Chapitre 3 - Repères
Kakashi poussa un long soupir attristé. Je ne pouvais décemment pas le laisser dans une telle situation, perdu au milieu d'un endroit dont il ne connaissait rien. Voyant le soleil entamer sa descente, je jetai un bref coup d'œil sur ma montre, il était déjà vingt heures passées. Plusieurs heures s'étaient écoulées depuis que j'ai quitté Lucy, et je devais bien avouer que ces dernières avaient été particulièrement bien remplies. Cependant, plusieurs interrogations me venaient en tête. Est-ce que le passage de l'Hatake ici était une simple coïncidence, ou était-ce le résultat d'un shinobi peu scrupuleux ? Ni lui ni moi ne semblions en savoir plus pour le moment, et trouver la réponse à cette question sans le moindre indice semblait relever du miracle. Et surtout, que devais-je faire ? Il commençait à se faire tard, et le Jonin n'avait nulle part où aller. Bien sûr, l'hypothèse de l'emmener dans un hôtel me traversa l'esprit. Mais était-ce là une bonne idée ? À la vue de sa réaction face à une sonnerie de téléphone, ne serait-ce pas un risque de le laisser livrer à lui-même ?
Mon estomac me tira de ma torpeur en émettant un gargouillement parfaitement audible, qui eut le mérite de faire pouffer Kakashi à l'instar de mes joues rougissantes et mes yeux s'abaissant soudainement sur mes pieds.
- Il semblerait que je vous ai assez retenue, s'excusa l'argenté. Vous devriez y aller, je vais me débrouiller.
Les mots devancèrent mes pensées.
- Non.
Je vis ses sourcils se froncer d'incompréhension.
- Non ? Répéta-t-il simplement, sous l'effet de l'incrédulité.
- Je refuse de ne pas vous porter assistance. Vous êtes dans une situation des plus atypiques, et je peux certainement vous aider.
L'homme ne répondit pas, se contentant de me dévisager. Néanmoins, j'étais certaine de ne pas avoir rêvé concernant la lueur de soulagement qui parcourut ses iris. Kakashi était juste bien trop poli pour oser me demander de l'aide, quand bien même il était entièrement désemparé. Je me balançai nerveusement d'un pied à l'autre, marquant un bref silence avant de poursuivre ma proposition.
- Écoutez, il se fait tard et vous n'avez nulle part où aller. Venez donc chez moi, je vous offrirai le gîte et le couvert. Au moins le temps que vous trouviez vous-même autre chose si cela vous gêne trop.
- Vous êtes bien gentille, mais cela ne me gêne pas de passer la nuit dehors. Cela ne serait pas la première fois dans mon métier, ricana-t-il.
- Certes, mais les dangers de ce monde ne sont pas les mêmes que par chez vous.
Je vis Kakashi considérer mon idée avant de se renfrogner à nouveau.
- Je ne peux accepter. Je n'ai même pas de quoi vous rembourser, m'expliqua-t-il.
- Oh, mais je n'attends rien en retour ! Réagis-je aussitôt en agitant les mains devant moi.
Les yeux hétérochromes me sondèrent un instant, semblant peser le pour et le contre. Après plusieurs secondes qui semblèrent durer une éternité, l'argenté finit par soupirer en haussant les épaules.
- Très bien, si vous insistez.
Malgré l'ironie de la situation que l'on vivait, je ne pus empêcher un large sourire fendre mon visage à l'entente de sa réponse. J'avais beau voir et entendre ce personnage en face de moi, je ne revenais toujours pas de ce que j'étais en train de vivre.
- Suivez-moi, fis-je avant de me retourner.
Nous nous mîmes doucement en route. Kakashi marchait légèrement en retrait, les mains dans les poches et les yeux fixant le sol, perdu dans ses pensées. Ni lui ni moi ne prononcèrent le moindre mot, et pourtant, je me surpris à trouver cela naturel, et je pourrais presque dire apaisant. Heureusement pour nous, les quelques rares passants que nous croisions en chemin étaient bien trop occupés pour remarquer l'allure atypique de l'homme qui m'accompagnait, entre ses cheveux presque blancs et son étrange tenue. Il était tellement discret que je ne pouvais m'empêcher de jeter de temps à autre des coups d'œil derrière moi pour m'assurer de sa présence. Je trouvais cela totalement absurde. Après tout, ce n'était pas comme s'il allait disparaître subitement. Mais je ne pouvais pas m'en empêcher.
