Chapitre 14

L'agitation qui régnait au rez-de-chaussée me réveilla. J'avais passé une nuit terrible. Emplie de cauchemars tous plus sanglants les uns que les autres, ils mettaient en scène d'affreux meurtres avec des personnages décapités. Bien trop crispée pour me rendormir, je me levai tant bien que mal sur mes jambes encore frêles. Habillée de la même façon qu'hier, je titubai jusqu'à l'étage inférieur. Plusieurs voix semblaient débattre sur un sujet qui m'était encore inconnu.

- Mais enfin c'est impossible autrement ! Comment ont-ils pu connaître tous les détails ? Ils connaissaient même les lettres sur le front ! Moi je dis qu'il y a une taupe parmi nous ! S'exclamait Harry d'une façon trop forte au goût de Ginny qui le rappela rapidement à l'ordre.

- Moins fort ! Tu vas la réveiller !

Un silence suivit cette déclaration, brisé par un étouffement indigné.

- Quoi ?! Tu insinues que c'est moi la taupe ? Je suis dans la même merde que toi, au cas où tu avais oublié !

Drago.

- Je n'ai rien dit !

- Ton regard parle pour toi !

Un autre silence. Entrecoupé par des soupires et des étranges bruissements de papier. Je décidai de pénétrer dans la pièce à ce moment là. Ils étaient les trois là, assis autour de la table. Ils se tournèrent vers moi et Ginny sauta sur ses pieds avant de s'approcher de manière moins brusque.

- Hermione ! Ca va ?

Je ne préférais pas répondre et elle n'insista pas. Je m'installai sur la seule chaise libre, en face de Malefoy. Sur la table, trônait la Gazette du jour. Elle ne m'intéressait pas jusqu'à ce qu'Harry amorce un geste en sa direction et la tire nonchalamment vers lui. J'interceptai alors une œillade mauvaise de Malefoy et une grimace de Ginny. Ils me cachaient quelque chose, c'était évident. Et ce quelque chose se trouvait dans le journal. Je tendis une main déterminée vers le quotidien :

- Je peux ?

Harry tordit sa bouche en un rictus hésitant et c'est Drago qui l'aida à se décider en faisant glisser la Gazette vers moi.

- Elle finira bien par l'apprendre de toute façon, se justifia t-il face au regard méprisant que lui lançait l'élu.

Malgré la peur qui tiraillait mes entrailles, les images débordantes d'horreur qui monopolisaient mon esprit et les légers tremblements qui secouaient mon corps depuis la veille, je ne pus nier que la curiosité m'avait piqué.

Je dépliai rapidement le journal et parcourus en quelques secondes la première page. Je n'eus pas besoin d'aller plus loin. Tout était dit. Tout était montré. Un immense portrait de Mathias Davos occupait plus de la moitié de la page et un petit texte l'accompagnait en guise de légende, surmonté d'un titre aux caractères larges.

Psycho-Matt : On nous a menti !

Mathias Davos, alias Psycho-Matt, le tueur de femmes tant redouté il y a de cela six mois, ne serait en réalité pas mort, comme le ministère nous l'a fait croire, mais bel et bien vivant.

Armé d'une soif de vengeance dévastatrice, il aurait dans sa ligne de mire toutes les personnes ayant organisés sa mort. Parmi eux, nous pouvons compter le célèbre Harry Potter, le puissant homme d'affaire Drago Malefoy, Anthony Hopstale, le président du mangenmagot ou encore Carl Baker, l'auror à la renommée international. Mais plus étonnant encore, il semblerait qu'Hermione Granger, celle à qui nous devons la mort de Vous-Saviez-Qui soit également présente dans la funeste liste puisque c'est chez elle que nous avons retrouvé hier soir la tête de Noah Palmer, dernière victime en date de Psycho-Matt.

Dure réalité ou simple canular ? Il semblerait que nous ayons trouvé une nouvelle affaire à suivre…

Je relevai lentement la tête vers mes interlocuteurs et lâchai d'une voix blanche :

- Cette fois c'est officiel. Nous sommes morts.

Face aux regards incrédules d'Harry et Ginny et à celui de glace de Malefoy, je jugeai bon d'ajouter :

- Façon de parler. Si les médias s'emparent de l'affaire, l'égo de PM sera flatté, et comme la dernière fois, ses victimes se multiplieront. Enfin, dans notre cas, je suppose que notre tour arrivera plus vite que prévu. Sans parler de la terreur qui ne va pas tarder à régner parce que la population est trop stupide pour comprendre que nous sommes pour l'instant les seuls visés…

Drago acquiesça lentement. Il semblait penser comme moi et cela me réconforta quelque peu. Harry passa une main tremblante sur son menton qui accueillait une barbe de quelques jours.

- Je me débrouillerais avec la Gazette pour qu'elle publie un démenti sur de fausses rumeurs, mais ce n'est pas gagné. Une grosse somme devra surement y passer…En espérant que notre supposée de taupe n'insiste pas…

Je soupirai de lassitude et exaspérée, je lâchai d'une voix plus dure que je ne l'aurai voulu :

- Bon sang mais ouvre les yeux, Harry ! Il n'y a ni taupe, ni rat, ni mulot, ni hippogriffe, ni aucun animal parmi nous ! Vous étiez au minimum quinze dans mon appartement hier ! Une quinzaine ! Et il semble que la discrétion n'est plus de rigueur dans la formation des nouveaux aurors. N'importe qui dans mon immeuble a pu vous entendre ! Alors arrête là ta crise de paranoïa parce qu'il n'y a réellement qu'une personne qui t'en veut en ce moment.

