Chapitre 17
— Mais je veux pas partir moi papa !
— Il le faut, fiston.
Han se mit accroupi, cherchant à être à la même hauteur que son fils. Le petit Anakin était désemparé à l'annonce que son père lui avait faite. Il ne comprenait pas pourquoi son propre père souhaitait qu'il parte loin d'ici. Il n'avait pourtant commis aucune bêtise. Han lui posa la main sur l'épaule. A quelques heures du départ pour suivre son oncle Luke, Leia avait annoncé la décision à son fils. Mais il était toujours perturbé. Han était revenu à temps pour parler une dernière fois à son fils. La brouille avec son beau-frère la veille était une chose. Mais Anakin était tout pour lui. Il ne pouvait pas ne pas le voir une dernière fois, avant bien longtemps. Pour lui, mais aussi pour Anakin. Il imaginait bien ce que pouvait impliquer se trouver loin de ses parents pour un jeune garçon. Han ne voulait pas qu'il vive sans ses parents, comme cela avait été le cas pour lui. Mais il était trop tard. Le choix était acté. Il s'agissait d'être présent en tant que père. Son fils n'avait que faire de ses états d'âme.
— Maman t'a tout expliqué, non ? Tu pars avec tonton Luke, essaya-t-il de dire en prenant un ton enjoué. Il va t'apprendre à devenir un Jedi ! C'est pas génial ça ?
— Mais je veux rester ici avec toi et maman ! Je veux pas partir.
— Ecoute fiston. La vie est faite de moments difficiles, mais c'est comme ça, tenta d'expliquer Han, conscient que ses paroles avaient une portée plus grande que la seule situation de son fils. Tu as un destin qui t'attend, tu vas apprendre à faire de grandes choses. Et puis, ce n'est pas comme si on n'allait jamais se revoir ! Tu reviendras nous voir d'ici moins d'un an.
— J'veux pas de destin, j'veux toi et maman et pis c'est tout !
— Viens par là, fit-il avant de longuement soupirer.
Ses lèvres tremblaient, et ses yeux commençaient à s'humidifier. C'était d'autant plus difficile de voir son enfant s'éloigner, alors que celui-ci pensait comme son père. Han tentait de le convaincre de quelque chose qu'il désapprouvait. Rarement il avait été aussi tiraillé dans sa vie. Il avait beau se dire qu'il devait agir pour le bien de son fils, et ne pas l'exposer aux querelles des adultes, l'effort était d'une difficulté presque insurmontable. Même s'il réussissait à le faire, nul doute qu'Han paierait ce sacrifice ultérieurement, il en était convaincu.
— Ton oncle s'occupera bien de toi, et tu seras avec ta petite cousine.
Le petit Anakin pleurait à chaudes larmes à son tour. Han réussit à ne pas craquer au prix d'un effort considérable.
— Tu vas me manquer papa.
— Toi aussi tu vas me manquer mon fils.
Une fois leur étreinte terminée, il plaça ses mains sur les épaules de son fils. Il le regarda profondément dans les yeux, tentant de prendre un air plus sérieux.
— Je te fais confiance pour bien prendre soin de ta cousine, d'accord ? Tu seras aussi responsable d'elle, alors je veux que tu me rendes fier.
— D'accord !
Le jeune Anakin avait repris un air plus joyeux. Han également, au moment où il posa sa main contre le visage de son fils. Mais seulement parce qu'il avait réussi à dissimuler sa mélancolie. Il profita une dernière fois de la vision de son fils qui le rendait si fier, qui lui-même était si heureux d'avoir un père aimant. Sans qu'aucun d'entre eux ne sache que c'était la dernière fois qu'ils expérimentaient une relation père/fils forte et apaisée. Du moins pas avant une vingtaine d'années...
*****
Alana avait son regard fixé sur le visage de la twi'lek. Elle comprit ce qui allait se passer. L'expression qu'elle affichait était manifeste. Mais c'était plus que cela. Alana comprit à l'instant ce qu'il se passait, comme si elle se trouvait aux côtés de Kyrsta lorsque son père lui avait dit ces mots.
— Kyrsta ! cria-t-elle. Non ! Tu peux encore renoncer, tu peux choisir ton destin !
La twi'lek leva son regard en direction d'Alana. Elle hésitait. Kyrsta ressentait la crainte et la tristesse qui transparaissait de la jeune femme. Cela la faisait douter encore davantage. Elle était perdue. Le temps était passé, l'effet résiduel du lien qu'elle avait partagé avec cette femme devait s'être dissipé. Mais elle n'arrivait pas à se convaincre de passer à l'action. Crail et Chewbacca commencèrent à comprendre ce qu'il se tramait, mais Anakin se trouvait trop loin pour déchiffrer la scène. Il était certain que quelque chose allait se passer, mais il n'arrivait pas à discerner quoi. Il était bien trop bouleversé de voir son père aux mains de l'ennemi pour cela.
— Kyrsta ? fit Maul d'un regard qui affichait une inflexibilité quant à l'ordre qu'il avait donné à sa fille.
— Non, ne fait pas ça ! lui intima de nouveau Alana.
Kyrsta regardait longuement Alana pendant qu'elle luttait intérieurement. Elle n'en avait pas envie. Jamais elle n'avait voulu de cela. La présence et les mots de la jeune Jedi résonnaient en elle. Sans s'en rendre compte, elle tourna son regard en direction de son père. Et c'est à cet instant que tout se joua. Le simple fait de rencontrer le regard de la seule personne qui importait dans sa vie, la seule personne pour qui elle-même importait, balaya son hésitation. Kyrsta prit conscience que la lutte venait de prendre fin. Elle regrettait toujours d'en arriver là, mais elle avait arrêté son choix, aussi âpre et horrible était-il. Elle se tourna de nouveau vers son otage qui se tenait devant elle, de dos.
