☆ 9ème Rêve ☆

Agathe avait soigneusement planifié sa journée. Toute la matinée était consacrée aux devoirs. Elle avait réservé son après-midi pour passer du temps avec Nathan et Coralie à traîner dans les rues.
Midi arriva très vite, c'était l'heure de rendez-vous que s'étaient donnés les trois amis. La jeune femme quitta alors son père qui lui fit quelques avertissements avant de la laisser partir. Comme à chaque fois, le jeune homme l'attendait devant sa porte.

-- Salut! Tu vas bien ?

-- On peut dire ça, répondit-elle n'ayant pas oublier Silas.

-- Allez, ne traînons pas. Coralie serait capable de nous faire des remontrances si on arrive trop en retard.

Agathe acquiesça et tous les deux partirent jusqu'au point de rendez-vous. Après quelques minutes de marche, ils se retrouvèrent face à un petit café. Les trois étudiants appréciaient beaucoup les produits qu'ils trouvaient là-bas, notamment les sandwiches faits maison. Ils furent accueillis par une femme très sympathique qui les conduisit vers une table proche de la vitrine. Ils passèrent leur commande habituelle et reprirent leur discussion.

-- Alors ? Pas très stressé ? demanda Coralie. Accueillir, servir, nettoyer les tables, ça sera ton rôle dans quelques heures.

-- Je ne sais même pas pourquoi j'ai accepté... Je me suis dit que cela pouvait être sympa comme expérience mais pendant un instant j'ai oublié que je devais la partager vers l'autre rapace.

-- Cela sera peut-être l'occasion de bien vous entendre, déclara Agathe.

-- Ça m'étonnerait tiens !

-- N'empêche, plus j'y pense et plus je vous imagine bien en bons amis, avoua Coralie.

-- Je serai fière de Nathan s'il devenait ami avec Eliott, lança Agathe en riant.

Sans que cette dernière ne remarque quelque chose, les joues du jeune homme s'empourprèrent.

-- V-vraiment ? lâcha celui-ci.

-- Bien sûr, confirma-t-elle innocemment. Cela prouverait que tu sais te remettre en question et dépasser ces a priori.

Coralie tentait tant bien que de mal à se retenir d'éclater de rire face à cette scène. Heureusement pour elle, la serveuse revint avec les commandes ce qui l'obligea à rester un minimum sérieuse. Chacun s'attaqua donc à son repas avec appétit.

-- Vous savez ce qui serait marrant, questionna la végétarienne.

-- Quoi donc ?

-- Qu'Eliott se pointe comme une fleur comme à chaque fois, lança-t-elle avant de rire.

-- Ah oui et comme laquelle ? Une pensée, un pétunia, une stellaire ? À moins que ce ne soit une raiponce voire un anonis.

-- Ahah ! Elle est bien bonne Nathan ! Tu imites bien la voix d'Eliott, déclara l'étudiante qui ne regardait pas son locuteur.

-- Non... Ce n'est pas moi qui ait parlé, c'est vraiment lui...

-- Quoi ?!

Elle se tourna subitement et se retrouva face au jeune homme.

-- Ah... Salut...

-- J'arrive comme une fleur alors ?

-- Ce n'est qu'une expression...

-- Et je ne savais pas que tu t'y connaissais en botanique, fit remarquer Agathe.

-- Je m'intéresse un peu aux fleurs à mes heures perdues, répondit-il.

-- Oui enfin si tu t'y connaissais vraiment, tu saurais que les raiponces ne poussent pas ici, intervint Nathan.

-- Ce n'est qu'un détail, plaisanta Coralie.

-- Bah ! J'aurai appris quelque chose au moins. D'ailleurs tu as l'air de t'y connaître toi.

-- Mon père est un expert en botanique, informa le jeune homme avec une pointe d'arrogance.

-- Je trouve ça rigolo que vous ayez des points communs alors que... vous ne vous entendiez pas tant que cela, lâcha Agathe sans vouloir vexer les deux jeunes hommes.

Ces derniers se jaugèrent du regard pendant un instant. Finalement, Eliott quitta les trois amis afin de rejoindre les siens.

-- Mince alors, je ne voulais envenimer la situation.

-- Ce n'est pas une grande perte...

Ils finirent leur repas et sortirent de l'établissement peu de temps après. Ils traînèrent dans la rue pendant plusieurs heures avant que Nathan ne doive aller au restaurant. Les deux jeunes femmes l'accompagnèrent et lui souhaitèrent bon courage. À la demande de l'étudiant, elles ne restèrent pas et rentrèrent chez elles. Lorsqu'Agathe passa le seuil de la porte, elle fut accueillie par l'odeur alléchante d'un bon dîner.

-- Il faudra que tu m'apprennes comment tu fais pour cuisiner si bien, déclara aussitôt la jeune femme.

