Chapitre 14
Le Faucon Millenium était rentré dans l'atmosphère bien au-delà des recommandations de vitesse réglementaire. Il fonça directement vers le siège de LandoMilitech, pour se poser en urgence sur le toit. Han avait tenté de contacter Lando sur son canal direct, mais s'était retrouvé bloqué par les procédures d'urgences. Il tourna la tête vers Anakin, et tous les deux pensèrent la même chose. Soit ils arrivaient pile au bon moment, soit ils arrivaient bien trop tard. La sensation dérangeante que le jeune Jedi avait ressentie plus tôt tendait à se confirmer. Han sentait bien que quelque chose clochait. Il lui suffisait d'observer son fils pour le comprendre. Anakin avait presque toujours sentit lorsqu'Alana expérimentait un épisode traumatisant. Cette fois, la perception était différente. Il avait sentit qu'elle était en danger, mais cette sensation s'était évaporée presque aussi rapidement qu'elle était apparue. Cela traduisait forcément quelque chose. Manifestement, elle ne l'avait pas écouté. Elle en faisait une moralisatrice de pacotille, à briser les leçons qu'elle donnait aux autres ! Même tendu, Anakin savait qu'il ne lui en voudrait pas bien longtemps. Il n'avait qu'une hâte, c'était de se retrouver face à elle, pour lui signifier le fond de sa pensée, pour ensuite avoir l'opportunité de s'en excuser. Cette sensation avait été étrange, presque douloureuse, pendant un court instant. Une impression tenace de perturbation dans la Force.
C'est lui qui sortit en premier du vaisseau. Il se lança rapidement pour rejoindre les niveaux inférieurs jusqu'à atteindre Lando. Han était resté en arrière, aidant Chewbacca à se lever et se déplacer, lui qui avait doucement repris conscience une dizaine de minutes plus tôt. Bourré de médicaments, il parvenait tout de même à avancer, même s'il titubait, tel un individu fortement alcoolisé. La réputation de la constitution physique exceptionnelle des wookies n'était clairement pas sans fondement.
Anakin comprit qu'il était trop tard. L'agitation et l'affluence importante dans les couloirs le lui disait. Il en déduit qu'Alana n'avait pas écouté sa mise en garde, et ne l'avait pas attendu. Il redoubla de précipitation, bousculant les gens sur son passage plutôt que de perdre du temps à les éviter. Cette incertitude était un véritable supplice pour lui. Dans le même temps, il craignait la confirmation de ses craintes. Il ne savait ce qu'était le pire entre les deux. Ce qu'il savait en revanche, c'était qu'il ne pouvait demeurer inactif, dans l'attente. Il arriva à l'étage du bureau de Lando, et fut stoppé par la sécurité.
— Monsieur, vous devez vous arrêter ici ! lança l'un des gardes.
— Laissez-moi passer ! grogna Anakin.
— On ne peut pas faire ça, monsieur, pas sans autorisation.
Le jeune Jedi sentit sa colère grimper en flèche. Son regard s'attarda sur une barrière de sécurité installée pour bloquer le passage. Il la souleva à l'aide de la Force, et l'envoya s'écraser contre le mur opposé. Les gardes étaient encore sous le choc.
— Et ça ? C'est suffisant comme autorisation ?
— Anakin ! l'interpella sa mère, le jeune Jedi surpris de la savoir ici. Messieurs, laissez-le passer !
Il n'attendit pas l'autorisation verbale des gardes pour la rejoindre.
— Maman ! Qu'est ce que tu fais ici ? demanda-t-il nerveusement.
— Crail m'a appelé. Ecoute mon fils, il faut que tu te calmes, et que tu écoutes bien ce que je vais te dire...
— Je n'aime pas ça maman, j'ai eu une sensation étrange et-
Il s'interrompit en tournant la tête en direction du bureau. Un des murs était complètement en ruine. Anakin reconnu immédiatement les traces d'une confrontation entre personnes sensibles à la Force. Il n'y avait aucun doute possible.
— Alana ! fit-il, le regard absent, perdu dans son cheminement de pensée.
Il dépassa sa mère, et entra dans le bureau. Il chercha désespérément la présence de sa cousine. Son inquiétude grimpait davantage, alors qu'il n'arrivait pas à ressentir sa présence. Il vit Lando au fond de la pièce, et Crail s'approchant de sa droite. L'agent commença à placer sa main sur le bras du jeune homme, qui la repoussa violemment.
— Où est-elle ! lâcha Anakin entre ses dents.
— Elle a été enlevée, Anakin, expliqua Crail, alors que le jeune Jedi le fixait avec un regard noir pendant qu'il poursuivait son récit. Elle était avec Yuthura Ban, moi avec Lando. Je suis arrivé trop tard... Elle nous a neutralisés tous les deux, et pu-
Crail s'interrompit lorsqu'une une tension irréelle commençait à fendre l'air, palpable par tous. Divers bibelots encore présent sur les meubles commençaient à s'agiter et trembler. L'agent Jerre comprit que l'électricité présente dans l'air provenait d'Anakin.
— Anakin, arrête je t'en prie ! lança Leia derrière lui.