Le rugissement de Chewbacca résonna dans toute la pièce, couvrant le râle d'Han lorsque la lame verte que tenait Kyrsta lui transperça le cœur. Il craignait cette issue, mais le wookie n'était pas parvenu à bloquer la profonde émotion qui le traversait. Alana étouffa un cri profond entre ses mains, et tomba à genoux. Elle n'avait pas été en mesure de l'en empêcher. A mesure que sa propre tristesse montait, elle expérimentait les émotions qui traversaient la twi'lek. Mais elle ne pouvait éprouver de compassion. Pas à cet instant. Anakin fixa la scène, immobile. C'était comme si le temps s'était arrêté. La lame de sa cousine dans les mains de cette twi'lek, bourdonnant à travers la poitrine de son père. Son canal d'interprétation était cette fois d'une lenteur significative, mettant un temps infini alors que l'information se frayait un chemin dans son esprit, avant d'activer les profondes émotions qui y correspondaient. Le cri de Chewbacca était ce qui le fit émerger. Il tenta de crier à son tour, mais ne fit que déglutir et trembler. La lame du sabre laser d'Alana s'éteignit. Han baissa la tête, observant le trou cautérisé de sa blessure à travers sa poitrine. Il releva la tête, cherchant son fils du regard au loin. Il devait poser la main sur le visage d'Anakin, une dernière fois. Han ne se rendit pas compte à quel point Anakin était loin de lui. Mais il tenta tout de même de lever sa main vers lui, pour lui adresser un dernier mot. Lui dire que ce n'était rien. Lui dire que tout allait bien se passer. Lui dire qu'il l'aimait, et qu'il n'avait jamais été aussi fier de lui. Au lieu de cela, il commença à défaillir. Sa vision se perdit dans le lointain, devenant floue avant de s'écrouler. Han Solo perdit la vie avant même qu'il n'heurte le sol. C'est lorsque sa tête rebondit à l'impact, dans un bruit sourd, qu'Anakin laissa ses émotions se frayer un chemin à travers sa gorge.
— Papaaa !!! hurla profondément le jeune homme, avant que son cri ne se transforme en son guttural de désespoir.
Son cri fit frissonner Alana, qui tourna son regard dans sa direction. Kyrsta également, qui jusque là fixait toujours le corps inerte de l'homme qu'elle venait de tuer de sang froid. Elle ne semblait pas pouvoir en détacher le regard jusqu'ici. Maul affichait clairement sa satisfaction. Il ne se réjouissait pas de la mort d'Han en réalité, homme qu'il estimait. Mais de l'effet produit sur ce jeune Jedi, qui n'annonçait que des promesses pour l'avenir. Brogus, lui, poussa un petit son, un grognement satisfait. En réaction au titan cuirassé, Anakin se tourna vers lui. Quelque chose se brisa dans l'esprit du jeune homme, au moment où une poigne immatérielle lui avait enserré le cœur. Un afflux surpuissant, insoupçonné, surgit brutalement. Il ne se posait plus de question. Son cœur était trop meurtri pour s'attarder sur la nature de ce qu'il expérimentait. L'air se mit à crépiter. Une vague de puissance montait en lui. La pression de l'air atteignit son paroxysme, au moment où une violente tempête d'éclairs violets jaillit de ses mains en un flot dévastateur, frappant les murs d'énergie autour de lui. Anakin hurlait alors que les éclairs jaillissaient de ses mains. Tous étaient stupéfaits par ce spectacle aussi incroyable qu'inattendu. En particulier Brogus, qui était aux premières loges. Maul semblait plus savourer l'instant que d'être réellement impressionné. Une surprise bienvenue, songea le zabrak.
Mais tous n'en comprirent pas immédiatement les effets. Cette tempête d'éclairs était dévastatrice. Les murs d'énergie commencèrent à perdre de leur intensité, vacillants et s'estompant même par endroits. Crail comprit le premier qu'ils n'allaient plus être protégés. Il enjoignit ses compagnons à le suivre pour se mettre à couvert. Il fut contraint de tirer Alana par le bras, elle qui n'arrivait pas à détacher son regard du spectacle qu'offrait le déchaînement de la détresse émotionnelle de son cousin. Elle était encore bouleversée par le décès d'Han, puis par les émotions de Kyrsta, qui commençaient cependant à s'estomper. Mais voir son cousin ainsi la blessait terriblement. Elle aurait voulu l'aider, mais elle ne savait que faire, étant elle-même perdue à l'instant.
Ils se retrouvèrent tous les trois à couvert, derrière le renfoncement d'un mur. Crail et Chewbacca se mirent en position, prêts à faire feu sur leurs ennemis. Une fois les barrières complètements désactivés, ils ouvrirent le feu tous les deux. Crail pu abattre plusieurs gardes avant qu'ils ne réagissent. Chewbacca en revanche, avait une cible bien précise en tête. Il visait celle qui venait de tuer son ami. Elle devait payer, telle était la règle. Les tirs de Crail avaient ramené tout le monde à la réalité, et à l'urgence de la situation. Kyrsta regarda le wookie en train d'armer son arbalète et d'ajuster son tir. Mais elle demeura immobile. Elle comprenait ce qui allait se passer. Mais elle n'avait plus la force ni la volonté d'agir. Elle était complètement perdue... Chewbacca fit feu dans un rayon à dispersion serrée, pour infliger des dégâts dévastateurs. Elle ne bougeait toujours pas, même lorsque Maul bloqua le tir. A l'aide de la Force, le zabrak suspendait le rayon d'énergie immobile dans l'air. Ce dernier émettait un bruit électrisant, cherchant toujours à progresser vers sa cible. Il tourna son regard vers sa fille.
— Kyrsta ! cria-t-il.
Elle réagit enfin, et se tourna vers son père. Ce n'est qu'ensuite qu'elle réalisa pleinement la situation, que le tir se dirigeait vers elle. Elle s'écarta d'un habile pas de côté. Maul pu enfin relâcher son effort, le rayon de l'arbalète du wookie allant creuser un trou béant à travers plusieurs épaisseurs de murs, sur plusieurs pièces différentes, avant de finalement stopper sa course. Chewbacca reporta ses tirs sur les mêmes cibles que Crail, sentant qu'abattre des êtres sensibles à la Force à lui seul était peine perdue. Il y avait de toute façon suffisamment de cibles sur lesquelles il était en mesure de laisser éclater sa rage. Les ennemis furent nombreux à tomber. Maul puisa à nouveau dans la Force, arrachant des morceaux de structures fixés aux murs et aux plafonds, les plaçant au sol pour offrir des options de couverture non négligeables pour ses troupes. De son côté, Anakin réussit à interrompre le flot continu d'éclair qui jaillissait de ses mains. Il ne réalisa pas pleinement encore ce qu'il venait d'accomplir. Mais une chose était certaine. Il n'y avait plus rien qui le séparait de son adversaire. Il dégaina son sabre laser avec rage, sa lame bleue vrombissant tendue en direction de la brute.
— On va voir si tu rigoleras toujours après ça ! se contenta-t-il de lancer avec détermination, juste avant de foncer vers Brogus.
