Chapitre 7

C'est bien ce qui me semblait. Que Malefoy vienne complimenter ma –enfin sa- robe et mon discours ne faisait pas parti de son comportement habituel. Non mais franchement ! Que croyait-il ? Que j'étais mère Theresa ? Ce n'était pas marqué charité sur mon front à ce que je sache ! Il allait voir ce qu'il allait voir. Délicatement, je posai le verre que je tenais dans les mains et me plantai face à lui, les mains sur les hanches, les sourcils froncés et les lèvres pincées.

- Malefoy, Malefoy, Malefoy…

- Granger, Granger, Granger…Me répondit-il, un sourire malicieux accroché aux lèvres. S'il croyait que j'avais déjà cédé, il se mettait le doigt au fin fond de l'œil.

- Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de toi ? Tu ressens un manque au fond de toi ? Tu sais tu peux me le dire, je ne le répéterais pas…Mais tu comprends j'ai besoin de réponses. J'excuserais peut-être ton comportement s'il y avait une raison à ta méchanceté.

Son sourire avait à présent disparu et il semblait plus suspicieux qu'autre chose.

- Alors je vais mettre les choses au clair pour la dernière fois, Malefoy.

- C'est quoi ce…

- Je n'ai pas fini ! C'est impoli de couper la parole ! M'exclamai-je en pointait un doigt accusateur sur son torse.

- N'est-ce pas…Marmonna t-il.

Je retins un gloussement et repris :

- Alors voila. Tu peux m'appeler Granger, ou Hermione mais ça me parait plutôt improbable au vu de notre…Situation. Oui parce que tu comprends, ce sont les amis qui s'appellent par leur prénom et nous sommes loin d'être amis alors tu m'appelles par mon nom de famille et je fais de même parce que nous sommes plus ou moins ennemis et…

- Oui bon ça va ! Viens-en aux faits. S'impatienta t-il.

Merlin que c'était bon de dominer ! Je me raclai la gorge et continuai :

- Je sais que je ne suis pas très grande mais tout de même. Tu me dépasses de quoi ? Une tête et demie ? Et bien figure toi qu'une tête demie ce n'est pas grand-chose ! Alors ce n'est pas une raison pour me rabaisser ! Qu'est-ce qu'il t'arrive ? Ton égo n'est pas assez grand ? Tu compenses par la taille ? Tu es ridicule vraiment, je…

Je m'interrompis lorsque que je compris que les lèvres pincées de Malefoy n'étaient pas dues à un énervement quelconque mais plutôt à son self-control pour empêcher un fou-rire. Au vu de l'absurdité de la situation, je craquai la première et éclatai de rire. Le Blond me rattrapa rapidement et nous nous retrouvâmes rapidement les larmes aux yeux. C'était grisant. Je n'aurais jamais cru un jour rigoler avec Malefoy. En réalité, je n'aurais jamais cru voir Malefoy rire, je veux dire, réellement.

- Attends…Tu m'as fait toute une scène parce que je t'ai appelé « petite Granger » ? Demanda t-il entre deux hoquets avant de repartir de plus belle.

Je tentais de reprendre mon souffle et soufflai :

- C'est tout ce que j'ai trouvé pour éviter de te répondre !

Ma dernière réplique sembla lui avoir rafraichie les idées. Son rire se transforma rapidement en un sourire que je qualifierais volontiers de malsain. Aïe…

- Alors ?

- Alors quoi ? Répondis-je toutes griffes dehors.

- Tu m'aides ?

- Non.

Nous dûmes penser la même chose car que nous sourîmes d'un même mouvement. Il était vrai que cette conversation ressemblait étrangement à la discussion que nous avions eu lorsqu'il me demandait pour la première fois de l'aide.

- C'est bête, hein ? L'argument tu as une dette envers moi a déjà été utilisé, raillai-je. Utilise ton second joker.

Il tordit sa bouche dans un drôle de rictus et passa sa main derrière la nuque, décoiffant au passage un peu plus ses cheveux.

- Je peux appeler un ami ?

Je pouffai malgré moi et l'interrogeai :

- Tu sais que c'est une émission moldue ?

Il haussa les épaules.

- Les parents de Maëlla sont des moldus et la dernière fois que nous sommes allés manger chez eux, ça passait à la téyé.

