Grandir
Je crois que j'aurais aimé qu'on me prévienne.
Les sentiments qui s'entremêlent. Ces milliers de nouveautés, qui arrivent plus vite que mon vocabulaire ne s'enrichi. Rien que moi, des peut-être et des à peu près pour tenter de saisir l'infinie. Ce long apprentissage, dont il faut déjà en apprendre assez pour réaliser qu'on a encore rien appris.
Un brique à braques de choses et d'autres. Il n'y plus de ces lignes droites auxquels on s'étaient tant habitué enfant. Accoutumé au point de ne pas savoir qu'il en était possible autrement, au point de ne même pas se poser la question. Ores, les choses sont maintenant trop peu manichéennes pour paraître simple.
Nous voilà en phase avec ces tristesses chaleureuses. Ce réconfort de l'inconfort que l'on ne s'explique pas. Ce souvenir terriblement joyeux qui ne peut s'empêcher de nous amener ce sourire pensif, presque comme un remords. Mais on le repasse en boucle. Encore et encore. La même image. Et nous qui nous lassions si vite autrefois, nous retrouvons un bon matin... ça fait 2 ans déjà, et cette pensée ne nous a pas quitté. Les mêmes mots prononcés jadis, les mêmes sourires sur des visages lointains, les mêmes... ce même moi, qu'on ne voit plus qu'en rêves... Ce même dessin heureux qui s'entêtent à menacer demain.
Le train est partit sans même qu'on veille y monter, heureux de l'avoir manqué, on s'est retrouvé au réveil fatalement assis sur l'un de ces sièges, entouré de ces autres aussi mal assis que nous. Le quai et la maison qu'on y a laissé, ce n'était qu'un rêve. Et cette image, cette même image nous poursuit. Par encore prêts à s'aventurer près des fenêtres, pas franchement désireux de savoir où l'on va non plus (peu importe, on ne voulait pas y aller), on la repasse en boucle, cette même image. À défaut, elle au moins on la connait.
Mais voilà, je ne crois pas y avoir pensé de la même manière hier que je le fais aujourd'hui.
Et un autre bon matin, bien loin des précédents, trop près des suivants, sur le rebord d'un banc, dans le journal de la semaine passée, on découvre un nouveau mot...: nostalgie. Et on comprend que c'est ça. Enfin...comment en être sur maintenant qu'on connait aussi « mélancolie » et « rêverie ». Peut-être n'a-t-il jamais été question qu'un seul mot ne suffise pour tout se brouhaha dans notre tête..?
Sur un recoin oublié de notre cerveau se cache une réalité indécise. Celle là même qu'on a préféré ne pas connaître. Et dans un malentendu, un soubresaut de courage, on la remarque, juste là, à la fenêtre de ce train qu'on aurait voulu refuser de prendre. Et pendant une fraction de seconde, tellement courte qu'on semblerait honteux de nous être trahit, on se surprend à apprécier... ce qui a changé. Au début ce n'est que timidement que l'on s'octroie de sourire, comme désolé pour notre ancien nous qui refusait catégoriquement toutes ces nouveautés qui lui paraissaient sournoises. Et puis on finit par réaliser que toutes ces nuances ne font qu'amener de la profondeur et une nouvelle air à notre histoire. On se détache de cette impression d'avoir perdu l'enfance, puisqu'on apprend à le retrouver dans chacun de nos éclats de rires. On comprend qu'on ne peut se dénaturer, s'il s'agit de s'affiner. On s'apprend. On révèle les forces endormies et on gagne en courage à chaque nouvelle peur que l'on affronte. Encore mieux quand il s'agit de ces peurs qu'on l'on aurait même pas pu imaginer. Et je n'ai même plus eu peur de la peur elle-même, à la seconde où j'ai cru en quelque chose de plus grand, mon Dieu.
On finit par être heureux de chacun de nos douleurs et de nos peines, s'en retrouvant enrichi. Reconnaissant de les avoir connus, parce que conscients que l'on aurait jamais pu apprend aussi vite et aussi bien tout ce que l'on sait à présent autrement. C'est cette école où l'on ne s'inscrit pas, mais qui nous apprend certaines choses parmi les plus essentielles.
Nos rêves aussi. Maintenant devenus courageux, on commence enfin à les poursuivre. Rêver est le propre des enfants, mais l'on ne s'efforce d'atteindre ces rêves qu'au moment où l'on devient mature assez pour presque tout y laisser. Il ne s'agit plus simplement de rêve. C'est les premières sueurs sur notre front, c'est nos première résussites, c'est nos premières chutes. C'est la première fois qu'on découvre avoir toujours été aussi déterminé. C'est nos premiers pas chez les grands.
Les paysages ce sont imposées à nous. On a bien du finir par lâcher le passé et arrêter d'être aussi peureux. C'est demain, que l'on voit à travers les fenêtres de ce train, et c'est là qu'il nous mène. Ce sont ces nouveaux mots, ces quelques pleures et émotions confuses, cette nouvelle croyance en mon Dieu, qui rendent mon bonheur si précieux. Me laissant entrevoir demain. Espérer est à nouveau possible.
Finalement, c'est un vrai bonheur de l'avoir appris seule.
Sur le chemin on finira même par choisir nous même nos paysages mais ne vous y trompez pas, ce sont déjà vos choix qui vous ont mené là où vous êtes aujourd'hui. Bonnes ou mauvaises. Vous apprendrez simplement à les faire moins maladroitement à l'avenir. Peu importe l'ampleur des événements, vous avez à chaque instant, consciemment ou non par défaut ou non, choisi. De fuir, de faire face, d'accepté de refuser, de donner votre droit de choisir ou de le garder. On ne commande pas l'orage, mais rien ne nous empêche de l'apprécier, profitez-en pour vous rafraîchir un peu.
En réalité, avec plus ou moins d'habilité avec plus ou moins de bagage en poche, nos choix ne cessent de nous façonner, à petits ou à grands pas. Notre identité n'est pas innée, on l'a construit tous d'une manière ou d'une autre, de gré ou de force, pour savoir qui l'on est, on doit y travailler. Nous somme ceux qui nous dessinons. Et grandir c'est aussi se construire non ?
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