La situation revint doucement à la normale. Anakin relâcha la tension accumulée et son regard braqué sur Crail, lorsque sa mère lui prit délicatement le bras pour le forcer à lui faire face. Elle n'était plus là... Ces types de l'Aube Rouge l'avaient enlevé. Diable pourquoi ne l'avait-elle pas écouté ? Il était aussi impuissant que dévasté. Il aurait du être présent pour la protéger, même si cela signifiait être enlevé à sa place. Elle avait tellement de valeur et d'importance, bien plus que sa pauvre existence. Il ne savait que faire, prisonnier de ses émotions. Son regard vacilla lorsqu'il rencontra celui de sa mère. Sa posture d'assurance résolue ne lui était plus d'aucune utilité. Elle ne lui avait jamais suffit de toute façon. A l'instant, il avait besoin d'autre chose. Il s'effondra dans les bras de Leia, face à ce regard désolé que sa mère lui adressait. Anakin tomba à genoux, la serrant contre lui. L'image était saisissante. Celle d'Anakin, à présent légèrement plus petit que Leia, dressant le portrait d'un jeune garçon perdu ayant simplement besoin d'être rassuré. Leur étreinte se termina après de longues secondes, et le jeune homme passa sa main sur ses yeux humides.
— Papa et Chewie vont arriver, ne t'inquiète pas, dit-il une fois son calme retrouvé.
— Je l'avais compris, je vais aller les rejoindre.
— Prend un médecin avec toi, pour Chewie, ajouta-t-il.
— Bien sûr, et Anakin ? fit-elle, attendant qu'il se retourne vers elle pour poursuivre. Crail a fait ce qu'il a pu. Vas-y doucement avec lui, s'il te plaît.
— Oui maman, s'inclina-t-il sobrement.
Leia s'avança vers le personnel médical de LandoMilitech, et l'invita à la suivre, s'éloignant du champ de vision d'Anakin. Lorsqu'il la perdit de vue, le jeune Jedi se tourna ensuite vers Crail. Ce dernier s'était éloigné, pour laisser Leia seule avec son fils. Anakin s'approcha de lui. Crail avait déjà beaucoup de difficulté à maitriser ses propres émotions, alors il ne pouvait que compatir avec celles d'Anakin. Il espérait au moins que le jeune Jedi ne s'emporte pas de nouveau, alors que Crail comptait se montrer conciliant avec lui. Quitte à prendre sur lui. Il fallait bien que l'un des deux le fasse.
— Je veux tous les détails, lui dit fermement Anakin. Et n'oublie rien.
*****
— Oui ?
— Père, c'est moi, fit Yuthura Ban, qui parlait par transmission directe dans le chasseur prototype LandoMilitech, déclara-t-elle face à une silhouette miniaturisée, un homme en position assise, son visage couvert avec une capuche. J'ai pu enlever un des Jedi, la fille de Skywalker, et m'enfuir de Coruscant sans être suivie.
— Ils n'ont aucun moyen de retrouver ta trace ?
— Les prototypes ont une balise de repérage. Ils finiront bien par l'activer, même à distance. Mais rien qui pourra continuer à émettre une fois proche du champ de brouillage de la base avancée.
— Bien, ma fille, fit-il d'un air sincèrement satisfait. Tout se déroule comme prévu. Installe-la rapidement une fois arrivée. J'aimerais voir de mes propres yeux à quoi ressemble un enfant issu de la lignée de ce sang vicié. Il me tarde de te revoir, ma fille.
Après des années passées loin des siens, la twi'lek se faisant appeler Yuthura Ban craignait que ces retrouvailles soient difficiles. Mais les mots et le ton que son père employait la rassurait, même sans l'avoir en face d'elle. Elle sentait qu'il était fier de son travail, et c'était tout ce qui importait pour elle.
— Moi aussi, père, dit-elle sobrement.
La liaison s'interrompit, et la navette repassa de nouveau en hypervitesse.
*****
Anakin comprenait qu'il ne pouvait émettre de reproches à l'encontre de Crail. L'agent avait clairement fait tout son possible, et avait manqué d'y laisser des plumes.
— Encore une adepte du côté obscur, conclu le jeune Jedi.
— Il ne peut y avoir de doute, continua Crail. Etant donné la vitesse à laquelle elle se déplaçait... Je n'avais jamais vu une chose pareille.
Tu m'étonnes, si cette femme égale le titan cuirassé, songea Anakin.
— Je n'aurais pas du t'en vouloir, avoua-t-il. Tu n'étais pas de taille face à un tel adversaire, ce n'était pas ta faute.
Crail se demanda un instant si la rage et la colère de tout à l'heure n'étaient pas préférables à la condescendance teintée de mépris qu'Anakin venait de lui témoigner. Il préféra changer de sujet, plutôt que de raviver un brasier désormais éteint.
— On a réussi à extraire certaines informations, poursuivit Crail en tendant un datapad en direction d'Anakin. Depuis l'intérieur des systèmes et des blocs de données se trouvant dans son bureau dissimulé.
Le rapport préliminaire était très succinct. Il faisait un récapitulatif des informations les plus importantes, avec un lien redirigeant vers les pièces à convictions dédiées. Voyant Anakin absorbé par le datapad, Crail retourna auprès de Lando et de son équipe. Le jeune Jedi remonta le fil chronologique, et s'arrêta sur plusieurs points. Les premiers étaient des rapports sur l'implantation de Yuthura Ban au sein de LandoMilitech, sa prise de contrôle sur plusieurs secteurs clés de la mégacorporation. Anakin les survola rapidement, pour tomber sur une première information intéressante.
