Croqueuse de foule:
La cliente était une grosse dame.
Joufflue comme seul peuvent l'être les riches et aussi hautaine qu'un banquier.
Le genre à glousser au salon de thé en exhibant la petite aquarelle qu'elle venait d'acheter à Alice pour trois fois rien avant de minauder sur un ton condescendant qu'il fallait aider ces gens là.
Ces gens là.
La jeune femme ne savait pas vraiment quand elle était devenue quelqu'un de ce genre. De ceux assis sur dans le caniveau à qui on ne prête pas un regard.
Elle était étudiante en art.
Elle aurait aussi bien pu faire du droit ou de l'histoire, cela n'aurait pas changé grand-chose, sa filière n'avait rien à voir avec la vie qu'elle menait sur le trottoir. Son proprio, avec ses grands airs et ses chemises hors de prix, ce connard de faux jetons, ouais il s'en foutait bien lui des études. Il aimait juste s'entourer de petites nouvelles, fraîchement diplômée et débarquant en ville, qui aurait tout donné pour quelques mètres carrés où se loger.
Alice n'avait pas voulu tout donner.
Elle c'était fait virer dans l'heure.
Et son père lui avait expliqué, très gentiment, avec son tact et ses grands mots, qu'elle ne pouvait pas revenir à la maison, pas dans sa condition.
Alors voilà.
Elle vendait des dessins aux grosses dames riches qui empestaient le parfum et la regardait avec condescendance. C'était pas si mal. Un ami à elle avait décidé de faire pute, c'était un choix comme un autre, mais elle ne se sentait pas de le suivre, et encore moins de bosser comme agent d'entretien dans un hôtel comme Lisa, qui racontait toujours les mains baladeuses du patron et des clients.
La vie était dure.
Surtout maintenant qu'il faisait froid.
Mais parfois.
Le temps s'arrêtait.
Figeant tout le quartier.
Les grosses dames et les gros monsieur.
Tout les riches, tout ceux se torchant limite avec de la soie, immobiles.
Alice replia rapidement son petit chevalet et rangea avec des gestes précis tout son matériel, toile, pinceaux, feuilles et crayons. Elle fourra le tout dans son sac et agrippa l'armature de bois du chevalet.
Fallait faire vite.
Elle laissa ses mains glisser dans le manteau de fourrure de la cliente, pas le temps pour les bijoux ou le portable, seul le fric comptait. Bientôt dans sa main reposait un porte feuille bien dodu qu'elle glissa dans son sac.
La rue n'était pas bien pleine, novembre et crachin oblige, alors elle fit cela vite.
Elle subtilisa le porte-monnaie d'une petite grand-mère promenant un minuscule chien, et fit les poches d'un employé en costume. Petit à petit, sans jamais vérifier son butin, elle dépouilla les quelques passants présents.
Au début, cela lui avait retourné l'estomac.
Mais Charlie et Lisa l'avait rassuré.
Eux avaient tout.
Baraques, bagnoles et compte bancaire blindé.
Elle, et eux, avait que dalle.
Elle avait besoin de ce fric.
Pour manger, pour les études, pour le matos de dessin, pour le médecin, les hormones et toutes ces choses qui coûtaient si cher.
Ce soir, ils mangeraient bien.
Alice avait envie d'un hamburger.
Énorme avec un steak de haricot rouge et des oignons grillés, et puis des frites aussi, dégoulinantes de graisses et de sel.
Ça faisait longtemps que le temps ne c'était pas figé dans un moment aussi opportun.
Elle avait envie de sortir le fric et d'acheter cette robe pour Charlie, la rouge qu'il voulait tant, et puis aussi cet intégrale de série sur laquelle Lisa bavait tellement. Elle aurait voulu dévaliser les boutiques de lingeries et essayer tout les soutien-gorge et les parures possibles, avant de partir en courant pour claquer sa fortune dans la salle d'arcade, la nouvelle ancienneté à la mode, et terminer par une orgie de nourriture.
La jeune femme sortie son portable, elle devait avertir les autres, même si cela n'avait aucun sens de le faire dans ce moment et...
Oh.
Le message de son père.
Très gentil et soucieux de sa santé, de son bien être et de ses études.
«C'est gentil papa, et avec quelque «e» de plus par ci, par là, ça aurait même été parfait».
Mais elle ne répondit pas cela.
Elle ne répondit rien.
Elle voulait penser à la nourriture, et aux cadeaux, au mois de rêve qui s'annonçait avec le pactole qu'elle avait récupéré.
Alice passa devant une épicerie.
Fine.
Pas le petit commerce avec deux mandarines et un peu de margarine.
Non le genre de coin où s'étalait le meilleur du meilleur.
Elle regarda la vitrine.
Elle n'avait jamais fait cela mais.
La jeune femme poussa la porte, faisant tinter une clochette.
Pourquoi pas ?
Hey!
Je pense que je posterai tout les vendredis soir jusqu'à ce qu'il n'y ait plus de nouvelle!
J'ai beaucoup aimé écrire celle ci même si j'avoue que le thème n'a rien de spéciale x)
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