Le titan cuirassé eut tout juste le temps d'allumer son épée laser pour réussir à parer le premier coup de son adversaire. La violence de l'impact lui fit légèrement perdre ses appuis. Contraint de mettre un genou à terre, il conservait toujours son sabre levé en position de parade. Brogus subissait la déferlante de coups du jeune Jedi. Anakin faisait pleuvoir les frappes par le haut, sans vraiment varier ses angles d'attaque. Le plus fort possible. Le plus rapidement possible. L'adrénaline hurlait dans ses veines, l'intimant de laisser toujours plus libre court à la puissance contenue dans ses muscles congestionnés au possible. Chaque coup renforçait sa détermination autant qu'il plongeait son corps dans un état de saturation. Anakin se persuadait qu'il ne devait s'arrêter sous aucun prétexte. Il devait continuer de frapper, encore et encore, toujours plus fort. S'arrêter signifiait la fin de tout, laisser cette tristesse et ce chagrin le faire souffrir. Alors il frappait, encore et toujours. Puisant au maximum dans la Force et la rage qui l'habitait, il se contentait de maintenir son adversaire en difficulté. Tous les muscles de son corps étaient littéralement à bout, douloureux au moindre mouvement. Par chance, l'adrénaline évacuerait cette douleur le temps du combat. Il serait en mesure de l'achever, et aurait tout le temps pour souffrir après coup.
Brogus cédait toujours du terrain. Mais en vérité, il en profitait pour préparer sa prochaine attaque. Cette déferlante était impressionnante. Mais il avait quelque chose en réserve contre cela. Il préparait une impulsion visant à percuter le jeune Jedi, tel un taureau chargeant son ennemi, en ignorant les éventuels dommages subis. Il misa sur sa cuirasse titanesque. Il se lança après avoir puisé dans ses puissants appuis. Sa course ne fut qu'à peine ralentie lorsqu'Anakin le toucha à l'épaule avec son sabre. Protégé, le titan cuirassé fut en mesure de le charger tête baissée, droit vers l'avant, et le projeter au sol d'une charge d'épaule, tel un mastodonte inébranlable et inflexible. Il continua sa course sur plusieurs mètres, même après avoir mit son adversaire au sol. Comme si son déploiement de puissance était trop fulgurant pour pouvoir arrêter net sa course.
La charge de Brogus mit fin à la vague de rage incontrôlée d'Anakin. Le jeune Jedi se releva rapidement, au moment où le titan cuirassé se retourna vers lui. Il regagna légèrement en lucidité, réalisant que des attaques plus techniques, plus conventionnelles, seraient bien plus pertinentes qu'une pluie de frappes désordonnées. Il était encore survolté, suite à la décharge d'adrénaline dans tout son corps, pour songer à son précédent combat contre le titan cuirassé pour l'instant. Brogus chargea de nouveau, épée laser à la main, et Anakin se lança également. Leurs armes se heurtèrent, et les deux opposants se retrouvaient à quelques dizaines de centimètres l'un de l'autre. Ils pouvaient presque sentir le souffle de leur adversaire, leurs visages crispés par l'effort maintenu.
Pendant que Maul fabriquait des abris de fortune pour ses troupes, Alana sentit que le moment de passer à l'action était venu. Toutes ces émotions l'avaient profondément ébranlées, mais l'avaient plus rapidement ramenée à la réalité. Elle avait réussi à recouvrir presque toutes ses capacités. A présent, il n'était plus question de rester sur la touche, à regarder les autres se battre. Son oncle venait de se sacrifier pour lui donner une chance de racheter ses erreurs. Il n'était pas question de la laisser passer. Elle sortit à découvert, levant son bras en direction de Kyrsta. Cette dernière n'eut pas le temps de réagir lorsqu'elle vit le sabre laser s'échapper de sa main. Elle vit ensuite la lame verte jaillir dans la main d'Alana. La jeune Jedi se plaça en position offensive, et chargea sans attendre en direction de la twi'lek. Elle affichait une détermination que la twi'lek ne lui avait pas connue lors de leur précédent affrontement. Kyrsta prit une posture défensive, tout en dégainant son fouet laser à son tour. Elle lança ses frappes, amples et courbées, avant que son adversaire ne soit trop proche. Mais Alana avait retenu sa leçon. Cette fois-ci elle eut la présence d'esprit d'esquiver, au lieu de tenter la parade avec son sabre. Elle fit une roulade sur le côté, reprenant sa course avant qu'un nouveau coup de fouet l'oblige à esquiver une nouvelle fois. Il fallait pourtant qu'elle entre dans sa distance de frappe. Une fois qu'elle serait proche de Kyrsta, le combat changerait drastiquement. Mais la longueur et l'angle des frappes de cette arme rendaient l'approche difficile. Kyrsta continua à faire pleuvoir des attaques tout en courbes avec son fouet. Elle réussissait à maintenir son adversaire à distance. Alana se rapprocha davantage en choisissant de ne pas esquiver, optant pour une tactique risquée. Elle éteignit son sabre laser, au moment où le fouet l'aurait touché, pour bondir rapidement en avant. Elle activa ensuite son sabre, mais fut de nouveau contrainte d'esquiver les coups. Sa tactique était audacieuse, mais risquée. La retenter ne garantissait pas le même succès, sans l'effet de surprise. Alana choisit donc de ne pas prendre de risques inconsidérés pour le moment. Même maintenant, elle ne parvenait plus à se rapprocher de son adversaire. La jeune Jedi tenta alors d'étudier le maniement de l'arme, et les différents schémas de frappe de son adversaire en temps réel.
De leur côté, Crail et Chewbacca continuaient leur combat par couvert interposé. Malgré leur nombre réduit, ils parvenaient à égrener les forces adverses. Ils les avaient réduites presque de moitié, prenant un rythme leur permettant de les mettre en difficulté sans être contraints de prendre des risques inconsidérés. A l'écart des combats, Maul observait et évaluait toute la scène. Il vit son champion ne pas réussir à prendre le dessus sur son ennemi. Sa fille en mauvaise posture, incapable de toucher la fille de Skywalker. Ses troupes se réduire, petit à petit. Il évalua rapidement la situation. L'envie de se lancer à son tour dans le combat le démangeait atrocement. Mais il se contenta de demeurer à sa place. D'ordinaire, il se serait lancé dans la bataille sans retenue, laissant éclater sa rage pour décimer ses adversaires. Il réfrénait néanmoins ses pulsions, chose plus aisé désormais. Il avait changé, depuis sa glorieuse période. A l'époque, il était un bretteur émérite, au sommet de son art, craint dans toute la Galaxie. Mais il avait prit de l'âge. Subit une cuisante défaite, face à un adversaire moins talentueux que lui.
