Chapitre 24
Le moment était mal choisi. Tout s'enchainait en même temps. J'étais tiraillée entre deux possibilités que j'aurais volontiers évitées. Mais je ne pouvais pas. Je devais choisir. Maintenant. Tout de suite. Oh et puis au diable tous ces dilemmes ! Drago pouvait attendre. La vie de Blaise et Harry, peut-être pas.
Evitant soigneusement le regard insistant de Drago, je tournai les talons et m'apprêtai à m'éloigner une nouvelle fois lorsque sa voix retentit dans mon dos :
- Tu ne crois pas qu'il serait temps de me dire la vérité ?
Je me figeai et sans me retourner répondis d'une voix hésitante :
- Peut-être. Mais je ne peux pas rester.
Un silence aussi lourd que ma poitrine s'installa. Je reculai alors d'un pas mais Drago interrompit une nouvelle fois mon geste :
- C'est maintenant ou jamais.
Je fermai un court instant les paupières. C'était un coup bas. Pourquoi devais-je toujours choisir ? Pourquoi le destin avait pour ambition de toujours me mettre face à des dilemmes injustes ? C'était maintenant ou jamais. C'était Drago ou Matthew Duncan. Quelle ironie. Il y avait comme un air de déjà vu.
- Alors ce ne sera jamais.
Je ne pensais pas un traître mot des paroles que je venais de prononcer. Mais si nous réussissions réellement à vaincre Psycho-Matt, alors tout serait arrangé. Tout serait pardonné. Et tous mes problèmes seraient envolés. Je me hâtai déjà vers le bout du couloir sans un regard en arrière lorsqu'une douleur lancinante déchira mon bras. Serrant les dents de toute mes forces pour ne pas hurler, je fis volte face et tentai de retirer ma main de la poigne de Drago. Mais il referma sa prise, peu envieux de me laisser partir. La douleur irradiait à présent de chaque cellule de mon corps. Je sentais des entailles s'ouvrir un peu partout dans ma peau. Les parcelles encore intactes accueillaient mon sang qui ruissela rapidement jusqu'aux doigts de Drago. Ne pouvant me retenir plus longtemps, je poussai un hurlement tellement déchirant que je ne fus pas immédiatement certaine qu'il provenait de ma gorge. Drago me lâcha instantanément les yeux écarquillés et la main sanglante. Mais la douleur ne disparut pas et les plaies ne se refermèrent pas. Je ne savais à quel moment j'étais tombée au sol, mais la moquette était à présent imbibée de mon sang. Je relevai alors des yeux larmoyants en direction de Drago rendu muet par sa stupéfaction.
- Félicitation, haletai-je. Tu viens de trouver un des enjeux du Serment.
Avec une grimace, je me remis difficilement debout. Il esquissa un geste pour m'aider mais je l'interrompis sèchement.
- N'y pense même pas.
Je m'adossai au mur pour aider mes jambes chancelantes, la respiration encore saccadée.
- Tu voulais savoir ? Tu vas savoir.
Je repris difficilement mon souffle sous le regard intense de Drago.
- Le jour où Psycho-Matt était supposé te tuer, nous sommes allés dans une bibliothèque et tu m'as demandé de partir, tu te souviens ?
Il hocha la tête et je repris :
- Je ne t'ai pas écouté. Tu…tu ne pouvais pas mourir, tu comprends ? Alors je suis allée à la rencontre de Duncan. Et nous avons fait un marché qui a été scellé par ce Serment Inviolable.
Je m'interrompis, reprenant mon souffle à travers les douleurs lancinantes qui parcouraient mon corps.
- Les enjeux étaient qu'il ne pouvait pas vous tuer, toi et Harry à la condition que je lui livre Naomi Adams et que je n'entre plus en contact avec toi. Littéralement.
Il ne réagit pas à la nouvelle. Ou peut-être était-il trop contrarié pour dire quoi que ce soit. Je n'en savais rien. Son visage n'était redevenu qu'un masque inexpressif. Je m'efforçai de continuer, la gorge nouée.
