Chapitre 14 : D'énigmes et d'obscurités

Lily serrait les draps dans ses petites mains d'enfant, regardant autour d'elle avec cette même curiosité que la première fois. Toutes ses voiles blanches qui pendaient au plafond, aux murs, l'intrigait.

Selon l'adolescent, elles étaient là afin de purifier sa chambre ainsi que tout le reste du bâtiment. Elles empêchaient le mal de passer, ou dans leur cas, de sortir.

Parce que pour faire sortir le Démon en eux, il fallait un rituel spécifique, un rituel qui ne libérerait pas le mal mais le réduirait en cendres. Et ce n'était qu'ainsi qu'ils pourraient rejoindre la Lumière.

Lily baissa ses yeux vairons vers ses draps, tout aussi blanc que le reste. Elle arrêta de les serrer dans ses petites mains, les rabattit plus loin et pivota de ses jambes afin de sortir de son lit. Une fois ses pieds à terre, elle s'approcha de l'une de ces voiles, la curiosité revenant au galop dans son cœur.

Elle ne savait pas pourquoi elle était là. Ou plutôt si, mais elle ne savait pas si ces madames avaient raison, si elle avait vraiment un Démon en elle. Si c'était le cas, elle le saurait, non ? En tous cas, son ami ne semblait pas y croire, lui. Et s'il n'y croyait pas, alors elle non plus.

Dans cette chambre à la blancheur absolue, vêtue d'une longue robe nuageuse, à moitié transparente, la petite fille semblait marcher dans le ciel. Tel un être céleste que nul ne pouvait arrêter.

Elle toucha alors de sa petite main la voile, qu'elle sentit douce, légère et agréable au toucher.

Avec un sourire tout enfantin, elle s'enroula dedans, le sourire jusqu'aux oreilles, avant de rire aux éclats. Elle était une étoile, comme ça. Une étoile au milieu du paradis.

Un bruit de pas. Un bruit de clenche qui se baisse. Son rire cessa. Son sourire se figea. Et elle tourna lentement son visage en direction de la porte qui s'ouvrait, horrifiée par ce qu'elle pourrait voir.

Un soupir de soulagement sortit d'entre ses lèvres quand elle se rendit compte que ce n'était que son ami. Et celui-ci fonça vers elle avant de coller sa main sur sa bouche, son regard intense ancré dans le sien.
- Ne ris pas. Jamais. Elles penseront que c'est le Démon qui s'exprime...

Il ne put finir. La porte se rouvrit derrière lui. Lily écarquilla les yeux d'horreur en voyant la femme au masque de colombe, celle au masque de cygne et celle au masque de mésange s'avancer.

La première ouvrit grand les bras.
- Que c'est malheureux... Ma tendre enfant... L'infamie te pourrit les veines, et s'accroche maintenant à tes cordes vocales... Quelle tristesse... Mais n'ai crainte, ma chère fille, je vais te libérer de son emprise ! Viens à moi, viens à moi Lily chérie.

Ses cheveux d'or valsaient autour d'elle alors qu'elle parlait. Elle écartait encore plus les bras pour inviter l'enfant à s'y loger sans peur.

L'adolescent se tourna vers les trois femmes. Faisant office de son corps comme d'un bouclier pour la jeune fille derrière elle.
- Le Démon ne lui a rien fait. Il ne l'a pas encore possédé. C'était le Démon en moi. Le Démon en moi m'a possédé pour que je la fasse rire. Je suis désolé.

Lily ouvrit de grands yeux. Elle voulut contester, ne comprenant pas pourquoi l'adolescent racontait n'importe quoi, mais celui-ci posa une nouvelle fois sa main sur sa bouche.
- C'était moi. Pas Lily.

La femme au masque de colombe pencha sa tête sur le côté, ses bras se baissant.
- Quel malheur... Tu vas donc devoir me suivre, pour que je te libère de son emprise... Quelle frustration ça doit être pour toi, savoir que ça fait six ans que tu es ici, et le Démon reste accroché à ton âme... J'en suis désolée... Quelle souffrance ça doit être... Tu es si courageux !

