[PARTIE 2 - ECSTASY] CHAPITRE 16 - AMIS
NOTE DE L'AUTEURE : Dans les médias, vous pouvez retrouver comment j'imagine les personnages à ce stade de l'histoire ;)
Kim Taehyung, 24 ans,
Mai 2024, Seoul.
La nuit envahit Seoul depuis plusieurs heures déjà. L'ambiance s'alourdit pour devenir plus sombre, plus oppressante. Du haut du balcon de mon appartement, j'ai une vue imprenable sur la ville, me donnant un sentiment éphémère de supériorité, comme si les problèmes ne pouvaient atteindre que ceux qui se trouvent en bas. De ma tour, je suis inaccessible, presque la tête dans les nuages. C'est un effet illusoire qui me réconforte, parfois.
Une fumée blanchâtre s'échappe de ma bouche quand j'expire cette brume toxique. Je tire une nouvelle taffe qui vient détendre mes muscles endoloris et apaiser mon esprit torturé.
Cela fait six ans que Eodum existe et un long chemin, parfois semé d'embûches, s'est dressé devant nous, nous demandant beaucoup de détermination, d'adaptation et de courage. Mais nous avons réussi, je crois que je peux le dire. Je ne serais pas dans cet appartement à plusieurs millions de wons* si ce n'était pas le cas. Je serais probablement revenu dans ma campagne abandonnée au fin fond de la province de Gyeongsang, à chanter pour les vaches dans les prés.
Nous allons sortir notre cinquième album et la pression est à son comble, comme à chaque fois. Nous sommes plus largement attendus cette fois-ci et nous comptons sur ces titres pour conquérir les pays occidentaux et l'Amérique. Notre rayonnement commence à percer les frontières de la Corée du Sud, ce qui nous donne bon espoir pour la suite. Nous préparons également une tournée où plusieurs dates à l'étranger sont prévues, nous aspirons à ce qu'elles soient remplies de Dumiz*.
— Tu fais une contre soirée ?
Je ne tourne pas la tête vers Namjoon qui me rejoint sur le balcon. Il prend place sur une chaise longue à mes côtés sans même me demander s'il peut me déranger. Nous nous connaissons depuis huit ans maintenant, et bien que chacun de nous ait son propre domicile depuis environ un an, nous continuons à vivre les uns sur les autres, ce qui rend les formalités superflues entre nous.
— Comme tu peux le voir, elle n'a pas un très grand succès, ris-je en allumant une nouvelle cigarette.
Il se met à contempler la vue, probablement peu impressionné par elle, pouvant l'admirer quotidiennement depuis son propre appartement, à quinze minutes d'ici.
Malgré l'obscurité de la nuit, je peux voir la Han River* et les milliers de petites lumières qui la borde. C'est joli et apaisant, j'apprécie particulièrement cet endroit chez moi.
— C'est ta combien ? m'interroge-t-il alors que je garde le regard vissé sur les éclairages en contrebas, sachant très bien de quoi il parle.
— Je ne sais pas, j'ai arrêté de compter.
Je passe une main sur mon visage, sentant la brise froide de ce mois de mai caresser ma peau, lui envoyant des millions de décharges de fraîcheur. Quand mes doigts se faufilent à travers ma chevelure, je me rappelle l'avoir coupée récemment. Elle a également pris une teinte argentée qui me donne un air plus doux, moins sombre.
— Ça veut probablement dire qu'il est temps pour toi d'arrêter, tu ne crois pas ?
En bon leader, mais surtout en excellent grand frère, il aime me rappeler la marche à suivre, le bon comportement à adopter. Mais ça fait un petit moment que je n'y prête plus attention. Je suis un adulte et j'assume les conséquences de mes actes, et fumer en fait partie. J'ai conscience des répercussions que ça peut causer à mon corps et ce que cela peut engendrer en tant qu'artiste. Je m'y suis mis il y deux ans et, si je n'avais pas une consommation régulière, petit à petit, j'ai trouvé en mes paquets ce que je ne trouvais nulle part ailleurs. Je ne fume pas vingt cigarettes par jour et il m'arrive même de ne pas le faire pendant un certain temps.
