☆ 6ème Rêve ☆
La rue était très sombre. Seuls les lampadaires éclairaient faiblement le trottoir. Agathe n'était pas du tout rassurée et se promit de faire vite. Après quelques virages, elle arriva enfin devant à la maison du jeune homme. Elle contourna la bâtisse, enjamba un petit portillon et se mit face au mur de derrière, là où il y avait la fenêtre de la chambre de Nathan.
-- Maintenant, il faut le réveiller...
Elle chercha à tâtons quelque chose qui pourrait faire du bruit en le lançant contre la fenêtre sans non plus la briser.
-- Hmm, pierre on oublie. Qu'est-ce que je peux trouver d'autre ? Un bâton ? Ça pourrait faire l'affaire.
Elle ramassa le bout de bois et le lança sur la fenêtre. Elle répéta son action plusieurs fois mais toujours rien. Elle retenta une fois de plus et le bâton lui attirit sur la tête.
-- Aïe !
-- Tu ne fais pas une bonne cambrioleuse, lança une voix masculine.
Agathe leva la tête et vit le jeune homme. Celui-ci s'asseya sur le rebord de la fenêtre. Il n'était vêtu que d'un short léger.
-- Je peux faire quelque chose pour toi ? Tu veux quoi ? Des bijoux ?
-- Toi, répondit-elle du tac au tac.
Cela déstabilisa Nathan qui butait sur chacun de ses mots.
-- Tu peux descendre ? demanda l'étudiante.
-- ... Je pense que oui, par contre je vais devoir traverser toute la maison. Je réveillerai sûrement mes parents.
-- Passe par cette grosse liane avec les feuilles sinon. Elle m'a l'air très solide.
-- Quelle liane ? Mais... depuis quand a-t-on ça ici ?
-- On s'en fiche, descend, dit-elle en vérifiant la rigidité des feuilles. C'est du solide dis donc.
-- Je te rejoins. Laisse-moi juste le temps de m'habiller.
-- Oui... Je t'en prie, lâcha-t-elle en regardant son ami.
Nathan descendit rapidement la liane et se posa face à la jeune femme.
-- On peut marcher un peu ?
-- Je te suis.
Heureusement pour elle, l'étudiant semblait moins fermé et énervé que les fois précédentes. Peut-être que Sylvain avait discuté avec son fils le plus grand. Ils se dirigèrent alors vers la rue et la longèrent.
-- Je voulais te dire, commença Agathe, je suis désolée pour tout ce que je t'ai dit et fait. Je crois que je suis maladroite avec les excuses.
-- J'avais remarqué, ria-t-il.
Cela faisait du bien pour la jeune femme de voir le sourire de son locuteur. Cela lui enlevait un poids sur la conscience.
-- Tu m'en veux j'imagine...
-- Agathe...
L'étudiante se tourna vers le jeune homme et le regarda dans le blanc des yeux.
-- ... Écoute, j'ai horreur de te faire la tête et en réalité je me force. J'essaye de faire le garçon dur mais j'ai beaucoup de mal, avoua-t-il. Je voulais simplement te faire comprendre que tout ce que tu pouvais dire, peut blesser quelqu'un. Pour être franc, je ne t'en voulais pas tant que cela mais je ne sais pas ce que je faisais. Peut-être voulais-je éviter de passer pour le garçon facile. Ou était-ce simplement une ânerie...
-- Pas du tout, répondit-elle en lui prenant les mains. J'ai réalisé que tu comptais pour moi.
-- J'en suis ravi...
-- Nous sommes réconciliés ?
-- Bien évidemment.
Ils se regardèrent droit dans les yeux avant qu'Agathe les ferma en faisant un grand sourire.
-- Je suis soulagée. Maintenant, nous ferions mieux de retourner chacun chez soi.
-- Tu as bien raison. Je te dis à demain ?
-- Plutôt à tout à l'heure, rectifia-t-elle.
++++++++++
Agathe monta sans un bruit dans sa chambre, se remit en pyjama et se glissa sous la couette. Elle était heureuse. Cette dispute qui s'était étendue sur deux jours l'avait beaucoup peinée. Maintenant qu'il n'en était plus rien, elle pouvait reprendre sa vie normalement, enfin...
☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆
-- Tu es de retour, lança Silas. Cela signifie que le problème est réglé ?
-- Oui, répondit la jeune femme qui paraissait soulagée. Nathan est là ?
-- Je suis là, je suis là. Encore merci. Allez, je vous libère de ce rêve.
Je claquais des doigts et un portail de couleur magenta apparut. Agathe, Silas et Eliott s'avancèrent. Alors que les deux premiers étaient passés, j'emprisonnai le dernier dans un cage afin qu'il ne passe pas le portail. Enfin, je me transformai en un personnage comme les autres.
-- Ah ! Ça fait du bien de retrouver son corps. Allez, je file. Salut Eliott ! À jamais !