Ma maison d'enfance apparut devant nous, quelques kilomètres plus loin. Elle n'était pas très grande, et ne payait pas forcément de mine, mais malgré tout, j'y étais profondément attachée. Cette bâtisse avait une histoire, et une floppée de souvenirs, parfois photographiés, y imprégnaient les murs. Des choses insignifiantes pour la plupart, comme mes premiers pas, mes premiers mots, ma première bougie, mon premier vélo à Noël que j'attendais tant. Je me souvenais encore quand Papa s'était fait gronder par Maman en m'emmenant sur une pente dans notre parc favori. Tellement raide que j'avais fini par atterrir sur un large tronc, qui me fit atterrir dans les buissons d'à côté. Par chance, je n'avais eu que quelques contusions, mais mon père avait eu droit à un sacré savon. Cette maison était comme un cocon où je venais me réfugier tous les jours, où je pouvais laisser vagabonder mon esprit à sa guise sans que personne ne puisse me juger. Où je pouvais laisser tomber le masque que je m'efforçais de poser pour paraître bien aux yeux de la société. Je m'y sentais bien, et je redoutais malgré moi le jour où je devrais quitter tous ces souvenirs pour commencer une nouvelle vie.
Sans m'en rendre compte, je compris que je m'étais arrêtée pour fixer un certain moment ma demeure. J'entendis une voix grave résonner, mais bien trop lointaine pour que je puisse en comprendre les mots. Ce fut un léger tapotement sur mon épaule qui eut le mérite de me sortir de ma torpeur, me faisant légèrement sursauter pour me tourner vers celui qui en était la cause. Je pouvais aisément lire de l'amusement dans le regard de mon invité, mais il ne releva pas mon absence.
- Nous sommes arrivés ? Demanda-t-il simplement.
- Oh. Heu. Oui. Excusez-moi.
- Il n'y a pas de mal.
Encore sous l'effet de la confusion, je m'avançais devant le palier et sorti fastidieusement les clés de mon sac, perdues entre toutes mes affaires, pour déverrouiller la porte. Je me décalai sur le côté pour faire signe au Jonin d'y entrer à l'aide de ma main. Ce dernier me regarda quelques instants avant de passer le seuil. J'entrai rapidement derrière lui pour allumer l'interrupteur histoire de rendre les lieux visibles aux yeux de mon hôte. Il ne faisait pas entièrement nuit, mais j'avais pour habitude de laisser les volets juste entrouverts pour ne pas souffrir de la chaleur le soir en rentrant. La légère fraîcheur ressentie à l'intérieur des murs était bien agréable après une journée chaude et ensoleillée.
- Je vous en prie, faites comme chez vous, dis-je. Voulez-vous boire quelque chose ?
- Volontiers. De l'eau suffira.
Laissant mon inviter s'installer sur le grand canapé en cuir, je filai à la cuisine pour attraper la bouteille d'eau dans le frigo. Je pris deux verres que je remplis aux trois quarts, remis la gourde au frais puis revint vers Kakashi. Il n'avait pas bougé d'un iota, et releva sa tête lorsqu'il m'aperçut avec les deux contenants. J'en posai l'un d'eux en face de lui et m'assis en face de ce personnage que je pensais encore fictif quelques heures auparavant.
Ne sachant visiblement ni l'un ni l'autre quoi dire pour combler le silence, nous sirotâmes notre boisson sans mot dire. Comme si cela était le plus naturel du monde, Kakashi buvait son verre à travers son masque. Il semblait en avoir l'habitude, mais je ne pouvais m'empêcher quel point cela devait être désagréable de s'hydrater de la sorte, en présence d'autres personnes. Assoiffée, j'engloutis le mien d'une traite, et quand j'eu fini, je me levai maladroitement, bredouillant quelques mots :
- Heu... Je vais aller préparer quelque chose à manger. Est-ce que vous souhaitez vous doucher ? Je peux vous prêter des affaires de mon père. Vous faites à peu près la même taille, après tout.