Il s'était depuis lors juré de ne plus jamais sous-estimer ses adversaires, en particulier les Jedi. Mais surtout, il estimait qu'il était trop tôt pour tenter d'anéantir la nouvelle génération de Jedi. Au delà de vains arguments et excuses, la réalité était tout autre. Il ne s'agissait pas de ses plans. Ceux qu'il avait élaborés pendant toutes ces années. Il avait attendu pendant trop longtemps. Préparé pendant trop longtemps. Pour simplement tout risquer dans une unique bataille. Son but était ailleurs. Il se trouvait dans une vision de la galaxie qu'il avait gardé pour lui seul. Qui sera laissé en héritage à sa fille une fois le moment venu. Car personne d'autre n'était au fait de ce qu'il réservait à cette galaxie. Un ordre nouveau, qui défierait l'entendement. Qui dépasserait tout ce qui avait déjà été tenté par les institutions s'étant succédées pendant des millénaires. Qui dépasserait ce que son ancien maître avait tenté d'accomplir.
Sidious... Maul chassa le souvenir de ce vieux décrépit de son esprit, car il ne devait pas laisser les émotions le troubler. Et il n'était pas question que ses plans ne soient bouleversés simplement parce qu'il croyait apercevoir une opportunité de victoire partielle, poussée par une vieille rancœur. Leur heure attendrait. La manière avec laquelle il comptait remporter sa victoire importait tout autant que la victoire elle-même. La vision qu'il avait expérimentée lui avait appris qu'aujourd'hui n'était pas la dernière heure des Skywalker. Pas encore. Ce spécimen qui venait de lui faire de l'effet allait peser dans la balance. A quoi bon vouloir le détruire dès maintenant ? Il contribuerait à semer le chaos face à sa menace principale. Ils s'entredéchireront, lui facilitant la tâche pour mettre son ambition en œuvre. Mais pour cela, il n'était pas question de les pourfendre ou de régler leur compte aujourd'hui. Le zabrak était animé par une discipline forgée par les désillusions et des pouvoirs sans limites pour l'enjoindre à résister à cet appel. Il était temps.
— Commencez à vous replier, lança-t-il à l'attention de ses troupes. Brogus, Kyrsta, vers les modules d'évacuation d'urgence !
Le titan cuirassé était à égalité avec Anakin. Mais l'intensité de ses frappes commençait à diminuer. Son adversaire ayant creusé dans sa condition physique en début de combat, la cuirasse titanesque commençait à se faire lourde. L'intervention de son seigneur fut presque salvatrice. Il sut alors qu'il lui suffisait simplement de repousser son adversaire. Mettre fin au combat, sans nécessairement le pourfendre, peu importe combien il en avait envie. Il rassembla rapidement ses dernières forces, pour lancer son attaque favorite. Un cri de Force ciblé sur Anakin. Le jeune Jedi eut tout juste le temps d'ériger une barrière de Force, pour se protéger des effets les plus dévastateurs de l'attaque de son adversaire. Il fut projeté sur une dizaine de mètres et heurta le sol. Brogus n'avait pas déployé sa pleine puissance. Il n'était pas question d'endommager la station, tant qu'ils étaient encore à l'intérieur. Satisfait, il fit demi-tour pour rejoindre rapidement Maul. Anakin n'était pas encore en mesure de le poursuivre. Il peinait à se relever, toujours sous l'effet de l'attaque du titan cuirassé.
Kyrsta maintenait toujours son adversaire à distance. Son attention se reporta également vers Brogus et son père, en train de se replier, ayant déjà passé la porte. Les soldats restants se repliaient également derrière eux. Elle comprit qu'il fallait mettre fin au combat rapidement, avant de se retrouver seule contre tous. Elle prépara un coup large, qui allait enserrer son adversaire sans qu'elle réussisse à esquiver. Pour ce faire, elle devait envoyer des feintes et des fausses pistes, pour que le coup soit fatal. Mais un léger doute manqua d'ébranler sa détermination. Ce qu'il fallait infliger à cette jeune femme pour avoir l'occasion de fuir. Alana avait senti que l'attention de son adversaire était moins focalisée sur ses actions. La jeune Jedi décida de saisir cette opportunité sans attendre. Lorsque Kyrsta lança les quelques coups plus classiques en préparation de son coup fatal, Alana passa à l'action, devinant que son adversaire préparait quelque chose. La frappe du fouet laser était moins claquante que les autres. Alors que Kyrsta voulait la pousser à une esquive qui lui serait probablement fatale le coup d'après, la jeune Jedi prit la décision de ne pas esquiver. De parer fermement le coup. La projection d'énergie du fouet commença rapidement à recouvrir la lame verte. Satisfaite, Alana pivota, tournant son buste pour donner plus de puissance à son mouvement, et frappa avec son sabre vers l'arrière. Le fouet de son adversaire lui fut arraché des mains dans la manœuvre.
Kyrsta ne s'attendait pas du tout à une telle tactique. Se retrouvant désormais désarmée, elle était prise au dépourvu. Ayant débarrassé son adversaire de son arme, Alana se lança vers elle aussi vite qu'elle le pu. Elle prépara une frappe rapide et décisive, déterminée. Mais sa course fut cependant stoppée net, à un bon mètre de Kyrsta. Alana se lançait vers elle en position d'attaque, mais la twi'lek ne faisait rien. Elle n'avait adopté aucune position. Elle avait en réalité sentit que ses alliés s'étaient enfuis. Que son père avait quitté la station. Pourquoi l'avait-il laissé ? Il l'avait sauvée et permis de se ressaisir il y a quelques instants à peine. Elle venait de le retrouver, mais elle devait l'avoir déçu. Profondément déçu. Il avait du la voir combattre, et ne pas réussir à vaincre son adversaire. A quoi bon se battre s'il n'était plus là ? Pourquoi lutter, si ce n'était plus pour lui ? Pourquoi fuir ce qu'elle venait de commettre, s'il ne se trouvait pas à ses côtés ? Elle estimait devoir payer pour ce qu'elle avait fait. Ce n'était que justice que ce soit Alana qui se venge, pour tout ce qu'elle avait infligé à la jeune Jedi. Et au moins, cela mettrait ainsi fin à son calvaire, cette culpabilité qui la taraudait déjà autant que la solitude qui apparaissait de plus en plus clairement...