- J'ai appris seulement après que Naomi Adams s'était suicidée. Mais ça ne changeait rien à l'issu de son sort puisque PM avait pour but de la tuer. Toi et Harry restaient donc intouchables. Quant à moi, je me suis rendue compte qu'il était inutile de me voiler la face. Duncan avait du nous entendre dans la bibliothèque et savait que nous étions des âmes sœurs. J'ai vraiment pris conscience de ce qu'impliquait ce Serment lorsque tu es venu chez moi et que tu m'as touché.
J'arrêtai là mon histoire. Le reste était connu de tous. Les jambes encore flageolantes, je m'affaissai de quelques centimètres le long du mur. Les yeux rivés sur mes pieds, je ne pouvais décidemment pas affronter le regard anthracite de Drago. Merlin seul savait ce que j'y trouverais et tout portait à croire que ses pupilles étaient encore plus sombres qu'à l'accoutumé. Le silence plombait l'atmosphère d'un air lourd, difficilement respirable. Plus les secondes s'égrenaient, plus j'avais la terrible impression de suffoquer, écrasant mes poumons à chaque inspiration d'un poids supplémentaire.
- J'aurais du savoir que tu ne partirais pas. Tu es bien trop têtue et bornée pour suivre un quelconque ordre.
Je relevai vivement la tête, mes yeux aimantés vers les siens.
- Foutu courage des Gryffondors, hein ?
J'eus un petit rire étouffé par un sanglot.
- Est-ce qu'il serait possible, une fois, que tu évites de sauver la terre entière ? Je t'apprendrais un jour comment fuir face au danger. Il semblerait que c'est un sujet que tu ne maîtrises pas tout à fait. Je sais que c'est dans ta nature, mais s'il te plait, arrête de toujours vouloir voler au secours tout le monde.
- Je suis tellement désolée, Drago…
Il étira un triste sourire en coin, me couvant d'un regard à la fois las et attendri. Quelque part, dans une des pièces environnante, une horloge émettait un tic tac régulier.
Oubliés Harry et Blaise. Ils pouvaient bien faire ce qu'ils voulaient. Je m'en fichais. Drago annihilait toutes pensées sensées de mon esprit. Tout ce que je souhaitais, c'était sentir le contact de Drago sur ma peau. Ca devenait vital. Et plus je restai là, à le contempler, plus mon impulsion prenait une tournure empressée.
Je tendis alors la main. Il m'imita et suspendit ses doigts à quelques millimètres des miens. La chaleur qui irradiait de sa paume chatouillait ma peau telle une terrible tentatrice. Une larme m'échappa. Comment pourrais-je vivre une minute de plus en sachant, que d'une certaine façon, Drago ne serait jamais complètement mien ? Peut-être la mort était-elle préférable…
XXX
Le cœur de Blaise battait furieusement contre ses côtes. Un terrible point de coté lui coupait la respiration et quelques goutes de sueurs coulaient déjà sur son front. Mais il ne s'arrêta pas. Matthew Duncan était dans le fond du parc. Il accéléra un peu le pas, traversant avec aisance la foule rassemblée dans un des nombreux salons du manoir. Il entendit vaguement quelqu'un prononcer son nom, au loin, mais il ne se retourna pas. Il n'avait pas le temps. Pas maintenant. Bousculant quelques personnalités au passage, Blaise parvint finalement à l'entrée du parc. Mais il ne s'arrêta pas. Seulement quelques hectares le séparaient de Psycho-Matt. La fin du tueur était proche.
XXX
Si Zabini ne l'attendait pas, Harry et lui seraient définitivement séparés. Alors qu'il traversait au pas de course le salon bondé, Harry fut subitement assaillit par une foule de journalistes. Entouré de toutes parts, il perdit Zabini des yeux et en dernier recours cria son nom. Il tenta en vain de pousser les nombreux micros et appareils photos qui crépitaient devant son nez mais les reporters étaient trop nombreux. Avec un dernier effort, il s'extirpa tant bien que mal de cette marrée humaine et se précipita hors du salon. Mais Blaise avait disparu. Ne restait de lui qu'un vague soupçon de son passage. Le Survivant scruta rapidement l'horizon mais seul le reflet du soleil faisait office de paysage. Si seulement Zabini l'avait attendu ! Cet idiot n'était qu'un ramassis d'inconscience. Et si Harry ne le retrouvait pas rapidement, il ne donnait pas cher de peau.