Un long silence suivit ma tirade. Harry ne me lâchait pas du regard et je commençai presque à regretter mes paroles. Presque, parce qu'au fond je les pensais et il le savait. Mon cœur tambourinait avec force mes côtes, comme si le combat visuel qui m'unissait à Harry avait un impact physique sur mon être. Mais je ne lâcherais pas. C'était une des rares choses que je pouvais contrôler à présent. A défaut de remporter ma bataille contrer la mort, contre le temps, j'allais au moins remporter celle-ci. Je ne flancherais pas. Je ne détournerais pas une seconde mon regard du sien. Parce que c'était le seul moyen de me prouver qu'au fond j'étais forte, de me rappeler que j'avais déjà traversé des épreuves difficiles et que je m'en étais sortie indemne. Alors après tout, pourquoi ne survivrai-je pas une nouvelle fois ?

Un étrange bruit retentit derrière moi et je rompis le lien visuel afin de me retourner. J'avais perdu. J'étais perdu. Parce que Ron était là. Je me levai d'un bon et m'apprêtai à quitter la pièce lorsqu'il s'avança vers moi. Je reculai d'un pas. Il sembla choqué par mon geste et s'arrêta au milieu du salon, les bras ballants.

- Hermione…Comment te sens-tu ?

Si ma vie avait été une comédie romantique, je me serais volontiers ruée dans ses bras, les joues baignées de larme, et j'aurais dévoré ses lèvres, trop heureuse de voir qu'il se souciait encore de moi. Mais voila, ma vie était rangée dans la catégorie des films d'horreur. Alors, au lieu d'appliquer le scénario réservé aux contes de fée, je lâchai d'une voix tremblante :

- Quand on jette, on ne reprend pas.

Et je quittais la pièce pour ma chambre, le cœur en miette.

A peine me fus-je isolée que de légers bruits de pas résonnaient déjà dans les escaliers. Dos à la porte, le regard perdu dans le paysage qu'offrait le jardin des Potter, je me contentai de soupirer lorsque Ginny entra dans la pièce. Peu désireuse de voir son regard empli de pitié, je restai résolument tournée face à la fenêtre.

- Tu ne peux pas comprendre. Tu n'es pas sur le point de mourir, ta vie parfaite est bien loin du chaos qui règne dans la mienne, Ron est ton frère et quoi que tu dises, tu le défendras toujours. Alors je t'en pris, ne dis rien. N'essaye pas de me réconforter avec tes habituels serments parce que je doute qu'ils marchent cette fois-ci.

Un court silence suivit ma déclaration.

- Tu te trompes sur toute la ligne. Je vais aussi mourir et ma vie est un incroyable bordel. Et le rouquin est bien loin d'être mon frère. Dieu merci. Et les serments, bah…Vraiment pas mon truc.

Je me retournai brutalement. Drago me faisait face, les bras croisés sur sa poitrine et son fidèle sourire en coin pendu à ses lèvres. Les timides rayons de soleil qui avaient osés s'aventurer dans la chambre illuminaient son visage d'une aura angélique. Et malgré les lourds cernes qui soulignaient son regard cendré, je ne pus nier qu'il était beau. Un agréable sentiment de paix soigna un court instant mon cœur malade. Je me sentais presque bien, presque en harmonie avec moi-même et c'était étrange que la seule présence de Drago puisse provoquer un tel apaisement. Il avait raison depuis le début. Il avait changé. Il était devenu quelqu'un de bien. J'étais consciente que sans lui, ma vie serait encore plus pitoyable parce qu'étrangement, il avait toujours été là pour moi. C'était inouï mais réel. Et je lui en serais éternellement reconnaissante. J'aurais voulu lui dire à quel point je lui étais redevable, à quel point il était impensable que je puisse le détester à nouveau, mais une boule obstruait ma gorge et empêchait tous sons de passer. Il était dommage que nos fins soient si proches, parce qu'au fond, j'aurais aimé apprendre à mieux le connaître et qui sait, peut-être être son amie.

- Harry et Ginny sont partis chercher tes affaires. Et j'ai amené tes chats chez moi. Maëlla s'en occupe.

Cette dernière nouvelle me réchauffa le cœur. J'étais heureuse d'apprendre qu'il avait suivi mes instructions.

- Quant à ta non-âme sœur, reprit-il, il semblerait qu'elle ait pris le large en même temps que tout le monde.

Je fronçais les sourcils. Non-âme sœur ? Cette histoire ne le regardait absolument pas.

- Ce ne sont pas tes affaires, Malefoy, parvins-je finalement à articuler d'une voix rauque.

Il haussa les épaules nonchalamment.

- Si.

- Non.

Il commençait sérieusement à m'agacer. Même si je l'appréciais un minimum, il restait Drago Malefoy.

- Si.

Je m'apprêtais à réitérer ma négation avec détermination mais il ne m'en laissa pas le temps.

