Chapitre VI - Réveil mouvementé

Un mal de crâne la saisit immédiatement après son premier essai pour retourner à la réalité. Elle avait l'impression qu'un chantier entier avait lieu dans son crâne. Le marteau-piqueur allant plein gaz. Les ouvriers détruisant tout ce qu'ils pouvaient à la masse. Sa gorge était affreusement sèche. Mélody se mit à tousser, ce qui fit résonner d'autant plus sa pauvre tête. Elle se tourna sur le côté, en quête d'air.

Quelque chose d'humide et froid tomba de son front. Quelqu'un s'en inquiéta, mais elle était trop dans les vapes pour s'en rendre compte. On essaya de l'empêcher de bouger. Elle se débattit. Mélody voulut hurler, mais son cri resta coincé dans sa gorge asséchée. Elle était couchée, c'était sa seule certitude.

— Arrête ! la supplia une personne. Tu vas te blesser ! argua-t-elle.

L'inquiétude transparaissait dans sa voix tremblante. On empêcha Mélody de bouger. Il y avait plusieurs personnes qui la retenaient. L'adolescente finit par ouvrir les yeux, prise de panique. Elle continua de se débattre. Sa tête continuait de la faire souffrir. Ses oreilles bourdonnaient. Sa gorge semblait vouloir ressembler au désert du Sahara. Une lumière trop forte lui brûla les rétines.

— Mélody, calme-toi, tout va bien ! continua cette même personne. Tout va bien, tu es à l'infirmerie de l'Académie.

La voix était apaisante. Mélody arrêta brusquement de se débattre. Elle n'essaya plus de forcer la barrière solide de ses paupières. Elle se laissa guider par cette voix douce à ses oreilles.

— Tout va bien, continua-t-elle. Tu as été en hypothermie, expliqua la personne en la lâchant petit à petit. Celicia a gelé toute la salle de classe pour se débarrasser de la poussière de fée et tu n'as pas résisté au froid...

Mélody sentit une main se glisser dans la sienne et entremêler leurs doigts.

— Tout va bien, reprit l'inconnue.

Sa voix tremblait. Elle avait peur. Elle ne cessait de répéter que tout allait bien. Probablement pour se rassurer elle autant que Mélody.

— Tu dois te reposer encore un peu. Tu viens de frôler la mort.

Mélody sentit la pression au niveau de sa main accroître. La personne qui lui parlait lui paraissait si lointaine. Elle n'arrivait pas à l'identifier. Pourtant, son inquiétude était si forte. Sa gorge la grattait. Ses paupières pesaient deux tonnes. Impossible pour un humain de les soulever !

Elle ne réussit à accomplir cet exploit que plusieurs heures plus tard. La lumière l'éblouit à nouveau, mais cette fois, elle y résista. Mélody se situait dans une grande pièce aux murs immaculés. Elle se trouvait dans un lit d'une qualité discutable, recouverte par une couverture toute douce. Sa tête lui faisait un mal de chien, mais ce n'était rien comparé à ce qu'elle avait ressenti précédemment. L'endroit ressemblait fortement à une chambre d'hôpital humain ; il ne manquait plus que toutes ces machines effrayantes dont les médecins se servaient pour aider leurs patients. Du mouvement attira alors le regard de Mélody. Elle s'assit non sans difficulté, tourna la tête et aperçut Daenerys, dos à elle. C'était probablement grâce à elle qu'elle se sentait mieux.

— Tu nous as fait une de ces peurs ! souffla Daenerys en se tournant pour lui faire face.

Mélody remarqua que, derrière elle, avachie dans un fauteuil en cuir, se tenait Aelia. Ses paupières étaient closes et sa respiration lente. Une petite couverture recouvrait ses frêles épaules. Elle paraissait étrangement inoffensive de cette manière, contrastant fort avec son habituelle animosité. Elle ressemblait presque à un ange. Son teint semblait encore plus pâle qu'à l'habitude. Voyant vers où le regard de Mélody était tourné, Daenerys sourit.

— Lia est ici depuis que tu es arrivée, murmura-t-elle. Elle vient seulement de s'assoupir.

Mélody ne put s'empêcher de se demander si cela avait un rapport avec ces sentiments dont Ali avait parlé dans l'une de ses précédentes visions. Aelia ressentait quelque chose pour elle. Ce ne pouvait pas être vrai. Et même dans le cas improbable où l'aveugle l'aimerait réellement, ce n'étaient pas réciproque. Aelia se montrait insupportable et insolente ! Elle mettait toujours les nerfs de Mélody en pelote.

Daenerys se rapprocha. Elle vint s'asseoir sur le bord du lit de son élève. Son visage n'exprimait plus cette froideur que Mélody avait pu observer précédemment. Elles s'observèrent l'une et l'autre pendant un long moment, sans un mot. L'adolescente se demanda si Daenerys voyait Sera, lorsqu'elle la regardait. Apparemment, elles se ressemblaient. Un silence régnait dans la pièce. Il n'était pas oppressant, ou froid, mais calme et nostalgique. Après quelques instants, l'amie de la reine bougea. Elle porta sa main au front de Mélody, sûrement pour vérifier sa température, ou quelque chose du genre.

La princesse sentit alors un mal de tête immense lui vriller le cerveau. Elle en eut les larmes aux yeux. Daenerys dut remarquer que quelque chose n'allait pas. Elle retira sa main, inquiète. Mélody eut comme un pressentiment. Elle devait garder un contact physique avec sa professeure. Elle agrippa son poignet, tentant de ne pas sombrer dans les ténèbres qui l'appelaient.

Soudain, la douleur partit. Mélody se trouvait toujours dans la chambre blanche, avec Daenerys et Aelia, mais une image d'horreur se présenta à elles. C'était comme si la pièce dans laquelle se trouvait Mélody se prolongeait en une grande chambre très sombre. Il y avait quelqu'un dans un grand lit, à quelques mètres d'elle. Mélody reconnut immédiatement sa tante. Regina tremblait comme une feuille. Des larmes baignaient ses yeux clos, ainsi que son visage cadavérique. Elle était pliée en deux. Ses bras, par-dessus sa couette, serraient son ventre, comme si cela l'aidait à apaiser la douleur. Du sang maculait ses mains et ses draps. Tout était rouge. Elle semblait souffrir le martyr. Ses lèvres remuaient très légèrement, aucun son n'arrivait à sortir, mais Mélody sut qui elle appelait.

Daenerys.

Mélody sentit des larmes dévaler ses joues. Elle regardait la scène, impuissante. Elle n'osait pas tourner la tête vers Daenerys, effrayée. Elle priait de tout coeur qu'il s'agisse du présent ou du futur pour que sa tante puisse encore être sauvée. Regina était en danger ! Il lui fallait de l'aide, au plus vite !

Une personne entra dans la pièce. Elle était vêtue d'une longue cape noire, similaire en tout point à celle que Talia portait, l'autre jour. La silhouette encapuchonnée s'approcha de la reine. Terrifiée à l'idée que l'on achève sa tante, Mélody voulut hurler, mais son état de choc l'en empêchait. L'inconnu.e tourna la tête dans sa direction, sans pour autant dévoiler son visage.

Aide-la, supplia-t-elle d'une voix haut perchée. Mélody, aide-la !

Aussi vite qu'elle était venue, la vision partit. Mélody regardait le vide, horrifiée. Elle ne savait comment réagir, tétanisée. Elle osa finalement lancer un regard à Daenerys. Son visage rayé par les larmes était d'une pâleur inquiétante. Sans un mot, sans explication, elle partit. Avec un peu de chance, elle arriverait à temps.

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