XXX
Blaise s'arrêta à l'ombre d'un grand chêne. Le souffle rendu court par sa course et son point de côté, il appuya avec une grimace sur son abdomen douloureux. Il se retourna et constata que Potter avait disparu. Tant pis. Il n'avait qu'à suivre le mouvement. Pour un héros de guerre, il paraissait un peu mou. D'un geste vif, il sortit sa baguette de sa poche et projeta l'hologramme contre l'écorce foncé de l'arbre. Duncan ne bougeait plus. Il n'était pas très loin de l'endroit où Blaise s'était arrêté. Une centaine de mètres, tout au plus. L'emplacement était une lisière de forêt particulièrement dense qui marquait la fin du domaine des Malefoy. Avec un sourire décidé, il reprit sa course vers le lieu indiqué, sa baguette fermement serrée dans sa main droite. Blaise arriva rapidement à l'endroit où aurait du se trouver Matthew Duncan. Un mélange d'excitation et d'appréhension parcourra son corps. Ce fumier allait enfin pourrir en enfer. Et Drago et Hermione pourraient enfin vivre normalement. Prudent, il contourna chaque arbre. Mais il n'y avait personne. Pas âme qui vive, à l'exception de quelques oiseaux qui gazouillaient gaiement au-dessus de sa tête. Il fronça les sourcils. Il était certain que le Psycho se trouvait ici. Une brindille craqua derrière lui et il se retourna vivement. Matthew Duncan était là. Un léger sourire allongeait ses lèvres et un sourcil arqué accentua son air de surprise feinte.
- Blaise Zabini, susurra t-il. Vous êtes donc aussi idiot que les tabloïds le prétendent.
Blaise serra les dents. Duncan paraissait calme. Beaucoup trop calme.
- Je suis venu pour vous tuer, grinça t-il avec une certaine véhémence.
- Et visiblement, aussi un grand naïf.
L'ancien Serpentard ne répondit rien. Il était bien plus mal à l'aise qu'il ne voulait le prétendre. Et un étrange sentiment contractait ses tripes. Serait-ce…de la peur ? Il fallait qu'il en finisse avec Duncan. Il semblait beaucoup trop détendu, beaucoup trop sur de lui. Et cela n'était pas pour rassurer Zabini. Il ne montra toutefois rien de ses doutes et releva sa baguette un peu plus haut.
- Vous me semblez bien agressif. Ne vous a-t-on donc pas appris les bonnes manières ? Chercher les conflits comme vous le faites n'est pas de bon augure. Avant toute chose, on salut son interlocuteur. Mais j'essuierais votre manque évident d'éducation et viendrais directement au bout de cette…conversation.
D'un geste vif et rapide, il sortit sa baguette magique de sous sa cape et celle de Blaise s'échappa de sa main pour aller s'écraser dans un bruit mat quelques mètres derrière Psycho-Matt.
Le sourire du tueur s'étira un peu plus.
- Voila une bonne chose de faite. Au risque de me répéter, vous êtes vraiment un crétin, Zabini. Vous pensiez réellement pouvoir me tuer en venant ici ? Votre bêtise me rappelle presque cette petite Granger. Elle aussi s'est crue supérieur à moi. Mais à sa grise mine d'aujourd'hui, j'en déduis qu'elle regrette de m'avoir défié.
Un rire faux s'échappa de sa gorge. Les oiseaux des branchages alentours se turent. Il abaissa sa baguette et la fit tourner entre ses doigts. Pensif, il reprit :
- Toutefois, j'avoue que ce marché ne m'arrange pas beaucoup. J'avais prévu de douces tortures pour Mr Malefoy, Miss Granger et Mr Potter. Vraiment magnifiques.
Il haussa les épaules.
- Mais puisque vous êtes là, je suppose que vous ferez l'affaire.
Ces derniers mots retentirent tel un long écho dans la tête de Blaise. Il glissa un regard désespéré vers l'endroit où sa baguette gisait. Mais il ne distingua qu'un entrelacs de brindilles, de terre et de feuilles mortes. La gorge sèche, il avala difficilement sa salive et se retint de toute parole. Jamais il n'aurait pensé que Psycho-Matt fut aussi fou et dangereux. Il avait été bien trop imprudent de partir seul à la recherche de Duncan. Mais il était trop tard pour laisser place aux regrets.
