XVI

Et si d'aventure

Vous croisez

Une fille aux yeux délavés

Au regard hautain

Au nez fier et trop droit

A la bouche pincée

Soyez certains

Qu'elle vous chantera de doux mots

Et vous embarrassera de ses baisers

Elle se fera hargneuse et jalouse ;

Parfois conciliante

Elle vous accusera de son doigt

Puis vous embrassera

Encore

Elle vous détestera quand vous aimerez

La blonde, son éternelle rivale

Mais elle insistera

Et dans une étreinte brutale

Vous rejoindrez sa toile

Le visage elle vous caressera

Et devant la larme qui roule vous trompera

Tout en vous quémandant monts et merveilles

Sans oublier

Liberté et fidélité

La passion vous consumera

L'aveuglement persistera

Mais elle tente le Diable, la belle

Et d'aventure

Croise un homme

Aux yeux délavés

Et au regard hautain

Au nez fier et trop droit

La bouche pincée,

Mimique de haine froide

Il lui chantera de doux mots,

Louera ses talents ;

Lui contera fleurette, en somme

Pour mieux se jouer de la vile joueuse

En se penchant au bras d'une autre

Dégoût et passion riment avec eux

C'est si divertissant

Et cela fait si mal

Alors nous pleurons

Mourons en silence

Car dans ce monde

Qui peut subsister

Sinon eux ?

Nous, humains au cœur tendre, 

Sommes de fragiles créatures

Qui se brisent, telle la glace,

A la moindre anicroche

Plutôt que de nous battre

Ou de nous débattre

Nous nous laissons aller

A cette douce torpeur

Synonyme de confort

Mais jamais de déception

Ou presque

Il n'y a que l'ennui

Et les souvenirs,

Brûlants et trop vifs

Et là, le même jeu se rejoue

Alors, si d'aventure vous croisez la Joie,

Vous saurez qu'elle ne sera

Qu'une banale illusion

Prête à se jouer de vous ;

Ô combien brillante, certes, je vous l'accorde

Moi qui fus victime de ses poisons.

2015