— Qu'est ce que tu attends ? fit Kyrsta d'un air désabusé lorsqu'elle vit son adversaire hésiter.
— Pourquoi ? chercha-t-elle à comprendre.
En guise de réponse, la twi'lek tomba à genoux devant Alana. La jeune femme comprit le désarroi qui habitait Kyrsta. Il ne restait plus qu'elle dans la pièce. Tous ses alliés s'étaient enfuit. Elle acceptait son sort. Crail et Chewbacca se montrèrent à découvert, s'approchant ensuite d'Alana. Anakin était à nouveau sur ses pieds. Il bondit rapidement pour les rejoindre lorsqu'il vit la scène. Après s'être réceptionné, il marcha rapidement, avançant d'un pas déterminé vers Kyrsta. Il leva son sabre encore activé en approchant de la twi'lek, quand Alana s'interposa.
— Ani, non ! lui lança-t-elle.
— Quoi ?! Qu'est ce que tu fais ? répliqua-t-il sur un ton grave.
— Elle est sans défense, et elle s'est rendue. Nous allons l'emmener avec nous.
— Pas question ! s'exclama Anakin. Elle doit payer pour ce qu'elle à fait à mon père ! Ce qu'elle t'a fait à toi !
— Non ! maintint-elle fermement.
Alana le voyait bien, il manquait terriblement de lucidité. Il en était peut-être conscient, mais il s'en fichait. Peu lui importait d'être lucide, de faire le meilleur choix. Il n'y avait qu'un seul choix valable à faire.
— Laisse-le faire, murmura Kyrsta.
— Il n'en est pas question ! cria Alana. Il y a eu assez de morts pour aujourd'hui !
Sa voix résonnait dans cette immense pièce presque vide, jonchée de cadavres et des traces du combat qui venait d'y avoir lieu.
— Ton père n'est pas là pour la leçon, lui lança son cousin d'un ton mauvais. Il n'y a que toi qui m'empêche de faire ce qui doit être fait !
— Si tu veux la tuer, il faudra d'abord te débarrasser de moi ! fit Alana, déterminée.
Anakin sentait sa colère grimper davantage. Il voyait bien qu'il n'allait rien pouvoir faire pour se débarrasser de sa cousine. Et il lui en voulait encore plus d'agir ainsi, sachant pertinemment que ce n'était pas juste qu'elle s'interpose sans qu'il puisse y faire quoi que ce soit. Qu'elle le prive de son droit légitime à la vengeance.
— Tu n'as pas le droit de me faire ça, Alana ! Pas à moi ! Pourquoi faire ça pour elle ?!
— Ce n'est pas seulement pour elle que je le fais, imbécile !
Sa dernière phrase gronda dans les ruines de la bataille, et provoqua un silence prolongé. Cet idiot était trop empli de colère pour se rendre compte qu'Alana agissait de nouveau pour son propre bien. Il n'était pas question qu'elle laisse son cousin arpenter une route sinueuse, en tuant de sang froid. Il en serait à jamais changé, détruisant tout ce qui faisait de lui l'homme qu'il était. Elle ne pouvait le laisser se faire du mal ainsi. Peu importait qu'il lui en veuille en retour, tant qu'il demeurait le vrai Anakin. Ce moment fut ensuite interrompu par le cri d'un signal d'alarme.
— Alerte ! Alerte ! lança la voix modulée. Début du protocole Carthage dans H moins dix minutes.
— C'est quoi ça ? s'interrogea Crail.
— Répond meurtrière ! vociféra Anakin en direction de Kyrsta.
— Verrouillage de la station, dispersion de gaz dans l'air, se contenta-t-elle de répondre.
— C'est ça le truc qu'on est en train de sentir ? s'inquiéta Crail en reniflant une odeur étrange.
— Il n'est pas toxique. Une fois le protocole arrivé à son terme, une surpression de l'air fait entrer le gaz en combustion. L'air s'embrase, détruisant tout composant organique.
Crail fit rapidement la déduction qui s'imposait quant à la marche à suivre.
— Alors on n'a pas de temps à perdre, conclut-il en tendant des menottes à Alana. On y va !
Anakin fut de nouveau abasourdi lorsqu'il réalisa ce qu'impliquait le geste de l'agent.
— Pas question de l'emmener avec nous ! lança le jeune Jedi.
— On n'a pas le temps pour ça Anakin ! Alors on se dépêche et on y va ! Si ça ne te plaît pas, tu peux rester ici si tu veux !
Le jeune Jedi se contenta de grogner, mais Crail avait raison. Ils n'avaient plus beaucoup de temps pour évacuer la station. Alana passa les menottes à Kyrsta, qui se laissa faire sans se débattre. Chewbacca n'approuvait pas non plus la décision. Mais il avait plus important à l'esprit à cet instant. Le wookie passa son arbalète laser dans son dos. Il se précipita vers le cadavre d'Han, le soulevant délicatement, portant dans ses bras le corps de son ami. Ils se mirent tous en route, Crail ouvrant la voie avec Alana tenant sa prisonnière, suivis par Chewbacca portant Han, Anakin se tenant à ses côtés. Ils reprirent le même chemin qu'ils avaient emprunté plus tôt pour progresser dans la station. Crail arrivait à se remémorer le trajet, leur permettant d'accélérer le pas. Ils croisèrent plusieurs gardes et techniciens qui couraient dans tous les sens. Ils manquèrent de les bousculer, mais aucun ne les remarqua vraiment au point de les arrêter, bouleversés par l'urgence de la situation, trop occupés qu'ils étaient de fuir pour leurs vies. Une fois arrivés au hangar, la voix électronique leur annonça qu'ils n'avaient plus que trois minutes.
— Montez tous à bord et commencez à mettre les moteurs en marche, fit Crail en s'éloignant du groupe.
— Pourquoi, où vas-tu ? demanda Alana.
— Nous avons laissé les techniciens inconscients, je vais les réveiller.
— On n'a plus le temps Crail, lâcha Anakin. Laisse tomber.
