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Empty - Olivia O'Brien
Avertissement :
Scarification
Plus de trois semaines étaient passées depuis qu'Eddie était sorti de l'hôpital. Le garçon avait été porter plainte avec Richie et Stanley. Et finalement Henry avait été transféré dans un autre lycée. Une mesure d'éloignement avait été mise en place et le garçon ne pouvait plus s'approcher d'Eddie. Il avait également écopé de travaux collectifs aux bénéfices de la ville de Derry.
Eddie n'avait été qu'à moitié soulagé, car même si Henry le laisserait sûrement définitivement tranquille, le garçon hantait ses cauchemars et ses journées. Il était là, constamment présent. Et Eddie était terrorisé. Il n'était pas retourné au lycée depuis une semaine après les vacances de Noël. Seul point positif, il n'avait eu pour l'instant aucune nouvelle de sa mère. Peut-être avait-elle décidé de le laisser tranquille, de l'oublier, de le radier de sa vie puisqu'il était si embarrassant pour elle. Eddie ne savait pas, il espérait ne plus la revoir. Enfin espérer était un bien grand mot pour lui, car l'espoir, il n'en avait plus vraiment.
Pendant tout ce temps, Richie et les autres Losers s'étaient occupés du mieux qu'ils pouvaient d'Eddie. Mais le brun avait changé. Il ne riait plus et ses yeux restaient ternes et sans émotions. Son rire manquait à Richie. Ses lèvres sur les siennes, ses sourires, sa voix enjouée, et par dessus tout ses grands et brillants yeux noisettes. L'ancien Eddie lui manquait.
Mais le bouclé n'avait pas perdu espoir, il savait qu'Eddie traversait une période difficile et qu'il lui faudrait du temps. Et Richie avait justement tout son temps depuis que sa mère passait une grande partie de sa vie dehors avec des hommes qu'il n'avait aucune envie de connaître. Il s'occupait donc d'Eddie. Il l'enlaçait et le rassurait la nuit quand le garçon faisait des cauchemars, l'encourageait à écrire pour reprendre pied, et essayait tant bien que mal de calmer ses crises de panique qui avaient été nombreuses.
De nombreux jours s'étaient écoulés et il était maintenant temps de retourner au lycée, au plus grand désespoir d'Eddie.
Il était lundi matin et le garçon se trouvait assis sur le lit de Richie. Il jouait nerveusement avec les manches d'un sweat trop grand, quand le bouclé rentra dans la chambre avec rien d'autre qu'une serviette autour de la taille. Eddie le regarda et esquissa un semblant de sourire, Richie s'assit à côté de lui, secoua ses cheveux humides et mouilla le brun à côté de lui. Celui-ci rigola d'un rire léger et Richie se retourna vers lui surpris.
« Quoi ? » demanda Eddie en frappant légèrement l'épaule du bouclé.
« Rien... c'est juste que je t'avais pas entendu rire depuis longtemps. » lui dit-il, choisissant la carte de l'honnêteté.
« Ouais, n'en fait pas une affaire d'état. » rétorqua t'il en se levant.
Richie le fit se rassoir en l'attrapant par la taille. Eddie ne dit rien et regarda juste la main du garçon qui venait de se glisser dans la sienne.
« Tout ira bien aujourd'hui ok ? »
Eddie releva son regard vers celui de Richie et acquiesça sans un mot. Le bouclé le prit dans ses bras et Eddie enfouit son visage dans le cou frais et mouillé du garçon.
« Je t'aime tu le sais ça ? » chuchota Richie.
« Oui, moi aussi. » chuchota Eddie en retour.
Et c'était vrai, l'amour d'Eddie envers Richie n'avait absolument pas changé.
Mais si cela n'était pas suffisant ?
Et si la seule force de Richie n'était pas suffisante pour faire ressortir Eddie hors de l'eau ?
Car le garçon se noyait. Il était vide et le monde et ses souvenirs l'aspiraient sans qu'il ne puisse rien y faire.
