Chapitre 29
- Je te promets que c'est la dernière fois June.
La dernière fois ? June connaissait que trop bien Johanne pour être sûre qu'elle lui mentait.
- Pour ma part je peux te confirmer que c'est la dernière fois, lança June avec humeur.
Johanne passa son bras autour de son épaule tandis qu'elles entraient dans la boîte de nuit. La musique tonnait comme l'orage, les jeux de lumière l'éblouissaient déjà. June cacha ses yeux en traversant la piste de danse et se dirigea vers la première banquette de libre.
- On s'amuse un peu c'est tout June, on profite de la vie ! S'exclama Johanne en sautillant comme une enfant.
- Il y a s'amuser et en abuser, contrat-elle en parcourant la piste de danse nerveusement. Et puis je ne suis pas rassurée depuis que Anderson m'a rendu visite en pleine nuit.
Johanne s'installa à ses côtés, le regard inquiet.
- Ne t'inquiète pas, Simon et moi on va te raccompagner.
Et pourtant, ça ne l'avait pas empêché de frapper à sa porte comme un fou furieux il y a deux jours. Dire qu'elle avait crû qu'il l'oublierait après sa rencontre avec Enzo.
Enzo...
Son cœur se serra sur l'instant. Pas une seule journée ne passait sans qu'elle ne pense pas à lui. Profondément blessée, June avait fini par se faire une raison. C'était fini. Définitivement terminé. Elle ne le reverrait jamais. Tristement elle tourna son regard vers Johanne qui elle, resplendissait de bonheur avec Simon, un jeune homme qu'elle avait rencontré quatre jours plus tôt.
- Comment fais-tu pour offrir ton cœur si facilement sans avoir peur d'être blessée ?
Johanne haussa des épaules en saisissant son verre de vodka.
- À force d'avoir le cœur brisé tu finis par t'y habituer ma belle June.
June vivait sa première peine de cœur et elle avait l'impression d'être paralysée par la tristesse osant à peine envisager son futur. Dire qu'elle avait toujours pensé qu'en se préservant elle échapperait à ça.
Regretter ? Jamais !
En dépit de la froideur avec laquelle Enzo lui avait fait comprendre qu'elle avait fait le bon choix, June ne regrettait rien. Enzo avait réveillé en elle une femme avec un peu plus d'assurance. Il avait su réveillé son corps, mais aussi son cœur qu'elle protégeait vaillamment depuis des années.
- À la tienne ! S'écria Johanne d'une voix excitée.
June força un sourire et trinqua avant de boire son verre en grimaçant.
- June !
À l'écoute de cette voix et malgré le bruit de la musique, June la reconnut et son visage se fissura de colère.
Tom.
- Qu'est-ce que tu fais ici ? S'enquit-elle en se levant pour le confronter.
Son frère s'approcha pour saisir son bras.
- Il est temps pour toi de rentrer.
June se dégagea violemment en le fusillant du regard.
- Rentrer ? Depuis quand tu joues au grand frère protecteur ?
Ce dernier s'agita nerveusement en se grattant l'arrière de la tête.
- Depuis que Enzo Lazzari m'a promis la mort si jamais il t'arrivait malheur.
Sous le choc, June pouffa de rire en portant ses mains à son front.
- Je suis en âge de me garder toute seule, tu devrais plutôt aller dire à ton ami de me laisser tranquille !
June descendit les marches pour se fondre dans la masse mais fut rattrapée par Tom qui lui bloqua le passage.
- J'ai merdé June, je me suis comporté comme une enflure et je suis désolé.
June le poussa en frappant ses mains sur son torse.
- Tu as volé de l'argent ! Tu as transformé la maison de grand-mère en bordel et tu as laissé ton abominable ami me faire des propositions indécentes. Comment peux-tu oser venir devant moi avec ce genre d'excuse.
Rictus amer aux lèvres June secoua de la tête avec dégoût et passa devant lui pour rejoindre le bar.
- Tu as raison, j'ai été horrible avec toi mais maintenant je vais faire des efforts pour te prouver que j'ai changé, insista-t-il en la suivant.
- Tu as dit la même chose la dernière fois et regarde ce qu'il s'est passé, rétorqua-t-elle en faisant signe au serveur.
- Je ne savais pas qu'il s'agissait du patron de la mafia russe quand je l'ai volé June. Crois-moi j'en ai pris conscience lorsqu'il m'a chopé à Las Vegas, ce type est effrayant.
June sentit un frisson parcourir son corps alors que des flashs d'Enzo le visage ensanglanté submergeaient son esprit.
- Écoute Tom, je sais que tu n'es pas là pour jouer les héros, alors dis-moi ce que tu veux.
Comme elle l'avait prédit son frère ne répondit pas, confirmant ses propos.
- J'ai besoin de cent dollars, s'il te plait June.
