🌨 𝑬𝒏𝒕𝒓𝒆 𝒍𝒂 𝒕𝒆𝒓𝒓𝒆 𝒆𝒕 𝒍𝒆 𝒄𝒊𝒆𝒍 🌨

Cet OS est une réécriture, qui m'a bieeen fait galérer! Il date en effet de 2014, période où ma plume était en pleine... construction?

Du coup, j'ai trouvé cet exercice aussi complexe que gênant. J'avais inclus un lemon à l'époque, mais je n'étais VRAIMENT pas douée pour ça... (C'est toujours le cas, d'ailleurs!)

Honnêtement, j'aime bien cette nouvelle version : elle ressemble davantage aux textes dramatiques et doux que j'affectionne tant désormais. Tu me diras ce que tu en penses? 💜

Sur ce, je te souhaite une bonne lecture!


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Son attitude si rigide, si froide, sa façon d'agir... Tout en lui m'a touché en plein cœur dès notre première rencontre.

Je me suis d'emblée inquiété pour lui, alors que je ne suis que son cadet. Mes amis m'ont même charrié lorsqu'ils s'en sont aperçus : moi, un ado complètement largué, incapable de se démarquer dans cet escadron d'élite, je me faisais du mouron pour le fameux Livaï.

Je l'ai approché sans vraiment savoir pourquoi – je désirais juste sa proximité. Je souhaitais mieux le connaître, l'aider en allégeant peut-être ce fardeau si lourd qu'il semblait porter seul depuis trop longtemps.

Il arborait toujours cette expression déçue face à la réalité.

J'ai vite compris que, au fond, il n'était en fait qu'un adorable rêveur.

C'était un jour comme les autres. La lumière m'a atteint en pleine tête vers neuf heures, et je crois que c'est là qu'un pressentiment ténu s'est éveillé en moi.

Il faisait plutôt beau pour une matinée de novembre : un soleil brûlant commençait déjà à me taper sur le système, me cramant la rétine de ses foutus rayons. J'avais la haine en songeant à mon uniforme noirâtre qui me cuirait à petit feu dès que je l'enfilerais.

Je détestais ça.

M'habiller pour aller au lycée. Feindre d'être en pleine forme devant ma mère, en ayant dormi quelques heures à peine.

Je n'ai jamais su pour quelle raison mes parents m'ont inscrit dans cette académie privée, alors qu'il en existe d'autres moins vieillottes à Shiganshina. Peut-être qu'ils n'ont pas voulu me séparer de mes copains surdoués, qui me faisaient involontairement passer pour un ignare? À mon grand regret, je n'ai en effet hérité d'aucun talent prestigieux.

Ce matin-là, je m'étais retrouvé coincé derrière Mikasa et Jean qui, pour changer, se disputaient connement.

Mikasa, cheveux bruns ébouriffés et peau laiteuse, portait une fois de plus la tenue réglementaire normalement réservée aux garçons. Les surveillants essayaient régulièrement de la réprimander à ce sujet, mais elle leur lançait de telles œillades sinistres qu'ils finissaient vite par la laisser tranquille.

Une quiétude qui n'était plus troublée que par Jean, ce crétin à tête de Shetland. Malgré l'amitié solide qui nous liait, je galérais parfois à le supporter – lui, ses iris noisette, et sa crinière folle similaire à la mienne.

Moi, j'étais comme d'habitude : nonchalant, fatigué, cloîtré au milieu d'une foule d'étudiants se rendant en cours en traînant les pieds.

Je me représente encore aujourd'hui les briques rouges des petites maisons devant lesquelles nous passions. Il y avait souvent un vieil homme qui nous contemplait en souriant de sa fenêtre, comme si sa jeunesse était là, en nous. Je crois qu'il s'appelait Pixis, quelque chose de ce genre...

Une fois arrivés au lycée, nous avons de suite remarqué que l'atmosphère était différente. Je me suis donc approché, bousculant les autres élèves.

J'ai toujours détesté le changement – comme on redoute une trahison.

Nous avons pénétré dans la cour principale, où se formait un attroupement de curieux. Et là...

Le choc.

Foudroyé, mon palpitant s'est arrêté. Mon être entier s'est tendu vers l'instant, vers l'entrée de ce vieil établissement.

Il y avait quelqu'un : un nouveau. Au début, je l'ai pris pour un enseignant, certes d'une taille... moindre. Puis le directeur, un colosse aux cheveux dorés, semblables à ceux d'Armin, nous a toisés. Il avait des yeux d'un bleu si pur et si froid, que le silence s'est installé sans tarder.

« Eh bien, que se passe-t-il? »

L'écho de sa voix grave nous a tous plus ou moins secoués, et plusieurs fouineurs préférèrent rejoindre le hall, en chuchotant et jaugeant celui qui se tenait au côté d'Erwin Smith. Je me rappelle parfaitement de ce que j'éprouvais.

