Chapitre 12

PDV Karma

La rentrée est vite arrivée et, avec elle, le plan que j'avais élaboré contre Koro, avec l'appui de Siyeon. 

Ce jour-là, la styliste en herbe portait une large veste qui lui arrivait aux genoux. Je ne savais pas trop pourquoi cependant.

Visiblement entièrement disposée à socialiser, Siyeon avait complètement changé de comportement depuis dix minutes, temps depuis lequel nous étions arrivés au collège. Elle était plus naturelle mais néanmoins sur ses gardes pour ne pas sortir un mensonge. C'était surprenant pour les élèves de notre classe mais ils n'en tinrent pas compte et en profitèrent pour discuter avec elle.

Lorsque Koro entra, je vis à son sourire qu'il était ravi de voir Siyeon discutait joyeusement avec les autres élèves de la classe. Kayano ouvrit son cadeau et cria de joie en voyant une tenue complète pour elle.

"Elle est magnifique !! Où tu l'as acheté ?!

- Nulle part, je l'ai faite.", répondit Siyeon avec un sourire. "Je porte uniquement des tenues que j'ai créé et mon petit doigt m'a dit que tu voulais quelque chose comme ça.

- Trop bien !! J'ai trop hâte de la porter ! Merci Lee !"

Kayano se jeta au cou de Siyeon qui, surprise, lui rendit son étreinte rapidement.

"Avec plaisir. Encore désolée d'avoir été si froide avec vous tous...

- Pas de soucis, il faut un temps d'adaptation à tout le monde, lui affirma Isogai.

- Oui, et il est plus long pour certains que pour d'autres, continua Nagisa.

- A la pause, allez voir dans vos casiers, tous. Je vous ai laissé quelque chose, sourit la noiraude.

- Comment tu as pu ouvrir les casiers alors qu'ils sont fermés à clé et que je ne t'ai pas quitté des yeux depuis qu'on est arrivés ? interrogeai-je.

- Je sais crocheter des serrures Cupidémon, et je suis venue pendant les vacances pour les déposer, c'est pour ça.

- Tu cesseras jamais de me surprendre, reconnus-je.

- Tu veux dire que je te surprend toujours ?"

J'eus mon petit sourire en coin et mis une main dans ma poche, laissant le silence planer quelques instants.

"Evidemment !"

Elle parut surprise mais se reprit étonnamment vite. Elle m'offrit alors un sourire solaire qui fit s'emballer mon coeur. 

"On passe à l'attaque maintenant ? me demanda-t-elle soudainement.

- Aller !"

Elle hocha la tête et inspira un bon coup avant de sortir quelque chose de son sac. Elle se dirigea vers Koro.

"Monsieur Koro, je vous ai fait un cadeau à vous aussi !"

Le regard du poulpe s'illumina, comme un ravi de la crèche.

"C'est vrai ?!

- Oui !!"

Siyeon déplia soigneusement le vêtement, révélant une veste de costard assez classique dans la forme. L'originalité se situait dans la couleur et le motif du vêtement : il était jaune vif avec un motif alternant poulpe et croissant de lune de couleur noire. Dans le dos, un étrange poulpe était brodé. Siyeon m'avait dit que c'était comme ça qu'elle imaginait Koro en poulpe : une sorte de poulpe jaune de trois mètres de haut, avec une grande tête ronde, un grand sourire, de petits yeux globuleux, deux grands tentacules servant deux bras et ayant deux doigts chacun, plein d'autres tentacules en guise de jambes, et habillé d'une robe noire académique, d'un petit chapeau académique carré noir avec un gland jaune, et une grande cravate noire avec une lune en forme de croissant jaune. 

Pas de doute, la styliste avait une imagination débordante.

"Vous me permettez de prendre quelques minutes sur le cours pour l'ajuster à votre taille ?

- Bien sûr voyons !", fit le poulpe, flatté.

Siyeon lui fit enfiler la veste et elle remonta la manche de la sienne pour dévoiler sa pelote d'épingles. Elle commença à ajuster le vêtement et arriva derrière lui. Elle se releva, comme pour vérifier le haut du vêtement. Je me tenais à proximité du poulpe, assez pour pouvoir bondir sur lui une fois que mon amie se serait occupée de lui, d'une manière qui m'était encore inconnue car elle m'avait demandé de lui faire confiance. 

