Chapitre 7 : Partie 2 : Les dualités de la valeur
Le sang gicla sur le visage de l'enfant, qui hurla.
Entre la valeur de l'argent et la valeur de la vie, celui qui venait de faire feu avait fait son choix en même temps.
Cette intonation, suivit de ce cri aiguë, réveilla Lily et l'extirpa de sa paralysie.
Cependant, en voyant la scène, l'adolescente ne put que pleurer silencieusement, les mains sur sa bouche pour éviter tout gémissements.
La fillette pleine de sang.
La tête de la mère, ses yeux vides, un trou dans le front, reposant sur le dossier du fauteuil.
Et le roman que l'homme tenait, tâché de sang.
Les autres de son espèce, à la cape rouge et au masque de serpent, faisaient de même.
L'un arracha le collier de perles que la femme au ticket portait autour de son cou, un autre s'empara du portefeuille et du téléphone de l'ado, et alors que le vieux se faisait aussi dépouiller, celui qui avait tué la mère se dirigea vers Lily. En fredonnant joyeusement.
L'adolescente, immobilisée par sa peur, ne bougeait pas d'un iota.
Elle se contentait de fixer le masque de serpent.
C'est alors qu'une silhouette passa dans son champ de vision, s'arrêta à un mètre de l'homme à la cape écarlate, avant de se figer. De faire volte-face. Et de croiser son regard.
Une silhouette à la chevelure soyeuse et noire, avec des yeux intenses et indescriptibles...
- Lily !
L'adolescent qu'elle avait reconnu en un clin d'œil fonça dans sa direction, empoigna son bras afin de l'obliger à sortir de sa paralysie, à se lever, puis à fuir dans son sillage.
Les pieds de la jeune fille bougeaient tout seul, par automatisme, et son esprit ne savait plus à quoi penser.
Balthazar s'était emparé du train.
Ce criminel si réputé à travers tout Bruxelles.
Et il venait commettre ses crimes ici, dans ce train-là, dans le train que Lily avait prit pour aller à l'école.
Pourquoi ?
Pourquoi ce train ?
Pourquoi le train où elle se trouvait justement ?
Pourquoi pas un autre ?
Pourquoi ?
Et Aselum...
Aselum qui la tirait à travers les couloirs étroits du train, dans les escaliers puis au premier étage, celui où les Pions de Balthazar ne se rendaient pas encore.
Que faisait-il là ?
Dans ce train ?
Aselum courait comme un dératé, sa poignée sur le bras de Lily comme preuve que celle-ci se trouvait bien derrière lui, que celle-ci suivait bien.
Et alors qu'il comptait emprunter un autre escalier, cette fois-ci pour redescendre, un homme leur barra le passage.
En le voyant, les autres subalternes de Balthazar quittèrent le wagon pour un autre.
Lui aussi portait un masque. Un masque de serpent. Une longue chevelure écarlate bien visible descendait jusqu'à ses genoux, par-dessus une cape noire aux stries d'argent. Une cape qui malgré sa longueur ne réussissait pas à cacher le début d'un tatouage de serpent sur son bras nue.
Ses yeux violets et bridés s'accrochaient sur les deux jeunes alors qu'un sourire sardonique se devinait à travers ses yeux.
Il pointa alors l'adolescent de dix-sept ans du doigt, après s'être léché les lèvres.
- Toi... Je veux ta vie ! Et toi, dit-il en montrant cette fois-ci Lily avant de plisser ses yeux et de se lécher à nouveau les babines ; je veux...
Il ne put finir sa phrase qu'Aselum fonçait vers lui tel un boulet de canon, le plaquant sur le sol, un étage plus bas.
- Ferme la porte, Lily !
La jeune fille ouvrit la bouche pour protester, comme quoi lui se trouvait toujours en bas, mais le regard que lui lança l'adolescent l'en empêcha. Elle ferma la porte à toute vitesse, avant de plaquer son visage contre la vitre de celle-ci, priant pour qu'il n'arrive rien à son... Son ami ?
Aselum écrasa la gorge de son adversaire de son bras, sur lequel il appliquait tout son poids, avant de se relever à la hâte quand ce dernier ferma ses paupières, le visage bleu. Et il se précipita vers l'attelage qui reliait le wagon où se trouvait Lily de celui où se situait la majorité des Pions de Balthazar.
Il y eut un tremblement.