ººº
Dans les couloirs du lycée, Eddie se faisait le plus petit possible. La capuche de son sweat, la veste en jean gigantesque de Richie, et tous les Losers qui l'entouraient ne l'empêchait pas d'avoir l'impression d'être le centre de tous les regards.
En direction de sa classe d'histoire il croisa le chemin de Patrick. Eddie baissa les yeux voulant s'enterrer dans le sol et commençant à ressentir les premiers symptômes de ses crises de panique récurrentes. Le garçon visualisa la bouteille au lieu des images traumatisantes du soir dans les bois, et commença à inspirer et à expirer profondément en essayant de ne pas attirer l'attention des autres. Richie le prit par les épaules et l'embrassa sur la tempe avant de le laisser entrer dans sa salle de cours. Une fois assis à une des tables du fond, Eddie se sentit légèrement mieux. Le cours commença et le garçon avait totalement repris le contrôle de sa respiration. Les élèves et le professeur ne lui prêtaient pas attention, tout cela lui allait très bien. Une demi-heure plus tard une fille rentra dans la classe et annonça tout haut :
« Eddie Kaspbrack est attendu dans le bureau du proviseur. »
Tout le monde se retourna vers l'intéressé qui se leva lentement en enfilant la veste en jean de Richie. Il se dirigea d'un pas qui se voulait confiant vers le bureau du directeur. Une fois arrivé, Eddie toqua à la porte et entendu la voix grave de Mr Holstrit l'inviter à entrer. Le garçon rentra dans la pièce et son corps se glaça à la vue de sa mère assise dans la pièce.
Le temps sembla s'arrêter pour Eddie et encore une fois, tout l'air de la pièce sembla disparaître, le laissant dans une crise de panique qu'il n'arrivait toujours pas à contrôler. Eddie essaya de déglutir mais il n'y arrivait pas. Les mains du garçon se mirent à trembler, puis tout son corps entier. Avant de perdre la raison et de se faire emmener à l'hôpital par sa mère, qui le fixait avec une légère lueur d'appréhension dans le regard, Eddie se précipita vers la sortie et claqua la porte. Le garçon se mit à courir le long des couloirs vident alors qu'il n'arrivait presque plus à respirer. Les détails semblaient flou et Eddie avait l'étrange impression de flotter. C'était comme si son corps entier se vidait d'air pour s'envoler vers le ciel. Il connaissait maintenant cette sensation par cœur, mais cela ne l'empêchait pas de toujours autant la détester, de la maudire de ne pas le laisser tranquille. Oui ce n'était qu'une crise de panique, mais Eddie se devait de la gérer. Il continua donc de courir, ou plutôt de déambuler vers la sortie arrière du lycée.
Il passa devant la classe de Stanley, et le garçon qui était accoudé sur le rebord de la vitre, visiblement ennuyé, aperçut passer Eddie qui était étrangement pâle et qui semblait haleter. Stanley se redressa droit comme un i et se précipita vers la porte oubliant qu'il était dans une salle de classe.
« Stanley on peut savoir où tu vas ? » lui demanda sa professeur plus choquée qu'en colère.
Stanley était toujours très discret en cours.
La classe ricana devant le visage confus du garçon. Stanley réfléchit et ne trouva pas mieux comme excuse que de décréter :
« J'ai besoin d'aller aux toilettes. »
La classe repartit de plus belle dans un fou rire et un garçon cria en pouffant :
« Probablement pour aller sucer son copain !!»
« Je ne tolère pas ce genre de langage dans ma classe, s'offusqua la professeur. Maxence tu resteras à la fin de l'heure et Stanley tu peux y aller. »
Stanley qui était rouge de colère et de honte se précipita en dehors de la classe. Une fois dans les couloirs, il pensa immédiatement à Eddie et partit à sa recherche.