- Je ne suis pas mauvais joueur. Je vais donc vous révéler ce que j'avais prévu pour vos amis. Voyez-vous, j'ai toujours pensé que Miss Granger avait un tempérament de feu. Cette flamme déterminée qui illuminait autrefois son regard avait arrêté mon choix sur un supplice…flamboyant. Quant à Mr Malefoy, que j'estime être le contraire de Granger, j'avais opté pour un sort plus glacial. Savez-vous comment il a essayé de me tuer ? Non ? A l'aide d'une potion qui glace le sang. C'est drôle, n'est-ce pas ? Cette méthode m'a donné des idées et j'aurais d'ailleurs aimé l'en remercier. Mais bon, je suis sur que votre cadavre transmettra parfaitement le message.
Blaise, tétanisé par les paroles du monstre qui lui faisait face, n'était même plus apte à réfléchir correctement. Bien sûr qu'il savait comment Psycho-Matt était supposé avoir été exécuté. Il avait lui-même participé à la fabrication de la potion. Mais il se retint de tout commentaire. Sa peine serait peut-être moins douloureuse.
- Restait alors Harry Potter. Le célèbre Harry Potter. Je ne pouvais que lui réserver une mort digne de son nom. Je m'apprêtai à modifier un peu mes méthodes pour cet invité d'honneur. N'aurait-il pas été intéressant de le tuer de la façon dont le Seigneur des Ténèbres l'avait souhaité ? Un simpleAvada Kedavra aurait suffit. Aucune torture. Une mort simple et indolore pour clore cette vie riche en évènements. Mais voila, ces plans restaient en suspens après ce Serment Inviolable. Et puis vous êtes arrivés. L'homme reliant mes trois victimes. Vous êtes le jouet parfait, Zabini. Et je vais me faire un plaisir de vous faire souffrir.
Un sourire malsain déforma son visage en un rictus démoniaque. Et il leva avec une jubilation écœurante sa baguette en direction de Blaise.
XXX
Drago abaissa sa main avec un léger soupir. Cette absence de proximité entre lui et moi me déplut. Presque contre ma volonté, mes jambes firent un nouveau pas douloureux dans sa direction. Il me regarda faire, curieux. Mon corps à quelques millimètres du sien, je levai la tête et noyai mon regard dans le sien.
- Qu'est-ce qu'on fait, maintenant ? Soufflai-je, le cœur lourd.
Il brisa notre contact visuel et reporta ses yeux sur un point au-dessus de ma tête.
- Que veux-tu faire ? Il n'y a rien à faire.
Un sourire amer prit possession de mes lèvres.
- Alors c'est tout ? Nos chemins se séparent ici ? On se recroisera peut-être un jour et tous les regrets qu'on aura enfouis ressurgiront, nous rappelant que quoi qu'on fasse, la vérité défiait toutes les lois de l'univers ?
Les muscles de sa mâchoire se contractèrent sous la provocation.
- Parce que tu as une solution, toi peut-être ? S'emporta t-il. Oh, mais c'est vrai ! Tu es miss je-sais-tout ! Alors vas-y, éclaire nous d'une de tes brillantes idées !
La tête haute, je ravalai du mieux que je le pouvais mes sanglots. Il reprit, plus calmement :
- Je ne peux pas te toucher Hermione.
Cette dernière phrase résuma tout. Et brisa mes derniers espoirs. Je ne pensais plus à Blaise ou Harry, tous deux partis dans une quête perdue d'avance. J'espérais simplement qu'ils s'en sortiraient vivant. Qu'Harry protégerait Blaise. Quelque chose se brisa dans mon corps déjà meurtri. Oui. Peut-être bien que la mort était préférable à tout cela. Je serais enfin en paix. Quelque part où tous les malheurs qui m'accompagnaient depuis maintenant bien longtemps ne pourraient plus me suivre. Mais il fallait faire les choses bien. Finalement, le vainqueur de toute cette histoire était Duncan. Il avait tout prévu depuis le début. Une vie pour une vie.