- Télé, le repris-je automatiquement.

Il haussa les épaules et repris :

- Ecoute, Hermione, tu pourrais éventuellement m'aider sans que je te doive quelque chose ou que tu me doives quelque chose, non ?

J'arquai un sourcil lorsqu'il utilisa mon prénom, mais ne relevai pas.

- Et bien…Si j'acceptais de t'aider, tu aurais par conséquent une dette envers moi…Répondis-je d'un air dégagé tout en regardant mes ongles à moitié rongés.

Il leva les yeux au ciel et soupira.

- Tu es incorrigible.

- Non, dure en affaire, nuance.

Après quelques secondes je repris :

- Et que veux tu que je fasse cette fois ? Ton mystérieux ennemi t'en veut encore ?

Il me mima le silence avec un doigt sur sa bouche et me fit les gros yeux.

- Je t'en parlerais ailleurs. Ici, les murs ont des oreilles, chuchota t-il.

Il se tut quelques secondes et tendit finalement sa main.

- En échange de ton aide, je ferais tout ce que tu désires.

Tout ce que je désirais ? Il vivait dangereusement ! C'était mal me connaître. Il était soit suicidaire, soit idiot. Il ne savait vraiment pas de quoi j'étais capable. Pour un serpentard, je le trouvais plutôt courageux.

- Enfin, presque tout.

Raté. Mon sadisme et mes idées démoniaques avaient sans doute dus être lisible sur les traits de mon visage. Je levai les yeux au ciel et serrai finalement sa main tout en lui chuchotant d'un air conspirateur :

- Commence déjà par m'appeler Granger, nous ne sommes pas amis.

Je me retournai et m'éloignai de lui, non sans avoir vu l'ébauche de son célèbre sourire en coin.

La soirée battait son plein. L'atrium était toujours aussi bondé qu'au début de la cérémonie, malgré l'heure tardive. Cette soirée était mon jour –ou plutôt ma nuit- de gloire. Jamais je n'avais connu ça auparavant, excepté à la mort du seigneur des ténèbres. Les gens venaient me voir, me félicitaient, me souhaitaient même la bienvenue. C'était la folie. Tout ce que j'avais fuit revenait vers moi au grand galop. Mais je ne m'en plaignais pas. J'avais fait mon deuil et je l'avais sans aucun doute porté plus longtemps qu'il ne le fallait. J'étais prête à présent. Prête à faire mon retour sur cette planète, et être celle que j'avais toujours été. Celle pour qui on avait toujours prédestiné de grandes choses. C'est cette fille la que je devais être. Je m'en rendais compte à présent. La population comptait sur moi. J'étais un exemple, un modèle et je m'étais trop longtemps esquivée. J'étais Hermione Granger et je devais m'y faire.

- Il serait temps, en effet.

Je me retournai vivement et me retrouvai face à Ginny, resplendissante dans sa robe blanche. Aucun sourire n'égayait son visage, mais ses yeux lumineux trahissaient son humeur.

- J'ai encore parlé à voix haute ? Demandai-je.

- J'en ai bien peur.

Nous restâmes quelques secondes à nous fixer puis, soudainement, sans aucune raison apparente elle me prit dans ses bras.

- Ca fait du bien de te retrouver, Hermione. Ou étais-tu ces quatre dernières années ?

- Partout et nulle part, éludai-je.

Même si Ginny était ma meilleure amie, je n'étais pas encore prête à lui expliquer plus en détail mon auto mise à l'écart. Mais cette étrange discussion m'avait fait prendre conscience que mon comportement de ces derniers temps avait affecté mon entourage. Même si j'avais été là physiquement, psychologiquement je n'étais plus la même et je ne le serais sans doute plus jamais. Je n'avais pas compris pourquoi Ginny ne se confiait plus à moi et pourquoi Harry s'était lassé de ma présence. Et, en fin de compte, c'était peut-être de ma faute si Ron m'avait trompé. Mais je préférais laisser cette affaire sur le côté. Elle était trop douloureuse.

J'aurais aimé qu'un « désolée » règle toute l'affaire, mais je savais que ça ne suffirait pas. Alors je me taisais.