☆ ☆ Portail couleur magenta ☆ ☆
Des pétales blancs virevoltaient dans le ciel. Des centaines. Des miliers. Ils partaient du sol, rejoignaient les nuages et redescendaient. Voilà le spectacle que la petite fille admirait tous les soirs. Elle se pencha afin d'essayer de voir les pétales tomber et toucher le sol, avant, d'une fois de plus, remonter. Alors qu'un d'entre eux repartait pour une ascension, la petite fille l'attrapa et fut emportée. Elle s'y accrocha bien et s'éleva haut, très haut. À un moment, elle la lâcha et chuta du ciel. Elle ne cria pas et contempla les pétales qui descendaient et montaient. Elle fit quelques pirouettes parmi les nuages et mit la tête en bas afin de rejoindre plus rapidement le sol. Elle s'y approcha à une vitesse fulgurante. Lorsque la petite fille y fut tout proche, un courant ascendant l'emporta encore et elle repartit pour un tour. Pendant sa nouvelle ascension, une voix s'éleva.
-- La reine vous appelle mademoiselle.
La petite fille continua de monter et s'aggripa à un nuage et monta dessus à la force de ses bras. Elle fut accueillit par un garde. Il portait l'uniforme officiel du royaume : chapeau multicolore avec une petite hélice sur le sommet, salopette et tongs. Le militaire l'accompagna jusqu'au château.
-- Faîtes attention où vous mettez les pieds mademoiselle. On nous a fait part récemment de nuages qui ne sont pas aussi solides qu'habituellement.
-- Merci pour l'information.
Alors que tous deux faisaient très attention, le garde mit son pied à un endroit apparemment fragile puisqu'il traversa le nuage et chuta. La petite fille regarda par le trou.
-- Bah, tout ce qui descend doit forcément remonter.
Elle poursuivit son chemin et arriva enfin face au palais. Là-bas, deux autres gardes lui ouvrirent le pont-levis. Elle pénétra dans l'immense bâtisse. Elle connaissait les lieux par cœur, c'était comme instinctif. Ainsi, elle zigzagua dans le château en prenant différents embranchements créés par les nombreux couloirs. Finalement, elle atteignit la salle du trône.
C'était une immense pièce tapissée de multiples tableaux plus magnifiques les uns que les autres. La vingtaine de fenêtres rendait le lieu très lumineux. Un long tapis rouge était déroulé de la porte jusqu'au trône. Ce dernier, d'un blanc immaculé, représentait d'ailleurs la beauté que laissait suggérer la façade du palais. La reine était assise confortablement dessus et semblait attendre la visiteuse.
-- Te voilà enfin mon enfant !
-- Je m'excuse de vous avoir fait attendre Madame.
-- J'accepte tes excuses. Maintenant, je te pris de retourner à ton travail. Le ménage ne va pas se faire tout seul. D'ailleurs, tu commenceras par mon trône.
La reine se releva et abaissa la cuvette. Elle traversa la salle et passa juste à côté de la jeune fille en lui donnant un coup de hanche, de quoi la faire tomber.
-- Allez ma fille ! Plus vite tu auras fini, plus vite tu attaqueras la cuisine, puis les cinq salles de bain, les vingt-deux chambres et tu connais la suite.
-- Oui Madame. Je m'occupe de tout cela le plus vite possible.
-- J'espère bien ma fille.
La reine quitta la pièce tandis qu'un garde s'approcha de la demoiselle.
-- Princesse, auriez-vous besoin de mon aide ?
-- C'est bien gentil à vous mais ces tâches sont destinées à moi et à moi seule.
-- Comme vous voudrez, néanmoins, si vous avez besoin de moi, je serai à votre entière responsabilité.
-- Et je vous en remercie.
La jeune fille partit vite chercher son matériel et revint dans la salle du trône. Elle passa la serpillière en dansant partout dans la pièce, sous les regards amusés des gardes qui appréciaient toujours la démonstration. Soudain, un messager fit irruption dans la pièce et se précipita vers la princesse.
-- Mademoiselle... vous voilà enfin, dit-il épuisé. Je vous ai cherché partout.
-- Qu'il y a-t-il ?
-- Le prince... Il est arrivé...
-- Déjà ? Je ne pensais pas que sa venue soit aussi tôt ! Je me hâte d'aller me changer et je vous rejoins.
Elle courut dans tout le palais en direction de sa chambre. Elle y entra et fonça vers la pièce annexe qui contenait son immense garde-robe. Elle passa en vue rapidement chacune de ses tenues et s'arrêta sur une magnifique robe orange en velours. Elle l'enfila en deux trois mouvements et se précipita pour accueillir le prince. Malheureusement, dans les escaliers, la jeune princesse trébucha et dévala les escaliers. Pendant sa chute, elle sentit ses dents frapper les marches, sa peau raper la pierre, ses cheveux s'emmêler, sa robe se déchirer. Elle atterrit finalement à plat ventre, déboussolée et rongée par la douleur. Malgré tout, elle se releva vite et reprit sa course. Quelques dents la quittèrent en chemin mais la petite fille continuait tout de même. Lorsqu'elle arriva à l'entrée, elle se retrouva face au prince.