La femme s'avança d'un pas puis d'un autre, jusqu'à arriver à la hauteur de l'adolescent. Elle posa l'une de ses mains sur son épaule, et l'autre sur l'épaule de la fillette cachée derrière lui.
- Mais il n'y a pas que le rire du Démon... Il n'y a pas que ça... Pour que le Démon s'en aille, faut-il encore qu'il ne prenne pas des forces chez ses congénères insipides... Mon pauvre garçon, je me doute que tu veuilles tenir compagnie à ton amie, mais tu ne fais que la mettre en danger ! Le Démon aurait pu te posséder et lui faire du mal !

Le garçon en question balaya la main de la femme afin qu'elle ne touche plus l'épaule de sa Lily.
- Je ne ferais jamais de mal à Lily. Jamais.

La femme esquissa un sourire derrière son masque, et se recula d'un pas.
- Je l'espère... Je l'espère tant... Mais en attendant, nous devons vous purifier. Tous les deux.

L'adolescent se recula, forçant Lily à reculer derrière lui.
- Il n'y a pas besoin de purifier Lily. Si vous me purifiez moi, c'est déjà suffisant.

La femme au masque de colombe le regarda longuement avant de répondre.
- Je suis désolée, mon petit, mais nous sommes les purificatrices, nous connaissons la procédure. Mais ne t'en fais pas, ton acte de générosité et de courage est déjà un combat contre ton propre Démon. Grâce à ça, le Démon en Lily ne peut se nourrir de l'énergie du tien. Sois en fière, mon cher garçon. Parce que ton acte a permis qu'un simple rituel de contrôle soit nécessaire.

L'adolescent ne bougea pas, même quand les deux autres femmes se dirigèrent vers sa protégée. Sa protégée apeurée, qui n'avait aucune idée de ce qu'on allait lui faire.

Une femme la porta dans ses bras et la jeta dans le lit. Elle prit ensuite ses mains qu'elle attacha avec une corde blanche. L'autre attacha ses pieds. Et arracha ses vêtements.

L'adolescent de treize ans regarda sans agir, sans rien essayer. Parce qu'il savait que cela ne servait à rien, qu'il échouerait. Il se vengerait, en temps et en heure, et sa vengeance allait être terrible.

La femme au masque de colombe s'approcha de la jeune fille, nue et attachée. Elle tourna autour d'elle, une bougie à la main qu'elle penchait vers le corps de la petite.

La cire coulait. Ardente. Et s'imprimait dans la chaire de Lily qui se tortillait en gémissant pour essayer d'y échapper.

Et les trois femmes psamoldiaient.
- Que la cire enchaîne le Démon. Que la cire le prive de ses mouvements. Que la cire le contrôle.

Une dizaine de minutes plus tard, une autre femme, avec un masque d'aigle, apporta un sceau, sertit d'un bec verseur, rempli d'or en fusion. Celle au masque de colombe s'en empara, et tourna autour de la fillette.

Elle versa l'or.

L'or toucha la peau de la jeune fille. Brûla sa chaire. Fusionnant avec elle.

Lily hurla.

Elle avait l'impression qu'on lui plantait un poignard ardent en pleine poitrine. Une fois. Deux fois. Trois fois.

La femme au masque de colombe versait méthodiquement. Faisant le tour de son corps.

Jusqu'à dessiner une colombe.

Les femmes s'en allèrent, la laissant seule et évanouie, emportant avec elle son seul pilier dans cet enfer déguisé en paradis.

Az.

***

1 Janvier 2021, 3h13

Son lit ressemblait à un champ de bataille. L'une de ses jambes formait un angle alors que l'autre restait droit. Un bout de son drap recouvrait négligemment le genou de la première, alors que la deuxième reposait sur le reste du tissu.

Lily se retourna vers son côté gauche, la couette se froissant à ce mouvement jusqu'à dénuder totalement la jambe auparavant un brin recouverte. Sa respiration était difficile, son ventre s'abaissait et se relevait à une vitesse anormale.

L'adolescente se retourna une nouvelle fois, sur sa droite à présent, repoussant de son pied le drap qui tomba à terre. Ses poings étaient serrés et des larmes se dévoilaient à la commissure de ses paupières.

