Chapitre 3

Pile à l'heure, le portail s'ouvre et les élèves de primaire déboulent en tout sens. 

"Nous ne laissons pas partir seuls les maternelles, j'invite donc les parents à se rendre au fond de la cour pour récupérer leurs enfants. 

Je suis le rythme, les plus petits sont dans un bâtiment flambant neuf un peu à part. Si j'ai bien compris, ils sont répartis en trois classes seulement, une pour chaque niveau. C'est une petite école. 

Les parents font la queue devant la salle, indique le nom de leur enfant à la maîtresse qui s'empresse d'appeler celui-ci. Est-ce comme ça chaque soir ? Mais bon, c'est rassurant, je suis maintenant sûr que Haly ne sera jamais livrée à elle-même du haut de ses trois ans et ne risque pas de partir avec un inconnu. 

Sûrement puisque c'est la rentrée, la maîtresse discute un peu avec chacun. Je laisse les parents passer devant moi, je ne suis pas pressé même si j'ai hâte de retrouver mon petit bout de chou et je pense que la maîtresse voudra me parler, elle est au courant normalement. 

Enfin, j'arrive à la porte. 

"Vous venez chercher qui ? 

- Haly MOPINT. 

- Oh moi qui croyais avoir affaire à un jeune papa, c'est un grand frère que nous avons là ! Haly, ton frère est là ! s'exclame en se penchant à l'intérieur de la salle. 

J'entend un petit cri de joie et je souris, les larmes ont l'air d'être passé. 

- Cela s'est bien passé ? 

- Oui très bien, elle a pleuré ce matin d'après Nathalie, qui gère la garderie mais je n'ai pour ma part eu aucune larmes. 

- Je suis rassuré, elle refusait que je parte ce matin. 

- Vous viendrez la chercher tous les soirs ? 

- Non, je suis lycéen, j'ai souvent cours jusqu'à dix-huit heures. Mes sœurs collégiennes viendront la chercher à la garderie vers dix-sept heures la plupart du temps. 

- Je vois et le matin, ce sera sept heures quarante cinq constamment ? Cela fait tôt pour une enfant. 

- Le mardi et le jeudi, je la déposerai à huit heures quarante pour le début de l'école mais les autres jours, elle devra aller à la garderie. 

Haly arrive enfin et me saute dans les bras, je l'attrape aussitôt et lui fait un gros bisous sur le front. 

- Je vois, vous êtes en tout cas très courageux de vous occuper seul de vos sœurs. 

- Je vous remercie. On y va princesse ? Tu me racontes tout ? 

- Oui !!"

Je souris devant son entrain et après avoir salué la maîtresse, nous prenons le chemin de la maison. Voilà aussi pourquoi je voulais absolument quitter plus tôt aujourd'hui, rassurer l'école, qu'il ne se fasse pas de soucis pour Haly et ne la traite pas différemment. 

Nous arrivons à l'appartement et je prépare le goûter tandis que la benjamine de la famille ne s'arrête pas de parler. 

"Et Théo il a dit que j'étais cholie ! 

- On dit jolie, Haly ! 

- C'est quoi chjolie ? 

Je ris devant sa tête pleine d'incompréhension. Elle parle très bien même si elle confond toujours les sons j, ch ou le r et le l. 

- Cela veut dire que tu es belle. 

- Il est gentil Théo alors ! 

- Mouais, mouais, moi je l'aime pas trop ce Théo. 

- Théo il est pas important tu sais, c'est toi mon amoureux.

Cette manie des enfants à vouloir être "amoureux" avec ses parents ou ses frères et sœurs m'étonnera toujours.

- C'est un honneur !"

Je finis de préparer le goûter, j'avais fait un gâteau hier soir mais il est un peu trop sec alors j'ai fait un coulis de chocolat pour le manger avec. Je sors du jus de pomme et des verres. Il est dix-sept heures, les filles ne devraient plus tarder. Je leur ai envoyé un message pour les prévenir que j'avais récupéré Haly. 

Je leur ai offert un téléphone juste avant la rentrée pour qu'elles puissent me contacter au moindre problème, ça me rassure. Et puis c'est plutôt pratique puisqu'elles se retrouvent des fois obligées d'aller chercher le pain ou acheter quelque chose qui manque. 

"On est là ! 

- Salut les filles ! 

Je suis assis sur le canapé et elles me sautent littéralement dessus, m'écrasant de leur poids. 

- Alors votre journée ? 

- Cela c'est bien passé, notre classe est plutôt gentilles. Et tout le monde a été sympa avec Matylde aussi. 

- Tu leur as dit quoi ? 

- Qu'elle était muette, je n'ai pas dit pourquoi. 

- Je vois. Tu as aimé aussi Mat' ?" 

Je me tourne vers ma soeur. Elle hoche la tête en souriant. Elle ne parle plus depuis le départ de ma mère, un traumatisme. 

Nous étions parti, mon père, moi et Lohann pour faire les courses. Matylde ne se sentait pas bien alors elle a préféré rester à la maison mais durant notre absence, notre mère a pété un câble. 

Elle lui a dit que c'était à cause d'elles, des jumelles, que tout allait si mal, que notre père l'avait obligé à les avoir et qu'elle ne les aimerait jamais, qu'elle ne pouvait pas les aimer. Ma soeur s'est défendu, elle a prétexté le contraire. Elle était un peu enrobée à cette époque et ma mère s'est servi de ce détail ridicule pour la briser. Il faut préciser que son accouchement a été fait par césarienne, ce qui est assez courant dès qu'il y a plus d'un bébé. 

Elle a dit que c'était sûrement à cause d'elle qu'elle avait tant souffert, qu'elle était trop grosse et qu'elle avait prit trop de place dans son ventre. Elle lui envoyé toutes sortes d'insultes avant d'essayer de lever la main sur elle mais nous sommes arrivés à ce moment-là et j'ai pris la claque pour elle. 

Depuis ce jour, ma soeur a perdu le don de la parole. Elle a aussi fait de l'anorexie. Ce sont toutes ses raisons qui ont convaincu les juges de ne pas nous confier de force à notre mère. 

Il est arrivé une ou deux fois qu'elle émette un merci à mon égard ou à celui de sa soeur jumelle. Elle a aussi parlé à mon père sur son lit de mort, juste quelques mots et nous ne saurons jamais lesquels. Mais malgré les séances chez le psychologue, elle ne retrouve pas la parole. 

Nous pensons qu'elle est juste mieux ainsi, dans ce petit monde. Sa soeur est là pour l'aider alors elle n'a pas besoin de sortir de sa bulle. Même si un jour elle devra bien affronter la réalité.

Puis aujourd'hui, nous pouvons communiquer par téléphone ou même par écrit. C'est ce qui me permet de discuter régulièrement avec elle malgré tout.

Nous dévorons le gâteau devant le dessin-animé préféré de Haly en se racontant mes journées. Les jumelles sont contentes que je me sois fait des amis, je crois qu'elles s'inquiètent un peu pour moi aussi. 

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