Chapitre 12 : Partie 3 : Anxiogène
La silhouette se mit en marche, et contourna la tente.
Lily l'observa, dans l'espoir que la personne parte. Mais il n'en fut rien. La silhouette fit juste le tour de la tenue avant de se remettre au même endroit que précédemment.
Tremblante, la gorge serrée, les lèvres en sang tellement elle les serrait, l'adolescente attrapa son téléphone. En jetant de fréquent coups d'œil sur la silhouette, elle déverrouilla difficilement son téléphone avant d'appeler Aselum.
Elle ne dirait rien. Pour que la silhouette ne sache pas qu'elle était réveillée. Elle coupa même le son. Elle n'allait pas entendre Aselum et lui ne l'entendrait pas non plus, mais comme ça, il saurait. Il saurait que quelque chose n'allait pas. Qu'elle avait besoin de lui.
Lily vit avec soulagement qu'Aselum avait décroché. Elle pourta alors son regard sur la silhouette. Et retint un cri.
Cette dernière s'était approchée. Et s'approchait. Elle avançait. Vers elle. Lentement. Trop lentement. Mais elle avançait. Continuellement. Elle avançait.
Lily suffoquait.
Elle avait beau tout faire pour chercher son souffle, elle n'y arrivait pas. Elle n'y arrivait plus.
La boule dans sa gorge était trop grande. La boule dans son ventre aussi. Et elle ne voyait quasiment plus rien à cause de ses yeux humides de larmes, mais elle percevait toujours la silhouette qui s'avançait.
Qui s'avançait toujours.
C'était certain, maintenant, la silhouette savait qu'elle savait.
La silhouette entendait certainement sa suffoquation. Sa crise d'angoisse naissante.
La personne derrière la tente posa sa main sur le tissu de l'abri de l'adolescente. Et s'arrêta.
Il ne s'approchait plus. Il restait juste là.
Quelques minutes plus tard, qui semblèrent durer des heures pour Lily, la silhouette se retira. Et partit en courant. Une autre s'approcha, en criant.
- Lily ! Lily, ça va ?!
Aselum. La voix d'Aselum.
Lily pleura. Elle pleura de tout son soul. Aselum rentra dans la tente, et posa ses mains sur les épaules de son amie. Lui disant qu'elle ne craignait plus rien. Qu'IL était partit.
Il l'aida à rentrer toutes ses affaires, et décida de dormir à ses côtés. Elle sur son lit, lui sur le divan qu'il avait monté avec l'aide de Lily dans la chambre de cette dernière.
Le lendemain, il dû partir tôt, car il devait rejoindre sa famille.
***
8 Juillet 2020
Lily serrait le poing de son meilleur ami de toutes ses forces. Non pas pour lui faire mal, mais pour évacuer son angoisse.
La veille, vers midi, sa mère lui avait fait remarqué la longueur de ses cheveux. Et qu'il était temps, selon elle, de les couper. L'adolescente n'avait rien voulu entendre de plus et s'était rué dans sa chambre, afin de s'y cacher. Même si au fond d'elle, elle savait que ce jour devait arriver vu que sa chevelure atteignait maintenant ses fesses, elle ne voulait pas.
Elle ne pouvait pas.
La peur qui tordait ses entrailles, qui s'écoulait dans ses veines tel un poison, la paralysait. Tout ça était psychologique. Elle le savait. Elle le savait très bien. Mais la douleur dans son ventre à cette simple évocation, les étoiles noires et mauves devant ses yeux, sa tête qui tournait et sa respiration difficile, tout ça était bien réel.
Lily secoua sa tête face à ses remembrances. Elle ne devait pas y penser.
Elle devait respirer.
La main d'Aselum serra la sienne. Lily tourna la tête dans sa direction et croisa des yeux bleus réconfortants.
Tout allait bien. Aselum était avec elle.
Ils marchèrent encore quelques mètres, jusqu'à arriver devant la maison de la jeune fille.
Lily prit une grande inspiration.
Et rentra.
Ce fut sa mère qui les accueillit, tout sourire, assise sur un des fauteuils du salon.
- Merci de lui avoir fait prendre l'air, Aselum.
Ce dernier fit un simple hochement de tête pour toute réponse, avant de pousser son amie dans le dos, en lui murmurant au creux de son oreille gauche ;
- Je suis là, je ne partirai pas, je veillerai sur toi, je vérifierai que ça se passe bien...
Lily hocha la tête, blème, et se dirigea vers le tabouret que sa mère avait installé.
Lysiris Aphos commença sa mission, Lily serrant ses poings en se mettant à énoncer des noms.
Alors que son corps tremblait. Alors que des lames invisibles et imaginaires commençaient à charcuter son ventre. Alors que ses poumons avaient de plus en plus de mal à récupérer de l'oxygène. Alors que des larmes s'agglutinaient aux bords de ses yeux. Alors que sa peur psychologique prenait de plus en plus d'ampleur dans son corps, elle énonçait des noms.
Des noms de Dieux Grecs.