J'y suis : paralysé, la main crispée sur la bandoulière de mon sac en cuir, des larmes au bord des paupières dues à l'aridité de mes émeraudes écarquillées. Je savais pertinemment que c'était moi que Smith dévisageait, et que cela voulait dire : "Va voir ailleurs si j'y suis". Mais je ne pouvais pas. Je devais être ici. Je déterrais mes désirs, et celui-ci était beaucoup plus puissant que tous ceux que j'avais pu ressentir auparavant. Une existence entière se dévoilait.

J'étais un drogué en manque, à une différence près : je n'avais même pas commencé à me piquer.

J'vous en prie, vous pouvez pas me demander de partir!

J'aurais dire ça. J'aurais dû, ne serait-ce qu'une seule fois, me bouger. Mais c'était si dur de sortir de mon cocon.

Personne ne m'avait préparé à recevoir tant de lumière.

« Voici Eren Jaeger. Puisqu'il semble fasciné, il sera le guide de ta première journée. » annonça subitement Smith en me fixant.

J'étais à deux doigts de chialer : on me lançait une bouée de sauvetage, une opportunité exceptionnelle de reconquérir mon quotidien! J'ai considéré le directeur avec une détermination aussi nouvelle qu'étonnante, ai légèrement baissé la tête, par respect, puis me suis avancé vers lui.

Lui.

« Eren Jaeger. » me suis-je présenté, omettant l'introduction de l'éminent blond.

Je sentais que, derrière moi, Mikasa, Jean, et un Armin fraîchement débarqué, observaient sans bouger, sans un mot. Ils pensaient plus fort qu'ils n'avaient jamais parlé, me comprenaient sans doute mieux que je ne le faisais. En moi, un tourbillon sans précédent dévastait tout.

« Livaï. » répondit-il simplement.

Le monde s'est effacé un peu plus. Un chagrin inconnu m'est apparu, et j'ai commencé malgré moi à m'inquiéter. Il n'y avait plus de sens à rien. Il était trop las, trop vide – ne renvoyait qu'un épuisement absolu.

L'univers a cessé de s'étendre tandis que je me noyais dans cette encre grise.

« Livaï est en Dernière Année. Je compte sur toi, Eren, tu ne me décevras pas. » m'assura Smith en posant une paume des plus sérieuses sur mon épaule.

J'peux pas vous décevoir alors que j'vous ai jamais montré ce que j'sais faire, m'sieur.


« Ici, c'est le couloir des Première Année. Y'a personne à cette heure-ci. »

Ce que je débitais n'avait strictement aucun intérêt.

Autant marcher en silence.

« Et là, c'est le réfectoire. Vide aussi. »

Je me désespérais.

J'avais vraiment envie de lui parler. De lui poser plein de questions, de parcourir le grain de sa peau pâle. Je voulais savoir ce qui l'avait poussé à s'inscrire ici, bouleversant ainsi mon espace.

« Tu connais Mikasa Ackerman? »

Je m'arrêtai brusquement.

« Ouais. Elle est aussi en Deuxième. Pourquoi? »

« Pour rien. »

Puis il a filé en m'ignorant. J'en profitai, relevai chaque détail de sa petite stature : ses traits d'une finesse rare, les reflets argentés de ses iris, la douceur apparente de ses cheveux sombres rasés avec soin près de la nuque, les mouvements de ses muscles sous la chemise blanche de l'uniforme... J'étais sûr de n'avoir encore jamais été tant attiré par quelqu'un. Et mon père qui croyait naïvement que je sortirais avec une fille, que j'en serais fou amoureux! Voilà que j'étais captivé par un garçon.

« Tu sais, si t'as besoin de quoi que ce soit... »

« Inutile de faire semblant. J'me fous pas mal de ton altruisme. »

J'en restai bouche bée. Il se planta face à moi, et osa me submerger à nouveau de l'acier de son regard. J'en tremblai un peu, et mon organe vital, déjà si malmené, suivit.

« J'ai besoin de personne. Et surtout pas d'un gamin qui se croit assez intelligent pour guider son aîné. »

« J'm'inquiète pour toi, OK? »

J'avais crié, ce qui le fit reculer dans un haussement de sourcils. Pourquoi j'lui ai balancé ça, moi? Ma soudaine fascination s'était emparée des rênes de mon cerveau, ruinant la visite en quelques secondes. Livaï semblait... effrayé. Le simple fait de m'en rendre compte me blessa.

« Dégage, Jaeger. Fous-moi la paix. »

Par la suite, sa voix me hanta. Même s'il avait prononcé mon nom avec mépris et méfiance, ce que je ressentais en y repensant était au-delà du descriptible.