Elle bougea à nouveau, cette fois pour se mettre en position fœtale, son corps secoué de tremblements.

Les heures passèrent ainsi, où Lily dormit extrêmement mal, rongé par des démons oubliés.

***

1 janvier 2021, 16h

Lily sautillait dans le salon, un sourire élargissant ses lèvres jusqu'à ses yeux. Elle attendait son meilleur ami, Aselum, avec une impatience brute et incontrôlable. Malgré les cernes sous ses yeux qui semblaient indiquer le contraire, elle débordait d'énergie.

La sonnerie retentit. Et la jeune femme fonça tel un bulldozer vers la porte afin d'ouvrir a l'invité tant attendu.

Celui-ci se tenait à trois pas du seuil de l'huis, un paquet cadeau dans une main. Il connaissait assez sa meilleure amie pour se douter que se tenir trop prêt de l'entrée lui aurait été fatal. Lily aurait débarqué à pleine vitesse, sans savoir s'arrêter, et les aurait tous les deux emportés dans une inévitable chute. En se tenant ainsi à l'écart, avec une main de libre, sa prédiction ne se réalisa pas, en revanche, il put rattraper l'adolescente qui ne échoua à s'arrêter par la faute de son élan, et trébucha.

Rouge de gêne, Lily se releva en balbutiant des excuses, le regard rivé au sol. Puis, dans un élan de courage, tourna petit à petit son regard vers celui d'Aselum, pour croiser son sourire chaleureux et plonger dans la mer calme, à peine agitée par quelques remous, de ses yeux.
- Joyeux anniversaire, Lily ! s'exclama le jeune homme avec un sourire amusé.

La jeune femme esquissa un énorme sourire, ses yeux brillants de joie.
- Je te rattraperai bientôt, attention !

Aselum lui administra une petite frappe sur la tête, releva la tête pour la jauger avec hauteur, avant de lui répondre, sarcastique.
- Rêves pas trop, petit démon ! Ça sera bientôt à mon tour de fêter mon anniversaire, et de creuser l'écart entre nous deux !

Lily lui tira puérilement la langue. Aselum leva poliment et innocemment son majeur.
- Lily, fait donc entrer ton invité ! s'exclama la voix de son père, depuis la cuisine.

L'adolescente fit une courbette devant son meilleur ami et lui présenta l'entrée de l'un de ses bras.
- Si monsieur sa majesté des doigts d'honneur veut bien s'en donner la peine !

Aselum retint difficilement son majeur qui le démangeait, et entra dans la maison de sa meilleure amie. Il alla déposer son manteau dans le vestiaire sans hésitation quant à son emplacement, étant assez venu dans cette habitation pour pouvoir la considérer comme sa deuxième maison. Il rejoignit ensuite Lily ainsi que ses parents dans la cuisine, en allant serrer les mains de sa mère et de son père en guise de salutation. Et par la même occasion, il déposa son paquet sur la table, sur lequel le regard curieux de sa meilleure amie lorgnait.

Amusé, le jeune homme l'observa durant quelques secondes avant d'annoncer ;
- Les cadeaux, c'est pour après le gâteau, n'est-ce pas ? demanda-t-il en jetant un regard de biais en direction des parents de Lily.

Ces derniers acquiescèrent, souriant en voyant le manège des deux jeunes face à eux. Leur fille, pas le moins du monde démunie grâce à son cerveau qui échaffaudait des tas d'idées, répliqua :
- On à qu'à manger le gâteau maintenant !

Sa mère secoua sa tête, un rire au bout des lèvres, puis expliqua sa réponse négative.
- Ton gâteau n'est pas encore totalement prêt, ma chérie...

L'adolescente eut un frisson innexplicable à l'entente de ce surnom et un goût infecte se répandit dans sa bouche. Sa mère, sans voir son trouble, termina sa phrase :
- ... Revenez dans... Disons... Une demie-heure ?

