Chapitre III - Premier jour
Mélody avançait lentement dans les couloirs de l'Académie, lançant de temps à autre des regards à la carte de l'académie qu'Aelia lui avait donnée la veille au soir. La journée s'annonçait belle et ensoleillée. Étonnamment, au vu des événements de la veille, Mélody avait bien dormi. Aucune vision, ni cauchemars n'étaient venus perturber son sommeil. Seuls quelques doux rêves l'avaient fait voyager dans les bras de Noah. Son amie lui manquait. Peut-être même encore plus que sa famille.
Un gardien était passé par sa chambre vers dix heures du matin, pour la réveiller. Mélody avait pris son temps pour se préparer, peu pressée. Elle avait enfilé pour la première fois son nouvel uniforme, avec un mélange de joie et de désapprobation. Comme beaucoup d'enfants de son âge, elle avait un jour rêvé d'avoir un bel uniforme, comme les élèves américains. Néanmoins, il n'était pas des plus faciles à mettre. Bien sûr, elle l'avait déjà vu et en avait essayé un lors de sa petite sortie à Oblivion avec Ariana, mais celui-ci lui paraissait plus étroit.
Après avoir mangé un bon petit déjeuner, Mélody était descendue par l'ascenseur. Aelia les avait fait monter plus d'une dizaine d'étages la veille, alors qu'il y avait un ascenseur magique !
La garce ! jura mentalement Mélody en y repensant.
Cette fille avait le don de l'horripiler ! Mélody savait maintenant qu'elle était une alliée, mais ça ne la rendait pas plus aimable pour la cause. Aelia se montrait toujours sarcastique, voire même foncièrement méchante juste pour le plaisir d'ennuyer son monde. En somme, Mélody se trouvait assez heureuse d'être à l'Académie et de ne plus l'avoir collée aux basques tout le temps – même s'il était vrai qu'Aelia ne la suivait pas toujours partout, à Oblivion.
Mélody lança un nouveau coup d'œil à la carte de l'Académie. Elle expira bruyamment, désespérée. Cela faisait bientôt trois fois qu'elle passait devant cette statuette de dragon, mais jamais elle n'arrivait à destination. Pourtant, elle suivait exactement le chemin indiqué ! Daenerys risquait de ne pas aimer qu'elle arrive en retard à son premier cours. Les couloirs étaient déserts. Mélody ne comprenait pas. D'autres étudiants devaient bien emprunter ces couloirs également ! Elle ne devrait pas être seule.
Elle avait comme l'impression de se trouver en pleine vision. Afin de vérifier, Mélody s'approcha d'un mur et essaya de le traverser – chose qui lui était possible durant ses absences, bien que la sensation était des plus désagréables. Elle se heurta à de la pierre froide.
Mélody observa attentivement les alentours, à la recherche du moindre indice qui pourrait lui venir en aide. Sur le sol, un parquet en bois craquait à chacun de ses pas. Les murs de pierres grisâtres s'élevaient très haut, se rejoignant en une voûte ornée de peintures. Quelques cadres de personnes à l'air bien trop sérieux pendaient ci et là, pour décorer les sombres couloirs de l'école. Aucun bruit ne lui parvenait. Ce n'était pas normal. Mélody se dirigea vers la première porte qu'elle trouva et frappa quelques coups. Après une longue absence de réponse, elle osa pousser la porte et tomba sur une salle de classe vide.
Mélody commençait à paniquer. Son esprit plutôt rationnel expliqua ces phénomènes étranges par le fait qu'il ne s'agissait que d'un rêve. Mais, dans ce cas, comment se faisait-il qu'elle se soit levée, ait petit-déjeuné... Elle ne se sentait pas à l'aise. Elle avait un très mauvais pressentiment. Quelque chose de dangereux planait au-dessus d'elle.
Soudain, un brouhaha impossible lui vrilla les tympans. Mélody se trouva face à un couloir rempli d'élèves en tout genre. Presque tous ressemblaient à des humains. Certains possédaient des ailes, des cornes, des écailles ou des yeux reptiliens, mais ils restaient « normaux ». D'autres n'avaient plus rien de bipèdes dotés de deux bras, deux jambes, une tête, des mains, des pieds... Mélody ne savait trop comment les décrire. C'était comme s'ils étaient à moitié animaux !
— C'est bon, circulez, il n'y a rien à voir ! s'exaspéra Daenerys en dispersant les quelques élèves qui s'étaient agglutinés autour de Mélody.
L'adolescente remarqua alors qu'elle était assise sur le sol. La statuette de dragon avait totalement disparu. Sa nouvelle tutrice se tenait debout, à quelques mètres d'elle et la toisait avec dédain. Mélody crut entendre quelque chose du genre « Vraiment bonne à rien » avant d'observer Daenerys s'en aller. Il lui fallut encore une minute avant de se rendre compte qu'il fallait qu'elle la suive. Elle se mit à trottiner derrière Daenerys, cherchant une explication logique. Que venait-il de se passer ? Comme souvent ces derniers temps, elle ne comprenait pas. À force, Mélody avait presque l'impression d'être simple d'esprit. Depuis sa rencontre avec Noah, les événements lui échappaient. Ce monde inconnu la tyrannisait et la terrifiait à la fois. On ne cessait de l'emmener ci et là pour sa protection. Mélody en avait marre de courir.
— Drakonis mythis, déclara Daenerys, tout en continuant à avancer d'un pas rapide. Aussi connu sous le nom « l'illusion du dragon ». C'est un tour que les fées aiment jouer aux nouveaux. Ça leur permet de vous évaluer et de vous ridiculiser.