Un rapport de suivi concernant une tentative d'assassinat à l'encontre de la sénatrice Organa-Solo. La pièce à conviction semblait désigner Yuthura Ban, et donc l'Aube Rouge, comme les commanditaires. Mais aucune information sur le tueur lui-même. Chose plus étrange encore, le rapport semblait presque positif, comportant un ton satisfaisant, malgré l'échec de la tentative. Cela répondait à des questions qu'il avait à présent oubliées. Cette tentative d'assassinat avait été plus qu'étrange, mais l'enchainement des évènements et des révélations l'avait trop préoccupé pour y repenser. Tout faisait sens à présent. Le but avait été d'éprouver la position de sa mère. De la mettre de côté lors de leur arrivée. L'Aube Rouge devait compter sur l'opportunité pour Jast de s'engouffrer dans la brèche et déstabiliser les Jedi. Le sénateur était-il lui-même impliqué ?
Dans l'instant, Anakin repassa leurs échanges et son ressenti à l'égard du sénateur quarren. Non, se dit-il, il n'est pas impliqué. L'Aube Rouge avait simplement exploité le climat social délétère, voilà tout. Ils avaient une parfaite connaissance des rouages de la Nouvelle République et du Sénat. La preuve que leur plan se mettait en place depuis bien des années...
Le deuxième point qu'il releva était un lot d'informations rassemblées concernant l'échange que Yuthura avait eu avec Alana, au gala de charité du sénateur Jast. Quelques détails faisaient mention de lui, Yuthura ayant échangé avec Temiri Orzo à son sujet. Mais l'humaine, avec qui il avait passé un agréable moment, ne semblait pas être impliquée dans les tractations de Yuthura. La twi'lek avait noté les informations qu'elle avait soutiré à Alana à propos des Jedi, et avait commencé à dresser un profil psychologique de la jeune femme. Anakin regrettait déjà l'élaboration du plan qu'il avait mis au point avec ses parents après l'avoir lu.
Le fils est caractériel et fier, suffisamment impulsif pour être remarqué. Il aurait pu faire un bon sujet en vue d'un endoctrinement. Mais son attachement émotionnel est trop profond, entre ses parents et surtout sa cousine. La fille paraît être une cible plus pertinente. Son idéalisme ingénu ne demanderait que peu d'efforts pour être brisé, avec des doses thérapeutiques de rappel à la réalité de la Galaxie. Sa seule présence ici va permettre de planter les graines du doute quant à la portée de son travail. Les choses n'en seront que plus simples une fois qu'elle sera entre nos mains. Une fois retournée, le fils sera ainsi dans les meilleures dispositions pour basculer à son tour. Son attachement émotionnel est très puissant. Il sera bien aisé de le manipuler, pour le forcer à agir selon nos intérêts. La fille est donc un choix plus adéquat. Ses talents pourraient de plus nous être plus utiles. Ses liens de parentés avec Luke Skywalker sont clairement à propos pour déstabiliser le maître Jedi si sa fille était retournée. Ce qui, avec de l'effort et de la persuasion, ne me parait pas impossible. Anakin se sentit terriblement coupable d'avoir laissé Alana et d'être parti.
Les derniers points faisaient état des informations rassemblées sur les attentats. Anakin eut la confirmation qu'il y en avait déjà eu plusieurs, avant celui du centre hospitalier. Ils n'avaient simplement pas été revendiqués, et le lien n'avait pas été établi. Des détails concernant leur mode opératoire étaient spécifiés, qui confirmaient un plan d'envergure prévu depuis longtemps. Les membres désignés sous l'appellation d'« élus », à peine sortis d'un centre de recherche dont l'existence était gardée secrète, de même que son emplacement, y comprit pour Yuthura, arrivaient sur Jakku. Il n'était pas spécifié ce qu'ils avaient subit pour qu'ils acquièrent ces étranges capacités. Ils étaient ensuite déployés sur Coruscant via un transporteur LandoMilitech dépêché par Yuthura elle-même, ne laissant aucune trace officielle de leur arrivée ici. Ils se voyaient ensuite confier une cible, avec un temps de préparation donné et une date butoir pour frapper. Il y avait au moins une dizaine d'attentats indiqués sur les rapports. D'une simple attaque sur un appartement individuel à l'attaque de la clinique, en passant par l'attaque dans une cantina, ou celle d'un transport en commun. Ils avaient commencés en s'attaquant à des cibles isolées, et le nombre de leur victime augmentait à chaque nouvelle frappe.
L'Aube Rouge semblait avoir calculé ses plans dans les moindres détails, avec une précision aussi chirurgicale qu'effrayante. Le jeune Jedi avait trop de choses en tête pour se souvenir que ce dont débattaient les sénateurs lors de leur introduction à lui et Alana concernait déjà un attentat de l'Aube Rouge. Anakin commençait à consulter les rapports faisant état du niveau de compromission des opérations de LandoMilitech, lorsque Lando prit précipitamment la parole.
— Je crois que j'ai une piste ! lança-t-il, attirant l'attention de tous alors qu'il se dirigeait vers Crail. La navette que Yuthura a utilisé pour s'échapper est l'un de nos derniers prototypes de chasseur, relança-t-il après un moment d'hésitation en ayant croisé le regard d'Anakin. Ils sont tous munis d'un système de localisation. Il n'était pas encore actif, mais j'ai réussi à contourner les protocoles et l'activer. On a perdu sa trace, mais l'historique de navigation indique que le trajet suivait un chemin dans la Bordure Médiane.
— Comment se fait-il qu'il ait cessé d'émettre ? s'interrogea Crail.
— Je pense qu'il émet toujours. Sauf que le signal est probablement bloqué par un système de brouillage perfectionné...
— Donc on n'est pas plus avancé au final, lança sèchement Anakin.
— Au contraire ! reprit Lando. Un tel système de brouillage nécessite énormément de ressources. Il ne peut donc se trouver à bord d'un vaisseau, quel qu'il soit !