Lily fit les gros yeux. Autant que ça ? Son regard dériva vers le paquet mystère posé sur la table, devant lequel se plaça son père comme si, ainsi, le paquet n'existait plus. Ce qui était totalement faux, Lily savait très bien qu'il était derrière son père. Elle avait acquis la permanence de l'objet depuis un certain bout de temps, tout de même ! Mais elle n'eut pas d'autres choix, Aselum s'emparant de sa main pour l'amener plus loin, dans le jardin.
- Pourquoi veux-tu aller dans le jardin ? Il n'y a même pas de neige...

Lily fronça ses sourcils en croisant ses bras.
- L'hiver, sans neige, c'est nul... Fichu Belgique.

Aselum lui jeta un coup d'œil, ce même air amusé constamment affiché sur son visage. Les vagues qu'elle pouvait voir dans les yeux océaniques de son meilleur ami valsaient, frétillant de joie.
- On ne reviendra que dans plus d'une heure, ta mère est au courant.

Lily lui jeta un regard d'incompréhension, et la phrase que rajouta Aselum ne l'aida pas à y voir plus clair, bien au contraire.
- J'ai un permis de conduire.

Sans laisser le temps à son amie d'analyser ses dires pour y comprendre leurs sens cachés, il la tira une nouvelle fois derrière lui jusqu'à une Toyota noire que Lily n'avait jamais vu. Et quand le jeune homme ouvrit sa portière, elle prit un air faussement offusqué.
- Tu plagies mon humour, là !

Aselum ricana, un sourire en coin.
- Je ne savais pas qu'il y avait des brevets à déposer pour l'humour, mais si c'est le cas, j'espère que tu as déposé le tien ?

La jeune femme monta dans la voiture et s'assit, puis lui tira une nouvelle fois la langue.
- Non mais tu peux te rassurer, j'ai déposé un brevet pour ta grognontitude, donc tu vas pouvoir continuer à faire le grognon !

Aselum claqua la portière puis, face à la vitre, montra son signe préféré, celui dont il maîtrisait tout l'art ; le doigt d'honneur.

Il contourna ensuite la voiture, ouvrit la portière du côté conducteur, et s'installa à son tour. Une fois sa ceinture mise, il mit le contact.
- Je suppose que tu ne me diras pas où tu m'amènes ? questionna Lily en le regardant faire avec curiosité.

La Toyota démara. Elle quitta le petit parking situé devant la demeure de Lily. Aselum, le regard sur la route, un sourire en coin, supputa :
- Tu as envie de savoir ?

Les étoiles dans les yeux de Lily ne pouvaient être plus claires quant à ce qu'elle souhaitait.
- Oui s'il te plaît !

Aselum lui jeta un coup d'œil avant de regarder à nouveau la route.
- Eh bien... Tu le sauras quand on y sera.

Lily le fusilla du regard puis pencha sa tête vers la vitre, observant le paysage défilé. Sa bouderie fut rapidement remplacée par ses pensées beaucoup trop encombrantes pour son petit cerveau d'humain.

Elle pensait au paquet mystère, évidemment, et à tout ce qu'il pouvait contenir. Un livre ? Un manga ? Aselum savait qu'elle adorait ça, et la boîte avait la bonne forme pour. Ou alors, ça pourrait être... Un mug avec un dessin particulier ? Ou autre chose ? Et pourquoi avait-elle ressenti ce frisson quand sa mère avait prononcé le mot « chérie » ?

Lily plaça son bras sur le rebord de la vitre, son menton posé dans sa main. C'était vrai, ça. Sa mère l'appelait souvent « ma chérie » et ça ne l'avait jamais dérangée. Alors pourquoi était-ce le cas maintenant ?

Et où comptait l'amener Aselum, d'ailleurs ? Lily jeta un coup d'œil vers le concerné, concentré sur la route. Il paraissait adulte. En même temps, il avait bientôt dix-huit ans, donc c'était quasiment le cas. L'adolescente fronça les sourcils. C'était vrai, ça. Il n'avait pas encore dix-huit ans, et pourtant, il avait déjà son permis, comment ça se faisait ?

Il est né... En mars. Le quatre mars plus précisément.

La bouche de Lily forma un « oh » sans pour autant laisser le moindre son passer. Il avait dix-sept ans et neuf mois. Donc il avait pu passer son permis. Ça se tenait.