- Si, ce sont mes affaires, parce qu'il semblerait que je suis le seul à savoir que tu t'es mise en tête une idée complètement dingue et stupide.

Les bras toujours croisés sur sa poitrine, il me détaillait de son regard anthracite, attendant sans doute une réaction qui ne tarda pas à arriver :

- Qu'est-ce que tu en sais, hein ? Tu n'es ni dans ma tête, ni dans mon corps, à ce que je sache. Et je sais ce que je ressens !

Il lâcha un ricanement provocateur.

- Personne ne peut t'ouvrir les yeux alors je me porte volontaire pour le faire : tu es une fille suicidaire, Granger. Vraiment. Tu vis dangereusement, tout le temps, partout. Tu n'hésites pas à mettre ta vie en danger chaque seconde de ta vie. D'abord Voldemort et puis quand tu estimes que ton monde est trop morne, tu te bornes à croire que les pires malheurs te tombent dessus. Et puis finalement, par ma faute, je le conçois, tu te retrouves avec un tueur fou sur les talons. Je suis certain que tu te sens bien plus vivante maintenant qu'il y a quelques mois en arrière.

Malgré tout ce qu'il venait de me balancer, je n'avais retenu qu'une chose. Qu'une phrase. Et sans aucun doute la moins anodine de son discours. Effarée, je balbutiai tout en m'approchant de lui :

- Mais…Ce n'est pas de ta faute !

Il détourna son regard du mien et contracta la mâchoire.

- Ne soit pas idiote. Tu le sais aussi bien que moi. Mais là n'est pas le problème. Ron n'est pas ton âme sœur. Il ne l'a jamais été. Tu te bornes à croire des choses fausses, dans l'unique but de te faire souffrir.

Il essayait de me faire mal. De me toucher. De me faire oublier mes dernières préoccupations. Mais rien de ce qu'il me disait ne m'atteignait réellement. Parce que je venais de comprendre. Je venais de prendre conscience d'une chose qui m'avait échappée jusqu'alors. Il s'en voulait. Tout comme je m'étais persuadée que Ron était mon âme sœur, il s'était convaincu que mon décès futur était de sa faute. Comment une telle évidence avait-elle pu m'échapper aussi longtemps ? Il était toujours là pour moi, parce qu'il se sentait coupable. C'était sa façon de se faire pardonner, de retrouver en lui la force de croire qu'il n'était pas une mauvaise personne et d'une certaine manière de vivre du mieux possible les derniers instants qui lui restaient. L'idée de lui en vouloir ne m'avait jamais, ne serait-ce qu'effleurer l'esprit, et cela n'allait pas changer.

- Drago…Soupirai-je. Ce n'est pas de ta faute ! Je…

- Arrête ! Siffla t-il. Tu sais très bien que si je ne t'avais pas demandé de m'aider tu n'en serais pas là aujourd'hui. J'aurais du me débrouiller tout seul au lieu de te faire chanter.

Stupéfaite devant ces paroles, j'essayais en vain de le dissuader de ses certitudes :

- Si je n'avais vraiment pas voulu venir, je ne l'aurais pas fait et…

Il se passa vivement la main dans les cheveux d'un geste agacé et planta avec force son regard dans le mien.

- Arrête ! Me coupa t-il d'une voix autoritaire. Arrête, s'il te plait, reprit-il doucement, comme si mes paroles résonnaient en lui comme une terrible torture.

Il s'assit mollement sur mon lit et se prit la tête dans les mains. J'avais rarement vu le grand Drago Malefoy dépossédé de ses multiples protections. Et pourtant, face à moi, se tenait un homme plus vulnérable que jamais. Je pris alors conscience que je n'étais pas si seule que je voulais me le faire croire dans cette descente au enfer. Il était là. A côté de moi. Avec moi.

Je m'installais contre lui et nous restâmes silencieux quelques secondes.

- J'ai peur, Drago, soufflai-je.

Il releva lentement la tête et je sentis son regard me détailler avec minutie. Lorsqu'il me répondit enfin, ses pupilles grises avaient dévié et fixaient un point invisible sur le mur face à nous.

- Moi aussi j'ai peur.

Lentement, je laissai ma tête tomber sur son épaule et chuchotai :

- On va faire un marché toi et moi. J'essaye de me convaincre que Ron n'est pas mon âme sœur et toi, en échange, tu empêches cette stupide culpabilité te ronger.

En dépit de la tension qui planait au dessus de nos têtes, je le sentis sourire.

- D'accord.

Nous sellâmes notre accord par un délicat silence, sachant pertinemment qu'aucun de nous deux ne respecterait sa part du marché.

Harry et Ginny ne tardèrent pas à revenir. Ils n'avaient pas pris grand-chose : quelques vêtements et une trousse de toilette. Quant à Malefoy, il était parti retrouver Maëlla qui s'impatientait face à son absence. En ce qui me concernait, j'errais telle une âme en peine et égarée à travers le manoir des Potter. J'avais tout essayé mais rien, absolument rien ne détournait mon attention de mon funeste destin. Je devenais irrémédiablement obnubilée par la mort et quand mes pensées ne se tournaient pas vers mon trépas, elles filaient droit vers Ron. Je vivais un cauchemar. Ma vie, celle qui me paraissait si morne autrefois, était devenue une véritable histoire digne des pires films d'horreur. Et je ne sais pas ce que je préférais, au fond.