- Poséidon.... Ar... Artémis... Zeus... Ha... Hadès... Ar... Arès... Je n'ai pas peur... Je n'ai pas peur...
D'une voix douce, et tout en continuant son travail, sa mère acquiesça.
- C'est ça Lily, respire et continue. Il y a qui d'autre, comme Dieux de l'Olympe ?
La jeune femme était complètement au bord des larmes, et puisait dans ses ressources énergétiques pour ne pas s'évanouir. Elle devait tenir bon.
- Héphaïstos...
Après deux autres noms, sa mère affirma qu'elle avait terminé, ce qui soulagea sa fille d'un poids colossal.
Comme si ces quelques infimes minutes à lui couper les cheveux avaient été en réalité des heures et des heures. Comme si elle portait, depuis tout ce temps, la terre sur ses épaules, et qu'Atlas l'en avait enfin débarrassé.
- Il faudra juste que je rectifie quelques mèches, mais ça, je peux le faire plus tard.
Le ciel chuta sur la tête de Lily.
Elle tourna son regard vers sa mère.
Et ses pupilles dilatées lui renvoyaient toute la terreur que sa simple phrase avait provoqué en sa fille.
Lily sentit alors la main d'Aselum entourer la sienne.
- Tu pourrais peut-être faire un câlin à Toupie quand Lysiris rectifiera les mèches ?
La jeune femme acquiesça. Serra la main d'Aselum dans la sienne. Et se tourna ensuite vers sa mère, le visage encore pâle.
- Je... Je veux bien faire ça tout de suite...
Lysiris envoya un petit regard surpris vers Aselum avant d'hocher sa tête.
- Toupie, viens ! appella Lily, tout en regardant son chien auparavant coucher, se lever pour venir vers elle.
L'adolescente s'accroupit, prit Toupie dans ses bras, puis se releva. Elle se dirigea ensuite vers le canapé où elle déposa son bébé d'amour. Elle s'assit, la prit dans ses bras, et enfouit son visage dans sa fourrure. Ses poils lui chatouillaient les joues mais ce n'était pas grave.
Derrière, sa mère recommença.
Et Lily serrait de toutes ses forces son chien, tout en faisant attention à ne pas lui faire mal. Et tel un mantra, elle répéta « Pour Gallifrey, pour les Seigneurs du Temps, et pour la fin du Temps ! »
Une fois que sa mère eut fini, Lily se dirigea vers les toilettes afin de se regarder dans le miroir. Elle ravala sa salive, s'assura que la main d'Aselum était toujours dans la sienne, puis se posa face au miroir.
- Le Démon va envoûter des personnes, on dirait.
Dans le reflet du miroir, Lily vit le rouge faire irruption sur ses joues comme la lave d'un volcan. Et ses cheveux, eux, s'arrêtaient maintenant à la première moitié de son dos.
***
14 Juillet 2020
Lily se réveilla en hurlant. Les larmes innondaient ses yeux comme de grosses perles de verres. Elle avait l'impression que son dos se faisait écorcher, que quelque chose souhaitait sortir, perforer sa peau, sans le pouvoir. Elle se mit sur le côté gauche, mais la douleur irradiait toujours plus.
L'adolescente empoigna son drap et en mit un bout dans sa bouche. Que ses parents soient encore endormis relevaient du miracle, et elle ne voulait pas remettre à l'épreuve cette chance qu'elle venait d'avoir. Elle releva sa tête, serra sa mâchoire et se blessa la langue dans la foulée. Les larmes ruisselaient, d'énormes étoiles de diamant.
Son dos. Elle avait l'impression que de la lave s'écoulait en-dessous et cognait encore et encore contre sa peau pour jaillir tel un geyser. Elle avait mal. Terriblement mal. La souffrance était si forte qu'elle se sentit partir.
Lily eut à peine conscience qu'on déchirait son pyjama et qu'on lui appliquait une crème sur le dos. Elle sentit des paumes masser chaque parcelle de sa peau et apaiser la douleur.
-... man...
L'adolescente tourna lentement sa tête vers sa mère, les yeux vitreux à cause de la fatigue. Mais les prunelles dans lesquelles elle chuta n'étaient en rien celles de sa mère.
Ces prunelles-là étaient fendues.
Elle sentit alors le froid. Le froid d'une lame. Et son cri aurait certainement réveillé tout le quartier si elle n'avait pas un bout de son drap fermement serré par sa mâchoire.
La lame venait de perforer sa peau. Sa peau se déchira. Se creusa. Saigna.
Puis se recouvrit, la personne derrière elle bandant la plaie avec précaution, tendresse et douceur.
Lily s'endormit telle une masse.
Ce n'était rien. Elle avait certainement rêvé les deux prunelles fendues.
La douleur avait irradié, sa mère avait essayé de la calmer avec un baume. Mais la douleur avait ressurgit, son dos avait saigné et sa maman avait dû mettre un bandage.
Il n'y avait pas d'autres explications possibles.
Tout allait bien.
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