🎤3. Origines🎤
Lewis
Existe-t-il une meilleure sensation que celle d'une grasse matinée dans un sommeil profond et confortable sous des draps bien tièdes ?
Enfin, si on considère que se lever à midi passé est une grasse matinée.
Ainsi, éveillé et allongé (ou plutôt étalé) sur mon lit, je profite de mon repos dans le silence le plus total.
Puis je reçois un appel, et me saisis donc distraitement de mon portable, l'esprit encore ailleurs.
- Allo ?
- Genre, t'es rentré hier soir toi ? me demande Harley de but en blanc.
- Bonjour Dingo, oui, j'ai bien dormi, et toi ?
- Moi, je suis sur le trajet, Gabin dit bonjour à Lewis !
- Bonjour Lewis, obéis le chauffeur de mon amie, de l'amusement dans la voix.
Nos trois chauffeurs, Evan, Gabin et Alban sont les seuls à connaître notre véritable apparence ainsi que nos prénoms. Plus par obligation que par réel choix. Mais nous savons qu'ils garderont le secret, déjà parce que (et ce même si je m'entends mal avec Evan) nous avons confiance en eux. Mais aussi, car ils sont sous clauses de confidentialités strictes pouvant mener à des poursuites en cas de manquement. Idées de nos avocats soit dit en passant.
- Ça fait même pas vingt minutes qu'on a démarrées et je me fais déjà chier, se plaint Harley. En plus Max est même pas là ! Ce lâcheur est parti voir ses parents sur Lyon.
- T'as qu'à regarder Netflix, je suggère. Ou Disney +, ils ont ajouté l'intégrale de Desperate Houswives dessus.
- Nan sérieux ? Oh trop bien. Mais, genre tu regardes ça toi ?
- Je regardais avec Iris quand on était au collège, c'est drôle comme série. Dans le genre, mais en plus vieux et plus comique je regardais Malcolm avec mon oncle quand j'étais gosse.
- Moi, je regardais avec mon frère, ça nous rajeunit pas tout ça, elle glousse.
- On n'a que vingt-cinq ans exagère pas.
- Ouais ouais. Bon, tu sais quoi ?
- Non mais je vais savoir ?
- Je viens à la villa, et on se mate Desperate Houswives avec un Uber, c'est ok ?
- Que ce soit ok ou non, tu viendras quand même hein ? je demande amusé.
- Exactement. À dans quatre heures Lee !
Sans attendre de réponse, mon amie l'excentrique raccroche, me laissant de nouveau dans le calme de ma chambre.
Je soupire et me lève. Sortant de mon cocon de couvertures moelleuses puis frissonnant à cause de l'écart de température. Voilà qui m'apprendra à dormir en boxer.
Après mon interminable trajet, j'étais arrivé à la villa aux alentours de six heures du matin. Et, encombrés d'une flemme équivalente à ma fatigue, j'avais décidé de sauter ma douche, abandonnant simplement mes habits et mes accessoires de scène un peu partout dans ma chambre.
Résultat : cette dernière ressemble à la niche d'un adolescent emo bordélique et une légère odeur de sueur émane de ma personne.
Passant mes mains sur mon crâne rasé à l'anglaise (façon Tommy Shelby version décoloré en blond foncé d'après Harley), je me décide à ramasser mes habits sales puis à les traîner jusqu'à la machine à laver avant d'entrer dans ma douche.
Ainsi détendu par la douce caresse de l'eau sur mon épiderme, je songe au concert d'hier soir. Et plus particulièrement au jeune homme blond à la sortie. Comment s'appelait-il ? Eric ? Non, Rick, juste Rick.
Me rappelant des détails de mon échange avec lui, je note qu'il faut que je vérifie s'il m'a envoyé ses fameuses photographies.
Avec du recul, je me demande pourquoi je lui ai donné un numéro. Il aurait sûrement mis ses clichés sur Facebook. Où j'aurais pu les lui demander en MP avec un de mes doubles comptes.
Bien-sûr, je ne lui ai pas donné mon numéro perso, mais mon numéro secondaire. Une ligne que je réserve à mes fréquentations officieuses et autres contacts distants. Mais je ne comprends quand même pas ma logique de la veille.
Une fois lavé, je ferme le robinet puis sors de la cabine, m'enroulant une serviette autour de la taille et peignant rapidement mes courts cheveux avant de me brosser les dents.
Je pars ensuite en direction de ma chambre, me choisis des habits confortables (t-shirt, sweat-shirt et jogging) et les enfile avant de retirer les draps sales de mon lit et de les remplacer par des propres.
Je place ensuite le reste de mon linge sale dans ma machine à laver puis lance un programme avant d'enfin me laisser tomber sur le lit et d'allumer la télé.
Après vérification, je constate que Rick ne m'a rien envoyé et n'a rien posté sur Facebook non plus. La patience n'étant pas mon fort, je pousse un soupir puis me concentre sur la télévision, y voyant une excellente façon de passer le temps.
~🎤~
Quelques heures plus tard, la voix d'Harley dans l'interphone de ma chambre vient me déranger dans mon observation attentive des formes de Tom Ellis (alias Lucifer).
- Ouvre-moi la porte ! Tu n'as pas le droit de me fuir de la sorte, chante Harley d'une voix traînante et mièvre.
Je soupire, mets sur pose, et me saisis de la commande de sécurité, accrochée au mur derrière mon lit. Je presse le petit bouton vert servant à déverrouiller la porte d'entrée, et appuis sur le bouton « mute » de l'interphone, m'étant fin à la reprise catastrophique de « Le renouveau », de La Reine des Neiges, par Harley.
Et moins d'une minute plus tard, elle entre dans ma chambre, ses courts cheveux noirs retenus en arrière par un élastique, un épi rebelle tombant néanmoins devant ses yeux.