J'aurais du accepter les offres qu'on me faisait à la mort de Voldemort. Peut-être habiterais-je dans un des ces immenses appartements sur Upper Street. Si tout cela avait été le cas, Ron ne serait jamais parti voir ailleurs parce que je serais restée la Hermione qu'il avait toujours connu, celle dont il était tombé amoureux et je n'aurais jamais fini saoul au mariage d'Harry et Ginny. Mais je devais arrêter d'envisager des choses aussi improbables car il était possible de refaire le monde avec des « si ».

Parmi toutes les questions sans réponses auxquelles je ne cessais de penser, il y en avait une, une seule, qui m'intriguait plus que les autres. Pourquoi Psycho-Matt avait-il déposé la tête de sa victime chez moi, sachant que je n'étais pas la suivante ? C'était absurde ! Loin de toute logique dont il s'était pourvu pour effectuer ses crimes infâmes. J'avais beau retourner le problème dans tous les sens, il n'y avait aucune cohérence. Ce n'était même pas comme si je jouais un rôle important dans cette histoire. Je n'étais qu'un pion, une mauvaise herbe gênante sur le chemin déjà tout tracé de Mathias. Alors pourquoi moi, Hermione Granger ? Pourquoi avais-je donc le droit à un traitement de faveur ? C'était absurde.

C'est Harry qui m'avait apporté la réponse. Au cours du diner, je n'avais pu m'empêcher de l'interroger sur ce problème qui me rongeait. Il avait semblé mal à l'aise. Une grimace avait déformé ses traits un court instant puis il m'avait expliqué en employant le même ton qu'utilisent les médecins pour annoncer la mort de leur patient à la famille.

- Je connais Psycho-Matt depuis un moment, maintenant. Je le traque depuis ses premiers meurtres et à force de me mettre à sa place pour essayer d'anticiper ses intentions, je commence à comprendre sa façon de penser.

Il s'était interrompit et avait glissé un regard inquiet vers Ginny avant de continuer :

- Comme tu le sais, la traque qui habite Psycho-Matt en ce moment n'est pas basée sur le plaisir de tuer, mais sur la vengeance, ce qui change de ses habitudes. Il n'aime pas tuer parce qu'il le doit, comme c'est le cas ici. Il aime tuer à sa guise, selon son humeur. Et puis, autre changement : pour mener à bien sa vengeance, il doit tuer des hommes, ce qui doit sans aucun doute l'agacer au plus haut point quand on sait que son truc ce sont plutôt les femmes.

Lentement, j'avais alors commencé à comprendre. C'était comme si les morceaux du puzzle s'étaient assemblés pour ne former qu'une immense image, grande, claire, précise et logique.

- Tu es la seule femme du lot, Hermione. Tu es son dessert, sa gourmandise, son plaisir. Le point culminant de sa tuerie. Il ne désire pas se venger de toi. Tu es seulement sa proie, son jouet, la pièce maitresse de son œuvre. Et selon moi, tu es en haut sa liste. Il garde le meilleur pour la fin. Tu es l'unique raison qui le pousse à tuer tout le monde. Il sait que lorsque tous seront passés sous sa baguette, il ne restera plus que toi, le meilleur de ses meurtres, celui qui l'aura sans doute fait le plus languir. Il a mis la tête chez toi pour s'amuser. Pour te montrer qu'il a plus de considération pour toi que pour aucun d'entre nous.

Mon cœur allait exploser, éclater, créant un trou béant dans ma poitrine qui suinterait de toute la peur qui m'habitait. Et je savais que lorsque ce jour arriverait, Psycho-Matt serait face à moi.

Une semaine. Une semaine, à la fois si longue et si courte. Une semaine que nous vivions tous en apnée, attendant la prochaine manche du jeu en solitaire que menait Psycho-Matt. Il n'allait pas tarder. La prochaine victime était Anthony McDuff. Je l'avais appris peu après mon arrivée chez les Potter. Je l'avais vu une unique fois : dans le bureau d'Harry lorsque j'avais été avisée de mon exécution prochaine. Dan étant déjà de l'autre côté de la barrière et Anthony étant le prochain à le rejoindre, je devinais aisément que l'entrée prenait fin. Le plat de résistance était pour bientôt. Harry et Drago avaient du souci à se faire. Moi j'avais encore un peu de temps, encore un peu de répits, si tant soit peu que le fait d'attendre presque avec impatience la fin d'une angoisse perpétuelle était considéré comme une certaine forme de rémission.

C'était presque amusant, au fond. De voir que tout le monde avait perdu espoir. De remarquer que plus personne n'osait parler de son avenir. Comme s'il était évident qu'il n'existait plus pour certain d'entre nous. Je me plaisais presque à observer les gens m'entourant baisser les uns après les autres les bras, las d'espérer pour rien. Notre destin était scellé à quatre planches de bois de manière irréversible. Mathias Davos était fort. Très fort. Je ne l'avais encore jamais vu, ne serait-ce qu'aperçu, et je savais d'avance que lorsque nos regards se croiseraient pour la première fois, le mien mourrait presque aussitôt. C'était triste et fatal. Et c'était la réalité. Cette réalité qui ne me faisait presque plus trembler. Cette réalité qui, à présent, me touchait à peine. J'étais ennuyée de me répéter inlassablement les mêmes choses. Mourir n'avait presque plus aucun sens pour moi. Ce mot était encré en moi, habitait chaque particule d'air que j'inspirais, demeurait sur toutes les lèvres. Il était tellement employé qu'il perdait tout son sens, tout son caractère effrayant et dramatique à mes yeux. Et, d'une certaine manière, la peur que provoquait en moi PM s'atténuait un peu.