Je vis mon invité tressaillir et se raidir aussitôt. Surprise par sa réaction, je fronçai un sourcil.
- Parce-que vous vivez chez vos parents ? S'insurgea-t-il brusquement.
- Heu... Eh bien... Oui.
Je ne voyais pas le mal, pourquoi réagissait-il de la sorte ?
- Je ne peux pas rester ici. Je ne veux pas que vous ayez des soucis à cause de moi. Qu'allez vous leur dire quand ils me verront ? On se connaît à peine et je...
Je l'interrompis dans son élan de se relever du canapé d'une main, l'intimant d'y rester.
- Ne vous en faites pas pour ça, essayai-je de le calmer. Mes parents sont partis en voyage d'affaire pour plusieurs semaines. Il n'y aura que nous deux dans cette maison. Je vous en fait la promesse.
L'homme ne répondit rien, plantant ses deux orbes bicolores dans les miennes.
- Faites-moi confiance, ajoutai-je. Je veux simplement vous aider, et je n'ai aucune raison de vous mentir.
- Vous avez raison finit-il par concéder, en détendant un peu ses muscles sur le sofa. Et puis, je vous avoue qu'une bonne douche ne me ferait pas de mal.
Je poussai malgré moi un soupir de soulagement. J'avais réussi sans trop de peine à désamorcer la situation. Avec un autre monde autour de lui qui ne lui était en rien familier, il était normal que Kakashi soit plus susceptible de céder à la panique, et je devais me montrer prudente vis-à-vis de ce que je lui annonçais.
- Bien, suivez-moi.
C'est ainsi que je conduisis l'Hatake à travers les couloirs pour l'emmener à la salle de bain. Sur les quelques mètres où il me suivait, je le voyais regarder avec curiosité ce qui l'entourait, et son œil s'attardait particulièrement sur les images figés accrochées au mur. Les clichés montraient principalement des images de moi enfant.
- Je m'absente le temps de vous récupérer des vêtements pour la nuit. Ne bougez pas.
Je me mis une gifle mentale pour la dernière phrase qui m'avez échappé. Bien évidemment qu'il n'allait pas bouger, à quoi pensai-je en disant cela ? Secouant la tête pour essayer d'oublier ma maladresse, je me dirigeai vers la chambre de mes parents. Je trouvai facilement un pantalon de survêtement couleur souris, un t-shirt ample blanc ainsi qu'un sous-vêtement de rechange. Satisfaite de ma trouvaille, je repris le chemin de la salle d'eau. Je franchis la porte en oubliant de m'annoncer, et je sentis aussitôt le rouge me monter aux joues.
Kakashi, torse nu, était en train de se passer un coup d'eau fraîche sur son visage. Les mots me manquèrent, et je ne pouvais empêcher mes yeux de parcourir sans vergogne ce buste aux muscles saillants et couvert de cicatrices de diverses tailles et couleurs. La source de mon trouble remarqua rapidement ma présence et je devinai un sourire taquin se dessiner sous son masque alors que ses yeux vinrent à ma rencontre.
- Je... Hm... Tenez. Je vous laisse, bégayai-je, tant bien que mal en détournant le regard.
Je tendis avec empressement la tenue et je parti aussitôt, sans demander mon reste. Encore troublée, je retournai au salon pour m'affaler sur le canapé puis allumer la télévision. Je zappai rapidement, pour trouver n'importe quoi dans le but d'essayer de calmer le rouge sur mes joues et la multitude de pensées qui m'envahissaient. Bon sang, je ne pensais pas perdre mes moyens aussi facilement avec Kakashi. Et pourtant.
Je réussi à me calmer en fermant les yeux et en tantant de prendre de profondes inspirations. Allez (t/p), ça va aller, ce n'était qu'une petite honte de rien du tout. Ton personnage préféré a juste remarqué que tu t'étais allègrement rincé l'œil sur lui il y a quelques instants, sinon tout va bien. Poussant un profond soupir d'exaspération, je me levai en direction de la cuisine pour commencer à préparer le repas. Par habitude, j'ouvris le frigo et détaillai le contenu, essayant de réfléchir à ce que je pourrai assembler pour faire un plat pas trop compliqué en vue de mes talents de cuisinière.