-- Oh tu sais, je ne fais rien de spécial. Ce doit être avec l'habitude.

-- Quelle modestie, ria la fille.

-- Enfin, ce n'est pas encore prêt donc tu peux vaquer à tes occupations.

-- Pas de souci.

-- Ah attend !

-- Oui ?

-- Si tu pourrais me faire une liste de ce que tu veux pour ton anniversaire ça m'arrangerait.

-- Ça marche ! répondit-elle en souriant.

Elle se hâta alors à cette tâche si on peut appeler cela ainsi. Une demi-heure de réflexion plus tard, sa liste n'était pas très remplie. De plus, tout ce qu'elle avait écrit était des titres de livres qu'elle avait vu à la librairie.

-- Je doute que cela puisse le satisfaire mais je ne sais pas ce que je peux vouloir d'autre. Rien ne me vient en tête...

Afin d'être plus productive, elle décida de se balader dans la maison. Elle traversa le couloir de l'étage et passa à côté de la chambre de ses parents. La porte étant à moitié ouverte, elle y jeta une rapide coup d'œil. La pièce était sombre puisque le volet avait été fermé. Le lit était impeccablement bien fait. Malgré l'obscurité, Agathe put remarquer un renfoncement d'une partie de la couverture, comme si on s'était assis longuement dessus. De plus, la jeune femme réussit à distinguer des vêtements qui traînaient par terre.

-- C'est bien la seule pièce qui n'est pas parfaitement rangée.

Elle les ramassa et se dirigea vers la salle de bain pour les mettre dans la corbeille à linge sale. Avant de quitter la pièce, elle observa encore un court instant la chambre.

-- Ce lieu a toujours un je-ne-sais-quoi d'inquiétant depuis qu'elle est partie... Brrr !

La jeune étudiante afficha un sourire triste et partit se débarrasser du linge qu'elle portait. En déposant les vêtements, une idée de cadeaux lui vint à l'esprit. Elle se précipita alors de l'écrire sur une feuille bleue, à part.
Une dizaine de minutes plus tard, son père l'appela pour manger.

-- La liste est faite ?

-- Oui, oui. Je l'ai laissé dans ma chambre.

-- J'irai la lire alors. Maintenant, il faut manger !

++++++++++

Le ventre plein, la petite famille ne mit pas longtemps à aller se coucher.

-- Dors bien Agathe.

-- Toi aussi papa.

Adrien s'étant enfermer dans la chambre parentale. L'étudiante en profita pour descendre au rez-de-chaussée furtivement et déposer la fameuse feuille bleue.

-- Elle devrait être assez visible ici.

Elle remonta rapidement et se mit aussitôt sous ses draps avant de pousser un baîllement.

☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆

La jeune femme rouvrit les yeux et se retrouva face à ses compagnons oniriques.

-- Je vais expliquer la situation, anticipa Silas. Alors, par quoi commencer ? Donc... Je suis ton subconscient comme j'ai pu te le dire plusieurs fois mais je ne suis pas le seul à porter ce rôle. En effet, celui qui est apparu au-dessus du château est lui aussi ton subconscient. La différence qui existe entre nous deux est que lui représente le côté fou, incontrôlable tandis que moi je suis le côté posé, calme. Nous sommes donc deux à gérer tes rêves. Notre présence fait un peu l'effet d'une balance. Si tu te souviens de rêves très étranges, et bien cela vient de lui. Moi, je suis là pour limiter les dégâts si on peut dire cela. Si je le laissais faire, ton cerveau aurait pété un plomb depuis bien longtemps.

-- C'est un peu étrange comme fonctionnement mais ça tient la route, fit remarquer Agathe.

-- Voilà une bonne chose de faite. Pour le portail...

-- Tu peux en créer quand tu le souhaites, je me trompe ?

-- Oui et d'ailleurs je voulais m'excuser...

-- Ahah.

-- ?

-- J'y ai réfléchi et je ne devrais pas être aussi dure avec toi, déclara-t-elle avec un sourire.

-- Non c'est moi, j'aurai dû dire la vérité dès le début. Je trouvai ça incroyable de pouvoir te rencontrer et j'aurai regretté que cela ne dure qu'un court instant.

La jeune femme enlaça aussitôt son subconscient.

-- Je ne t'en veux pas.

-- C'est moi ou ces excuses sont ennuyantes à mourir ? lâcha Coralie.

-- Je trouve ça touchant moi, répondit Nathan.

-- Bon, allez, il faut y aller ! se reprit Silas. Il faut conduire Agathe au bureau du patron pour cesser ce rêve continu !

-- Et on peut y aller directement ? demanda la jeune femme.