Lily l'observa, du coin de l'œil, un long moment. Elle ne saurait dire si des minutes ou des heures s'étaient écoulées tant Aselum l'hypnotisait. Sa simple vision faisait taire toutes ses pensées.

Elle sentit quelque chose en elle, et ce n'était pas inconfort, loin de là. Elle se sentait bien. Elle avait chaud, mais pas trop, juste assez.

Aselum tourna son regard vers elle. Un frisson agréable traversa l'échine de Lily, la faisant détourner la tête et rougir. Qu'est-ce qui lui arrivait ? Sans doute était-ce la météo déréglée de la Belgique et qu'une brise s'était introduite par un minuscule interstice de l'habitacle où ils se trouvaient. Lily ne voyait pas d'autres explications.
- Nous sommes arrivés.

L'adolescente ouvrit de grands yeux quand elle remarqua ils étaient arrivés. Devant le parc à mitraille d'Ottignies.

Elle riva ses yeux vers eux abyssaux de son meilleur ami, qui lui offrit un sourire en coin.
- Ça te dit, de remplacer la neige par de la glace, et de faire de la patinoire ?

Les étoiles qui brillaient dans les yeux de Lily étaient évocatrices. La jeune femme n'eut même pas besoin de donner une réponse, Aselum avait compris.

Tous deux sortirent de la voiture et rejoignirent la patinoire en question. Aselum paya leur place, puis lui et Lily mirent leurs patins et s'élancèrent.

Lily glissa sur quelques mètres, le sourire aux lèvres, avant de s'emmêler les pieds. Et au moment même où ses fesses auraient dû rencontrer le sol, des bras la rattrapèrent.
- Je ne pense pas que Lysiris soit d'accord que je te ramène toute cassée, tu sais ?

Les joues de Lily devinrent écarlates. Elle se détacha des bras d'Aselum pour glisser loin de lui, là où ses patins accepteraient de l'amener sans la faire chuter. Et c'est ainsi que tout naturellement, sans qu'ils n'eurent à échanger une parole, une course de patins s'engagea entre les deux amis.

Lily donnait tout ce qu'elle avait pour prendre de la vitesse, et Aselum la narguait en la dépassant. Et quand l'adolescente était sur le point de tomber, son meilleur ami était toujours là en un temps record pour lui éviter la catastrophe.

Il réussissait à la dépasser, à aller plus vite qu'elle, mais pire que tout ; il réussissait ça en assurant en même temps ses arrières !

Lily lui donna un petit coup dans l'épaule en s'en rendant compte. Son meilleur ami était expérimenté, c'était indéniable. Elle porta sur lui des yeux curieux, teintés d'admiration.
- Où est-ce que tu as appris à faire tout ça ?

Aselum esquissa un petit sourire.
- Quelqu'un m'a appris. Et je peux t'apprendre, si tu veux.

La jeune femme l'observa un long moment. Sans doute que c'était un professeur qui avait enseigné Aselum, ou alors son père. Il en parlait rarement... Qu'est-ce qui lui était arrivé pour qu'Aselum soit si secret sur ce dernier ? Lily secoua sa tête, remettant ses esprits en place, puis acquiesça à l'affirmation de son meilleur ami.
- Ça me ferait très plaisir que tu m'enseignes ça !

Les vingt minutes qui suivirent, Aselum usa de patience, de pédagogie et de réconfort afin d'apprendre à sa meilleure amie l'art de patiner sans filtrer sans cesse avec la glace. Et c'est lessivé que les deux sortirent de la patinoire afin de regagner la voiture.
- Merci Aselum, c'était super !

Le jeune homme tourna sa tête vers sa meilleure amie, souhaitant lui dire à quel point il avait apprécié ce moment avec elle, mais il n'en fit rien. Car à côté de lui, Lily dormait à poings fermés.

Alors qu'Aselum se garait dans le parking des Aphos, Lily papillonna des paupières pour s'adapter à la lumière de la soirée, même si celle-ci déclinait grandement.
- Réveillée, le démon ? Tu as bien dormi ?