J'arrivais d'une démarche lente et trainante dans la cuisine où Ginny s'affairait avec des gestes désordonnés. Elle n'avait jamais été très douée pour préparer des plats. Mais il fallait bien qu'elle s'occupe, elle aussi. A chacun sa façon de détourner son esprit de l'intérêt morbide que provoquait Psycho-Matt.

- Ca sent bon, mentis-je. Que prépares-tu ?

Elle se retourna vivement et me dévisagea de ses grands yeux bleus avant de laisser un petit sourire étirer ses lèvres.

- De la poularde au jus de citrouille ! S'exclama t-elle joyeusement.

Je grimaçais discrètement avant d'afficher un faux sourire ravi.

- Mmmh, ça à l'air excellent ! J'ai hâte d'y gouter !

Le visage de Ginny devint soudainement grave et elle me fixa longuement des ses petits yeux inquisiteurs.

- Tu mens, déclara t-elle finalement. Tu dis ça pour me faire plaisir.

- Oui, cédai-je honteusement. Ca à l'air affreux.

Elle se laissa tomber sur la chaise à côté de moi.

- Je sais, gémit-elle. Ce n'est pourtant pas bien compliqué à faire une poularde au jus de citrouille ! Je ne comprends pas…J'ai hérité de tout, absolument de tout de la famille Weasley, mais visiblement pas des dons culinaires de ma mère…

J'haussai les épaules et me levai.

- Laisse faire les pros ! Dis-je tout en dégainant ma baguette.

Elle me regarda avec des yeux ronds puis se résigna.

- Après tout, tu es Hermione Granger. Tu sais tout faire.

Je pouffai et m'affairai aux fourneaux avec un entrain non dissimulé. Y aurait-il eu de la musique que je me serais presque trémoussée.

Comme si la rouquine avait lu dans mes pensées, un air entrainant retentit soudainement dans la pièce. Je me retournais, un sourire pendu aux lèvres. Elle s'était levée et commençait une danse enflammée. Ses gestes n'avaient ni queue ni tête mais elle semblait s'amuser. Alors, tout en chantant à tue-tête, je l'imitai. Et nous dansâmes, en plein milieu de la cuisine, la musique sortant de partout et nulle part à la fois. J'avais l'agréable sensation de m'être retrouvée. De faire à nouveau qu'un avec la Hermione que j'étais à Poudlard. Cette Hermione heureuse et pleine de vie. Cette Hermione à qui j'avais lâché la main en cours de route. Psycho-Matt n'existait plus. Il n'y avait plus que moi. Moi et la vie. La vie et moi. Et telle une amie, elle m'ouvrait grand les bras. Je savais que l'instant n'était qu'éphémère. Qu'il prendrait rapidement fin et que nous serions une nouvelle fois projetés dans la dure réalité qui nous entourait, qui nous encerclait et qui se resserrait subtilement chaque jour, pour à la fin ne laisser plus aucune place aux illusions. Mais pour l'heure, j'aurais presque pu affirmer être heureuse. J'avais oublié le temps de quelques précieuses minutes toute la misère que je portais sur les épaules et tout cela grâce à une danse puérile, bordée de rires enchantés.

Un raclement de voix nous interrompit. C'était trop tôt. Beaucoup trop tôt pour retourner dans ce monde qui nous attendait, un sourire insolent sur les lèvres. Malgré mes supplications silencieuses, la musique s'arrêta. Nous nous retournâmes d'un même geste, les cheveux emmêlés, les joues rougies et le souffle saccadé vers le nouveau venu. Les nouveaux venus, en fait. Drago et Maëlla nous observaient, un sourire amusé sur les lèvres du premier et un air incrédule plaqué sur le visage de la deuxième. Ginny se racla la gorge, visiblement mal à l'aise.

- Nous…Nous…Tenta t-elle de se justifier en faisant d'innombrables moulinets avec son bras.

- Nous cuisinions, terminai-je en hochant de manière peu convaincante la tête.

Le silence accompagna quelques temps ma déclaration. Silence qui dura peu. Il fut brisé par le rire de Malefoy. Résonnant comme une magnifique mélodie à mes oreilles, je ne pus m'empêcher d'esquisser un léger sourire. Il était tellement rare en ces sombres temps d'entendre quelqu'un rire. Drago se reprit rapidement mais ses yeux brillaient d'une lueur moqueuse. Un léger sourire mutin avait également prit place sur les lèvres de Maëlla mais elle ne pipa mot.

- Vous restez manger ? Proposa Ginny, essayant malgré tout de reprendre contenance.

Blondie déclina l'offre poliment avant d'échanger un regard douloureux avec Drago. Je n'avais aucune idée de sa signification, mais je me doutais que la réponse à mes questions n'allait pas tarder. Elle poussa un long soupire et se résigna à tout nous expliquer :

- Nous annulons le mariage. Avec toute cette histoire de vengeance et de meurtre, nous avons jugé préférable de repousser la cérémonie à...plus tard.