— Ce qui veut dire que l'emplacement actuel du chasseur est forcément à proximité de cette zone, comprit Crail.
— Exactement !
— Ils auraient aussi pu neutraliser votre traceur, objecta le jeune Jedi.
— Impossible, il est implanté profondément dans la structure de l'appareil.
— Mais il n'y a aucune planète recensée dans cette zone, reprit Crail. Il n'y a que du vide. Vous êtes sûr que nous n'avons pas affaire à un destroyer ?
— Je sais ce que je fais, lança timidement Lando, conscient de la fragilité de la posture dans laquelle lui et son entreprise se trouvait. Même les supers destroyers de l'Empire ne pourraient masquer ainsi un tel signal. Une des explications serait que nous avons affaire à une station spatiale très perfectionnée.
A l'heure actuelle, les explications et les détails importaient peu au jeune Jedi. La seule chose d'importance était de disposer d'une piste solide, et de pouvoir agir. Tout plutôt que de rester ici. Alana n'avait pas ce luxe, alors pas question de se tourner les pouces.
— Bon, dans tous les cas on a une zone à quadriller, non ? résuma Anakin
— Attends, le stoppa Crail. Ca semble simple, mais la zone à cadrer doit être immense. C'est dans l'espace je te rappelle. Devoir repérer une station spatiale visuellement, aussi grande soit-elle, sera très difficile.
— C'est toujours mieux que rien, interrompit Leia.
Tous se tournèrent en direction de la sénatrice, accompagnée de son mari. Anakin abandonna simplement la discussion, pour se dirigea vers son père.
— Papa, commença-t-il, je... Alana...
— Je sais fiston, répondit Han en posant fermement sa main sur l'épaule de son fils. Ta mère m'a raconté, je suis désolé.
— C'est ma faute. J'au-
— Pas de ça avec moi, le coupa-t-il.
Han devait être le seul à avoir le droit de s'auto-flageller. Il avait nuit à trop de monde, en particulier ses proches, pour faire autrement. Mais son fils n'avait pas ce droit. Il avait été trop longtemps victime de la volonté d'autres personnes pour se faire du mal ainsi. Il devait s'efforcer de se concentrer, car il avait en lui la capacité de résoudre cette situation. Parce qu'il était son fils. Anakin avait toute sa confiance, et il n'était pas question qu'il se laisse abattre avec ce genre de pensées.
— C'est faux, et surtout ce n'est pas le moment de penser comme ça, poursuivit Han. Tu pourras y penser une fois qu'on l'aura ramenée, c'est compris ?
— Oui papa.
*****
Alana ouvrit difficilement les yeux. La vision encore brouillée, un bourdonnement sourd alourdissait sa tête, son crâne pesant une tonne. Rien de ce qu'elle voyait autour d'elle ne lui était familier. Elle se trouvait dans une pièce très éclairée, dont les murs étaient d'un gris métallisé rappelant les cloisons des différentes navettes dans lesquelles elle déjà avait voyagé. Elle clignait fermement des yeux, cherchant à s'habituer à la luminosité presque aveuglante. Elle s'aperçut rapidement que c'était plus son mal de crâne que la lumière qui la gênait, et qu'elle se trouvait allongée. Après avoir tenté de se redresser, elle se rendit compte que ses membres étaient immobilisés. Lorsqu'elle tâcha d'en connaître la raison, elle en fut empêchée, sa tête étant également bloquée, attachée par des sangles sur ce qui devait être une table. Après ce constat, les évènements récents lui revinrent en mémoire. Yuthura, LandoMilitech, le combat, puis plus rien...
L'affluence soudaine de ces souvenirs la poussa à essayer de se débattre. Mais elle ne réussit qu'à s'épuiser sans résultat. Elle entendait une voix.
— La prisonnière s'est réveillée, annonça une voix masculine.
Une légère pause flottait, l'homme semblait attendre la réponse d'une autre personne. Alana essayait de retrouver des sensations à travers la Force, mais Elle paraissait lointaine, embrumée.
— Oui mon seigneur.
Alana comprit que ce devait être un garde ou un soldat qui s'adressait à travers son comlink. Et qu'elle allait bientôt faire connaissance avec l'interlocuteur. La personne à la tête de l'Aube Rouge, pensa-t-elle. Elle tenta au maximum de se concentrer, rassembler ses forces et faire le vide en elle. Mais la jeune femme était comme coupée de la Force. Le résultat ne fut guère probant. Elle n'avait pas beaucoup de temps pour se préparer à ce qui venait. Elle n'allait pas pouvoir se reposer sur sa maîtrise de la Force. Tout indiquait qu'elle ne pouvait être à la hauteur... L'image d'Anakin lui apparut furtivement dans son esprit. Qu'allait-il bien pouvoir penser de ce qu'elle avait fait... Elle ne l'avait pas écouté, alors qu'elle aurait du. Parce qu'il avait raison... Elle n'était pas à la hauteur face à de tels guerriers. Elle avait beau posséder la volonté de dépasser ses limites, cela n'avait visiblement pas suffit. Anakin se serait bien moqué d'elle...