— Tout va bien pour toi ? Tu sais que si tu as besoin de parler, je suis là pour t'écouter, propose-t-il et mon regard se porte sur lui.
Namjoon aussi a changé. Ses traits autrefois plus enfantins sont devenus ceux d'un homme sûr de lui. Et s'il était déjà charismatique, il est encore plus inspirant aujourd'hui. Il a laissé ses cheveux pousser jusqu'à ce qu'ils forment des boucles à leurs extrémités, qui sont maintenant d'un noir profond, en parfaite harmonie avec sa peau hâlée. Son corps aussi a évolué, il s'est développé à force de fréquenter la salle de sport où il s'évertue à sculpter ses muscles.
— Si j'avais voulu parler, je serais resté à l'intérieur, conclus-je en écrasant ma cigarette terminée dans le récipient prévu à cet effet.
Je prends quelques inspirations en fermant les yeux, laissant à nouveau le vent s'abattre sur mon visage pour me rafraîchir les idées. Je me rends compte que j'ai été sec avec lui, qu'il ne m'a rien fait, qu'il n'est pas responsable de mes tourments. Namjoon est et sera toujours l'un de mes meilleurs amis, celui à qui je pourrais confier ma vie. Il incarne également cette figure paternelle dont j'ai tant manqué, et il le fait avec une autorité naturelle indéniable. Il est rassurant et plein de bons conseils, et en cela il est probablement l'homme que je rêverais d'être.
— Allons rejoindre les autres, dis-je finalement, ne sachant pas quoi ajouter de plus.
Même si je n'ai pas plus envie de parler.
Je préfère quitter l'ambiance devenue pesante malgré la bourrasque fraîche. Nous nous levons sans un mot et rentrons dans mon appartement. Le balcon donne accès au salon composé d'un long canapé en tissu gris entourant une table basse en verre. Une télévision orne l'un des murs, accompagnée de tableaux et d'objets artistiques divers. J'ai un second salon attenant à ma cuisine, mais je l'utilise davantage quand je suis seul, notamment pour manger puisqu'il s'y trouve une table avec des chaises vintages.
— T'es en train de perdre sévère là, s'amuse Jin, notre manager, alors qu'il a les genoux sur le sol et qu'il effectue de grands gestes en direction de Jimin, assis sur le sofa en face de lui.
— La partie n'est pas finie, joue ! commence à bougonner le blond.
Jimin n'est pas un très bon joueur, en plus d'avoir un karma de poisseux, ce qui fait qu'il perd régulièrement. Ils font un Uno dans mon salon, autour de bouteilles de soju et de sushis. Hoseok est allongé au sol, sur le ventre tandis qu'il fixe ses cartes avec un air concentré. Il n'est pas un mauvais perdant, mais s'il peut gagner, ça l'arrange quand même franchement bien. Il se fait rejoindre par notre leader, qui s'assoit en tailleur à ses côtés.
Seul Jungkook est un peu plus calme, comme à son habitude. Il est installé sur le canapé alors qu'il a les jambes repliées contre lui. Ses mains sont posées sur ses genoux et un petit sourire grignote son visage parce qu'il est en train de gagner. Il ne lui reste que trois cartes, la balle semble être dans son camp.
Je ne réfléchis pas davantage et avance vers eux. Jungkook est le premier à me remarquer, comme toujours, pourtant il me tourne le dos. Avec le temps, il a développé un radar qui lui permet de suivre le moindre de mes mouvements avant même que je ne les effectue.
Il me suit des yeux jusqu'à ce que je fasse le tour du canapé et m'assois à ses côtés, non loin de Jimin. Le noiraud tient ses cartes d'une main et ses sourcils se froncent lorsque ses narines perçoivent l'odeur de la fumée qui m'entoure. Je sais qu'il n'apprécie pas cette mauvaise habitude, qu'il ne la comprend pas non plus, et je ne lui demande pas d'aimer chaque facette de ma personnalité, tant qu'il m'accepte tel que je suis dans ma globalité.