Lily chuta, se cogna contre une des parois du train, avant de se relever à la hâte, les yeux écarquillés et le cœur tambourinant.
Où était Aselum ?
Qu'est-ce qui venait de se passer ?
Soudain, le visage de l'inconnu aux cheveux couleur sang se retrouva à quelques millimètres à peine de son visage ; une simple et misérable vitre les séparait.
Lily cria.
Se recula de deux pas et trébucha.
L'inconnu fracassa la vitre de son poing. Et passa à travers. Avant de sourire, d'une manière malsaine, et de s'exclamer, les yeux plus brillants que jamais ;
- Toi, tu viens avec moi !
Il se pencha vers l'adolescente.
Une détonation.
De son épaule ruissela un liquide chaud, un liquide gluant, un liquide rouge.
Du sang.
Son sourire s'accentua d'autant plus, et ses yeux fixèrent l'adolescente. Celle-ci regardait avec horreur une arme dans sa main, un pistolet, un pistolet qu'elle venait d'utiliser.
Cette arme...
D'où venait-elle ?
D'où l'avait-elle prise ?
Elle venait de faire feu.
Sur un homme.
Un homme vivant, de chair et de sang.
Avec un pistolet venu d'elle ne savait où.
Elle n'avait pas hésité une seule fraction de seconde avant de le sortir et de faire feu.
Comme si elle savait exactement où il était, quand et comment presser la détente.
Mais elle l'ignorait.
Elle ignorait tout.
Elle ne savait pas comment...
... Comment ça avait-il pu arriver ?!
Les larmes noyant ses prunelles, Lily jeta l'arme loin d'elle, avant de regarder ses mains de longues secondes. Et elle remonta après ses yeux, lentement, sur ce que la balle avait causé comme dommage.
Un trou.
Béant.
Sanglant.
Dans l'épaule d'un homme.
Horrifiée, Lily se recula encore et encore et encore, avant de se faire acculer par une porte fermée.
Elle tremblait de tous ses membres.
Et l'homme qu'elle avait touché, comme s'il ne ressentait aucune douleur, s'avançait, un sourire torve sur le visage.
- Eh bien, eh bien, eh bien ! Le serpent est venimeux, à ce que je vois !
La jeune fille essayait de parler, mais ses sanglots lui rendaient la tâche difficile. Et ce ne fut que des mots chevrotants qui sortirent des fins fonds de sa gorge.
- Je... je suis dé... désolée... je... je ne voulais p... pas... je ne voulais pas faire... faire ça...
L'homme s'accroupit.
Un sourire comme deux serpents prêts à dévorer leur proie.
Des yeux comme deux trous noirs béants prêts à aspirer toutes âmes qui vivent.
- Oh mais si. Si, tu le voulais. C'est exactement ce que tu voulais ! Le Mal, le Chaos, c'est dans tes gènes, siffla l'inconnu avant d'exploser de rire à nouveau.
Un ordinateur s'abattit sur son crâne.
L'inconnu s'évanouit, laissant place à la silhouette d'Aselum. Celui-ci se mit au niveau de la jeune fille, et l'amena dans ses bras.
- Ne l'écoute pas, Lily. Il ne sait rien de toi. Il ne te connait pas. Alors ne fais pas attention à ce qu'il dit, d'accord ? Écoute, il faut vraiment que nous partions d'ici... Il peut se réveiller d'un moment à l'autre, alors il vaut mieux être loin quand ça arrivera ! J'ai fait en sorte de détacher notre wagon de tous ceux qui sont derrière, mais il reste encore des subalternes de Balthazar dans cette partie du train... Et Balthazar lui-même.
Lily, le regard perdu dans le vague, hocha doucement la tête, avant de caller son visage pâle tout contre la gorge d'Aselum.
Elle n'avait pas entendu.
Ou plutôt, elle n'avait pas compris.
Sa conscience flottait dans le souvenir de la détonation, de la balle, du sang, d'un Mal et d'un Démon.
Le jeune homme serra ses dents, serra un peu plus l'adolescente, puis la souleva.
Il fallait qu'ils s'en aillent.
Il couru alors jusqu'aux escaliers qu'il descendit, puis regarda les portes fermées du train.
Ce dernier avançait à toute allure, produisant des étincelles sur les voies.
Plus rien n'était discernable dehors.
La paix avait disparu, au profit du chaos.
Aselum ferma ses yeux.
Se recula.
Couru.
Et sauta.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top