Je reprenais soudainement conscience et réalisais que j'avais encore eu une absence de plusieurs minutes. Je regardais autour de moi. Personne ne semblait avoir remarqué dans la classe. Mon regarde se tourna alors sur la gauche et je pu voir Agnès, calée contre le mur, me fixant avec un regard colérique. Elle avait tout vu.
Merde.
Je lui fis un grand sourire innocent, et eut en retour un regard encore plus froid.
-Bon. Tu vas finir par m'expliquer ce qu'il t'arrive ou pas ?
-De quoi tu parles ?
-Arrête un peu, Ethan ! Tu t'endors en cours, tu as des absences, Ezéquiel fait des crises d'épilepsie... En plus il paraît que ce matin, vous parliez japonais.
La vérité éclatait au grand jour, et j'étais totalement incapable de réagir. Je ne savais absolument pas mentir, en plus.
-Comment tu sais qu'on parlait japonais ?
-Elisabeth me l'a dit, parce qu'elle s'inquiète pour vous, figure-toi.
-Je ne sais pas quoi te dire. Je ne sais pas vraiment non plus ce qui nous arrive.
-Vous vous droguez ?
-Quoi ?
-Je sais que ça se fait ici, à l'approche des partiels, mais franchement, vous réagissez très mal pour faire ça.
Agnès venait de me trouver un parfait alibi, je n'y aurais jamais pensé. Se droguer. C'était évidemment à ça que les filles devaient penser! Elles ne pouvaient pas imaginer la vérité. Je n'avais pas envie de mentir, mais il fallait bien essayer.
-Je... Je suis désolé, c'est juste que je suis tellement stressé.
-Tu prends quoi ?
-Du café et du crack.
J'avais sorti un nom de drogue au hasard. La vérité était que je ne m'étais jamais drogué et que je n'avais aucune idée des effets des différentes drogues. Agnès me regardait avec de grands yeux écarquillés, arquant ses sourcils si démesurément que son visage me semblait soudainement déformé.
-Mais tu es fou !
Toute la classe se tourna vers elle avec surprise. Elle s'excusa poliment, faisant mine de retourner à son travail. Lorsque tout le monde fut retourné, elle me fit à nouveau face.
-Tu te rends pas compte que c'est super dangereux, murmura-t-elle avec colère. C'est lui qui t'a donné ça ? Ce serait pas étonnant, avec ses airs de dealer.
-Eh, doucement. Parle pas comme ça d'Ezéquiel.
-Ok, bref, on en parle tout à l'heure.
Je sortais discrètement mon téléphone alors qu'elle se reconcentrait sur le cours.
12h47.
Ça allait bientôt être la pause déjeuner. Je me décidais à écrire à Ezéquiel.
Ethan Collet :
Hey ! J'ai encore eu une absence. Agnès se méfie.
12h48
Ame-sœur <3:
Moi aussi... Merde. Elle a compris ?
12h48
Ame-sœur <3 :
Eh d'ailleurs...
12h48
Ame-sœur <3:
MDR nan je te raconte ça tout à l'heure 😉
12h48
Ethan Collet :
Non, elle croit qu'on se drogue. J'ai inventé un mito. Mito comme la tante de Gon lol
12h49
Ethan Collet :
Bref... Qu'est-ce que tu me caches ? :o
12h49
Ethan Collet :
:o
12h49
Ame-sœur <3 :
Ok, je relève même pas tellement c'était con. Tu lui as dit quoi ?
12h49
Ame-sœur <3 :
Tkt, je te dis à la cafèt' c'est marrant
12h50
Ethan Collet :
Qu'on prenait du crack...
12h51
Ame-sœur <3 :
Quoi ??????!!!!
12h51
Ame-sœur <3 :
Mais tu es stupide, non ?
12h51
Ame-sœur <3 :
Tu sais ce que c'est au moins ?
12h51
Ethan Collet :
Eh ! Doucement hein. Comment tu parles toi, tu étais là ? J'ai fait comme j'ai pu !!! Tu aurais préféré que je lui fasse un jajaken peut-être ?
12h52
Ame-sœur <3 :
Excuse-moi, c'est juste que c'est assez vénère comme truc, je m'attendais pas à ça. Mais au moins c'est crédible par rapport à nos réactions.
12h54
Ethan Collet :
Nan c'est bon, c'est pas grave
ça fait quoi au fait ?