La nouvelle ne me fit ni chaud ni froid. Elle me paressait logique et réfléchie. J'observai minutieusement Maëlla et remarquai que ses grands yeux clairs s'étaient embués. Malgré ses joues voilées de rose, elle restait belle. Ses longs cheveux dorés brillaient d'un éclat surnaturel auréolant son visage fin, rongé par deux grandes émeraudes innocentes. Sa peau laiteuse accentuait son air angélique, la rendant d'autant plus fragile et délicate. Malefoy passa un bras autour de sa taille gracile et la rapprocha de lui. Je détournai le regard, amer. Chaque geste tendre, chaque mot doux murmuré au creux d'une oreille me rappelait inlassablement Ron. Un simple surnom qui constituait en moi une peine maladive me dévorant de l'intérieur chaque instant passé. Et comme toutes les fois où mes pensées étaient un peu trop tournées vers mon âme sœur, je perdis le lien qui me rattachait au monde, me laissant entrainer dans un tourbillon de rêves irréalistes.

J'entendis vaguement Ginny s'excuser pour le jeune couple mais sa voix me semblait si lointaine que j'oubliais bien vite ces paroles. Pourtant, comme un écho résonnant de plus en plus fort à mes oreilles, mon prénom me parvint de manière claire. Je sursautai légèrement et me tournai vers la source de l'appel. Les yeux de Drago me vrillaient d'une manière indéchiffrable.

- J'étais au ministère tout à l'heure et Potter aimerait que tu le rejoignes. Etant donné que j'y retourne, nous pouvons y aller ensemble.

J'hochai la tête en silence et allais chercher un manteau. Au moment où je m'apprêtais à franchir le seuil de la porte d'entrée, je me retournai vers Ginny et lui expliquai d'une voix dénuée d'émotion :

- Pour la poularde, tu n'as plus qu'à la mettre au four trente minutes.

Elle acquiesça, Maëlla à ses côtés, et nous sortîmes du manoir. L'air, qui se faisait de plus en plus glacé au fil des jours, me mordit violemment le visage. J'enfouis mon menton dans mon écharpe offrant le bout de mes chaussures comme seul paysage à ma vue. Alors que je m'apprêtai à transplaner, Drago me retint par le bras.

- Attend, regarde ! Me souffla t-il.

Je relevai la tête et cherchai dans l'immensité du parc l'origine de l'interpellation de Malefoy. Je la trouvais rapidement. Là, à une centaine de mètres de nous, se tenait une silhouette. Longiligne, toute de noir vêtue, il m'était impossible de distinguer un homme d'une femme. Surprise par cette soudaine apparition, je restai pétrifiée face à cette ombre qui semblait nous dévisager. Je remarquai du coin de l'œil que Drago avait glissé sa main dans sa poche à la recherche de sa baguette, mais il m'était impossible de faire de même. Je ne pouvais détacher mes yeux de cette forme obscure, comme si elle avait une quelconque emprise sur mon être. Plus aucun geste ne pouvait être réalisé par la volonté seule de mon cerveau. J'étais hypnotisée, fascinée par l'aura maléfique que dégageait notre visiteur. Drago, tout comme moi, semblait attendre un geste de sa part qui ne tarda pas à venir. Comme dans un rêve au ralenti, il leva finalement sa baguette dans notre direction. Chaque détail de la scène me semblait si clair, si précis que j'aurais facilement pu tirer ma baguette et contrer le sort. Mais c'était impossible. Les yeux écarquillés de stupeur, je restai immobile, attendant un impact qui ne vint pas. Lentement, je tournai alors la tête en direction de Drago. Je n'ai jamais su à quel moment, ni comment, mais il venait d'ériger autour de nous un protego d'une puissance rare dont la lumière dorée formait une bulle autour de nos corps. Aveuglée par le puissant aura lumineux que dégageait le sort de protection, je mis ma main en visière et plissai les yeux en direction de la silhouette. Mais elle avait disparu. Malefoy sembla aussi s'en rendre compte car il annula le sortilège. Nous restâmes longuement immobiles, le regard rivé au loin, nos poitrines se soulevant au rythme des battements beaucoup trop rapides de nos cœurs. Etait-ce une vision ? Un rêve ? Avions-nous halluciné ? Rien, absolument rien autour de nous n'indiquait qu'un étrange personnage venait de nous attaquer.

- Qu'est-ce que…Commença Drago.

Mais il ne continua pas lorsque son regard se posa sur une petite boite qui trainait à mes pieds. Tremblante, je me penchai et la ramassai entre mes doigts engourdis. Le coffret était d'un blanc parfait à l'exception du couvercle surmonté d'un gros cœur rouge sang. Les mains glacées, je m'appliquai à tirer le minuscule verrou. Alors que je me préparai à soulever l'opercule, Drago m'arracha la boite des mains et exécuta le geste que je m'apprêtai à faire. Une grimace de dégout déforma un court instant ses traits parfaits et il referma d'un geste brusque le coffret. Je ne tentai même pas de savoir ce qu'il contenait. Le regard inquiet et pesant de Malefoy valait toutes les descriptions du monde.

- C'est lui, n'est-ce pas ? Demandai-je d'une voix chevrotante. Il a recommencé. Il a tué Anthony.