Crail ne perdit pas de temps en débats inutiles. Il fonça en n'écoutant que son instinct vers les quatre techniciens, toujours allongés dans un coin. Il s'empara de son blaster paralysant, et régla le tir sur la décharge de réveil. Il régla la dispersion large, et tira sur tout le groupe. Ils commencèrent à peine à émerger que la sirène s'intensifiait, indiquant qu'ils étaient entrés dans la phase finale avant le début du protocole. Crail fit demi-tour, et sprinta jusqu'au Faucon. Les moteurs vrombissaient pendant qu'il entrait dans le vaisseau, la passerelle se refermant juste après son passage. Informé de son arrivée à bord, Anakin commençait à faire décoller le Faucon, qui s'éloignait doucement de la baie d'amarrage.
— Content d'avoir servi à rien ? ironisa Anakin une Crail arrivé dans le cockpit. Tu crois vraiment qu'ils vont avoir le temps de s'échapper ? Encore faudrait-il qu'ils méritent de s'en sortir...
— Fous-moi la paix, lança-t-il, tout en s'installant sur le siège à côté de lui.
Crail ne faisait que suivre son instinct. Peu importait si ces techniciens s'en sortaient ou non. Il souhaitait simplement leur offrir une chance, et ne pas les condamner arbitrairement. Anakin commença à pianoter sur certains boutons de commande, et le Faucon accéléra sa course pour être suffisamment éloigné de la station. Estimant le compte à rebours terminé, ils s'étaient tous préparés à une grosse secousse de déflagration. A la place, ils virent simplement des flammes s'échapper d'un peu partout par les vitres détruites de la station, s'estompant rapidement une fois qu'elles atteignaient le vide de l'espace. Les deux hommes quittèrent le cockpit pour rejoindre leurs compagnons. Anakin vit Alana assise en face de Kyrsta, à l'endroit où lui et Chewbacca avait joués leur partie d'holoéchecs il n'y a pas si longtemps. Il avait l'impression que cette vision remontait à des années en arrière.
— Où est Chewie ? commença-t-il par demander, alors que son regard était fixé sur celle qui avait ôté la vie de son père.
— Il est allé installer Han dans une couchette, lui répondit doucement Alana, restée à côté de la prisonnière.
— On reparlera de tout ça tout à l'heure, dit-il en se dirigeant hors de la salle centrale.
Alana arrêta son regard sur Crail, qui s'était placé dans son champ de vision. Il ne pouvait s'empêcher d'afficher un léger sourire compatissant. Malgré la mort d'Han, il éprouvait un soulagement sincère de la voir tirée d'affaire. Ses pires craintes avaient été évitées. Il voyait qu'elle avait été blessée, mais le plus important était qu'elle soit sauve. Il devait se contenter de cela, auquel cas il serait toujours en train de se reprocher de ne pas avoir agit assez promptement tout à l'heure.
— Comment te sens-tu ? lui demanda-t-il naïvement.
— Mal, lâcha-t-elle la voix trainante. Quand je repense à tout ce qu'il s'est passé là-bas...
Leurs regards se tournèrent vers Kyrsta. La twi'lek gardait le silence, fixant la table devant elle d'un air abattu, résigné. Son univers entier avait été anéanti en quelques jours. Lorsqu'elle pensait enfin arriver au bout de ses peines, tout s'était écroulé. Elle venait de perdre tous les repères qu'elle n'avait jamais eut, au moment où elle espérait justement les retrouver. Et, alors que sa mort lui paraissait presque salvatrice, une femme qu'elle avait manipulée et blessée était la seule qui lui avait tendu la main. Elle lui était reconnaissante, malgré le fait de ne pas comprendre pourquoi Alana ne l'avait pas achevée. Elle estimait que ce n'était pas simplement dû à la faiblesse dont faisaient preuve les Jedi dont son père lui avait parlé, non. C'était autre chose. Elle se doutait que le lien créé, celui qui la perturbait tant, devait avoir eu le même impact. Ses effets s'estompaient néanmoins, les deux femmes ne ressentant plus autant les émotions de l'autre. Mais demeurait tout de même un lien étrange, une compréhension mutuelle et profonde, assez inhabituelle et singulière. Mais ce n'était ni le moment, ni le lieu de s'en préoccuper. En ce qui la concernait, Kyrsta pensait que le mieux pour elle était de conserver le silence.
— Je ne vois pas bien où tu veux en venir avec ça, fit Crail en désignant Kyrsta de la tête.
— Je n'en suis pas tout à fait sûre moi non plus, avoua-t-elle. Je te le dirais quand je le saurai.
— Très bien. On va donc te faire confiance...
Chewbacca apparu dans la pièce. Alana se leva immédiatement lorsqu'elle le vit le wookie. Elle ne l'avait jamais vu ainsi. Même s'il n'était pas simple de décrypter les émotions sur le visage d'un wookie, ce n'était cette fois pas difficile de voir la tristesse clairement apparente. Chewbacca jeta un regard mauvais en direction de Kyrsta. Il tourna néanmoins la tête vers Alana, au moment où elle s'approcha de lui. Devant l'expression sur le visage de la nièce de son ami, il accepta sans peine l'étreinte qu'elle demandait. Une fois dans les bras du wookie, Alana relâcha toute la tension qu'elle avait accumulée, pleurant à chaudes larmes. Ses sanglots étaient en partie étouffés par les bras de Chewbacca, atténuant la force des bruits émis, mais accentuant l'émotion palpable. C'était comme si elle s'était retenue, contrainte par les évènements de remettre sa tristesse à plus tard. Mais face au wookie, la réalité s'était invitée de nouveau. Elle avait frôlé la mort, mais était toujours en vie parce que son oncle avait échangé sa place avec elle. Il avait rejoint la Force, c'était terminé. Mais la jeune femme ne pouvait s'empêcher de retenir ses pleurs...
*****
De son côté, Anakin été resté à l'entrée de la cabine où Chewbacca venait de déposer Han. Il fixait la scène, le wookie observant silencieusement le corps de son ami, d'un air qui indiquait qu'il cherchait toujours un sens aux récents évènements. Dans quelle mesure il aurait pu agir différemment. Mais cela n'aurait fait aucune différence. Une fois qu'Han avait décidé quelque chose, il était difficile de le raisonner. Et sauver Alana n'était pas quelque chose à regretter. Il s'agissait alors de faire avec tout cela. Lorsque Chewbacca se rendit compte de la présence d'Anakin, il l'invita d'un signe de tête à s'approcher et s'assoir à ses côtés. Il le rejoignit sans un mot. Après quelques instants à fixer son père, il posa délicatement sa main sur l'épaule du wookie, demandant sobrement à Chewbacca s'il pouvait rester seul. Ce dernier accepta naturellement, se levant pour rejoindre les autres.