Siyeon détacha en silence sa veste avec une main, l'autre palpant le nouveau vêtement de Koro. Tout se déroula ensuite très vite. La noiraude dégaina à tout vitesse quelque chose puis un "BAM !" retentit avant que Koro ne s'écroule au sol.

Je levai la tête vers Siyeon et je la vis, brandissant dans les airs une...

"Poêle à frire ?!!"

Fière d'avoir assommée le prof, la noiraude fit tournoyer l'instrument de cuisine avec son index, qui était dans le trou de la poignée.

Bien que surpris, je me repris rapidement, de même que le reste de la classe. On se jeta tous sur le prof inconscient avant de le toucher avec nos faux couteaux, dont la partie censée être coupante était recouverte de peinture à l'eau. On le toucha tous avec nos armes à des endroits qui seraient mortelles avec de véritables armes.

Lorsque je me redressai, je tombai nez-à-nez avec Siyeon, un sourire ravi aux lèvres. Elle me tendit son poing et je cognai le mien contre le sien.

"Bien joué ! fit-elle.

- Bien joué !", répétai-je.

Elle cala sa poêle sous son aisselle et regarda une nouvelle fois Koro. Il devrait se réveiller dans quelques heures, ce qui nous laissait largement la matinée de libre.

"Je vais prévenir Madame Pouffe et Monsieur Karasuma, indiqua Isogai avant de s'éclipser avec Kataoka.

- C'était incroyable ! C'est toi qui a monté ce plan Lee ?! s'étonna Kurahashi.

- Non, c'était l'idée de Cupidémon... euh Karma. Je devais le distraire et faire en sorte qu'il ne fasse pas attention à lui, afin qu'il le poignarde par la suite. J'y ai juste ajouté ma touche personnelle. Une cible assommée est quand même plus facile à tuer.

- Mais pourquoi une poêle à frire ? interrogea Maehara.

- Parce que je ne fais pas les choses comme tout le monde !", rétorqua la noiraude.

C'est bon ! Je sais comment je vais l'appeler.

"Tu es unique Raiponce, c'est certain !

- Raiponce ? Pourquoi tu me donnes le nom d'une princesse Disney ?

- Tu as des cheveux très longs, tu te bats avec une poêle à frire et... et tu es une princesse en quelque sorte."

J'avais dit cette dernière phrase avec un ton plus tendre que ce que j'aurais voulu, mais cela n'échappa pas à la noiraude, car elle devint aussi rouge que mes cheveux.

"Je... Je ne suis pas blonde, je n'ai pas des cheveux de vingt-deux mètres de long et je n'ai pas de caméléon !

- C'est un détail ça ! Tu préfères que je t'appelle Sisi peut-être ?

- Non, Raiponce ça ira.", décida Siyeon en raccrochant sa poêle à sa hanche.

Je ris légèrement et elle bouda, en croisant les bras. Toute la classe s'était éparpillée, la plupart était dehors hormis Nagisa, Kayano, Rio, Yada et Kurahashi, qui s'étaient dispersés dans la salle. Je déposai mon couteau sur le bureau à côté de moi.

Je souris légèrement et levai la main pour caresser doucement la joue de Siyeon.

"Boude pas, t'es plus jolie quand tu souris."

Elle décroisa les bras alors qu'elle rougissait à une vitesse affolante. Elle ouvrit légèrement la bouche mais aucun son n'en sortit. Mon sourire s'élargit sans que je ne m'en rende compte, Siyeon était trop mignonne comme ça. 

"K-K... Karma... b-bien sens tu te... enfin tu... t-tu te sens bien ?", bafouilla péniblement Siyeon.

Je laissai retomber ma main et elle joua avec une mèche de ses cheveux pour éviter de me regarder en face.

"Pourquoi je ne me sentirai pas bien Raiponce ? dis-je, un brin malicieux.

- M-Mais... enfin... tu...

- Je ?"