-- Non on ne peut pas. Le seul contact que l'on peut avoir avec le patron est via une lettre. Mais bon, vu toutes celles qu'il doit recevoir, la nôtre risque de se fondre dans la masse.

-- Alors comment va-t-on faire ?

-- Trouver le bon portail menant à son bureau, expliqua Silas.

-- Mais tu ne viens pas de me dire que l'on ne pouvait pas y aller directement ? demanda Agathe.

-- Si.

-- Je suis perdue...

-- Enfin si mais directement... c'est plutôt...

-- Tu es un bien piètre explicateur, lança Nathan.

-- Si ce métier existe bel et bien, ajouta Coralie.

-- Alors pour faire simple entre guillemets, précisa le petit garçon, le patron a fait en sorte que les subconscients un peu taré ne puissent pas le déranger voire l'attaquer. Pour cela, il a créé un lion vert qui est en quelque sorte la clé de ce fameux portail pour accéder à son bureau.

-- Un lion vert ? répéta la jeune femme. Mais il y en avait un avec toi quand tu as poussé la chansonnette, non ?

-- Si, si c'était bien lui. Il se balade un peu partout et il est vrai que l'on s'entend plutôt bien.

-- Et... tu ne pouvais pas lui demander à ce moment de nous aider ?

-- ... Oups !

Agathe laissa alors afficher un sourire entre le désespoir et le rire.

-- Allez, fit soudainement Coralie. On ferait mieux de ne pas traîner.

-- Oui elle a raison, affirma Silas. De plus, Bartholomé peut surgir d'un moment à l'autre et on en sortirait pas forcément indemne.

-- Bartholomé c'est son nom ? questionna Agathe afin d'en être sûre.

-- Oui, c'est le nom de cet abruti.

La jeune femme ria à ce dernier mot. Cela lui rappelait la relation entre les véritables Nathan et Eliott.
Le subconscient agita ensuite ses mains et fit apparaître un portail devant lui.

-- Il va falloir faire très attention. Je ne sais pas où l'on va pouvoir atterrir. Mais rappelez-vous, dès que vous voyez un lion vert, prévenez-moi.

-- Ça marche ! répondirent les trois compagnons.

☆ ☆ Portail couleur cacao ☆ ☆

Il faisait sombre. Très sombre. Seuls quelques rayons de soleil parvenaient à s'immiscer dans la pièce. Elle avançait, pas à pas, ne sachant où elle posait les pieds. Soudain, un grincement se fit entendre. La jeune femme se tourna subitement afin de connaître l'origine du bruit. Avec l'obscurité, elle ne pouvait rien distinguer. Elle décida donc de marcher à reculons mais elle percuta quelque chose et tomba en arrière. Alors que la chute s'annonçait brutale, elle fut plutôt... mœulleuse. La jeune femme était tombée sur un matelas très confortable. Pourtant, elle se releva et tenta de sortir de ce lieu. Elle plaça ses mains devant elle afin de tâter tout ce qui pouvait croiser son chemin.

-- Si seulement je pouvais avoir ne serait-ce qu'une petite source de lumière.

Soudain, quelques rayons de soleil pénétrèrent dans la pièce. On était dorénavant capable de voir de nouveaux éléments. Un lit, d'où le matelas, un placard collé contre le mur et une pile de vêtements qui s'élevait jusqu'à l'infini. Curieuse, la jeune femme se mit en tête de l'escalader. Plusieurs fois elle chuta mais reprit son ascension aussitôt. Plus elle montait, plus il y avait de la lumière. Jusqu'à ce que, tout à coup, il n'y en ait plus. Plus rien. Le noir complet. Encore. Elle était complètement désorientée et faisait plusieurs tours sur elle-même afin de voir quelque chose. Après quelques secondes, l'étudiante arriva enfin à percevoir une tâche blanche. Celle-ci était floue et flottait dans les airs. Elle devenait ensuite de plus en plus nette jusqu'à ce qu'elle le fut parfaitement. C'était un sourire. Un sourire sadique avec des dents pointues, aiguisées.

☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆

-- Aah... C'est... c'est un cauchemar... J'ai horreur de ça.

La jeune femme se leva lentement et sortit de sa chambre. Le couloir de l'étage était déjà bien éclairé et Agathe remarqua que la porte de la chambre parentale était grande ouverte.

-- Ouaah... On doit être tard dans la matinée. Je n'ai même pas regardé l'heure, se dit-elle en descendant les escaliers.

-- Salut, lança son père.

-- Bonjour. J'ai un de ces coups de barre moi...

-- Tu n'as pas veillé au moins ?

-- Je t'assure que non.

Elle effectua un balayage de la pièce par son regard et en conclut quelque chose.

-- La feuille est bien partie, pensa-t-elle.

-- Allez viens à table. Le petit déjeuner est prêt.

Publié le 15/06/2020

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