Mon acolyte se contenta d'hocher la tête, un air grave peint sur le visage.

Le bureau d'Harry était devenu pour moi une sorte de pièce annonciatrice de mauvaises nouvelles. Autrefois chaleureux à mes yeux, il n'était à présent qu'un endroit froid, dénué d'heureux sentiments. Drago s'avança au centre de la pièce et posa fermement le coffret sur le bureau en bois foncé de mon ami. Ce dernier leva des yeux interrogateurs en notre direction et attira la boite à lui. Il exécuta les mêmes gestes que Drago avait accomplis auparavant. Un rictus écœuré défigura son visage.

- C'est pour ça que tu voulais que je vienne, pas vrai ?

- Oui. Quand nous avons trouvé Anthony et que son cœur manquait, je me suis douté que Mathias s'apprêtait à jouer une nouvelle fois avec toi.

Ainsi donc c'était le cœur de sa dernière victime qui reposait là. Une nouvelle fois encore, Psycho-Matt venait d'ôter la vie à un pauvre homme qui avait eu pour seule malchance d'avoir exercé son travail. Une vague de haine se déversa soudainement en moi tel un ras de marée et je m'efforçai de garder mon calme devant les deux hommes. Non, Mathias Davos ne me faisait plus aussi peur. Oh, ne vous méprenez pas, j'étais tétanisée à l'idée de me retrouver face à lui. Mais l'idée que je me faisais de lui ne me semblait plus aussi terrible. Et j'étais bien décidé à ne pas le laisser gagner la parti que nous avions tous commencé malgré nous. J'étais certaine que cet homme, comme tout individu qui se respecte, avait une faille, un défaut, un talon d'Achille. Et je trouverais sa faiblesse coute que coute, même si je devais y laisser ma vie. J'aurais au moins eu le mérite de sauver la vie de deux personnes.

- On sait qui est le prochain ? Demandai-je soudainement, le cœur lourd.

Harry parut surpris par ma question et échangea un long regard avec Malefoy. Il se tourna finalement vers moi et daigna me répondre d'une voix pas très sure :

- Non. Non, nous ne savons pas.

Il lança un coup d'œil à Malefoy qui n'avait pas bougé. Un masque particulièrement inexpressif habitait son visage. Je fronçai les sourcils. Pourquoi Mathias Davos aurait-il changé son mode opératoire ? Pourquoi n'aurait-il pas laissé de nom ? C'était contre toute logique.

- Hermione, pourrais-tu sortir une minute, s'il te plait ? Je dois m'entretenir avec Malefoy.

Je fronçai une nouvelle fois les sourcils mais n'insistai pas. Je saurais la vérité bien assez tôt. Tout ce que je retenais est qu'il se passait quelque chose. Quelque chose de louche.

D'un pas trainant, je sortis de la pièce à l'atmosphère pesante et m'appuyai contre le mur, les bras croisés sur la poitrine. L'entretient ne dura qu'une minute. Deux, peut-être. Lorsque les deux hommes sortirent à leur tour du bureau, aucun signe ne trahissait les paroles qu'ils avaient échangées, à l'exception peut-être du teint anormalement livide d'Harry.

Je ne bougeai pas. Me contentant de les fixer à tour de rôle. Il y avait quelque chose que je ne savais pas. Ils m'excluaient volontairement d'une histoire dont je faisais pourtant pleinement partie. C'était injuste.

Les bras toujours croisés, j'attendais que l'un d'eux prenne la parole. Et il semblerait que je pouvais espérer longtemps. Je poussai un long soupir et demandai soudainement, déterminée :

- Je veux voir ce qu'il y a dans le coffret.

Je restais persuadée que leur nouveau secret reposait sur l'étrange contenu de la boite. Harry échangea un nouveau regard inquiet avec Malefoy dont le visage était resté impassible.

- Pour que tu vomisses partout ? Non merci. Objecta t-il d'une voix glaciale.

Vexée, je pinçai les lèvres. Je ne connaissais pas la cause de la mauvaise humeur de Malefoy mais je ne comptais pas me laisser faire ainsi.

- Je veux voir ce qu'il y a dans le coffret, répétai-je en plongeant mes yeux dans les pupilles foncées de mon interlocuteur.

Un bruit de pas à ma gauche retentit mais je ne détournai pas mon attention de Malefoy.

- Monsieur Potter ! On vous demande dans l'atrium !

Harry soupira et suivit l'homme qui venait de s'adresser à lui. Ni Drago ni moi ne bougeâmes. Nos regards toujours entremêlés d'un lien provoquant, j'esquissai un pas en direction du bureau d'Harry. Il ne réagit pas. Je réitérai mon geste. Il n'émit aucun mouvement mais quelque chose en lui changea. Ses épaules s'affaissèrent et son regard se voila. Il me paressait soudainement si las, si fatigué par tous les événements qui s'abattaient sur lui. Je regrettai un court instant le duel auquel je le confrontai.

- Il y a le nom du prochain dedans, pas vrai ? Pourquoi je n'ai pas le droit de savoir, moi aussi ? Questionnai-je soudainement d'une voix tremblante, contaminée par le désespoir qui s'était abattu sur mon compagnon.