Un silence s'installa entre nous. Pas de ces silences où chacun regardait ses pieds en se creusant les méninges pour trouver un sujet de conversation potable. Non, c'était un silence léger, où chacune de nous deux savourait notre sérénité retrouvée.

Ginny fut appelée un peu plus loin et elle me quitta avec un sourire et un signe de la main. Je soupirai, soulagée d'avoir au minimum retrouvée dans ma repentance ma meilleure amie.

Le bruit, la chaleur, le monde et sans aucun doute la fatigue me firent un peu perdre la tête. Les images se décalaient dans ma tête et certains objets me semblaient flous. Je me faufilai le plus discrètement possible jusqu'au gigantesque balcon du ministère aménagé pour l'occasion. Peu de personnes avaient eu la même idée que moi. La fraicheur du crépuscule en avait sans aucun doute découragée plus d'un. Je me trainai jusqu'à la lourde balustrade de pierre et me penchai dans le vide, respirant à plein poumon l'air frais. Je me sentais déjà beaucoup mieux. J'avais toujours eu quelques tendances claustrophobes et la foule n'aidait pas.

La vue sur le chemin de Traverse était magnifique. Toutes ces lumières illuminant des bâtiments de bois et de pierre donnaient à l'endroit une ambiance exaltée. Je n'avais jamais remarqué à quel point ce village sorcier pouvait être charmant. Le cadre aurait pu être romantique, si j'avais quelqu'un à aimer. Au moment même où cette dernière pensée m'effleura l'esprit, une main se posa sur mon épaule. Je me retournai, stupéfaite et me retrouvai nez à nez avec Ron. D'accord, j'étais mal. Premièrement parce que j'étais plutôt dans une position délicate. Coincée entre lui et la rambarde, peu de choix s'offraient à moi. Soit je sautais, soit je l'ôtais de mon chemin et comme je ne comptais pas me suicider tout de suite, il ne me restait qu'une solution. Deuxièmement parce que je ne voulais surtout pas lui parler.

- D'accord, maintenant si tu veux bien je vais aller vomir, raillai-je.

Mais il ne bougeait pas, se contentant de me fixer, impassible. Oh, je voyais très bien où il voulait en venir, mais je ne comptais pas rentrer dans son jeu. Alors, pour une fois dans ma vie, j'allais faire preuve de patience. J'inspirai un bon coup et hissait mes fesses sur la balustrade. Tout en croisant les bras, je pris le même air vide que lui. Et j'attendais. Je ne cèderais pas. Après tout, qui avait trompé qui, hein ?

Nous dûmes rester ainsi quelques minutes puis il prit enfin la parole.

- Hermione…Notre relation est malsaine.

J'étais ébahi. Une relation ? Mais quelle relation ? Il n'y avait rien entre nous, absolument rien. Seulement un vide, grand, infini qui jamais plus ne sera comblé.

- On a du mal se comprendre. Quand j'ai mis fin à notre couple, il y a trois ans de cela, j'étais définitive Ron. Si tu crois qu'un espoir pour me reconquérir existe toujours, tu te fourres le doigt dans l'œil. Plus rien ne nous lie. Plus rien. Toi et moi n'auront jamais plus rien en commun. Nous ne sommes même plus amis, Ron. Nous ne sommes plus rien. « Nous » n'existe plus, tout comme « toi et moi ».

Bizarrement, il ne cilla pas. Il se contenta de me fixer, exactement de la même façon qu'il le faisait depuis qu'il se tenait face à moi. Et il fallait qu'il arrête. Il devait arrêter parce que mon cœur battait à mille à l'heure et parce qu'une partie de moi, et dont j'ignorais encore laquelle, ne voulait qu'une chose irrémédiable : l'embrasser. Chaque partie de mon corps brûlait au contact visuel qui nous liait. Chaque cellule de mon organisme bouillonnait pour ne former qu'un incontrôlable brasier. Et il le savait. Il savait tout et l'avait toujours su. Le jour où il avait délibérément baisé avec une autre que moi, il savait que jamais je ne pourrais cesser de l'aimer et que me passer de lui me serait fatal. Et il avait raison. Aujourd'hui, par la simple force d'un regard, j'étais prête à retomber dans ses bras. Durant trois ans, il était resté dans l'ombre tout en me contemplant alors que je tombais à l'eau, puis me débattais et enfin coulais, n'attendant qu'une chose : que je sois assez faible pour me récupérer. C'était pathétique mais bien pensé. Il fut un temps où j'aurais été surprise que Ron trouve un plan aussi diaboliquement bien monté seul. Il fut un temps, je n'aurais jamais pensé que Ron tromperait sa petite-amie. Mais à présent, je savais de quoi il était capable et je ne me laisserais pas faire. Et pour l'heure, je devais m'éloigner de lui, reprendre mes esprits et me souvenir pourquoi je le détestais tant.