« Dégage, Jaeger. »

Au cours des semaines qui suivirent, je le lorgnai de loin, accompagné de mon trio d'alliés. Eux seuls essayaient d'entendre ma détresse ; eux seuls tentaient d'en saisir la cause. J'arrivais toujours à enterrer ce qui me paraissait désagréable, pourtant! Mais ces minutes, cette voix, ce visage – impossible.

J'oubliai presque qui j'étais, me concentrant uniquement sur Livaï. J'avais souvent envie de pleurer, en particulier lorsque mon père me demandait, de temps à autre, si j'avais une copine. Aussi, je m'effondrais quand Jean me taquinait à ce sujet – ce qu'il regrettait systématiquement. J'étais misérable, et rien ne parvenait à me sortir de ma léthargie.

Chaque week-end, je gâchais des dizaines d'heures dans ma chambre, prétextant que je m'attelais à mes devoirs. En réalité, je me perdais sur Internet, essayant vainement de passer à autre chose. Mais chaque seconde me rapportait à ces mots qu'il m'avait crachés, à ce moment fatal où mon flegme habituel s'était tu. Je vivais chaque journée dans le noir complet, et j'avais le sentiment que seule sa présence parviendrait à me ramener.

À présent, quand j'explore ces souvenirs, je me rends compte qu'il s'agit de la période la plus consternante de ma courte vie.

Heureusement qu'il y a une fin à tout.


Un lundi matin de janvier.

Je me levai avec peine, et jetai un œil machinal au-dehors : des flocons. Je m'autorisai un sourire, charmé par cette atmosphère hivernale. Voir le paysage tapissé d'une couverture épaisse et immaculée me remémorait mon enfance, quand mon père m'y emmenait batifoler. À cette époque, je n'étais pas conscient des efforts colossaux qu'il me faudrait fournir plus tard pour me maintenir à flot.

Après avoir salué mécaniquement mes parents, je rejoignis la rue aux maisons en briques rouges, là où l'on croisait le vieux Pixis. Ce matin-là, je ne l'aperçus pas à sa fenêtre – ce qui ne m'a pas empêché d'y penser. Je me suis demandé si lui aussi avait un jour ressenti une brûlure pareille au creux de sa poitrine.

Il n'y avait personne à notre point de ralliement. J'attendis, mais ne vit jamais venir l'un de mes trois alter ego. Je me rappelai alors qu'ils habitaient à l'extérieur de la ville et que, vu le temps, leurs bus n'étaient sûrement pas passés. Un poil désespéré, je sus que j'allais devoir affronter le lycée et Livaï seul.

À mon arrivée, je vis quelques surveillants discuter entre eux, et constatai l'absence de bon nombre de mes camarades. Je soupirai, contemplai la vapeur émise par mon souffle, et me blottis dans mon manteau en laine. Je pénétrai dans l'un des bâtiments avec une envie grandissante de rentrer chez moi, fournissant comme excuse à ma mère que j'étais l'unique élève présent en Deuxième Année...

Ce qui était sûrement vrai, d'ailleurs.

Le couloir des Première, éternellement vide à cette heure, m'accueillit tel un vieil ami. Je m'installai à même le sol et tendis l'oreille au cas où un surveillant me surprendrait, tout en examinant le plafond abîmé. Combien d'heures avais-je passées à cet endroit depuis novembre, préférant la compagnie de la solitude à celle de mes semblables?

« Jaeger? »

La crainte, viscérale et déchaînée. Mon cœur qui lâche.

Qu'est-ce qu'il fout là, bordel?

« Eh, Jaeger? »

L'usure engendrée par mon deuil émotionnel absurde m'acheva.

Les sanglots me secouèrent par surprise, me donnant enfin la permission de me débarrasser de ce qui m'avait tant fait souffrir ces derniers temps. J'en tremblai, en proie à la cruauté de ma mémoire. Je fermai les yeux, me fondit dans le mur en placo dans mon dos, priai pour que ça s'arrête. Je voulais tout et rien à la fois.

Arrêter d'être tangible, devenir un mélange immatériel entre la terre et le ciel.

Une substance aussi pure et transparente que la bise glaciale de l'hiver.

« Pourquoi tu pleures, Eren? »

Les larmes tièdes coulaient encore quand le froid disparut doucement. Des bras forts me pressèrent contre un vêtement rêche, m'amadouèrent.

Il m'avait appelé par mon prénom...

« J'comprends pas! »

Je rugis, paumé, le palpitant en sang au bord des lèvres.

« Comment tu peux me cajoler comme ça? »

L'étreinte se raffermit, je cédai de plus en plus de terrain.

« Eren... »

« STOP! »

Je trouvai le courage de le repousser, en profitai pour me lever et le défier.