Tandis que les larmes montaient toutes seules June plaqua un billet de cent dollars sur sa poitrine et s'en alla en essuyant sa joue gauche. Elle connaissait que trop bien son frère pour espérer qu'il s'intéresse à elle. Soudain, elle perdit goût à la fête et plus les heures passaient plus elle se rendait compte qu'elle n'était pas à sa place dans ce genre d'endroit. Certes elle s'était bien amusée durant ces trois derniers week-end mais ce n'est pas ici qu'elle voulait être. Dans son lit sous une tonne de couvertures lui paraissait un meilleur endroit.
- Je crois que je vais partir Johanne, je suis fatiguée.
- Je comprends mais tu vas avoir un problème je crois, regarde ton frère.
June se tourna dans la direction qu'elle lui indiquait et trouva son frère complètement ivre mort sur une banquette voisine.
- Je crois June que tu devrais laisser, intervint Johanne quand elle s'élança à son secours.
- C'est mon frère, malheureusement.
- Ça n'excuse pas tout June, répondit son amie sur un ton ferme. Il ne t'apporte que des ennuis, il ne veut pas se faire soigner. Il faut que tu arrêtes de t'en occuper tu as fait tout ce qui est en ton pouvoir pour le sauver mais je crois que c'est trop tard pour lui. Oh mon dieu June regarde-le.
June n'osait plus tourner le regard mais le fit quand même en le regrettant.
- Voilà à quoi on servi tes cent dollars, il voulait s'acheter de la drogue.
Déçue, elle se leva pour le rejoindre.
- Ma petite sœur adoré, dit-il avec un sourire dansant alors qu'il essayait de se lever.
- Je vais te raccompagner lève-toi.
- Je vais changer June, je te le promet, hein.
Ignorant ses propos auxquels elle ne croyait plus, June l'aida à se lever en l'aidant à passer un bras autour de sa nuque.
- Ça va aller, je gère, dit-elle à Johanne en se dirigeant vers la sortie.
La nuit était noire et glacial, une légère couche de neige recouvrait le trottoir. Son frère était si lourd qu'elle avait dû mal à marcher.
- Un coup de main ma jolie ?
June se stoppa net en confrontant Viktor qui venait d'apparaître de nul part.
- Non, je me débrouille, répondit-elle sèchement.
Le cœur martelant ses tempes, elle le dévisagea avec un goût amer dans la bouche. Il ressemblait à un Mac, le teint grisonnant, les cheveux plaqués en arrière. June inspira profondément et poursuivit son chemin avant de sentir son frère se détacher d'elle.
- Je vais vous aider, insista-t-il ma voiture et juste ici pas très loin, je sais où il habite.
Méfiante, June plongea sa main dans son sac en agrippant son spray aux poivre tout en le suivant dans la rue adjacente.
- C'est en partie à cause de vous qu'il est devenu comme ça, lui cracha-t-elle au visage au moment où il referma la portière. Dites à mon frère que je ne veux plus le revoir.
- Ne part pas si vite, lui dit-il en saisissant son bras. Ça va faire tellement longtemps que l'on ne s'est pas vu. Je vois que tu es seule mais où est donc passé cet homme tatoué qui prétend être de la mafia hein ?
June tenta de garder son sang froid mais plus elle sentait son haleine fétide plus la peur commençait à l'empêcher de respirer.
- C'en est un, et il n'est pas avec moi ce soir je dois le rejoindre maintenant lâchez-moi !
- Tu mens petite garce ! Tu es toute seule depuis des semaines, à croire qu'il ne tenait pas tant que ça à toi.
June tenta de lui faire lâcher prise et le frappant et perdit son sac à main dans la lutte.
- Ton innocence m'intéresse et je suis prêt à payer le prix fort pour ça, chuchota-t-il en lui prenant le visage avec ses doigts qui sentaient le cigare.
- Allez en enfer, répondit June d'une voix tremblante de dégoût et de peur mêlés.
Il se mit à rire tout près de son visage et se mit à le humer avec perversité.
- Tu sens tellement bon...
June tenta de lui prendre les doigts accrochés à son visage pour qu'il la relâche en réprimant une grimace douloureuse. Et alors qu'elle se pensait fini, prisonnière de ses griffes, June entendit un bruit de plusieurs moteurs à la fois s'ensuivit d'un crissement de pneus. Viktor lâcha sa prise sur elle, enfin. June se gorgea d'une immense bouffée d'air en se retenant à la voiture massant son visage douloureux. Les phares des voitures l'empêchaient de voir correctement jusqu'à ce qu'une silhouette sombre se mette devant l'un d'entre eux. June tenta de distinguer l'inconnu alors qu'il avançait dans la rue sombre puis enfin, il émergea des ténèbres, et son cœur sursauta en découvrant l'identité de son sauveur.
Il s'agissait du diable...son diable...
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