J'esquissai un nouveau mouvement vers Drago. Vers ce corps qui pouvait faire ce qu'il voulait de moi tant j'étais soumise. A travers sa chemise froissée, ses muscles frémirent sous cette peau que je savais d'albâtre. Je redressai mon regard jusqu'à son visage. Un léger sourire étira mes lèvres à la pensée qu'il était peut-être l'incarnation d'un ange.
XXX
Harry cria une nouvelle fois le nom de Blaise. Mais seul le silence, hostile, lui répondit. Au hasard, il se dirigea vers la cime des arbres qu'il devinait au fond du parc. Pourquoi Zabini ne l'avait-il pas attendu ? Partir à la rencontre du psychopathe le plus dangereux d'Angleterre, sorcier de surcroit, sans aucune protection relevait de la folie. Ou de l'inconscience. Et le dernier cas, s'apparentait facilement à l'idiotie. D'une main agitée, Harry desserra le nœud de sa cravate qui semblait contribuer à son mal-être. Peut-être était-il déjà trop tard. Mais il secoua la tête à cette pensée. Comme pour se convaincre du contraire, il accéléra le pas en direction de l'inconnu.
XXX
Blaise ferma les yeux, attendant cette douleur qui ne venait pas. Il n'espérait qu'une chose finalement : que ce ne soit pas trop long. Mais il doutait sérieusement de la probabilité de voir cette requête aboutir. Duncan était du genre à jouer avec la nourriture. Pourtant, le temps lui semblait étrangement long. Il se permit d'entrouvrir une paupière. Il eut tout juste le temps de voir Psycho-Matt lui saisir le bras avant de se sentir compresser dans un étau sombre. Son bourreau venait de transplaner. Lorsqu'ils arrivèrent, Blaise inspira longuement ce qu'il savait ses dernières bouffées d'oxygène, conscient que les choses se compliqueraient à partir de maintenant. Et il avait raison.
- Voila. Je pense que nous serons plus tranquilles ici. Les landes de Cornouailles. Regardez ces immenses plaines, Zabini. N'est-ce pas magnifique ? C'est un honneur de mourir dans un cadre comme celui-ci. J'espère que vous m'êtes reconnaissant.
En guise de réponse, Blaise cracha aux pieds de Duncan puis répondit avec hargne et provocation :
- Peu importe l'endroit où je meurs, du moment que vous tombez avec moi.
Psycho-Matt éclata d'un rire glacial qui fit frissonner, malgré lui, Blaise.
- Vous n'avez pas encore compris ? Ou êtes-vous aveuglé par votre naïveté et votre espoir ridicule ? Vous n'avez même plus de baguette. Qu'est-ce que vous pourriez bien faire face à la puissance de ma magie ?
Il ne lui laissa pas le temps de répondre et agita nonchalamment le morceau de bois. De vives flammes surgirent alors sur les mains de Blaise, le faisant hurler de douleur. Il tomba sur les genoux, ses yeux exorbités par la torture et la peur rivés sur ses doigts enflammés. Puis, tout cessa, laissant comme seule preuve de la dernière scène passée une odeur de chair brulée et d'infâmes cloques sanglantes sur les mains de Blaise. Ce dernier releva un regard humide et dégouté vers Psycho-Matt qui lui souriait.
- Je vous avais prévenu. D'abord le feu, puis la glace.
Il accompagna le dernier mot d'un nouveau geste de la baguette et, cette fois, les mains de Blaise gelèrent, lui arrachant un nouveau cri de douleur. Mais la température était beaucoup trop basse pour que son corps résiste et les mains tombèrent au sol, mortes, laissant à leur place initiale deux moignons ensanglantés.
- Oups ! S'exclama faussement Psycho-Matt, un rictus jouissif déformant ses lèvres.
XXX
Plus que quelques millimètres nous séparaient à présent. J'ébauchai un léger sourire. Pour la première fois depuis une éternité, j'avais enfin l'impression de faire le bon choix. D'aller dans la bonne direction. Les pupilles anthracites de Drago me vrillaient, soucieuses. Je remarquai pour la première fois les lourds cernes qui soulignaient son regard profond. Mon cœur se mit à battre plus vite dans ma poitrine. Je n'avais plus mal. Et l'agréable impression que tous les morceaux de mon corps, qui s'étaient disloqués au fil des épreuves, s'étaient recollés répandit une douce chaleur à travers mon être.