12h54
Ame-sœur <3 :
C'est un peu comme de la coke mais en plus sale
12h54
Ethan Collet :
Ah !
12h54
Ethan Collet :
Ah oui je colotne mieux
12h54
Ethan Collet :
Comprends*
12h55
Ethan Collet :
On mange ensemble ce midi, on se retrouve devant la cafet ça te va ?
12h56
Ame-sœur <3 :
Yep ! A tout de suite, « petit-ami »
12h56
Ame-sœur <3 :
Héhé je vais te renommer comme ça sur mon tel
12h56
Ethan Collet :
Oh trop chou :3
12h57
Ame-sœur <3 :
J'ai un surnom sur ton tel d'ailleurs ?
12h58
Ethan Collet :
Heu non pas vraiment hihi...
12h59
Ame-sœur <3 :
Mdr comment tu mens XD Il est si terrible que ça ?
13h00
Ame-sœur <3 :
Bon, à tout de suite
13h00
J'avançais vers la cafétéria et repérais Ezéquiel. Il passait difficilement inaperçu avec sa parka prune. C'était le début de l'hiver mais il faisait assez froid ce jour-là et il me semblait qu'il essayait de jouer discrètement avec la buée qui sortait de sa bouche, tentant d'en faire le plus possible et pour fabriquer des ronds avec. Il me vit alors et me regarda avec un air narquois, stoppant ses activités enfantines. Elisabeth n'était pas là pour une fois. Je suppose que maintenant qu'elle avait eu ce qu'elle voulait, elle allait se faire moins présente et vaquer à ses occupations. D'un autre côté, elle s'était inquiétée pour nous, ce matin. J'espérais d'ailleurs qu'elle n'en avait parlé qu'à Agnès et pas à toutes ses amies.
Ezéquiel sortit les mains de ses poches pour me prendre dans ses bras une fois à sa hauteur. Il me regarda en souriant et déposa ses lèvres froides sur les miennes, me lançant un regard à tomber, puis se détacha de moi pour saluer Agnès, emmitouflée jusqu'au cou dans une grosse écharpe.
Nous rentrions dans le bâtiment de la cafétéria. Je ne pouvais m'empêcher de remarquer les regards mauvais qu'Agnès lançait à Ezéquiel. J'étais un peu mal à l'aise. J'avais peut-être exagéré. Il avait l'air de s'en moquer royalement, ne daignant même pas la regarder.
-C'est quoi le truc que tu voulais me dire par sms ?
Ezéquiel pouffa de rire, s'en souvenant probablement soudainement, puis me lança à nouveau un sourire narquois. Ça ne me disait rien qui vaille.
-Arsène m'a avoué un truc aujourd'hui.
Entendre le nom de ce sale type me rendit immédiatement anxieux. Je ne lui faisais pas du tout confiance, surtout depuis son cinéma à la soirée.
-Quoi ? Qu'est-ce qu'il t'a avoué ?
Le sourire d'Ezéquiel s'élargissait sur son visage. Je commençais à être irrité.
-Qu'il était amoureux de moi.
-QUOI ?
Les étudiants autour de nous se retournèrent avec surprise pour nous observer dans un silence attentif. Je crispais mon visage dans un sourire et le brouhaha habituel revint quelques instants plus tard.
-Putain, j'en étais sûr, soufflai-je.
-Il m'a dit que c'était seulement la première année, puis il a vu que je couchais avec plein de filles alors il a lâché l'affaire. Mais quand tu es apparu, et que j'ai tout de suite été beaucoup avec toi, il a pensé qu'il aurait pu avoir une chance et ses sentiments sont revenus.
-Donc là, il en est où ? Il t'aime ? Il va pas marcher longtemps sur mes plates-bandes, Monsieur Propre.
Ezéquiel éclata de rire, ramenant à nouveau vaguement l'attention sur nous.
-Trop drôle ! Moi aussi je l'appelle comme ça.
-En même temps, la ressemblance est affolante. Il est juste plus tassé quoi.
Je suis bitchy. Je dois vraiment être jaloux. Mais Ezéquiel est magnifique, normal que d'autres gens lui tournent autour.
-T'inquiète pas. Tu es le seul qui m'intéresse.
Sa phrase était rassurante. Je me sentais un peu mieux. Il semblait seulement amusé d'avoir découvert ça. Il n'avait vraiment pas l'air de prendre les sentiments de ce type au sérieux, mais savoir qu'il ressentait des choses pour lui m'avait suffit pour que je le déteste.