♫ play
De son côté, Eddie venait d'arriver sur le terrain d'athlétisme du lycée. Il était vide. Toujours aussi mal en point, le garçon s'assit en bas des gradins. Eddie s'obligea à fixer un point et à essayer de reprendre le dessus sur sa respiration. Il aurait pu utiliser son inhalateur mais il l'avait perdu lors de la nuit dans les bois, et de toute façon cela ne l'aiderait en rien. Il devait régler son problème sans s'aider avec cette merde de médicament. Eddie essaya donc de concentrer son regard sur les bâtiments alentours mais il n'y arrivait pas, chaque chose autour de lui le rendait malade et lui donnait cette sensation d'enfermement, de compression... Derry le rendait malade.
Eddie avait l'impression d'étouffer, alors il retira en vitesse sa veste en jean et retroussa les manches de son sweat. Son regard s'arrêta sur ses avant bras pâles. Il resta à fixer son bras pendant une minute. Puis sans vraiment réfléchir, Eddie enfonça ses ongles relativement long aussi fort qu'il le put dans sa chair et commença à se griffer. Le garçon ressentit une légère douleur qui vint le picoter le long du bras mais rien de plus. Sa respiration s'était légèrement calmée mais Eddie en voulait plus. Il ressentait finalement quelque chose. Il regarda donc partout autour de lui et trouva des résidus d'une bouteille de verre cassée. Il en attrapa un.
Le morceau n'était pas bien gros, mais bien aiguisé sur le bout. Eddie le fixa pendant quelques secondes qui semblèrent lui durer une éternité, et approcha la lame de son avant bras avant de laisser s'enfoncer la pointe en verre dans sa peau. Il donna ensuite un coup sec et une griffure apparut sur son bras. Le visage du garçon était indéchiffrable, il n'avait ressenti aucune douleur. Alors il recommença et plusieurs griffures plus ou moins visibles commencèrent à entacher son bras. Eddie esquissa quelques grimaces de douleur et quand il vit quelques gouttes de sang perler sur ses coupures, il s'arrêta. Son bras semblait comme endolori dû à tous les picotements qu'il ressentait. Mais la douleur ne la gênait pas, il l'acceptait plutôt bien car elle lui faisait enfin ressentir quelque chose. De plus, le garçon ne se préoccupait pas du côté négatif de la chose qu'il n'aurait jamais, oh grand dieu, jamais pensé à faire avant. Tout ce qu'il voulait, c'était continuer. Il voulait voir le sang couler le long de son bras jusqu'à ce qu'il vienne se loger au creux de sa main. Alors voyant qu'il ne restait plus de place sur son avant bras gauche, Eddie passa à son bras droit. Il allait s'apprêter à répéter les mêmes gestes quand une voix l'interrompit :
« Eddie ? »
Stanley se tenait à quelques centimètres du garçon. Il était arrivé sans faire de bruit, et regardait maintenant avec une expression plutôt confuse et choquée le bras d'Eddie qui était recouvert de coupures rouges vives où le sang perlait. Le brun rabaissa ses manches précipitamment en se mordant la lèvre à cause du contact inconfortable du tissu contre sa peau meurtrie.
« Stanley je ne veux pas en parler. » annonça t'il d'un ton plutôt suppliant.
Le garçon en question se mit à réfléchir tout en scrutant le visage d'Eddie avec une expression concentrée sur le visage. Non il ne jugeait pas Eddie, il voulait juste comprendre et peut-être même l'empêcher de le refaire. Le garçon n'allait pas bien, il en était sûr. Et après ce qu'il avait enduré, cela semblait être la seule solution qu'il avait trouvée pour gérer tout ce qui le torturait à l'intérieur . La scarification, Stanley ne savait pas vraiment ce que c'était, mais en avait entendu parler. Il savait que ceux qui se scarifiaient s'infligeaient ses sortes de blessures. Ils se marquaient la peau comme un tatoueur la grave, mais dans un tout autre but.
Stanley essaya de trouver les mots justes mais rien ne lui venait en tête. Il ne voulait pas empirer les choses, ni vexer Eddie, alors il s'assit à côté de lui et lui demanda le morceau de verre. Eddie le lui donna sans un mot et baissa la tête.