- Hermione…Souffla Drago, visiblement inquiet.
Mon sourire s'élargit. Sûre de moi, je levai lentement ma main en direction de son visage. Il eut un mouvement de recule.
- Hermione ! Tu ne…
- Chut.
Il fronça les sourcils tandis que ma main continuait son ascension.
- Tu ne dois pas me toucher, Hermione !
Je suspendis mon geste.
- Ah non ? Et sous ordre de qui ?
Il me détailla longuement, indéchiffrable. Ma douce folie se dissipa lentement, emportant avec elle mon état léthargique. Emportant avec elle mes derniers espoirs. Emportant avec elle Drago. Ma vue se brouilla. Non ! Qu'elle revienne ! Dans une dernière tentative pour ramener à moi un semblant de bonheur, je murmurai :
- S'il te plait, Drago. Ca a toujours été comme ça, quoi que tu dises. Toi et moi contre le monde. Alors qu'est-ce qui nous arrête ?
Il ne cilla pas. N'eut aucune réaction. Je reculai d'un pas. J'avais eu tort. Tort de penser qu'il me suivrait n'importe où. Et alors que je m'apprêtai à tourner les talons, il passa brusquement sa main derrière ma nuque cella nos lèvres.
XXX
Lorsqu'Harry arriva à la lisière de la forêt, il n'y avait toujours personne. Blaise semblait avoir disparu de la surface de la Terre. Ou du moins du terrain Malefoy. Légèrement anxieux, il espéra de tout cœur qu'il n'avait pas trouvé Psycho-Matt. Ou que Psycho-Matt ne l'avait pas trouvé. Par dépit, il shoota dans une pierre qui ricocha sur un morceau de bois familier. Mais Harry n'y prit pas garde. Aveuglé par un sursaut de colère contre lui-même et contre la stupidité de Zabini, il commença une ronde agitée. Il devait bien y avoir une solution ! Si seulement il avait gardé la potion de Blaise ! Son pied roula sur quelque chose et il se rattrapa de justesse à un arbre. Pestant à voix haute, il baissa les yeux sur l'objet de ses malheurs. Mais ce qu'il découvrit chassa rapidement son irritation. Il se pencha, les mains tremblantes, et ramassa la baguette. D'un geste incertain il fit apparaître une carte en hologramme, ce qui lui confirma deux choses : c'était la baguette de Blaise et ce dernier se trouvait bien loin d'ici, en compagnie de Matthew Duncan.
XXX
Une paire de jambes et de bras désarticulés avaient rejoint les mains brûlées dans l'herbe grasse. Ne restait de Blaise Zabini qu'un buste presque mort. Toute douleur s'était dissipée à force de torture. Les yeux clos, Blaise prenait son mal en patience. Le rire de Psycho-Matt ne l'atteignait même plus. Il semblait bien loin, comme si un mur s'était dressé entre le son et lui. Comme s'il était immergé dans une eau glaciale et que les bruits lui parvenaient étouffés. Difficilement, il entrouvrit les paupières mais la lumière lui paraissait trop vive. Alors il les referma. Duncan prononça quelques mots, mais il ne les comprit pas. De toute façon, ça lui était égal. La seule chose qui lui importait réellement était sa défaite. Il avait failli à sa mission. C'était dommage. Il aurait vraiment voulu qu'Hermione et Drago vivent heureux. Ils le méritaient. C'étaient des gens bien. La douleur avait complètement disparu, à présent. Son corps paraissait de plus en plus léger et alors que Blaise se sentait partir définitivement, un vague bruit familier lui parvint. Quelqu'un venait de transplaner. Psycho-Matt était-il parti ? Le laissait-il vivre ses dernières secondes en paix ? Avec un effort surhumain, il rouvrit une demi-seconde les yeux. Juste le temps de voir l'éclair vert se diriger vers lui et les pupilles horrifiées de Potter plonger dans les siennes. Puis ce fut le noir total.