Non ! Jamais il n'aurait fait cela ! Malgré sa tendance à la railler, à la protéger excessivement en la mettant à l'écart des problèmes, il ne l'avait jamais méprisé. Il la taquinait lorsqu'elle échouait, mais cela demeurait léger. Le bougre n'était pas commode, mais il avait toujours été bienveillant à son égard. Elle ne pouvait pas baisser les bras. Elle avait peut-être échoué, mais elle n'était pas perdue pour autant. Elle avait plus de moyen d'agir qu'elle ne le pensait. Anakin était avec son oncle et sa tante, et étaient certainement en train de chercher un moyen de la retrouver. Crail également. Crail justement ! songea-t-elle en s'inquiétant pour son ami. Pas de ça ! Elle pouvait avoir confiance en eux. Plus que cela, elle devait honorer cette confiance, en prouvant qu'elle en était digne. Elle possédait les capacités intellectuelles suffisantes pour se sortir de cette situation. Gratter le maximum d'information possible. Elle avait été enlevée, et non exécutée, ce qui impliquait qu'ils lui voulaient quelque chose. Elle pourrait gagner du temps par la parole et le dialogue. Ça, c'était dans ses cordes. La porte de la pièce où elle se trouvait s'ouvrait de nouveau. Le moment était venu. Elle était prête, remobilisée. Elle trouverait un moyen de rattraper son erreur.
— Monseigneur, fit le garde en posant un genou à terre, tête baissée.
— Tu peux nous laisser, ordonna une voix sombre, des bruits de pas approchant d'Alana. Alors voici donc le fer de lance du Nouvel Ordre Jedi. Je suis quelque peu déçu, mais que peut-on attendre d'un Jedi...
— Montrez-vous ! lança Alana. Plutôt que de vous cacher comme un lâche !
— Ma fille, peux-tu relever notre invitée ?
— Oui, père, répondit une voix familière aux oreilles d'Alana.
La table sur laquelle elle se trouvait s'activa dans un bruit mécanique. Elle se releva, permettant à Alana de faire face à ses ravisseurs. Elle reconnu le visage associée à la voix féminine qu'elle avait entendue. Celui de Yuthura Ban. Les formes géométriques presque parfaites du visage de la twi'lek qui s'était montrée si bienveillante et avenante à son égard. Avant de lui infliger une défaite cuisante, révélant qu'elle était membre de cette organisation terroriste. L'autre visage ne lui dit rien. Il s'en dégageait néanmoins un sentiment inquiétant. Il était intimidant, emplit de haine et de puissance, alors qu'il arborait une expression neutre à moitié dissimulée sous sa capuche.
— Tu me vois à présent, Jedi.
C'était un zabrak, et les traits de son visage étaient difficilement lisibles à cause de sa couleur de peau. Il affichait un léger sourire, même si l'on sentait la colère et la rancœur qui habitait ses paroles lorsqu'il s'adressait à Alana. Il tourna ensuite son regard en direction de Yuthura.
— Tu as fait de l'excellent travail, ma fille.
— Merci père, fit-elle en inclinant légèrement sa tête.
— Comment as-tu pu faire ça ? lança Alana. Trahir tout le monde ainsi ?
— Kyrsta ne fait que ce que je lui demande de faire, répondit le zabrak. Tu parles de trahison, là où je vois une femme forte et fidèle à notre cause, et au juste combat que nous menons.
Juste ? Combat ?
— Massacrer des innocents est tout sauf un juste combat !
— Tu es jeune et naïve, Jedi, lâcha-t-il, prononçant le mot « Jedi » comme s'il s'agissait d'une insulte. Crois-tu vraiment que toi et les tiens menez un combat plus juste ? Tu n'as strictement aucune idée de ce dont tu parles. J'ai vu bien des gens se dévouer à des causes plus absurdes et idiotes...
— C'est une critique dissimulée contre les Jedi ?
— Non. Si j'ai une critique à faire, elle sera on ne peut plus claire. Et je ne compte pas me justifier devant toi. Vous comprendrez tous bien assez tôt, ajouta-t-il avant de se tourner en direction de la twi'lek. Kyrsta, tu peux nous laisser. Veille à ce que je ne sois pas dérangé.
— Oui père, fit-elle avant de quitter la pièce.
Alana n'eut pas le temps de penser au nouveau nom de Yuthura, car le zabrak s'approchait d'elle. Elle cru percevoir des sons mécaniques, presque imperceptibles, à chacun de ses pas. Il releva sa capuche lorsqu'il fut tout près d'elle, et Alana pu contempler plus amplement les motifs tribaux de son visage sur sa peau rouge et noir mêlés, et les petites cornes qui entouraient son crâne comme une couronne sur un crâne chauve.
— Nous allons mettre tes croyances et ta foi à l'épreuve, jeune femme, et alors nous verrons...
*****
Une fois sortie de la salle d'interrogatoire, Kyrsta, la twi'lek qui se faisait appeler Yuthura Ban, arpenta des couloirs identiques aux murs de la pièce précédente. L'architecture de la station spatiale était on ne peut plus sobre, calibrée pour être fonctionnelle avant tout. Elle s'arrêta net lorsqu'elle tomba face à une silhouette colossale et massive.
— Bonjour Brogus, fit-elle légèrement gênée.
— Enfin de retour parmi nous, lui répondit simplement le titan cuirassé. Ton père est avec la prisonnière ?
— Il a demandé à ne pas être dérangé, choisit-elle de répondre.
— Naturellement. J'attendrais qu'il en ait fini avec elle. Je suis impatient de pouvoir m'entretenir avec elle, moi aussi.
Brogus cru deviner une sorte de mécontentement chez la twi'lek. Ou du moins une certaine désapprobation envers le ton réjoui qu'il avait employé. Il tenta donc une approche.
— Il parait qu'elle t'a tapé dans l'œil, la Jedi.
— C'est faux, nia naturellement la twi'lek.
