prénom me fait faire un bond dans le passé, lorsqu'Andréas l'avait prononcé avec tellement d'émotions contradictoires que cela m'avait paralysée, et j'en étais même venue à idolâtrer secrètement mon appellation.
Pourtant, cette fois, je me renfrogne et serre les dents ; maintenant que j'ai découvert à quel point mon prénom peut sonner magiquement bien, je ne laisserais plus personne le régurgiter.
Profondément irritées, j'ouvre la bouche pour lui répondre mais elle me coupe la parole.
-Ne me dit pas que c'est parce que tu t'es faite jetée par tes soi-disant amis que tu veux trainer avec nous maintenant, pas vrai ?
Cassée. Je déglutis et trouve un intérêt soudain pour mes chaussures boueuses de par la neige sale au-dehors. Sa façon de me parler à beau me mettre hors de moi, quelque part, elle a un peu raison. Un peu beaucoup même. Si j'ai commencé à être amie avec Lewis et Ashley, c'est parce que nous étions trois extrêmes incompris et que nous avions besoin les uns des autres. Oui, j'avais terriblement besoin d'eux, quittent à jouer un rôle chaque seconde pour avoir le droit de rester parmi eux.
« Ça vous dit qu'on soit...amis ? »
Voilà les premiers mots que nous a sourit Ashley, quand je venais de lui renverser « accidentellement » mon chocolat chaud dessus après avoir éternué un peu trop fort, dans un petit café près de l'école. Lewis, en passant par-là, n'avait pas pu s'empêcher de rire aux éclats en hurlant que « chocolat sur chocolat au lait ça ne se voyait pas » et ainsi, de nous transmettre sa bonne humeur comme une maladie qu'on attrape et dont on n'arrive plus à se débarrasser. « Objectif atteint » était ce que j'avais pensé, victorieuse.
Nous avions répondu « oui », sans l'ombre d'une hésitation.
Amis...ce n'est pas le mot qui convenait à notre entente, pourtant, nous nous sommes accrochés à ces quatre lettres comme on s'accrocherait à la vie.
Entre le génie qui joue aux masochistes, autant idolâtré que mis inconsciemment à l'écart, la tête en l'air extrême et ses manies étranges comme celle de porter des montres tels des bracelets, et enfin, la gamine effrontée qui se croit supérieure mais dont la façade est bien trop fine pour ne pas voir la fille brisée qui se trouve recroquevillée à l'intérieur, le titre de team décalée nous convenait à merveille.
Il n'est pas étonnant que notre groupe ait si vite volé en éclats.
Quand je relève mon regard vers la fille hamster, sa grimace effrayante me fait baisser les yeux de nouveau et je joue nerveusement avec mes doigts, mon assurance ayant déguerpi comme une lâche ; cette fille me semblait beaucoup plus amicale de loin.
Je prends mon courage à trois mains et me redresse tout à coup.
-Je voulais...euh...je voulais simplement manger avec vous pour une fois. Je pensais que ça pourrait être sympa.
L'otaku s'apprête à rétorquer mais la danseuse qui jusque-là était restée silencieuse la retient par le bras pour la tirer un peu en arrière.
-Du calme Maddy', s'exclame-t-elle en pressant légèrement son amie pour la calmer. Elle n'a rien fait de mal.
Puis, ses prunelles rencontrent les miennes.
-Excuse son attitude un peu excessive. Pour tout te dire, on n'aurait jamais imaginé que tu viendrais un jour nous adresser la parole.
Son ton jovial me détend un peu et je hausse les sourcils.
-Ah bon ? Pourquoi ?
Mon innocence a l'air d'exaspérer Maddy' et les deux jeunes filles échangent un regard entendu avant de revenir vers moi.
-Et bien...toi et tes amis, ou plutôt anciens amis j'ai cru comprendre, semblaient faire partie d'un autre monde, quelque peu...inaccessible.
Elle coince une mèche de ses longs cheveux derrière son oreille avec une grâce époustouflante et je déglutis en reculant d'un pas, réellement secouée par ses propos.
Alors, c'est vraiment comme ça que tout le monde me voit ? Je ressemble à une...une populaire ?!