Lily bailla.
- Je rêvais que j'étais en enfer et que je torturais des gens alors forcément...

Aselum haussa un sourcil. Avec sa meilleure amie, il n'était pas certain de si c'était une blague ou non. Et vu la moue boudeuse que lui lança Lily, ça devait être une farce.
- T'as pas d'humour, Aselum.

Le jeune homme ricana :
- Avec toi, c'est difficile de savoir ce qui est une blague.

Lily lui jeta une œillade assassine, avant d'esquisser un sourire moqueur.
- De toute façon, j'ai quand même gagné.

Le présumé perdant haussa ses sourcils.
- Comment ça ?

Lily ouvrit sa portière, détacha sa ceinture et posa un pied en-dehors de l'habitacle.
- Tu as rigolé.

Elle claque la porte et courut vers sa maison, comme si elle avait le diable aux trousses. L'adolescente entendit alors le bruit d'une autre portière qui claquait, ainsi que des bruits de pas précipités. Et alors qu'elle était sur le point de faire le code du garage, la main d'Aselum enserrait la sienne.

Son souffle se coupa. Lily eut un brusque mouvement de recul. Et une seconde à peine après, l'adolescente balbutia. Elle ne savait pas ce qui lui avait pris. Elle regarda ses mains, dans l'incompréhension, ravala sa salive et regarda à nouveau Aselum.
- Désolée, je ne sais pas pourquoi...

Son ami secoua sa tête, un sourire sur les lèvres.
- Ne t'en fais pas ! Allez, rentrons !

Lily hocha la tête, avant de froncer ses sourcils. Son ami gardait un bras derrière son dos. Pourquoi ?

Vu le regard d'Aselum, il ne fallait pas poser la question. Bien que curieuse, Lily se retint et composa le code. Elle se déchaussa avant de courir vers l'intérieur de sa maison, faire un « mais mais mais » à son chien qui lui fit la fête en la voyant.

Il était 19h lorsque le gâteau fut enfin servi, après un copieux repas à base de carbonara. Et Lily s'en lécha les babines en découvrant que son gâteau était, comme chaque année, un merveilleux. Un délicieux et divin merveilleux. Et dans un autre plat se trouvait une charlotte au chocolat.

Huit bougies se trouvaient sur le merveilleux. Et huit autres se trouvaient sur la charlotte.

Lorsque ses parents et Aselum eurent fini de chanter le chant d'anniversaire, Lily regarda droit dans les yeux les flammes valsantes qui n'avaient pourtant pas d'yeux.

Elle ferma les siens.

J'aimerai rester heureuse avec Aselum et mes parents.

Elle ouvrit ses paupières. Les flammes dansaient, d'un côté puis d'un autre, leur luminosité éclairant l'obscurité des gâteaux.

J'aimerai...

Un essaim de libellules éclaira son cœur.

J'aimerai savoir...

Les libellules devinrent fleurs qui explosèrent en milliers de pétales de cerisiers, couleur de l'aurore.

J'aimerai savoir si ce que je ressens pour Aselum...

Un bout de son cœur s'envola, avec de magnifiques ailes aux couleurs boréales. Un autre bout partit, aux teintes d'une galaxie. Et encore un autre... Son cœur devenait miettes, et ces miettes devenaient papillons.

Son souffle balaya le feu alors que son âme criait la fin de sa pensée, au plus profond de son être.

Ils mangèrent ensuite tous avec appétit, se délectant des délicieux gâteaux que Lysiris Aphos avait préparés. Une fois qu'ils eurent fini, le père de Lily apporta un paquet que celle-ci s'empressa d'ouvrir.
- Un pull Doctor Who et un pull Hunter X Hunter !

Lily sautait de joie. Elle alla ensuite embrasser sa mère et son père, avant de revenir à sa place où l'attendait deux paquets. Celui mystère d'Aselum et un autre, beaucoup plus long. Elle décida de commencer par le paquet mystère d'Aselum.

Elle y trouva une petite boîte qu'elle ouvrit avec précaution, et écarquilla les yeux en découvrant de quoi il s'agissait.
- C'est... C'est...