Kyrsta était devenue maître dans l'art de feindre ses réelles intentions. Mais Brogus plaçait la foi en son instinct au-dessus de tout autre chose.
— Qui a bien pu te raconter des mensonges pareils ? poursuivit-elle.
— Personne. C'est toi, qui me fais penser ça. La façon dont tu as mené toute l'opération, tes réactions...
— Je fais juste ma part du travail, Brogus. Laisse-moi m'occuper de moi, et concentre-toi sur ce que tu as à faire.
Elle n'était pas aussi résolue dans ses souvenirs. Le temps passé loin des siens ne pouvait l'avoir rendue si farouche...
— J'ai touché un point sensible, on dirait, se satisfit Brogus.
— Tu ressens visiblement le besoin de t'affirmer pour combler ton manque d-
— Mon manque ? l'interrompit-il fermement.
— Contrairement à toi, je ne suis pas rentrée les mains vides, déclara-t-elle d'un air de défi.
Kyrsta avait habilement retourné la situation. Brogus se trouvait à présent en mauvaise posture. Mais la réaction de la twi'lek lui révéla que son instinct ne l'avait une nouvelle fois pas trompé. Le titan cuirassé préféra battre en retraite, gardant cette information pour la jouer à un moment plus propice. Malgré l'infinie brutalité et bestialité dont il faisait preuve en combat, et dans la majorité des situations d'ailleurs, il respectait le principal précepte que son seigneur lui avait enseigné. La rage maîtrisée. Une technique de discipline mentale, permettant de canaliser sa rage plutôt que de la laisser constamment se déchainer. Elle s'accumulait lentement, pour la déchaîner au moment désiré à sa pleine puissance. Avec le temps et de la pratique, maîtriser ainsi sa rage était une formalité pour Brogus Kast, même si cela requérait toujours une discipline de fer. La colère ressentie suite à la pique de Kyrsta s'estompa tout aussi rapidement qu'elle était montée. Le titan cuirassé la conserva en réserve, et elle se trouva compartimentée dans son esprit.
— Tu as passé trop de temps chez l'ennemi Kyrsta. Il serait temps que tu te rappelles comment fonctionnent les choses ici. Tant que tu prêtes ton allégeance à l'Aube Rouge, tout se passera pour le mieux, précisa-t-il avant de s'éloigner de Kyrsta.
La twi'lek se retint de justesse de glisser que son allégeance allait vers son père en premier lieu. Mais c'aurait été fournir la preuve que Brogus attendait tant. Pas tant dans la formulation, car le titan cuirassé vouait un véritable culte au seigneur de l'Aube Rouge. Leur première rencontre, et ce que son père avait apporté à Brogus, ne changeraient jamais rien à cette indéfectible loyauté. Mais la twi'lek avait en revanche un lien de parenté avec lui. Le seigneur Maul, leader charismatique et incontesté de l'organisation secrète de l'Aube Rouge. Mais avant tout son père, celui qui l'avait élevé et fait d'elle la femme qu'elle était aujourd'hui. Kyrsta reprit son chemin pour se diriger vers le poste de garde principal, et alla s'adresser au commandant de la garde.
— Le seigneur Maul est avec la prisonnière et ne souhaite pas être dérangé.
— Oui Madame, répondit le commandant.
— Cela vaut pour moi aussi commandant. A moins que notre seigneur veuille me parler, j'aimerais ne pas être dérangée.
— Bien reçu Madame.
Kyrsta se détourna du commandant et des quelques gardes, et reprit sa route en direction de ses appartements personnels. Une fois arrivée et la porte d'entrée fermée, elle se délesta de toute la tension accumulée en allant s'écrouler sur le lit dans sa chambre. Elle n'avait pas pu souffler une seconde, depuis son affrontement avec Alana et Crail. Même si les deux combats avaient été remportés rapidement, ils lui avaient demandé des efforts conséquents, et l'avaient forcée à puiser de manière significative dans ses capacités sensitives exceptionnelles. Il en était de même pour le trajet, ou sur la station. Elle ne pouvait se laisser aller. Sa position ne lui permettait pas ce genre de relâchement devant les autres membres de l'organisation. Kyrsta pensa se reposer encore un moment, avant d'aller prendre une douche. Elle reprendrait ensuite sa tenue habituelle au sein de l'Aube Rouge. Sa combinaison l'attendait d'ailleurs, posée sur un coin du lit. Au bout d'une dizaine de minutes, elle reçu une communication via l'intercom. Pas le temps pour une douche, songea-t-elle. Mais elle se changea tout de même.
*****
Kyrsta hésita à entrer directement, après avoir frappé trois fois à la porte. Cela faisait longtemps qu'elle n'était plus en contact direct avec l'organisation, suite à son infiltration prolongée chez LandoMilitech. Elle n'était plus certaine du protocole en vigueur. Revêtir un uniforme sombre lui paraissait suffisamment dépaysant comme cela, habituée aux robes et tailleurs. Maul lui fit justement la remarque, après qu'elle eut finalement choisit d'entrer.
— Tu attendais une invitation, ou avais-tu oublié nos habitudes ?
Il lui avait parlé sans lui accorder d'attention, se tenant à genoux, au sol. Il avait les yeux et le visage fermés, face aux tapisseries anciennes sur les murs. La salle privée du leader de l'Aube Rouge était plutôt similaire à celle de Kyrsta. A ceci près que l'éclairage d'ambiance, constitué de flambeaux anciens fixés aux murs, conférait une teinte plus sombre à la pièce. Effet accentué par les différentes tapisseries murales, de teintes rouges pour la plupart, avec des ornements décoratifs représentant des scènes de batailles. Le tout brodé avec du fil noir et doré. Dans la pièce principale, seul un bureau moderne semblait dénoter avec l'aspect très antique, voir archaïque, de la pièce.