J'ouvris une brique de lait à la fraise et la bus tranquillement. C'était adorable de la voir perdre ses moyens comme ça, juste parce que je lui avais caresser la joue. Ou alors c'était peut-être ce que je lui avais dit.

Ou les deux.

En tout cas, elle était tellement adorable que je ne pouvais mettre fin à son supplice. Siyeon était visiblement très réceptive, et pour pas grand-chose. 

"Tu es bizarre depuis Noël, articula Siyeon avec peine.

- Raiponce, tu es bien la seule à ne pas avoir remarqué que j'étais bizarre...

- N-Non... je... j'avais remarqué que tu étais bizarre mais... enfin... tu es encore plus bizarre que d'habitude. Tu es sûr que tu vas bien ?"

Un sourire tendre menaça de prendre place sur mes lèvres mais je le réprimai. A la place, j'affichai mon éternel sourire en coin.

"Je vais parfaitement bien Raiponce. Mais ça te dérange que j'agisse comme ça ?"

Je penchai légèrement la tête sur le côté, intrigué par la réponse qu'elle pourrait donner. A part que j'étais légèrement plus entreprenant et tendre envers elle, je n'avais pas trop l'impression d'avoir changé de comportement. Je voulais la séduire sans qu'elle n'en ait l'impression, pour ne pas ruiner notre amitié. On sait jamais.

Elle leva timidement les yeux et devint encore plus rouge, ce qui fit qu'elle retourna dans la contemplation de sa mèche de cheveux noirs.

"Je... c-c'est juste... c'est juste déconcertant..."

Je soupirai intérieurement de soulagement. Elle me donnait en quelque sorte le feu vert pour continuer comme ça. Si ça la dérangeait, elle me l'aurait dit, je la connaissais bien maintenant.

"Aller viens, on va rejoindre les autres, souris-je.

- O-Ok !"

Je mis ma main libre dans ma poche et on rejoignit Nagisa et Kayano, qui avaient entre temps rejoint Rio, Kurahashi et Yada. Les deux délégués débarquèrent alors et demandèrent un conseil de guerre de la classe E. Isogai appela donc les élèves à l'extérieur et ils vinrent rapidement.

"Bien, comme vous le savez, en "tuant" Koro, nous avons droit à deux semaines supplémentaires de vacances et la note maximale dans la matière de notre choix, commença Isogai.

- Cependant, les examens sont très bientôt et ce ne serait pas judicieux de rater les derniers cours qu'il nous reste, d'autant plus qu'on a un week-end à Kyoto par la suite, une sortie prévue par l'établissement.", poursuivit Kataoka. "C'est pourquoi nous devons voter si on prend les deux semaines de vacances. La majorité l'emportera."

Ils laissèrent le silence planer quelques dizaines de secondes pour nous laisser le temps de réfléchir.

"Passons au vote. Qui veut maintenir les cours ?", interrogea Isogai.

Que je lève la main n'était pas vraiment une surprise, puisque je voulais battre Asano. Que Siyeon le fasse, c'était déjà une plus grande surprise pour la quasi-totalité de la classe, excepté moi. Je savais à quel point réussir ces examens, les vrais examens, était important pour elle. Par contre, c'était encore plus étonnant de voir toute la classe lever la main, y compris Terasaka et sa bande.

"Verdict unanime.", sourit Kataoka. "Dans ce cas, nous avons quartier libre jusqu'à ce que Koro se réveille puisque nous avons cours avec lui toute la matinée, c'est pourquoi Monsieur Karasuma tient à ce qu'on reste dans l'enceinte du collège. Nous allons mettre une feuille sur le bureau de Koro et nous aimerions que vous y notiez votre nom et prénom ainsi que la matière dans laquelle vous voulez le cent sur cent. Evidemment, vous pouvez choisir d'attendre que les examens soient passés aussi."

La déléguée prit une feuille de sa pochette, nota quelque chose dessus avant de la poser sur le bureau du prof. On entreprit ensuite de relever Koro pour le caler contre le mur. Siyeon lui retira la veste ayant contribué au piège afin d'ajuster ce qui devait l'être et pour éviter qu'elle ne se froisse au passage. La noiraude me demanda de mettre la veste, afin qu'elle garde sa forme pendant les ajustements. Je m'exécutai de bonne grâce et elle se mit aussitôt au travail, avec la même passion qui la caractérisait quand il s'agissait de conception de vêtements

"N'empêche, le coup de la poêle à frire, c'était bien trouvé. J'y aurais pas pensé.