Ce ne fut qu'une fois seul qu'Anakin s'abandonna à sa tristesse. Il laissa tomber sa tête dans la main inerte de son père. Il eut toutes les peines du monde à contenir ses puissants sanglots qui s'échappaient. Comment les choses avaient-elles pu terminer ainsi ? Pourquoi les évènements se montraient si cruels ? Le jeune homme venait à peine de retrouver son père. Il avait craint ces retrouvailles, mais elles s'étaient bien mieux déroulées que dans ses meilleurs espoirs. C'était une chose qu'il avait considéré comme impensable, pendant de longues années. Et pourtant... Il avait rétablit un lien qu'il pensait à jamais perdu. Mais ce qu'il avait réussit à tisser de nouveau venait de lui être brutalement arraché. Il ne l'acceptait pas. Jamais. Il n'en était pas question. Comment le pouvait-il ? Qu'avait-il fait pour mériter cela ? Des erreurs, il en commettait, c'est certain. Mais il avait toujours fait de son mieux avec les cartes qu'on lui avait fournit, et celles que beaucoup lui avaient dissimulé depuis toujours. Un sentiment se dessinait clairement. Accompagné d'une résolution nette. Les sanglots et les larmes commencèrent à s'estomper, pour laisser place à autre chose.
— Ils paieront tous papa, je t'en fais la promesse, fit-il tout bas.
*****
La navette d'évacuation dans laquelle se trouvait Maul et Brogus était déjà bien loin, au moment où l'intérieur de la station spatiale s'embrasait. Le zabrak ne pu dissimuler son inquiétude indéfiniment.
— Mon seigneur, je comprends votre inquiétude concernant votre fille, commenta le titan cuirassé en brisant un long silence. Mais aujourd'hui est un jour glorieux, malgré la perte de la station. Nous avons porté un rude coup à la Nouvelle République et aux Jedi.
— J'en suis conscient, Brogus, grommela Maul. Mais la capture de ma fille ne faisait pas partie de notre plan.
— Vous pensez qu'elle est toujours en vie ? s'étonna-t-il, alors que l'expression sur le visage du zabrak laissait transparaître sa certitude. C'est une bonne chose, mon seigneur. Elle pourrait de nouveau influer en notre faveur.
Même s'il le désirait ardemment, Maul ne pouvait tout risquer pour arracher sa fille des griffes de ses ennemis. Elle allait devoir se débrouiller seule. Il finirait par la retrouver, lorsque les Skywalker seraient effacés de cette galaxie. Mais quant à Kyrsta... Il devait néanmoins se focaliser sur ce qu'il était en mesure de contrôler. Il était l'incarnation de l'Aube Rouge, et avait une cause et des fidèles à animer.
— C'est possible, répondit-il sobrement.
Car Maul n'était pas aussi confiant que son champion. Brogus était satisfait d'avoir vu Kyrsta afficher sa dévotion à la cause, tuant l'un des symboles de la Nouvelle République. Ce témoignage était suffisant pour le titan cuirassé, qui ne se posa pas d'autres questions. Ce n'était de toute façon pas son rôle, et il en était conscient. Mais le zabrak avait vu et senti ce que cet acte avait provoqué chez sa fille. Il ne l'avait jamais vu douter à ce point. Cette confusion qu'elle ressentait lui ôtait toute certitude la concernant, malgré les apparences. Et il avait sentit le tourment qui s'était emparé d'elle ensuite. Il aurait tellement voulu l'aider, mais les circonstances étaient autres. Il n'avait aucune idée s'il parviendrait à trouver un moyen de la libérer. Être à la fois un père, et le leader de l'Aube Rouge, n'avait jamais été aussi difficile.
Mais cette ambition particulière, cet ordre nouveau qu'il avait ancré dans son esprit, n'existait que pour laisser un héritage à Kyrsta. Si elle n'était plus à ses côtés, tour ceci n'avait plus de sens. Il chassa difficilement ces pensées, focalisant son esprit sur les tâches à venir. Brogus disait vrai. Un grand pas venait d'être réalisé. Sa vision commençait à se concrétiser. Tout cela allait provoquer l'effet désiré, d'ici quelques mois, lorsque Skywalker lui fera face. Sa fille sera emprisonnée. Victime des traitements de ses ennemis peut-être. Mais cela importait peu, car elle était en mesure d'y faire face. Le moment venu, elle sera de nouveau à ses côtés. Maul savait cependant que ce n'était que le début d'un combat plus long et éprouvant à venir, avant que sa vision ne se produise.
*****
La cérémonie funéraire en l'honneur d'Han Solo s'était tenue en petit comité. La veille, une cérémonie plus officielle avait été organisée dans une cour de la Grande Rotonde du Sénat. Nombre de politiciens, d'officiers et de personnalité de marque y étaient présents, pour rendre un dernier hommage à un des plus grand héros que la République n'ait jamais porté. Une succession de discours pompeux avait été débités, ce qui aurait passablement agacé Anakin s'il avait été présent. Il ne souhaitait pas se rendre à une cérémonie remplie d'hypocrites ayant tourné le dos à son père lorsqu'il en avait eut le plus besoin. Et malgré ce qu'il ressentait à son égard, Anakin avait également insisté sur la présence de Lando Calrissian pour l'hommage privé le lendemain. Le Sénat avait exceptionnellement accordé un droit de sortie de détention à l'ex PDG de LandoMilitech. Il se trouvait en instance de procès, et ce pour tout un tas de chefs d'accusation. De la participation à des actes terroristes par association, jusqu'au détournement de fonds gouvernementaux à cause des contrats passés avec la Nouvelle République.
Leia avait fait installer un petit autel dans une partie de la cour dans la résidence Organa, et Han avait été placé sur un petit bûcher funéraire. Il n'était pas friand des traditions Jedi. Mais tous s'étaient accordés sur le fait que l'incinération était la meilleure solution. Cela lui permettait ensuite de reposer auprès de son fils, dans le parc Kenobi. Leia était vêtue de noir, comme toutes les autres personnes présentes. Elle était entourée par Anakin à sa droite, Alana étant sur sa gauche. Chewbacca s'était placé juste derrière eux. Ils avaient tous fait le choix de se tenir debout pendant la cérémonie. Crail se trouvait plus en retrait, aux côtés de Lando. Plutôt que de devoir chacun prononcer un discours à voix haute, Leia avait simplement invité chaque personne présente à aller prononcer les paroles qu'ils estimaient appropriées devant le corps d'Han, avant de reprendre leur place. Ce fut Crail qui se présenta en premier.