— Pardonnez-moi père, dit-elle, confuse.
— Allons ma fille.
Il finit par se lever, et fit quelques pas dans la direction de Kyrsta, avant de s'arrêter dans un geste simple mais qui invitait à abandonner le ton solennel de la conversation.
— Je comprends que les effets de l'éloignement persistent, poursuivit-il. Mais lorsque nous ne sommes qu'entre nous, il n'est pas nécessaire d'être si protocolaire.
— C'est le temps que les habitudes reviennent, fit-elle en se massant nerveusement les mains, ne sachant comment gérer son stress.
Le zabrak eut un léger sourire lorsqu'il vit l'attitude et l'expression de Kyrsta. Il continua de l'observer sous toutes les coutures, d'un regard empli de fierté et de reconnaissance, et s'approcha ensuite d'elle pour l'enlacer. Il était quasiment de la même taille qu'elle, maintenant qu'elle ne portait plus de talons. Ce geste d'affection si élémentaire signifiait tant pour elle. Des années séparée de son père l'avait bouleversé. Elle avait un but, une mission d'une importance capitale. Son rôle avait été clairement défini pendant que Maul la formait. Mais le quitter n'avait pas été moins difficile pour autant. Sans compter qu'elle craignait ces retrouvailles, après tant de temps passé loin des siens. Elle conservait tout de même une légère réserve, sans quoi elle aurait laissé l'émotion et quelques larmes perler lors de son étreinte avec le zabrak.
— Tu n'imagines pas comme je suis heureux de te revoir, lui fit-il d'un voix calme et apaisée.
— Moi aussi j'en suis heureuse père.
Il mit fin à l'embrassade, et l'invita d'un geste à le suivre. Ils s'installèrent dans un canapé, au coin de la pièce.
— Cela a prit du temps, et ce fut difficile, mais tu as parfaitement rempli ton rôle ma fille.
— Merci père, fit-elle, reconnaissante, le regardant directement dans les yeux sans détourner le regard pour la première fois. Avez-vous appris quelque chose de la Jedi ?
— « As-tu », lâcha-t-il dans l'instant, ce qui la prit au dépourvu. Je suis déjà assez vieux comme ça, lui dit-il d'un ton étrangement bienveillant. Je suis ton père, pas question de me traiter comme un ancêtre !
Elle avait presque oublié qu'il savait se montrer si délicat avec elle. Du moins compte tenu de sa nature et de son ambition avec l'Aube Rouge. Certains souvenirs commençaient à refaire surface, qui mettaient la twi'lek davantage en confiance. C'était manifestement un vrai retour à la maison, peu importait si elle n'avait pas souvent mis les pieds dans cette station.
— Oui, pardon... Et donc, concernant la Jedi ?
— Je n'y suis pas allé trop fort, si c'est ce que tu craignais, déclara-t-il sans vraiment chercher à la rassurer. Je me suis contenté de simples agressions mentales, surchargé son système nerveux. Pour qu'elle ait un aperçu de notre puissance... A l'heure actuelle, c'est Brogus qui s'entretient avec elle. Tu connais ses méthodes pour obtenir des réponses..., dit-il simplement, alors que cette phrase provoqua un bref sourcillement chez la twi'lek. Un problème ?
— Non, aucun, mentit naïvement Kyrsta.
— Je ne suis pas dupe ma fille. Parle-moi.
— C'est juste que..., fit-elle avant de timidement s'éclaircir la voix. Je ne vois pas l'intérêt de la torture physique. Cela ne servira pas nos intérêts, père. Je pourrais réussir à pénétrer son esprit, seule.
— Je sais parfaitement ce dont tu es capable. Mais tu n'as jamais eu affaire à un Jedi. Même si nous leur sommes supérieurs, ce sont des adversaires que nous devons respecter. Ils ont une manière bien à eux d'utiliser leurs pouvoirs sensoriels. Si tu les prends à la légère, tu recevras une sacrée leçon.
Sans s'en rendre compte, Maul baissa son regard en direction de ses membres inférieurs, rien qu'un instant. Des souvenirs d'un affrontement qu'il dominait outrageusement, et à la suite duquel sa défaite n'en avait été plus que cuisante.
— Une leçon que j'ai moi-même apprise, de la plus dure des manières, il y a bien longtemps, finit-il par déclarer. Briser leurs défenses mentales n'est pas une chose si aisée, même pour toi. Le travail de Brogus est complémentaire au tien, et le facilitera.
— Mais père...
Maul ne souhaitait pas s'attarder sur ce sujet plus que nécessaire. Il se souvenait parfaitement de ce qu'il avait longtemps affirmé à sa fille concernant les rejetons de Skywalker. En conserver un sous la main, en guise de levier ou de moyen pour obtenir des informations dans le détail, pourquoi pas. Mais le faire basculer... Kyrsta y croyait, et le zabrak avait consenti à aller dans son sens, pour la maintenir pleinement impliquée malgré l'éloignement. Maul détestait mentir ainsi à sa fille, mais il n'en avait guère le choix. C'était nécessaire, pour le bien de son plan et de sa vision à long terme.
— N'en parlons plus, je te prie. C'est une grande journée ! Je retrouve ma fille, et nos plans n'ont jamais été en aussi bonne voie. Ne gâchons pas cela. Fais-moi confiance, veux-tu ?