Il poussa un profond soupir, détourna le regard et me désigna d'un vague geste du bras le bureau.

- Très bien. Tu as gagné, félicitation Granger. Va voir qui est le petit veinard. Crois-moi, tu ne t'en sentiras que plus mal, termina t-il d'une voix acerbe.

Je n'avais plus tellement envi d'ouvrir cette maudite boite à présent. Je voulais seulement rentrer chez moi, retrouver mes chats, retrouver ma vie, aussi minable soit-elle. Mais je savais que c'était impossible. Alors je me dirigeai la tête haute dans la pièce et m'avançai vers l'écrin qui trônait au centre de la table. Délicatement je le pris entre mes mains et soulevai le couvercle. Il était là. Baignant dans une marre de sang, dénué de tous battements. Mort. Mon propre cœur, encore actif, se serra à la vue de son confrère et j'essuyai d'une main frémissante une larme qui avait échappé à ma vigilance. Lentement, je relevai les yeux sur l'intérieur du couvercle où un mot griffonné à la hâte s'étalait. Le peu de force qui me restait s'envolèrent alors. Je lâchai le coffret qui se brisa sur le sol, répandant son macabre contenu sur la moquette, éclaboussant au passage mes jambes. Mais je m'en fichais. Je me retournai, tétanisée, vers l'entrée du bureau où Malefoy m'observait, inébranlable, appuyé contre le chambranle de la porte. Mon cœur, battant courageusement dans ma poitrine, me semblait lourd et mes joues étaient trempées de larmes. Le corps tremblant, il m'était impossible de faire ne serait-ce qu'un pas en sa direction.

- Je t'avais dit, se contenta t-il de déclarer avec un haussement d'épaules.

Sa voix déclencha en moi une série de frissons incontrôlables.

- Mais…Mais tu vas mourir ! M'exclamai-je d'une voix étranglée.

Les mots que j'avais lus quelques instants auparavant paraissaient encrés à tout jamais sur ma rétine. Mes amitiés à Drago Malefoy, Mathias DavosDrago MalefoyDM…DMMD… J'enfouis mon visage entre mes mains et secouai la tête, essayant de chasser cette terrible vision. Mes sanglots étaient désormais incontrôlables. Ils faisaient entièrement parti de moi et je semblais ne plus pouvoir m'en passer. Il allait mourir. Et cette idée m'affectait bien plus que je n'aurais pu le croire. Parce que je prenais réellement conscience de notre position. Et cette fois-ci c'était différent. Je le connaissais. Il n'était pas un inconnu dont la mort ne me toucherait pas personnellement. Il allait mourir. Et Harry. Et moi.

Je sentis soudainement ses mains repousser les miennes et glisser le long de mes joues, enfermant mon visage dans l'étau de ses longs doigts fins.

- Granger…Hermione…Regarde moi…S'il te plait.

Je m'exécutai. Mes yeux embués de larmes ne me permettaient pas de le distinguer avec exactitude, mais je discernais malgré tout le regard doux qu'il me lança.

- On a été prévenu. Ce n'est que la suite logique des évènements, me souffla t-il, son haleine caressant mon visage humide.

Je fermai les yeux très forts et secouai une nouvelle fois ma tête, emprisonnée dans la coupe que formaient ses mains.

- Je ne veux pas…Je ne veux pas…

Il n'ajouta rien, se contentant de me serrer contre lui. Je passai mes bras entour de son corps et me pressai un peu plus auprès de son torse. Mon oreille contre son cœur, je comptais ces battements réguliers qui bientôt seraient inexistant.

Je ne sus combien de temps nous restâmes dans cette position, une de ses mains dans le creux de mes reins et l'autre caressant nonchalamment mes cheveux. Mes sanglots s'atténuaient peu à peu mais je refusais de mettre fin à cette étreinte si réconfortante et apaisante. Elle était la seule chose stable qui me permettait de tenir debout alors que tout mon monde s'écroulait. Nous ne pouvions pas continuer comme ça. Attendre bêtement notre tour. Attendre gentiment que la mort vienne nous chercher. Ca ne me ressemblait pas. Ca ne nous ressemblait pas. Nous avions vaincu le plus grand mage de noir de tous les temps. Alors anéantir un sorcier psychopathe était supposé être un jeu d'enfant. Il suffisait de trouver sa faiblesse, comme nous l'avions fait pour Celui-Dont-On-Ne-Devait-Pas-Prononcer-Le-Nom.

Je me détachai rapidement de Drago et effaçai les derniers sillons que les larmes avaient creusés sur mes joues. Malefoy me laissa faire, une lueur curieuse illuminant ses pupilles. Tout aussi vite, je glissai ma main dans la sienne et l'entrainai dans un dédalle de couloirs et escaliers.

- Où va-t-on ? S'enquit-il finalement.

Je m'arrêtai devant une porte et me retournai vers lui, un sourire énigmatique accroché aux lèvres.

- N'oublie jamais que je suis une Gryffondor.

Et je poussai la porte, découvrant une pièce sombre, illuminée uniquement par quelques bougies. Le même sourire carnassier prit possession des lèvres du Serpentard.

- Bien sûr. Les archives. Je ne dois surtout pas oublier que tu es Hermione Granger.

Et main dans la main, nous pénétrâmes dans le plus grand repère de secrets d'Angleterre.

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