Aselum eut un sourire amusé, et pour toute confirmation, il ne prononça qu'un seul mot.
- C'est.

Lily avait la bouche grande ouverte, ébahit. Dans ses petites mains, elle tenait la montre à gousset des Seigneurs du Temps dans Doctor Who, ainsi que le tournevis supersonic du dixième Docteur.

Lily voulu sauter dans les bras de son meilleur ami, mais se rappela in-extremis qu'il n'aimait pas ça. Alors, à la place, elle lui fit un bisou sur la joue.
- Tu n'ouvres pas l'autre paquet ? questionna Aselum, bras croisés.

La jeune femme regarda le dernier paquet. Il était long. Très long. Qu'est-ce que ça pouvait être ?

Elle s'approcha, doucement, et défit l'emballage. Avant de crier.
- Aselum !

Celui-ci fit un sourire angélique qui sonnait totalement faux avant de jouer l'étonnement.
- Qui ça ?

L'adolescente le regardait avec de gros yeux, puis sortit de l'emballe un katana. Plus précisément, le Katana du Pilier de la Flamme dans Demon Slayer.
- C'est trop ! hurla Lily, qui n'en revenait absolument pas.

Ce qui était très contradictoire avec ce qu'elle criait, c'était qu'elle tenait sa lame bien en main, comme si elle craignait que quelqu'un la lui prenne.
- Ce n'est pas trop, Lily, sinon j'aurais pris moins, répondit Aselum en haussant les épaules, comme s'il parlait de la pluie et du beau temps.

La jeune femme le fixa intensément, avant de se résigner. Elle était trop contente pour se plaindre. Pourquoi se plaindre d'ailleurs ? Elle adorait ce katana ! Et cette monstre à gousset ! Et ce tournevis supersonic ! Et ces pulls !
- Merci !

Les deux plus jeunes restèrent encore quelque temps avec les parents de Lily, avant de sortir avec Toupie pour lui permettre de faire ses besoins. C'est alors que la jeune femme remarqua une boîte de carton, prêt de sa porte. Elle s'approcha, Aselum sur ses talons.

« Destinataire : Lily Aphos »

L'adolescente ne fut même pas étonnée. Elle s'empara du carton, appela son chien et rentra, Aselum à ses côtés. Après avoir essuyé les pattes de Toupie, Lily et son meilleur ami montèrent jusqu'en haut. Ce ne fut qu'à ce moment-là qu'Aselum posa la question.
- Qu'est-ce que c'est que ce carton ?

Lily l'observa quelques minutes. Elle ne voulait pas l'inquiéter mais... Si elle lui avait dit pour l'inconnu, elle pouvait bien lui dire pour le reste, non ?

La jeune femme alla s'asseoir sur son lit, inspira un grand coup, et se lança. Elle raconta tout. Tout ce dont elle se souvenait. Les garçons morts. L'hôpital psychiatrique. Les rêves qui étaient sans doute des souvenirs de ces années passées dans cet endroit... Elle ne laissa rien de côté. Elle ne cacha rien.

L'impression constante d'être observée. La main sur son pied. Et tout le reste.

Toutes ces choses où on essayait de lui faire croire que ce n'étaient que les symptômes d'une schizophrénie.

Et elle lui raconta pour les colis. Ces colis qui ne manquaient aucun de ses anniversaires depuis aussi loin qu'elle se souvienne.

Après avoir tout raconté, Lily ouvrit le colis, sans voir que le visage de son meilleur ami était resté de marbre lorsqu'elle abordait le sujet de ce « monstre » et des colis. Et dans la caisse, la jeune femme découvrit des armes, évidemment, ainsi que des romans dont « La Tisseuse de Mélodies » de Sarah Abassi, ainsi qu'une enveloppe.

La curiosité à son paroxysme, Lily l'ouvrit.

Des billets de cent euros s'en échappèrent ainsi qu'un papier plié.

Un papier qu'elle ramassa, déplia et lu.

« Nous serons bientôt réunis, Lily
CDB »

Le papier s'échappa de ses mains. Plana quelques secondes avant de tomber par terre.

La terreur paralysa Lily.

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