Chapitre 6 : Partie 2 : Maudite et Miraculé
Une élève de sa classe s'approcha, l'observa quelques secondes avant de prendre la parole ;
- Ça va, Lily ? Qu'est-ce qui se passe ?
L'adolescente avait besoin d'être seule.
- Ça va...
L'élève secoua sa tête. Elle voyait bien que Lily mentait. Une autre élève, d'une autre classe, se tourna vers les trois jeunes femmes.
- Qu'est-ce qui se passe avec Lily ?
Samantha fit les gros yeux.
- Ça ne vous concerne pas.
Elle se tourna ensuite vers Lily qu'elle fusilla.
- Tu vois ce que tu causes en préférant avoir cette discussion ici !
La jeune fille voulait s'enterrer sous mille tonnes de terre.
La première élève qui avait prit la parole, celle de sa classe, expliquait à d'autres élèves ce qui se passait. La deuxième, celle qui n'était pas de sa classe, en faisait de même.
Lily voulait mourir.
- Ça suffit vous tous ! Foutez le camp ! s'exclama une voix masculine et familière.
Le Démon en elle enflammait les âmes.
La première élève qui avait prit la parole, celle de sa classe, fronça ses sourcils.
- Et pourquoi, hein ? Ça ne te concerne même pas, tu n'es pas dans la même année que nous !
Le jeune homme leva son majeur en direction de la fille, et de la foule d'élèves par extension.
- Ça me concerne parce que moi, au moins, je me soucie vraiment de ce qu'elle est en train de ressentir maintenant et je ne fais pas la commère ! Alors sauf si vous voulez mon poing dans la gueule, foutez le camp !
Tous se dispersèrent bien rapidement, reconnaissant enfin l'élève qui leur faisait face ; et sa réputation le précédait.
Il n'avait jamais frappé personne, mais son côté friand de liberté et « ceux qui m'en empêcheront, je les emmerde » dont il usait même face aux profs, était légendaire.
Ce qui faisait fuir les élèves était avant tout son aura.
Il n'avait jamais porté la main sur un de ses condisciples, mais il transpirait le danger. Sauf les profs - et même, il existait des exceptions parmi eux - tout le monde en avait peur.
Le jeune homme se dirigea à l'opposé du canapé et s'assit simplement, sans rien dire, sans regarder Lily, juste en restant là.
L'adolescente avait les yeux plongés dans le vide.
« Tu n'es pas notre amie »
« Ça nous fait chier, là »
« Chien chien »
« Tu t'incrustes »
Des larmes glissèrent sur ses joues.
Elle n'avait pas voulu poser une question indiscrète. Ni même entendre une conversation intime.
Si elles lui avaient dit de partir, elle l'aurait fait.
Par le passé, elles l'avaient déjà fait. Lui dire de partir pour avoir une discussion privée. Et elle l'avait fait. Sans rechigner. Parce qu'elle comprenait.
Alors pourquoi ne pas juste l'avoir refait ? Pourquoi ne pas juste lui avoir dit qu'elles voulaient être seules ?
« Chien chien »
Elle les suivait parce que... Elle pensait avoir trouvé un groupe d'amies... Un groupe compréhensif.
Elle ne savait pas quoi faire d'autres.
Que dire d'autres.
Elle suivait... Parce que c'était le plus facile.
« Ça nous fait chier, là »
Elle ne s'en rendait pas compte.
Pas avant aujourd'hui.
Elle les faisait chier.
Elle les faisait tous chier.
Il n'y eut rien d'apparence, mais ce fut comme si son ventre s'ouvrait, que ses intestins se répandaient sur le sol.
Sa souffrance était à son comble.
Ses larmes dévalaient afin de former une cascade, et Lily se pliait en deux de douleurs.
Elle voulait mourir.
Le jeune homme à ses côtés hésita quelques minutes avant de se rapprocher.
- Est-ce que tu veux...
Sans même attendre de savoir ce que l'adolescent lui proposait, Lily le rembala, des gémissements dans la voix.
- Pars. S'il te plaît. Je suis maudite... Ça ne sert à rien de rester avec moi...
Le jeune homme fronça les sourcils et se rapprocha pour de bon.
- Ça, ce sont des conneries. Tu n'es pas maudite. Et c'est avec les autres qu'il faudrait éviter de traîner. Ils sont tous cons. Les humains sont cons.
Lily regarda ses chaussures.
- Je suis humaine, moi aussi je suis conne. Trop conne pour ne pas avoir vu que... Qu'en fait...
Sa voix se brisa. Les larmes chutèrent à nouveau.
Trop conne pour ne pas se rendre compte de la masquarade de cette pseudonyme amitié qu'elle avait cru voir.
L'adolescent leva ses yeux au ciel avant de les secouer.