- Journée Netflix&Chill ? elle m'interroge en s'installant à côté de moi.
- À peu près ça oui, je confirme.
- J'ai cru ne jamais arriver, pour finir, on a dû s'arrêter à la pompe, il y avait une attente mortelle.
Ôtant ses chaussettes, elle tire un morceau de couverture à elle puis pioche dans mon paquet de Schoko-Bons.
- Eh, vas-y fait comme chez toi pouffiasse, je remarque.
- Techniquement, je suis un tiers chez moi ici.
Je grimace et soupire. Lui accordant le point pour cette fois.
La villa parisienne dans laquelle nous nous trouvons appartient au groupe, et est donc « partagée » par ses trois membres : Harley, Maxime et moi-même. Cependant, je suis le seul à y vivre à l'année, Harley ayant un appartement en centre-ville et Maxime une petite maison en banlieue.
- Elle passe quand la femme de ménage ? me demande la guitariste en débloquant Netflix.
- Elle est venue hier, elle m'avait laissé une note sur le frigo, mais je l'ai pas lue. Pourquoi ?
- Y'a plein de poussière sur la PlayStation en bas, et la poubelle est pas vidée, nos cartons de kebab de jeudi dernier y sont encore. Elle doit pas se casser le cul la nana.
Je pousse un autre soupir et note mentalement d'aller vérifier les dires de mon amie plus tard.
- Bon, sinon, à part Tom Ellis et un gigot de rien saupoudrait de rien, on mange quoi ?
- J'sais pas, commande un Uber, j'veux une pizza raclette.
- Pourquoi c'est moi qui commande ? T'as peur d'appeler tapette ?
- Je t'emmerde Dingo, je soupire.
- Et moi, je t'encule, c'est plus sportif, dit-elle, un insupportable sourire collé sur sa face.
Un échange cordial de doigt d'honneur plus tard, Harley se lève pour aller passer commande dans le couloir.
Les bonnes manières et la politesse ? Nous pas connaître. Mais c'est comme ça qu'on s'aime, du moins je suppose.
Nous nous connaissons depuis le primaire, et d'aussi loin que je me souvienne, nous avons toujours fait bande à part, Harley, Maxime, moi et un couple d'amis maintenant partit vivre en Amérique. À nous cinq, nous étions un groupe à part.
Ni tout à fait intégrés aux autres élèves, ni tout à fait rejetés. Un entre deux qui nous avait toujours pleinement satisfait.
Au début du collège, Harley avait commencé à jouer de la guitare pour imiter notre ami Flinn Carlton dont le père était guitariste.
Vite jaloux, Max les avait suivis dans leur délire en apprenant à jouer de la batterie. D'abord pour rire, je leur avais écrit une chanson, étant fortement porté sur le littéraire. Ils s'étaient alors occupés de produire une bande-son et m'avaient demandé si je voulais bien chanter le fameux texte. Pour leur faire plaisir, j'avais accepté. Et étrangement, je m'étais pris au jeu.
À fond dans notre trip, on s'est donc retrouvé presque chaque week-end dans le garage de chez Flinn pour jouer de la musique ensemble.
Puis un jour, alors que nous étions tous en Terminale, Iris Martin (dernière membre de notre petit Club des Cinq et petite amie de Flinn) nous avait filmés à notre insu durant quatre chansons puis postées sur YouTube.
Et là, ce fût le buzz. L'audio enregistré sans images dans le garage miteux du guitariste avait fait plus d'un million de vues en moins de quelques jours.
Tout le monde cherchait qui nous étions, un rêve monstrueux. Nous vivions un véritable conte.
Et ça ne s'arrêta pas là, à notre plus grand bonheur, une maison de disque nous avait contactés pour produire nos chansons. Nous demandant par la même occasion de monter un groupe, se montrant désireuse de nous produire dans sa catégorie « jeunes talents ».
Ainsi était né Epsilon. Cinquième lettre de l'alphabet grec, car nous étions cinq : notre succès, nous le devions à Iris.
J'étais Alpha, le premier, chanteur.
Harley était Bêta, la deuxième, guitariste.
Maxime était Gamma, le troisième, batteur.
Flinn était resté seulement un an avec nous sous le nom de Delta, le quatrième. Il occupait le rôle de second guitariste. Mais étant plus centré école que musique, il avait choisi de partir étudier aux États-Unis, sa terre natale, avec Iris.
Nous avions décidé de notre anonymat ensemble à nos tout début afin de pouvoir séparer notre vie professionnelle de notre vie personnelle.
Et étrangement, l'effet boule de neige avait voulu que notre absence de réelle identité attire encore plus l'attention sur nous.
Personne n'a vu nos visages sans nos déguisements, pas même le staff du groupe, personne ne connaît ne serait-ce que nos prénoms. Hormis nos chauffeurs et notre producteur.
Harley revient s'échouer à côté de moi, fière de m'annoncer que notre nourriture arriverait dans quarante minutes, soit le temps de regarder un autre épisode de Lucifer.
Mais elle n'est pas du genre à se taire et à regarder calmement quoi que ce soit, alors, pas même cinq minutes plus tard, elle se tourne vers moi et me fixe jusqu'à ce que je pose mes yeux sur elle.
- Bon, puisque tu ne t'expliques pas tout seul, je vais te passer à la questionnette Lewis.
- Qu'est-ce que tu me baves ? je demande.
- Tu foutais quoi avec le téléphone du mec blond à la sortie hier soir ?
Je glousse et me reporte sur la télévision en lui répondant, portant un uf en chocolat à ma bouche par la même occasion.
- Alors là, si je le savais moi-même, j'aimerais bien te le dire, crois-moi.
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