« Est-ce que tu t'es déjà fait ça avant ? » demanda Stanley.
Eddie secoua la tête de droite à gauche.
« Pourquoi ? »
Eddie poussa un gros soupir et sentit quelque chose en lui qui semblait presque étranger après avoir passé trois semaines sans pleurer. Car en effet, sa gorge lui piquait et sa vision commençait à se troubler. Une larme vint s'écraser contre le tissu de son pantalon. Stanley passa gentiment son bras au dessus des épaules d'Eddie qui ravala du mieux qu'il put ses larmes. Il s'essuya le nez avec le revers de sa manche, posa sa tête sur l'épaule de Stan, et répondit d'une voix cassée.
« Je sais pas... je veux juste que tout ça se stoppe. »
« Tout quoi ? » demanda Stanley en fronçant les sourcils.
« Le fait de me sentir de trop dans mon propre corps. Depuis... Henry, dit-il en balayant le terrain de la main comme si le garçon se trouvait ici, j'ai l'impression de ne plus rien ressentir. Et à chaque fois que je vois le H gravé sur mon ventre c'est comme si je ne pouvais plus respirer. Et je le vois chaque jour, je ne pourrai jamais oublier tout ça. Je me sens tellement impuissant et tellement... vide. Je-je... » commença à balbutier Eddie.
« Eh eh eh, chut, calme-toi, respire. » chuchota Stanley d'une voix rassurante.
Eddie se mordit la lèvre jusqu'à sentir le goût du sang dans sa bouche. Tout était flou dans sa tête et il ne savait plus quoi faire. Il savait que les larmes menaçaient de couler à chaque instant, mais il ne savait plus ce qu'elles voulaient représenter. Elles ne le libéraient plus, et ses émotions, même si il doutait de toujours en avoir, étaient coincées, perdues et introuvables dans toute la complexité effrayante de ce vide qui le retenait prisonnier.
Eddie se mit à pleurer en silence. Seul le bruit de ses reniflements venaient perturber le silence hivernal. Sa tête était toujours posée contre l'épaule de Stanley et son bras le brûlait légèrement à présent. Pleurer ne l'aidait en rien. Eddie avait mal. La même douleur sourde, qu'il avait ressenti l'autre jour à l'hôpital, continuait de s'emparer de tout son corps et de son esprit. Tout lui semblait incertain et tout était gris. Eddie était tellement brisé qu'il en était arrivé à un stade où il ne pouvait plus rien ressentir. Le garçon se leva et Stanley fit de même.
« S'il te plaît Stan, ne me suis pas et ne dis rien à personne, j'ai besoin d'aller marcher pour réfléchir. » lui demanda le garçon.
Stanley sembla hésiter et répondit finalement :
« D'accord mais s'il te plaît promets moi que tu ne te feras plus jamais de mal, ne le fais pas pour moi, ni pour personne d'autre... fais le pour toi. Promis ? »
Eddie fixa Stanley. Des larmes perlaient au coin de ses yeux. Il n'avait jamais vu le garçon pleurer.
« Je... Promis. » finit-il par dire avant de laisser le garçon et de partir.
Stanley regarda Eddie partir, jusqu'à voir sa silhouette disparaître derrière les gradins. Il ne savait pas quoi faire. Il ne voulait pas trahir la confiance que le garçon avait en lui, mais il ne voulait pas non plus qu'il lui arrive du mal. Il décida finalement de ne rien dire et de veiller personnellement sur Eddie. Pas un mot à Richie, ni aux autres.
Plus rien ne serait comme avant et ça, Stanley le savait.
Il passa à côté des autres morceaux de verre, les ramassa et les jeta dans une poubelle avant de repartir vers le lycée.
« But I'm empty inside,
Yeah I'm empty inside
And I don't wanna live but I'm too scared to die... »
Désolé pour ce chapitre et désolé pour les prochains aussi:(
Lou <3
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