« Je me suis vraiment inquiété pour toi! »

« Personne te l'a demandé! »

« Mais pourquoi tes yeux sont si tristes, Livaï? Et pourquoi j'suis tombé amoureux d'un tel connard? »

« J'ai rien fait, putain! »

Un bruit de pas retentit, nous amenant à fuir sans attendre.

Nous n'avions pas terminé.

Dissimulés dans une salle de classe inoccupée, nous fîmes de notre mieux pour apaiser nos souffles erratiques. Livaï bloqua la porte avec une chaise, avant de me fixer intensément, sa pâleur sublimée par les reflets de la neige qui nous parvenaient au travers des vitres.

« Personne se préoccupe de moi. » lâcha-t-il finalement d'un air renfrogné. « J'connais pas mes géniteurs, ils ont jamais cherché à me retrouver. Mes parents adoptifs m'ont calé ici pour m'éloigner. Paraît que j'suis un enfant perturbé. »

Il s'avança vers la table sur laquelle je m'étais installé.

« J'm'appelle Livaï Ackerman. Quand j'ai su qu'une meuf du même nom était ici, j'ai pas hésité. J'ai accepté l'internat. »

J'eus peur de faire le lien.

« T'es le premier à t'être vraiment intéressé à moi, à c'que je ressens. »

Une étincelle fila dans ses prunelles, agitant l'encre brumeuse. Le visage à quelques centimètres du mien, il glissa une main précautionneuse derrière ma nuque, et ajouta :

« Jaeger, tu m'as complètement saccagé. »

Et il s'approcha, encore. Me demanda silencieusement s'il pouvait le faire.

J'acquiesçai, craignant de briser la tension salvatrice qui s'était tissée entre nous. Avais-je seulement le droit d'embrasser quelqu'un dont je ne connaissais presque rien?

Malgré moi, je me reculai un peu.

« Pourquoi? »

« Parce que t'es pas le seul à en avoir bavé ces dernières semaines. »

Les mots de trop.

Mes doutes se fracassèrent sur le carrelage tandis que je m'emparais du bas de la chemise de Livaï, l'attirant en un geste quasi désespéré. Je me fichais bien de mes connaissances inexistantes à son sujet : tout ce qui comptait, c'était le magnétisme inexplicable qui nous unissait. La sensation infiniment douce de ses lèvres sur les miennes.

Elles se rencontrèrent avec force, d'une façon si délicieuse que j'en gémis. Ses doigts accrochèrent mes mèches brunes, approfondissant notre baiser, me guidant. Il m'apprit à mêler ma respiration à la sienne, à savourer la chaleur de sa langue, à flirter avec sa peau légèrement découverte. Nos prénoms furent chuchotés d'innombrables fois, bannissant à jamais l'affreux souvenir de nos altercations. Le simple fait de l'entendre susurrer le mien déclenchait des frissons violents à la surface de mon épiderme sensible.

Si j'avais pu choisir l'instant de ma mort, j'aurais prié pour ce que soit celui-ci.

« Alors... » me relâcha-t-il finalement, aussi haletant que moi. « T'es amoureux, c'est ça? »

Si mes pommettes n'avaient pas déjà été écarlates, elles auraient certainement fait évoluer le sens du terme.

« Ouais. Ouais, je t'aime, Livaï. » avoué-je.

À quoi bon nier l'évidence?

« Laisse-moi t'apprendre par cœur, OK? »

Dès lors, je n'ai plus jamais éprouvé de difficultés au réveil.

Je mire le ciel en sortant de chez moi, inspire profondément, puis cours vers la rue de briques rouges. Je n'ai qu'une hâte : voir Livaï. Chaque matin, nous nous rejoignons au réfectoire, et il me parle de lui, répondant à ma demande. En échange, je lui rends la pareille et détaille mes goûts, mes envies, mes projets.

Je l'ai poussé à se confier à Mikasa, et l'ai accompagné dans ses révélations. Comme je m'y attendais, ils sont rapidement devenus proches au fil de leurs recherches familiales – ce qui m'a donné par la suite de multiples occasions de comparer la teinte de leurs iris, d'une obscurité inégalable.

Livaï, peu attentif aux cours théoriques, a redoublé sa Dernière Année. Pour ma part, j'ai fourni beaucoup d'efforts afin de clôturer ma Deuxième, soucieux de nous garantir un avenir serein au plus tôt. Nous nous sommes donc retrouvés dans la même promotion et, peu à peu, la majorité des élèves a appris pour notre relation.

Désormais, l'heure des examens finaux approche.

J'avoue que je me sens un peu perdu entre nos journées prosaïques au lycée et nos rendez-vous amoureux où ses baisers brûlants me font voir les étoiles. Mais ça me va.

Le voilà, mon mélange entre la terre et le ciel.


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