Elle s'était déjà surprise de le contredire, même à demi-mot. Mais ces arguments suffiraient à la convaincre de s'incliner. Parce qu'ils provenaient de son père. Sans compter qu'il avait agrémenté le tout d'un ton affectueux qui n'était pourtant pas nécessaire pour qu'elle obtempère. Mais Maul était toujours ainsi face à sa fille depuis qu'elle avait passé l'adolescence. Elle était trop chère à ses yeux pour amoindrir l'affect qu'il éprouvait pour la jeune femme. Ses désillusions passées l'avaient tellement brisé que lorsqu'il se remobilisa pour mettre son plan en œuvre, il avait rapidement convenu qu'une fois Kyrsta formée, il ne se montrerait plus si distant avec elle. Cela avait été difficile pour lui au début, car il s'était longtemps efforcé de maintenir une certaine distance avec elle. C'était nécessaire, pour lui apprendre à s'endurcir. Mais une fois ces étapes passées, ses sentiments ne sauraient être passés sous silence. Du moins certainement pas lorsqu'ils se retrouvaient rien qu'entre eux.
— Oui, bien sûr père.
— Brogus me préviendra lorsqu'il en aura terminé. En attendant, profitons-en pour rattraper le temps perdu. Parlons de ces dernières années, et de celles à venir.
— J'en serais ravie, père.
*****
— Bon, je ne pense pas qu'on apprendra grand-chose de plus sur ces fichiers, dit Crail.
— Il faut qu'on mette le plan en place alors, lança Anakin.
— On a une zone et les moyens d'y aller, remarqua Han. Mais s'il faut s'attaquer à une station spatiale... Et surtout, qui nous dit qu'ils s'y trouvent toujours ? Sans compter que le délai d'un mois va finir par expirer...
Leia ne pouvait laisser l'émotion s'emparer d'eux. La situation était dramatique, mais le pire pouvait encore être évité. Elle se devait de calmer les choses, alors même qu'elle aussi était affectée. Elle maintenait pour l'instant sa présence ici, alors qu'elle songeait à son frère. Le fait qu'il n'ait pas senti ce qui arrivait à Alana était déstabilisant. La sénatrice avait pensé qu'il se serait manifesté, tentant de communiquer avec elle pour la sonder, pour manifester son intérêt suite aux perceptions qu'il aurait eue. Mais il n'avait visiblement rien ressenti. Elle n'avait pas sa maîtrise pour le contacter comme lui l'aurai fait. Elle avait trop à faire ici pour retourner au domaine Organa, et utiliser la ligne de communication secrète qui renvoyait au mini serveur sécurisé de New Alderaan. Ce choix venait de Luke lui même. Il avait insisté pour que l'emplacement de la planète et du temple ne soit pas connu de tous. Et qu'un unique canal de communication soit établi seulement pour les cas d'extrême urgence. Ce qui était le cas ici. Mais le dispositif était toujours au domaine Organa.
Elle ne pouvait se permettre d'y aller pour le moment. On avait trop besoin d'elle ici. Si son frère n'avait pas ressenti le danger, cela voulait dire que quelque chose brouillait ses perceptions. Ces membres de l'Aube Rouge qui étaient sensible à la Force devaient posséder des pouvoirs particuliers. Et cela la poussa davantage à se focaliser sur leurs actions à tous ici même. Le temps jouait contre eux. Elle n'aimait pas faire des choix contraints et dans l'urgence. Mais les évènements l'y poussaient.
— Messieurs, réfléchissons, suggéra Leia. Nous sommes tous d'accord qu'il faut secourir Alana au plus vite. Mais nous en savons si peu que nous pourrions errer dans cette zone pendant longtemps, sans y trouver quoique ce soit. Nous devrions établir des protocoles de recherches, pour être le plus efficaces possibles.
— On n'a pas le temps maman.
— Surtout qu'ils doivent nous attendre maintenant, ajouta Han. On perd l'élément de surprise, ce n'est pas rien.
— Pas nécessairement, expliqua Lando. Une station spatiale se fie généralement à ses capteurs pour s'occuper des vaisseaux en approche. Vous pourriez utiliser un de mes systèmes de brouillage, pour vous approcher suffisamment avec le Faucon sans vous faire repérer.
— Oui, et une fois qu'on est tout proche, on fait comment pour entrer dans leur hangar, le génie ? contra Anakin avec hostilité.
— J'essaie juste de vous aider...
Les paroles acerbes du jeune Jedi suffirent à entamer la confiance pourtant habituellement sans faille de l'excentrique PDG. La culpabilité qu'il éprouvait avait déjà fait la majeure partie du travail. Il s'efforçait de se rendre utile, pour évacuer de son esprit ces pensées qui le parasitaient. Mais Anakin n'en avait cure. Il n'était pas question de se montrer conciliant, pas avec lui, et surtout pas pour le moment en tout cas. Malgré sa volonté de changer, le jeune homme avait toujours besoin d'un exutoire qu'il devait personnifier.
— Vous feriez mieux de vous abstenir, on dirait.
— Anakin, l'interpella sa mère. Lando n'est pas responsable de ce qui arrive à Alana. C'est l'Aube Rouge qui l'est.
— N'insiste pas Leia. Ton fils n'a pas tort. Je... je ne suis pas à ma place avec vous. Pas pour l'instant. Je vous laisse.
Il commença à s'éloigner lorsque Crail le stoppa.
— Attendez ! J'ai peut-être une idée, et nous allons avoir besoin de votre aide.
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