Son regard est pourtant doux sur ma personne, il ne cesse de me fixer avec ces yeux-là depuis quelques années. Il y a six ans, nous avons performé Red Fire pour la première fois devant un public et c'est également à ce moment-là que nous avons révélé une part importante de ce que nous sommes. Cette chanson est le fruit de notre relation naissante, elle en est le déclencheur, elle nous a rapprochés, a fait que nous nous sommes sincèrement intéressés à l'autre. J'ai mis un peu de temps à l'admettre, mais je sais aujourd'hui que les paroles parlent réellement de nous, de ce que nous représentons l'un pour l'autre. Nous ne l'avions pas vraiment compris autrefois, étant probablement beaucoup trop jeunes et autocentrés, mais nous avions de l'appréhension à nous retrouver ensemble. Nous voulions la présence de l'autre comme nous la craignions. Nous n'avions pas réalisé à quel point nous étions pareils, parce que nous ne manifestons tout simplement pas nos similitudes de la même manière.
Après sa crise d'angoisse, nous sommes restés un long moment dans les toilettes des loges de ce plateau d'émission. Je l'ai bercé dans mes bras, senti son souffle se relâcher, comme s'il me donnait la permission pour le découvrir tout entier. Et c'est ce que nous avons fait par la suite.
Je place ma main sur son genou et appuie doucement dessus, lui intimant silencieusement de déplier les jambes. Une fois fait, je m'allonge et dépose ma tête sur ses cuisses, calant l'une de mes mains sous ma joue.
— Jungkook-ie, tu joues ? demande le blond à nos côtés.
— Je réfléchissais, répond-il et je sens sa voix résonner à travers son corps.
Ces douces secousses m'apaisent et je ferme les yeux. Je le sens bouger pour, je l'imagine, déposer une de ses cartes, mais je n'y prête pas grande attention, sentant la fatigue s'installer.
Soudainement, une main glisse dans mes cheveux et caresse mes mèches avec tendresse. De légers frissons me traversent la nuque et s'étendent jusque dans mon dos. Il se met ensuite à masser tranquillement mon cou, m'apportant un réconfort immédiat. Ses doigts sur moi ont toujours cet effet-là parce que je me sens détendu, à l'aise, comme s'il me connaissait par cœur, qu'il avait mémorisé tous les détails qui me constituent. Il sait toujours ce dont j'ai besoin avant moi, au point où je me suis posé pas mal de questions. Je me suis imaginé qu'il lisait dans mes pensées ou bien qu'il était voyant, mais je me suis résolu à une conclusion : il est simplement très observateur.
Aujourd'hui encore, il n'est pas très bavard, même s'il l'est davantage. Il préfère concentrer son attention sur les petites choses qui ont de l'importance. Enfin, celles qu'il souhaite se rappeler.
Sa main remonte à nouveau dans ma chevelure qu'il câline par automatisme. Ce jour-là, dans ces toilettes, nous avons accepté d'être l'ami de l'autre, et parfois je me dis que nous avons consenti à plus que ça. Il est devenu mon âme-sœur, l'une des personnes les plus importantes dans ma vie. Le Jungkook derrière le masque est une belle personne et j'ai regretté un long moment de ne pas l'avoir vu plus tôt.
Assez rapidement, nous nous sommes rapprochés, de manière magnétique, ce qui a surpris les autres membres. Lorsque j'ai compris que je me sentais en sécurité à ses côtés, je n'ai plus voulu aller nulle part ailleurs. Il m'apporte une affection toute particulière, pleine de candeur et de douceur, c'était inattendu mais paisible, agréable.
Avoir accepté d'être son ami a allégé beaucoup de choses pour le groupe, mais ça a surtout atténué le trou béant que j'ignorais avoir dans la poitrine.
Il le savait avant moi, mais je manquais effectivement d'amour et je le cherchais à travers les moindres petites attentions. Notamment les siennes.
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NOTE DE L'AUTEURE :
Prêts pour un best friends to lovers ? ;)
Sachez que cette partie est plus sombre que la première et que j'y aborderai des sujets sensibles. Il risque aussi d'y avoir quelques rebondissements ;)
A samedi pour la suite xx
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