— Je ne sais que dire, Han, commença-t-il une fois à sa hauteur. J'ai appris bien plus que ce que je m'étais imaginé. Je n'oublierais jamais votre dernier geste, et je m'en inspirerai. Je tâcherais de me montrer à la hauteur de votre héritage.
Il fit un bref salut d'un signe de tête, avant de revenir à sa place. Il adressa un regard compatissant vers Alana et Leia. Ce fut ensuite au tour de Lando.
— Je ne peux m'empêcher de me sentir responsable, Han. Bon sang... Pourquoi a-t-il fallu que tu te sacrifies ?! fit-il en s'agaçant, la mâchoire serrée, avant de marquer une pause et soupirer longuement. Mais comme tu me l'avais si bien dit, j'essaierai de me rappeler mes propres paroles. La culpabilité empêche d'aller de l'avant. Se faire mal à soi-même ne mène nulle part, récita-t-il en posant sa main sur le bord du bûcher. Je ferais mon possible pour t'honorer, mon vieil ami. On se reverra sous peu, canaille.
Lando retourna à sa place, en gardant la tête baissée. C'est Alana qui s'avança ensuite.
— Je crois que je te dois beaucoup, oncle Han, fit-elle difficilement, la voix déjà altérée. C'est grâce à toi si je suis encore en vie. Je sais que j'ai épargné ta meurtrière, mais j'essaie d'écouter mon cœur. Je pense que c'est ce que tu voudrais, espéra la jeune femme, avant de marquer une courte pause. Mon père m'a dit un jour que les personnes au cœur pur finissent également par ne faire qu'un avec la Force. Peu importe qu'elles n'aient pas de liens avec Elle, expliqua-t-elle, sa voix tremblant sous l'émotion. J'aime à penser que tu as rejoins ton fils. J'espère que tu es heureux là-bas, tonton Han. Tu vas me manquer.
Alana se retourna, et alla directement trouver les bras d'Anakin. Ces derniers jours, des tensions persistaient entre les deux Jedi, à cause de la décision prise par Alana concernant le sort de Kyrsta. Cette dernière avait été placée en cellule ultra-sécurisée, au sein d'un pénitencier prétendument inviolable. Mais Anakin n'avait toujours pas l'esprit tranquille. Il avait tenté de reparler à sa cousine, lui faire comprendre qu'elle aurait du le laisser s'occuper d'elle, que ce choix lui revenait. Mais celle-ci refusait toujours le débat. Elle voulait lui faire entendre raison, sans y parvenir. Le jeune Jedi trouva un léger apaisement dans cette étreinte, la considérant comme de bon augure pour la suite. Pendant ce temps, c'était Chewbacca qui était allé se recueillir.
Le wookie se contenta de parler tout bas, les autres n'entendant que des petits rugissements inintelligibles. En réalité, Chewbacca récitait un poème réservé aux guerriers les plus braves tombés avec honneur. Une fois terminé, il sorti une petite lame de sa ceinture, et l'utilisa pour se couper une petite touffe de sa fourrure. Il la brandit en l'air, se retourna pour la montrer à tous. Il la déposa dans la main de son ami, avant de conclure par un nouveau rugissement plus distinct, qu'Alana traduisit comme « Adieu, mon frère ».
Chewbacca retrouva sa place derrière Leia et les autres, et chacun posa une main sur le wookie en marque de soutien. Anakin marqua un léger temps de pause avant de se décider à y aller. Une fois arrivé devant le corps de son père, il posa un genou à terre.
— Papa... Si tu savais comme je regrette comment tout ça a tourné, comment... Je sais que tu me dirais de ne pas avoir de regrets. Mais je n'y arrive pas. Tant de temps entre nous gaspillé, perdu. Tellement de choses qui auraient dû être faites... Je souhaiterai tant revenir en arrière pour le rattraper. Mais je sais que c'est impossible... Je garderai les moments qu'on a partagé ces derniers temps dans mon cœur, pour toujours. Et je m'y engage, de nouveau. Ces gens paieront pour ce qu'ils t'ont fait.
Il prit la main de son père dans les siennes, et l'embrassa. Il se releva, et rejoignit les autres. Leia posa sa main sur la poitrine de son fils pendant un long moment, avant de rejoindre son mari pour la dernière fois.
— Han chéri... Ca te ressemble bien, de partir ainsi, satisfait d'avoir tenu ta promesse de ramener Alana et notre fils, déclara-t-elle avant d'abandonner son ton faussement blagueur. Il fallait que tu te sacrifies, hein ? Infiniment persuadé que c'était le seul moyen te faire pardonner. De rattraper... Quoi ? Pourquoi ?
Elle posa sa main contre le bûcher, plus pour éviter de défaillir que pour l'hommage. Parce que tu es tombée amoureuse du vaurien le plus courageux de la galaxie.
— Tu n'imagines pas à quel point je t'aime, et combien tu vas me manquer. Jamais je ne pourrai t'oublier...
Elle retrouva Anakin et Alana, mais fut prise de vertiges. Alors qu'elle commençait à chanceler, elle porta sa main contre son front, sentant un grand épuisement l'envahir. Anakin se précipita à sa rencontre lorsqu'il vit que sa mère manquait de défaillir. Elle retrouva rapidement ses appuis et retrouva sa place, soutenue par son fils. Les circonstances expliquaient ce soudain afflux de fatigue. Tous demeurèrent ensuite silencieux pendant un long moment, les lointains sons de l'agitation de la mégalopole ponctués par des pépiements apaisants les accompagnants. Leia finit par avancer, invitant tout le monde à s'approcher. Le moment était venu. Anakin alla chercher la torche qui se trouvait plantée au sol, et l'approcha de sa mère. Ils la tinrent tous les deux, et la posèrent sur le bûcher, à plusieurs reprises, à différents endroits. Ils reculèrent tous ensuite de quelques pas, regardant longuement les flammes s'intensifier, et s'élever de plus en plus haut, consumant le corps d'un homme qui avait tout donné, jusqu'à sa propre vie, pour les siens. Tellement persuadé qu'agir ainsi était le seul moyen pour lui de se racheter d'actes pour lesquels on lui avait déjà accordé le pardon. Mais le cruel paradoxe résidait dans le fait qu'il ne s'était jamais pardonné lui-même...
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