Je sautais du muret et me détournai de lui le plus rapidement possible. Il ne tenta pas de me rattraper mais prononça une phrase, une seule, qui me fit perdre toutes mes résolutions :

- Je sais que tu m'aimes encore. Sache juste que c'est réciproque.

Cette simple phrase eut l'effet d'une bombe. Il m'aimait encore…Il m'aimait encore…Pleine d'espoir et de rêves, je fis volte face et planta mon regard dans le sien, cherchant une faille. Mais rien, seulement deux pupilles dilatées par l'obscurité. Alors, avec une lenteur délibérée il se rapprocha un peu plus de moi. Il n'avait pas besoin d'aller plus vite. Il savait que j'étais prisonnière de mes sentiments, de mon attirance vis-à-vis de lui. Tout aussi doucement, il posa sa main sur ma joue et attendit. Il était faux. Voulant faire croire à qui voulait l'entendre qu'il me laissa une échappatoire. Mais ce n'était que des foutaises parce qu'il me clouait sur place avec son regard azure et je sentais presque les pointes des punaises me picorant chaque parcelle de peau. Insensiblement, il rapprocha sa tête un peu plus près de la mienne et m'embrassa. C'était comme si toutes les sensations que j'avais ressenties auparavant s'évanouissaient dans l'obscure clarté de la nuit. Et contre mon gré, mes bras entourèrent son cou et ma langue chercha la sienne. Un vertige me prit mais je l'ignorai, m'accrochant un peu plus fort à Ron. Cependant, lorsqu'il mit fin à notre étreinte, un frisson de dégout parcourut mon échine. J'avais replongé dans ses bras comme un drogué privé d'héroïne, comme un alcoolique avec une bouteille de whisky. J'avais replongé, tout simplement dans les méandres de l'amour. Pas d'un amour où tout était beau et rose mais dans une relation destructrice ou un faux pas de l'un entrainerait la mort de l'autre, et je ne doutais pas quant à l'identité de l'autre. Horrifiée, je reculai d'un pas et me réfugia à l'intérieur du ministère. J'étais stupide. Trop stupide. Et naïve. Tellement naïve. J'y avais cru comme dans un ordinaire conte de fée où les promesses du parfait happy end grouillaient.

- Granger ! Faut que je te parle !

Je me retournai et offris à Malefoy un visage inondé par les larmes. Je devais vraiment être horrible car son habituel masque d'impassibilité tomba pour laisser place à un air totalement ahuri. Je secouai la tête et continuai ma route, dans l'espoir impossible de trouver un coin tranquille. Il semblait que pour une fois dans la soirée, la puissance qui nous dominait tous était d'humeur à réaliser mon vœu. Face à moi, je reconnus la porte menant à l'antre d'Harold. Je savais qu'il n'y était pas puisque je l'avais rapidement aperçu depuis la terrasse. Je m'engouffrai dans la minuscule pièce et fus heureuse d'y retrouver la chaleur qui en émanait. Je me laissai choir entre robes, escarpins et sac à main et reposa ma tête sur mes genoux, repliés contre ma poitrine. Je réfléchissais. A quoi ? Aucune idée. Je cherchais en vain un éventuel concept pour me sortir du pétrin dans lequel je m'étais fourrée. Mais rien. Le vide total. Le néant. Il semblait que ma capacité à réfléchir était limitée pour ce soir. J'avais assez donné. Pourtant, l'idée apparut quelques minutes plus tard. Je devais partir, loin de préférence. M'isoler pour penser et éclaircir les zones d'ombres de mon cerveau.

Si seulement j'avais su que Malefoy allait m'aider…

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