- Tu sais, tu n'as pas tout à fait tord de m'appeler Raiponce. C'est ma princesse Disney préférée, je trouve qu'elle me ressemble un peu.

- Normal, c'est une artiste, comme toi.

- Oui bon, elle est quand même pas mal plus rêveuse que moi. Mais c'est vrai que j'ai choisi la poêle à frire parce que j'aime Raiponce. Je ne me suis jamais battue réellement avec.

- On dirait pas, tu la manies aussi bien que Raiponce !

- Je n'arrive pas à savoir si tu te moques de moi ou non.

- J'oserais jamais me moquer de toi. Tu manies aussi bien la poêle que moi avec un couteau en plastique.

- J'ai été élevée à bonne école... Halmeoni me menaçait avec une poêle pour pas que je vienne la déranger quand elle cuisine, quand j'étais petite. Du coup, pour rire, je faisais des genres de duels contre Halabeoji, poêle contre poêle. C'était drôle !

- Je vois ça, ton visage s'illumine quand tu en parles"

Elle leva la tête un bref instant et m'offrit un sourire lumineux.

"C'étaient de bons moments, c'est vrai. Ce sont des moments que je chéris aujourd'hui. Au fait, j'ai remarqué que tu semblais plus apaisé depuis Noël, comme si... je ne sais pas... comme si les nuages s'étaient levés.

- Ouais, j'ai passé une excellente journée avec ta famille et toi, c'était vraiment cool. Et tu n'es pas étrangère à ce changement de météo en moi.", plaisantai-je en ponctuant ma tirade d'un clin d'oeil complice.

Ses joues se marbrèrent de rouge mais son sourire s'élargit.

"Tant mieux ! Tu fais tellement pour moi que je suis bien contente de t'aider en retour. Mais ne t'inquiète pas, je ne dirais rien sur... sur ton comportement de ce jour-là."

Elle me regarda de manière insistante, pour me faire passer un message.

"Je ne dirais rien sur ta faiblesse de ce jour-là."

C'était comme ça que je l'aurais interprété si ces mots avaient été prononcés par quelqu'un d'autre que Siyeon.

"Je ne dirais rien sur ta tristesse de ce jour-là."

C'était comme ça que je l'interprétais dans la bouche de Siyeon. Elle ne dirait rien sur le fait que j'étais limite au bord du gouffre le jour de Noël, avant qu'elle ne me remonte le moral en... en étant juste elle en fait.

Cette fille était une perle !

"Merci Raiponce, soufflai-je, reconnaissant.

- Tu aurais fait la même chose pour moi, non Cupidémon ?", me sourit-elle.

Son sourire, empli de la confiance qu'elle m'accordait, se répercuta sans peine sur mes lèvres, qui esquissèrent à leur tour un sourire révélateur de la confiance que je lui portais.

"J'aurais fait la même chose, et plus encore."

Ca, c'était ce que j'en pensais réellement.

"Oui, j'aurais fait la même chose."

Et ça, c'était ce que je lui avais répondu. 

Ouais, pour Siyeon, je serai capable de décrocher la lune mais ça, je ne lui dirais jamais. Ou, en tout cas, pas encore. C'était trop tôt et les tendre inclinations que je ressentais à son égard étaient encore trop récentes pour que j'ai ne serait-ce que le courage de les exprimer à haute voix en étant seul dans la pièce. Alors devant la principale intéressée... ouais non. Pas encore. 

Un jour... un jour je lui dirais à quel point je l'aime. Mais en attendant, ma priorité était surtout de ne jamais la laisser seule avec Asano, de faire en sorte que s'il voulait lui faire des avances, ce soit devant moi, la personne à laquelle Siyeon était la plus proche dans cette école, celle qui avait juré de la protéger. 

Siyeon était vraiment trop bien pour cette enflure.

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