- Non, tu n'es pas conne. Les humains le sont mais pas toi. Ce n'est pas parce que tu n'as pas vu l'hypocrisie de ces gens que tu es conne. Ça ne veut absolument rien dire. Ça veut juste dire que tu étais trop gentil.
Lily hocha sa tête. Toujours en regardant ses chaussures alors que la douleur de son ventre ne faisait que se rappeler à elle.
- Ça va ? Je veux dire, en-dehors de ce qui s'est passé..., questionna le jeune homme.
L'adolescente grimaça. Il s'était rendu compte... Il était bien le seul.
- J'ai juste un peu mal au ventre, c'est tout...
L'élève à ses côtés se retint de tout commentaire. Il voyait bien qu'il s'agissait de plus, mais son but n'était pas de la faire fuir avec trop de questions personnelles.
- Je m'appelle Aselum, et toi ?
La jeune fille eut un petit sourire malgré la douleur qui lui tordait les entrailles.
- C'est le nom d'un elfe, ça... Je m'appelle Lily... Mais je... Je ne rigolais pas, Aselum... Il ne faut vraiment pas que tu restes avec moi, parce que sinon... Sinon, tu vas finir par mourir...
L'adolescente de quinze ans ne le regardait toujours pas.
Comme si elle craignait de précipiter sa mort d'un simple contact visuel.
Aselum haussa ses sourcils.
- Ta classe et les trois hypocrites sont toujours en vie.
Lily hocha sa tête lentement.
- Ce sont des filles, c'est pour ça... Et elles étaient gentilles... Avant... Mais tu vas voir... Le monstre va les réduire en charpie... Et toi aussi... Toi aussi, si tu restes avec moi, parce que tu es un garçon... Et le monstre déteste les garçons.
Aselum esquissa un sourire ironique.
- Je te parie qu'entre moi et ta malédiction, qu'entre moi et ce pseudonyme monstre, c'est moi qui gagne. Tu verras, Lily. Demain, je serais à l'heure à l'école, même plus tôt pour pouvoir te prouver de ma survie avant d'aller en classe.
Lily secoua sa tête. Elle ne voulait rien entendre. Elle voulait qu'il parte. Qu'il oublie cette idée suicidaire.
Parce que toutes les personnes qui s'étaient essayées à devenir son ami en tant que garçon, tous sans exception, gisaient en ce jour dans un cimetière.
La sonnerie sonna. Aselum se leva pour rejoindre son local. Lily, souffrante, avait le droit de rester dans la salle des sixièmes jusqu'à ce que l'un de ses parents arrive.
***
Samedi 19 Mars, 7h
« ... Les faits se sont déroulés dans un magasin de vêtements... On suppose un cambriolage qui aurait mal tourné... Mais rien n'a été dérobé à l'enseigne. Trois victimes sont néanmoins a déplorer, d'où la conclusion du cambriolage qui aurait mal tourné... Oui, des adolescentes de quinze ans... Sophiannah, Lisie et Samantha... Toutes nos condoléances s'en vont à leur famille... »
***
Lundi 21 Mars, 8h
Lily était assise sur le même divan que la veille, où elle avait rencontré Aselum.
Son regard ne réussissait pas à se détacher de la page de son roman sur laquelle il était accroché depuis déjà une dizaine de minutes.
Son cœur battait à mille à l'heure.
Ses yeux menaçaient de lâcher des larmes.
Aselum n'allait pas se présenter à elle.
Elle en était certaine.
Il était mort.
Mort comme tous les autres.
Mort alors que tous ce qu'il voulait, c'était être son ami.
Elle n'avait même pas eu le temps de voir son visage...
D'apprendre à le connaître...
D'avoir même les prémices d'une amitié...
Parce qu'il était mort.
Mort.
- Tu vois, je te l'avais dit, murmura une voix à son oreille.
Lily tourna brusquement sa tête.
Aselum.
Aselum lui souriait.
En chair et en os.
Bien vivant.
Son visage encadré de longs cheveux noirs allant jusqu'à la moitié de son dos, et ses yeux... Ses yeux, aussi profonds qu'un miracle pouvait l'être.
Lily craqua.
Ses larmes coulèrent en trombe.
- Tu n'es pas mort... Tu n'es pas mort !
L'adolescente se jeta sur lui, mais Aselum l'arrêta juste à temps.
- Pas de câlin, non.
À la place, il lui fit quelques tapotements sur l'épaule, avec un petit sourire au coin.
- Je te l'avais dit, ta malédiction ou ce pseudonyme monstre peuvent aller au diable, parce qu'aucun ne gagnera contre moi.
Ce fut la première fois en sept ans que le sourire sur le visage de Lily était aussi sincère qu'heureux, et tellement fort qu'il illuminait son visage plus que jamais auparavant.
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