Moi qui déteste ce genre de clan, à rire fort pour un rien et à se croire meilleur que les autres parce qu'ils...Je me fige et ma gorge se serre. Elle a raison. J'étais exactement comme ça.
Je snobais les autres sans scrupules et ce, à chaque seconde de ma misérable existence. La preuve, je suis toujours incapable de mettre un nom sur le visage de cette danseuse qui pourtant semble mieux me connaître que je ne me connais moi-même.
Mes épaules s'affaissent et deux grosses larmes viennent glisser sur mes joues rougis par l'envie de changer, tellement forte qu'elle me brûle les entrailles.
Alarmées, les deux filles font un pas dans ma direction mais mes sanglots redoublent d'intensité.
-Je suis désolée...je suis tellement désolée..., je balbutie en essayant tant bien que mal d'essuyer mon visage à l'aide du dos de mes mains. Je voudrais devenir une personne meilleure, mais je ne sais pas comment m'y prendre. Je sais bien que je suis égoïste, pitoyable, répugnante, mais je voudrais faire de mon mieux...Je vais faire de mon mieux.
Elles restent un instant silencieuses, probablement choquées par mes propos, puis Maddy' pousse un long soupir et secoue avidement la tête.
-Je m'appelle Madison et voici mon amie, Riley, lance-t-elle en me tendant sa main pour que je la serre, ce que je fais sans vraiment comprendre. Sèche tes larmes, Heaven ! Si tu veux changer, autant partir sur de bonnes bases !
-Tu voulais qu'on mange ensemble, n'est-pas ? complète Riley en me souriant tendrement.
Je renifle, essuie mon visage d'un revers de manche et souris à mon tour.
-Oui !
Finalement, j'ai mangé à la cafétéria avec Riley et Madison et j'ai appris pleins de choses sur elles.
Riley m'a expliqué qu'elle fait partie des rares élèves de l'école à pratiquer le patinage artistique et elle m'a proposé de venir essayer, un de ces jours.
Maddy' de son côté s'est avérée être très gentille mais un peu impulsive sur les bords. Je dirais qu'elle est une véritable boule d'énergie.
Quand nous avons débarrassé nos plateaux, juste avant de rejoindre nos activités respectives, elle m'a attrapé le poignet pour me retenir et m'a promis qu'elle me prêtera quelques-uns de ses mangas et bande-dessinées pour les vacances. J'ai souri, et ai accepté avec joie.
A la fin de la journée, nous avons même échangé nos numéros et nous nous sommes promis de nous organiser une sortie toutes les trois. Et comme une idiote, j'ai tellement souri et rigolé toute seule sur le chemin pour rentrer chez moi que j'ai eu une crampe à la joue. Oui, à la joue. Mes parents ont cru que j'avais de la fièvre.
Et je vacille tel un oisillon qui fait ses premiers pas. Et je me tords comme une chétive fleur qui encaisse son premier souffle. Mais je me relève, me redresse, et recommence.
Je ne sais pas combien de temps cela me prendra, mais je te rattraperai, Andréas, et je te retiendrai avant que tu ne passes par-dessus cette rambarde, et que tu t'élances dans le vide sans un regard en arrière.
Avant que la rose ne devienne poussière.
ENFIN UN NOUVEAU CHAPITRE!!!!!
Wow, cette réécriture m'a paru interminable!
Mais ça y est, je l'ai enfin fini!
Ce qui veut dire que je reprends enfin pleinement l'écriture et donc la publication d'une partie de chapitre par semaine, tous les SAMEDIS.
J'espère que vous serez au rendez-vous!
Et je peux vous promettre que les prochains chapitres ne vont pas vous décevoir!
Les fêtes de fin d'année arrivent à grands pas! Mais que va-t-il donc se passer durant ces vacances d'hiver?
Que va faire Heaven pour s'occuper?
Et comment sa relation avec Madison, Riley, Ashley, Lewis, Matthew et peut-être même Andréas va-t-elle évoluer? (wow, ça commence à faire beaucoup de personnages!)
Mystère mystère!
Allez, je vous dis à la semaine prochaine pour la suite!
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7DreamUniverse
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