***
La soirée se passa pour le moins normalement. Je veux dire, hormis le fait que j'avais passé tout mon temps à éviter soigneusement le regard de mon invité. Et que mes pensées distraites auront eu le mérite d'obtenir un riz beaucoup trop cuit et des boulettes de viande presque crues. Kakashi, certainement bien trop poli, ne releva aucun de ces défauts pourtant bien visibles gustativement parlant. Nous avions mangé chacun de notre côté, afin de lui laisser l'intimité nécessaire pour que l'argenté puisse se ravitailler sans que je ne vois son précieux visage, bien que j'en avais une très nette idée. Mais ça, je ne lui avais pas précisé, histoire de ne pas mettre l'argenté dans l'embarras. De ce fait, il bénéficiait du confort du canapé du salon pendant que je m'étais installée sur la petite table de ma cuisine. Et, même s'il ne l'avait pas suggéré le moindre du monde, cela permettait au Jonin de suivre assidument la série à l'eau de rose sur laquelle nous étions tombés quand nous cherchions un programme à regarder, peu de temps avant de nous mettre à table. Il semblait littéralement captivé par un amour impossible entre un agent secret et une étudiante qui essayaient tant bien que mal de cacher leurs sentiments. Cela me fit rire intérieurement de voir que cela était au goût du ninja. Puis en y réfléchissant, je me disais que cela ne devait pas être trop loin des romans du fameux Jiraya. Peut-être quelques détails croustillants en moins, ceci dit.
Je picorai dans mon assiette en faisant défiler des vidéos courtes et amusantes sur mon téléphone, de manière totalement aléatoire. Mon cœur avait un loupé à chaque fois que je tombais sur l'univers de Naruto, et en particulier quand j'apercevais les animations d'un homme situé à seulement quelques mètres de moi. Un rêve devenu réalité. Même si je savais bien que comme tout rêve, il n'était qu'éphémère. Aussi éphémère qu'un papillon de nuit, et aussi fragile que ses ailes. Piètre assimilation, je le reconnais. Après tout, ce n'était pas pour rien que j'avais privilégié des études scientifiques à littéraires.
Une fois mon repas terminé, je demandais à haute voix si mon invité souhaitait une sucrerie pour clôturer le repas. Cependant, je n'obtenu aucune réponse. Tout était étrangement calme, hormis le bruit de fond de la télévision encore allumée. Intriguée, je posais mon assiette et mes baguettes dans l'évier avant de me rendre au salon à petit pas. J'aperçu rapidement la silhouette de l'argenté étendue de tout son long sur le divan. Prudemment, je m'approchai de l'homme pour essayer de comprendre la raison de son silence. Et j'en compris rapidement la cause.
Kakashi s'était tout simplement assoupi.
Son visage était apaisé et un léger ronflement émanait de derrière le masque. Sa main était posée sous l'une de ses joues pour faire un oreiller en plus de l'accoudoir sur lequel sa tête reposait. Ses cheveux argentés éparpillés et libérés de leur habituel bandeau reflétaient la lumière vive de l'écran. Ayant peur que l'animation ambiante ne le réveille, je pris avec précaution la télécommande posée sur la table basse et éteignit le poste. L'Hatake semblait bien plongé dans son sommeil, à tel point que je n'osai le réveiller pour le guider vers la chambre d'ami. Réfléchissant quelques instants à une solution, mes jambes s'éloignèrent quelques instants le temps d'aller attraper une couverture rangée dans un placard à côté et avec toute la douceur possible, je la couvris sur l'homme masqué. Il n'était pas bien tard, mais la journée qu'il venait de vivre était pour le moins éprouvante.
Demain serait un nouveau jour. Qui sait ce qu'il pourrait nous réserver ?
***
Hey ! 👋🏻
Me voici de retour sur cette histoire après une "pitite" absence. J'avoue avoir un peu galéré à écrire ce chapitre, c'est pas un défi facile que je me suis lancé là ! Mais j'espère que cela vous plaira malgré tout. ☺️
N'hésitez pas à me faire part de vos retours ! 🤗
A bientôt !
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