Nous nous asseyions tous les trois et Agnès prit la parole pour la première fois depuis le début de la conversation, avant même de commencer à manger.
-Ça fait longtemps que tu te drogues, Ezéquiel ? commença-t-elle d'un ton sec.
Ezéquiel me lança un regard exaspéré auquel je répondis par le sourire le plus innocent que j'avais.
-Non, non... improvisa-t-il. C'est seulement à cause des partiels.
-Quand même, le crack, c'est fort.
-Pas autant que l'héroïne, avait-il alors répondu en haussant les épaules.
Mauvaise réponse.
Il baissa soudain la tête en écarquillant les yeux, pensant à ce qu'il venait de dire. Elle allait être encore plus inquiète.
-Ah parce que tu as déjà testé ?
Agnès avait l'air d'être sur le point d'exploser. La conversation prenait un tournant pénible et je me sentis doucement partir. Je réalisais ce qu'il se passait mais étais incapable de faire quoique ce soit.
-Well... Yeah I used it a lot when I was young. Eventually, I've been forced to quite. But now I'm sober, thanks to Daniel !
-Pardon ?!
La voix d'Agnès me fit soudainement revenir à moi. Je m'étais transformé en Marcus pendant un court instant. Ce qu'on redoutait avec Ethan était déjà en train de se produire. Il me regarda avec un air paniqué. Que pouvais-je répondre pour justifier ce qu'il venait de se passer ? Le temps me semblait si long.
-Bon, j'en ai assez ! A quoi vous jouez ? hurlait presque Agnès.
-Agnès, je suis désolé ! C'est compliqué de t'en parler, c'est un peu délicat, confessa Ethan.
Je suis décomposé. Il va lui avouer. On va se faire interner.
Ma vie est foutue... Quelle horreur !!
Mais peut-être que je serais avec Ethan. S'il est là, ce serait supportable. Et puis on pourrait essayer de fuir avec Daniel. Mais bon, quand même...
Le regard d'Agnès sembla néanmoins s'adoucir.
-Je m'inquiète, c'est tout. Qu'est-ce qu'il se passe de si spécial dont tu ne peux pas me parler ? Je suis censée être ta meilleure amie.
-C'est juste très compliqué... Je t'en parlerai, je te le promets. Mais pas ici, d'accord ?
-D'accord.
Il avait réussi à faire taire Agnès. Mais à quel prix ? C'était sûr qu'elle ne lâcherait plus l'affaire désormais.
La journée se passa dans un calme relatif. Arsène n'osait plus me parler et Elisabeth me jeta plusieurs coups d'œil un peu anxieux tout au long de l'après-midi. Les partiels commençaient mercredi et avec les récents événements, je n'avais pas autant travaillé que ce que j'aurais voulu.
Je rentrais avec Ethan, Elisabeth nous ayant définitivement abandonnée. Le trajet était agréable. Je me sentais bien avec lui, main dans la main. Je n'aurais jamais imaginé qu'être en couple serait si merveilleux et rassurant.
Nous arrivions chez lui, et je me rappelais soudain que le lundi soir était le jour de la tradition. Charles faisait à manger pour tout le monde. Ethan avait l'air angoissé. Il me jetait des regards paniqués mais je serrais un peu plus fort sa main dans la mienne.
-Je suis désolé, j'ai pas envie que tu fuis encore... Enfin c'est pas que je te fais pas confiance hein ! Mais c'était dur la dernière fois.
-Je t'aime.
Je l'avais enfin fait. Ces mots que j'avais toujours été incapable de prononcer, je les avais enfin dit pour lui. Mon cœur fit un bond en réalisant ce que je venais de faire. La bouche d'Ethan se fendit dans un sourire gigantesque et il me sauta au cou, m'étreignant si fort qu'il m'étouffait presque. Puis il plongea ses grands yeux dorés dans les miens, ne quittant jamais son éternel sourire.
-C'est la première fois que tu le dis, non ?
-Oui, murmurai-je, la tête basse.
-Je t'aime aussi, Ezéquiel. Ce que je ressens pour toi, c'est si fort, je ne l'ai jamais ressenti avant.
Je m'empourprais devant sa déclaration, ne bougeant plus, souriant à mon tour. Il me tendit une main que je pris sans hésiter.
-On y va ?
-Oui, allons-y.
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