Mélody se stoppa net. C'était donc cela ! La statue de dragon, c'était ça ! C'était pour ça qu'une fois sortie de l'illusion, elle ne voyait plus cette fichue statue. Encore une fois, elle s'était montrée idiote. Mélody se fustigea mentalement, en colère contre elle-même. Ce n'est qu'après une bonne minute que Daenerys intervint dans son sermon silencieux avec ses propres reproches.
— Si je suis venue vous chercher à l'entrée de l'Académie, ce n'est pas pour que vous restiez plantée au milieu du couloir, votre majesté ! cracha la professeure.
Puis, sans un mot de plus, Daenerys tourna les talons et partit. Mélody se remit à trottiner pour pouvoir la suivre. Ils passèrent devant plusieurs classes. Mélody fut étonnée de ne voir que deux à trois élèves dans chacune de celles-ci, accompagnés uniquement par un.e professeur.e. Le bruit régulier que produisaient les talons hauts de Daenerys en claquant contre le sol stressait Mélody. Elle avait l'impression d'être constamment en retard, et détestait cela. Son souffle était saccadé, sa mâchoire serrée. Soudain, Daenerys s'arrêta. Mélody ne sut s'arrêter dans son élan et lui fonça dedans. Elle retomba sur son derrière. Encore un coup pour son fessier. Un jour, elle finirait par se casser quelque chose ! Daenerys se retourna vers elle, l'air furieux. Mélody n'y fit attention qu'un court moment, étonnée par autre chose. En tombant, elle avait dû accrocher le chignon de Daenerys, car ses cheveux étaient détachés. Ils étaient bien plus longs que l'adolescente ne l'aurait imaginé. Sa très longue chevelure dans de jolis ton vert cascadaient le long de ses épaules et jusqu'au bas de ses fesses, lui donnant un air moins strict et plus doux.
— Vous pourriez au moins faire un minimum attention à où vous allez ! S'insurgea Daenerys, avant de se rendre compte que ses cheveux étaient détachés.
En quelques mouvements, elle les replaça en un chignon parfait. Elle se retourna vers la porte qui leur faisait face et l'ouvrit d'un coup sec. Mélody se releva tant bien que mal, n'osant pas dire un mot. Elle suivit sa professeure dans ce qui devait être sa salle de classe, le regard tourné vers le sol. Elle ne remarqua même pas le jeune homme sur sa droite. Elle fit un bond d'un mètre, lorsque la porte de la pièce se claqua. Mélody lança des regards paniqués autour d'elle, sur le qui-vive. Rien d'anormal à signaler, mis à part un jeune homme inconnu à côté de Daenerys.
Le garçon ressemblait un peu aux bad boys des romances classiques. Un air mystérieux, accompagné de lunettes aux verres teintés alors qu'il se trouvait dans une pièce à la luminosité discutable. Des courts cheveux d'un poivre et sel argentés, soigneusement ébouriffés. Des traits fins. Une mâchoire carrée. Un nez droit. Des lèvres pleines d'un rose pâle. Un teint parfait. Il portait une chemise blanche qui dessinait parfaitement ses muscles et un pantalon noir en toile. Il semblait avoir son âge – physiquement, tout du moins.
— La ressemblance avec Sera est... frappante ! déclara le jeune homme avec un accent qui sonnait anglais. Et pas uniquement physique. Elle aussi me trouvait fort à son goût, au début, ajouta-t-il avec un rictus enjôleur.
Mélody sentit ses joues chauffer et devina qu'elle devait avoir viré au cramoisi. Si elle avait pu disparaître, elle l'aurait fait depuis longtemps.
— Monsieur Rhan, les règles de magie s'appliquent également à vous ! gronda Daenerys.
— Ce n'est pas juste ! Si j'avais été un télépathe, ça aurait été justifié, car elle pensait à moi, râla-t-il.
— Mais vous n'en êtes pas un.
Le jeune homme croisa les bras et lui tira la langue, fâché. Mélody se fit la réflexion avec plein d'ironie qu'il était très mature, pour faire une chose pareille. Daenerys lui lança un regard noir, mais ledit Rhan n'en fit rien. Il ne paraissait nullement effrayé.
— Miss Basilias, je vous présente William Rhan. Tous vos cours sont groupés. Il sera votre guide pour les quelques semaines à venir, affirma Daenerys.
William sembla tomber des nues. Il écarquilla les yeux, surpris. Ses iris fixèrent tour à tour Daenerys puis Mélody. Il parut approuver ce nouveau rôle qui lui avait été attribué à son insu. Il n'avait – malheureusement pour lui – pas le choix, de toute façon.
— Vous ferez connaissance tout à l'heure, pendant la pause de mesiméri. Quant à moi, je serai votre professeur de magie, de langue et d'histoire. Vous m'appellerez Dame Stotcheia, et uniquement ainsi. Clair ? vérifia Daenerys en posant son regard perçant sur Mélody.
Ne sachant trop comment réagir, l'adolescente acquiesça. Les cours s'annonçaient amusants !
— Par quoi on commence ? la questionna William.
— Peu importe, je vous garde jusqu'à mesiméri de toute façon, répondit Daenerys en se tournant vers le jeune homme. Que préférez-vous ?
Mélody ne savait que répondre. Les cours de magie avec Daenerys ne lui seraient pas d'une grande utilité. Regina s'occupait déjà d'Oramata. À moins qu'elle ait d'autres pouvoirs ! Ce serait incroyable ! Peut-être développerait-elle une magie capable de détruire Seth... Malgré cette perspective alléchante, l'adolescente était très intéressée par le cours de langue et par celui d'histoire. Elle aimait découvrir de nouvelles langues, leur sonorité, leurs origines, et cætera. Tandis qu'en apprendre plus sur ce monde ne pouvait que se montrer bénéfique.
— Magie ! déclara William, sans prendre la peine de la concerter.
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