XXX
Harry n'hésita pas. Il transplana immédiatement, incertain face à ce qu'il allait trouver. Ses pieds foulèrent rapidement l'herbe verdoyante des landes. Il eut tout juste le temps de voir le sort mortel de Duncan toucher Zabini. Ou du moins ce qu'il restait de l'ancien serpentard. Un liquide acide remonta le long de sa gorge, brulant son œsophage. Mais il se força à le ravaler. Il détourna alors les yeux du cadavre démantibulé et sanglant. Une violente vague de rage monta en lui et alors que Psycho-Matt se tournait déjà vers Harry, ce dernier n'hésita pas une seconde supplémentaire. Tout se déroula rapidement. Le jet de lumière verte et la chute du corps dont les yeux brillaient encore du plaisir récemment éprouvé. Et c'est raide que le bourreau tomba aux côtés de la victime.
XXX
La douleur était fulgurante mais peu m'importait. Nos mains glissaient sous mes plaies qui suintaient d'un liquide carmin. Il était impossible pour Drago, comme pour moi, de nous arrêter. La tentation et l'envie trop longtemps refoulées avaient raison de nous. Je me forçai à me concentrer sur ses caresses plutôt que sur la douleur. Parfois, des points noirs brouillaient ma vue mais je les ignorais. Les mains de Drago glissèrent le long de mon dos, descendant la fermeture éclair de ma robe à présent plus vermeille que grise. Ma peau s'enflamma sous ce contact. Ses lèvres embrassant férocement les miennes, il passa un bras autour de ma taille et m'entraina dans le salon. Mes mains rendues frémissantes par la douleur et l'excitation, je détachai difficilement les boutons de sa chemise, tachant de sang tout ce que je touchai. Précipitamment, la chemise de Drago glissa autour de ses épaules et rejoignit ma robe sur le sol. La tête me tournait affreusement. Je ne distinguais plus rien autour de moi. Seuls les effleurements de Drago me semblaient encore vraisemblables. Mes jambes cédèrent sous mon poids et je tombai sur le canapé. Le corps ferme de Drago se colla au mien et les dents serrées, je m'efforçai de ne penser qu'au bien que me procurait ce contact si longtemps attendu. Petit à petit, la douleur se dissipait. Ca marchait. Je me concentrai encore plus fort mais un froid anormal caressa ma peau à vif. J'ouvris difficilement les yeux. Drago avait disparu. Faiblement, je tournai la tête, le cherchant du regard. Je le trouvai rapidement. Et la vision qu'il m'offrit me choqua bien plus que je ne voulais l'admettre. Son torse, ses bras, ses mains, son visage et quelques mèches de ses cheveux étaient couverts de mon sang. Nauséeuse, je lui souris doucement, l'incitant à revenir. Mais il ne réagit pas, se contentant de me fixer, le regard blême.
- Tu as arrêté de saigner, articula t-il finalement, la voix rauque.
- C'est parce que tu ne me touches plus.
Il secoua la tête de droite à gauche.
- Non. Tu ne comprends pas.
Il se rapprocha de moi et s'empara fermement de ma main. Aucune nouvelle plaie ne s'ouvrit. Aucune lame invisible n'entailla ma peau. J'esquissai difficilement un sourire.
- Ils ont réussi…, murmurai-je périlleusement.
Et paisible, je fermai les yeux et sombrai dans un monde inconnu.
XXX
La première chose qui me frappa fut l'odeur. Une sorte de mélange de produits de toxiques. Les laboratoires deHealthpotion sentaient pareille. Puis le bruit. Une sorte de bourdonnement désagréable. J'essayai d'attraper le coussin trop dur sur lequel ma tête reposait pour me protéger les oreilles mais mes muscles refusèrent de coopérer. Alors, je rassemblai toutes mes forces pour entrouvrir mes paupières. Mais la lumière était beaucoup trop vive et je les refermai aussitôt, des larmes perlant au coin de mes yeux. Une pression tiède serra les doigts de ma main gauche. J'aurais voulu y répondre mais j'étais paralysée. Un voile noir passa devant mes paupières closes et je compris que la lumière avait diminué d'intensité. Je retentai alors d'ouvrir les yeux. Le plafond de la pièce sombre que je distinguai m'était inconnu. Le visage qui se pencha au dessus de moi, en revanche, m'était bien familier. Drago. Il avait une mine terrible. De profonds cernes soulignaient son regard sombre. Son visage paraissait plus émacié et ses pommettes étaient plus saillantes que jamais. Il n'en restait pas moins magnifique.