La princesse le contempla de bas en haut. Le jeune homme était vêtu de chaussures noirs, tout ce qu'il y avait de plus classique. Il portait également un pantalon marron en velours ainsi qu'une chemise blanche sur laquelle il avait mis une veste légère accordée à son pantalon par dessus.
Alors que la princesse exerçait une pression sur sa joue, le prince engagea la discussion :
-- Je suis enchanté d'enfin vous rencontrer princesse, dit-il en s'inclinant légèrement.
-- Moi de même, répondit-elle simplement avec de cracher une dent recouverte de sang.
-- Je n'ai jamais vu une demoiselle porter la beauté aussi bien que vous.
-- Vous êtes trop aimable, lança-t-elle en essayant de démêler des nœuds de ses cheveux.
-- Peut-être que vous accepteriez que je baise votre main ?
-- Sans aucun doute, déclara-t-elle alors qu'elle arrachait les bouts de robe qui ne tenait maintenant qu'avec un ou deux fils.
Le prince s'approcha d'elle, mit un genou à terre et prit délicatement la main de sa locutrice. Celle-ci saignait, de la peau s'était arrachée, ses ongles ne ressemblaient plus à rien et il manquait le petit doigt.
-- Quelle douce main vous avez.
-- Vous me flattez.
Pendant que le jeune homme faisait la cour, la reine fit irruption et l'invita à rentrer. Ils se retrouvèrent alors tous les trois dans la salle du trône.
-- Quel pièce splendide, complimenta le prince.
-- La cérémonie se fera dans cette pièce, expliqua la reine.
-- Je vois.
-- Une cérémonie ? questionna la princesse.
Le prince reprit sa pose et regarda la demoiselle dans les yeux.
-- Princesse Agathe, voulez-vous m'épouser, moi prince Eliott ?
La jeune fille clignota plusieurs fois des yeux avant de répondre :
-- Pardon ?
☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆
Agathe se réveilla subitement.
-- Je... J'en ai réellement marre. Pourquoi je dois faire tous ces rêves aussi étranges les uns que les autres ?
Elle jeta un rapide coup d'oeil à son réveil. Il allait sonner dans quelques minute. Elle fit en sorte qu'il ne sonnerait pas pour ce matin et partit se préparer. Dans le couloir, elle croisa son père, les cheveux ébouriffés, qui était dans le gaz.
-- J'allais te réveiller, baragouina-t-il.
-- Je te le dis tous les matins, tu n'as pas besoin de te lever plus tôt juste pour me réveiller. Je me gère toute seule. Allez, maintenant va te coucher.
-- Tu as bien raison, dit-il en se dirigeant vers sa fille afin de l'embrasser sur la joue. Bonne journée.
-- À toi aussi papa.
L'étudiante descendit les escaliers, débarassa l'assiette qui était laissée pour sa mère et prépara le petit-déjeuner pour elle et son père. Après s'être nourrie, elle partit faire rapidement sa toilette, s'habiller et prit au vol son sac de cours. Aujourd'hui, elle était impatiente de discuter avec Nathan, plus que d'habitude en tout cas. Elle ouvrit la porte et vit son ami face à elle. Alors qu'elle allait la fermer, son père lui souhaita une fois de plus une bonne journée, elle lui répondit rapidement, ferma à clé la maison et se tourna vers le jeune homme.
-- Ça va ? demanda-t-il avec un grand sourire.
Agathe ne répondit pas et se jeta dans les bras de Nathan.
-- Merci de m'avoir pardonné, souffla-t-elle en enfouissant sa tête dans le cou de son ami.
Le jeune homme était complètement paralysé et avait bafouiller un "de rien".
-- Allez, on va en cours ?
-- ...
-- Nathan ? Ne me dit pas que tu fais encore la tête ?
-- ...
Elle claqua plusieurs fois des doigts devant son visage afin de le faire réagir.
-- Eh oh...
-- ... Hein ?! Qu'est-ce qu'il y a ?
-- Tu étais totalement figé, c'était inquiétant.
-- Oh je suis désolé... Bon, on va en cours ?
-- C'est ce que je viens de dire il y a quelques secondes, reprit Agathe en fronçant des yeux.
-- Pardon, s'excusa-t-il gêné, je n'ai pas dû t'entendre.
-- Ça ne fait rien. Ne traînons pas maintenant. Ce serait bête d'être en retard alors que nous avions de l'avance.
-- Je sais pas trop, avoua le jeune homme. J'ai peur d'encore péter les plombs si je vois l'autre abruti.
-- Je serai là pour te retenir s'il le faut. Après tout, on doit s'aider entre amis.
-- Oui... entre amis...
Publié le 21/05/2020
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