- Il…il faudrait sérieusement que tu…penses à manger et…dormir. Tu…tu as une affreuse…tête, croassai-je.
Chaque mot m'écorcha la gorge mais ça m'était égal parce que le sourire qui illumina son visage valait tous les sacrifices de la terre.
- Pas de doute, aucune séquelle n'a entravé ton humour douteux, railla t-il, amusé.
- Dommage, hein ? Rétorquai-je faiblement.
Il pouffa.
- Son humour n'est pas douteux. Il est juste incompris, retentit une voix familière.
Le visage d'Harry m'apparut, aux côtés de celui de Drago. Lui aussi semblait épuisé.
- Qu'est-ce que c'est ? Un rassemblement de zombies ? Je suis invitée ?
- Tu es le maître de cérémonie.
J'esquissai une moue vexée et les deux hommes étirèrent le même sourire moqueur. Je les détaillai longuement avant de reporter mon regard sur ma main gauche, toujours serrée dans un étau chaud et doux. La main de Drago. Je plongeai mon regard dans le sien.
- C'est fini, pas vrai ?
Il hocha la tête et je me redressai avec une grimace dans mon lit. La chambre dans laquelle on m'avait placée n'était pas bien grande. Ses murs, blancs comme la neige, la rendait plus impersonnelle que jamais. Aucun meuble, à l'exception de mon lit, n'habitait les lieux et la seule source de lumière émanait d'une fenêtre, recouverte d'un rideau jaunâtre.
- Où est Blaise ?
Les regards d'Harry et Drago se croisèrent rapidement. Je n'eus pas besoin de plus. La gorge nouée, je ravalai mes sanglots et serrai plus fort la main de Drago dans la mienne, appréciant malgré tout ce contact qui m'avait si longtemps manqué.
Un léger coup retentit derrière la porte qui pivota doucement sur ses gongs. Maëlla, la bouche étirée en un léger sourire, pénétra dans la pièce. Je me mordillai la lèvre inférieure et baissai les yeux, ne souhaitant pour rien au monde croiser son regard. Quelques bruissements d'étoffe retentirent et la porte pivota une nouvelle fois. Je relevai les yeux et constatai qu'il ne restait dans la pièce plus que Maëlla et moi. Je raclai doucement ma gorge sèche, en proie à une réelle gêne. Elle s'approcha souplement de mon lit et saisit ma main dans la sienne. Surprise, je plantai mon regard dans le sien, cherchant une raison à son comportement anormalement gentil.
- Tu vas mieux ?
- Dur de répondre. Je ne sais pas ce que je fiche ici, grimaçai- je alors que je pliai les jambes.
Elle me sourit, presque maternelle. Geste qui me culpabilisa encore plus que je ne l'étais déjà.
- Tu as perdu beaucoup de sang. On t'a amené en urgence ici, à Sainte Mangouste, pour que tu reçoives des transfusions.
J'hochai la tête, me retenant de tout commentaire. Connaissait-elle la cause de mes blessures ? Probablement. Je soupirai, essayant de reprendre contenance et de chasser cette pression qui enserrait ma poitrine. Fichue conscience.
- Je suis désolée, Maëlla, lâchai-je subitement. Tu ne méritais pas ça. Je veux dire…toute cette histoire avec Drago.
Elle pressa gentiment ma main.
- C'est de la faute à pas de chance. Je m'en remettrais, ne t'en fais pas.
J'esquissai un petit sourire. Cette femme était décidemment la plus incroyable qu'il me fut donné de rencontrer. Et sous ses airs résignés, je savais sa peine grande.
- Que vas-tu faire, maintenant ?
Elle haussa les épaules.
- Je vais surement retourner en Suède. Toute ma famille est là-bas.
Je n'ajoutai rien, la culpabilité semblant enfler comme un ballon dans ma poitrine. Alors qu'elle amorça déjà un pas en direction de la sortie, je l'interpelai. Elle se retourna, surprise.
- Je voulais te demander…comment fais-tu ? Même en situation de crise, tu arrives toujours à rester si…parfaite. Existe-t-il un secret ?
Elle ébaucha une moue énigmatique.
- Un sourire ne veut rien dire s'il est vide de toute sincérité.
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