Le reste de la journée, Nathan garda ses distances avec Agathe. Coralie tentait de la rassurer du mieux qu'elle pouvait. Elle lui répétait qu'il fallait lui laisser le temps de se calmer. Pourtant, cette attente était insoutenable pour la jeune femme. Plusieurs fois, elle se rapprocha du jeune homme mais celui-ci partait aussitôt. Agathe vivait très mal la situation. À la fin des cours, tandis que Coralie partit de son côté, Agathe attendait devant l'université celui qu'elle considérait toujours comme son ami même si cela n'était plus forcément réciproque... Lorsque Nathan passa à côté d'elle, cette dernière posa sa main sur son épaule.

-- Hmm ?

- Je... Je ne sais pas vraiment ce qui te met à ce point en colère mais... si je peux faire quoi que ce soit...

-- Me lâcher les baskets, coupa-t-il sèchement avant de se mordre la lèvre.

Agathe en tombait à la renverse. Auparavant, il ne s'était jamais adressé à elle ainsi. Il avait toujours été doux et là...

-- Dis-moi au moins ce qu'il ne va pas.

-- Toi.

Il s'éloigna d'elle et monta dans une voiture, celle de son père. Celui-ci en croisant le regard de l'étudiante la salua.

-- Tu vas bien ?

-- Oui merci et vous ?

-- Tutoie-moi s'il te plaît. Cela me gêne que tu me vouvoies. Tu es une amie à mon fils après tout.

Elle ne répondit pas et cela intrigua Sylvain. Afin de ne pas envenimer la situation, il souhaita à Agathe une bonne soirée et partit. La jeune femme fit donc le chemin jusqu'à chez elle, seule. Cela n'était arrivé que très rarement. Sur le trajet, elle se demandait ce qu'il pouvait le mettre en colère à ce point.

-- Cela serait à cause d'Eliott ? Probablement. Il ne le porte pas dans son cœur ça c'est sûr.

Elle entra chez elle, discuta rapidement avec son père et monta dans sa chambre. En voyant son lit, sa fatigue se fit ressentir. Cela faisait plus d'un jour qu'elle n'avait pas dormi. Elle évita de croiser le matelas du regard et se mit à ses devoirs.

++++++++++

Deux heures plus tard, elle ferma son cahier et s'appuya sur le dossier de sa chaise. Ses yeux se fermait petit à petit. Elle luttait du mieux qu'elle pouvait, pourtant, lorsqu'elle remarqua qu'elle était impuissante, elle s'étala en étoile sur son lit et s'endormit.

☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆

Quand elle rouvrit ses yeux, elle se retrouva là où elle avait quitté le rêve : dans les bras d'Eliott. Elle se retira aussitôt et s'éloigna du jeune homme.

-- Eh que faisais-tu depuis tout ce temps ? Ne me dis pas que tu n'as pas dormi la nuit dernière ?

Il considéra le silence d'Agathe comme un "oui".

-- Tu sais que ce n'est pas bien de faire des nuits blanches ! gronda son subconscient.

-- Si j'ai fait cela c'est parce que je ne voulais pas me retrouver encore dans les bras de cet idiot.

-- Maintenant tu te rends compte que ce ne fut pas si horrible. Tu t'es dégagée en deux secondes, ria Silas.

-- Pardon de vous déranger mais..., commença Eliott.

-- Oh ferme-la toi ! s'écria une voix familière.

Tous trois se tournèrent vers le lieu où provenait la voix. Une gigantesque girafe s'approcha d'eux. Lorsqu'elle s'arrêta, quelqu'un glissa sur son long cou avant de faire un salto et d'atterrir pieds joints sur Eliott qui était encore allongé.

-- Bien fait pour ta gueule ! lança Nathan.

-- Il n'était pas mort ? demanda Agathe à Silas.

-- Si mais nous sommes dans un rêve, la mort n'existe pas pour les personnages que tu peux croiser ici. Et j'en fais parti. La seule qui peut mourir, c'est toi. Je te rassure, il y a peu de chances que cela arrive.

-- Je peux mourir dans mes rêves ?

-- Avec le syndrome du Rêve Continu, oui.

-- Ça me rassure encore moins, confia la jeune femme.

-- Ça n'arrivera pas ! Je te protégerai ! lança Nathan. D'ailleurs, j'ai commencé par celui-là. précisa-t-il en lançant un regard noir à sa victime.

Soudain, le jeune homme chuta. Le second s'était relevé et était prêt à en découdre. S'enchaîna alors un échange de coups de poing. L'un en donnait un et l'autre le lui rendait.

-- Non ! Je ne peux pas supporter cela ! s'exclama Agathe.

Silas aurait aimé faire quelque chose mais il ne savait quoi.

-- Le seul moyen d'arrêter cela est de mettre fin au rêve, supposa-t-il.

-- Nous ne savons pas comment faire, rappela la jeune femme.

Alors qu'ils réfléchissaient sur le moyen de fuir ce rêve, Nathan et Eliott commençaient à être défigurés. Ils avaient des bleus sur tout le visage, du sang coulait de plus en plus. La vue de cette scène dégoûtait Agathe.

-- Il faut absolument trouver la solution !

La situation semblait desespérée pour celle-ci. Pourtant, son subconscient devint plus calme et plus réfléchi.

-- Dans ce rêve, nous formions une famille. La clé doit être en rapport.

-- J'ai peur de ce qui va suivre, avoua Agathe.

-- Et si tu l'embrassais ?

-- Qu'est-ce que je disais... ? Tu es tombé sur la tête ?! Tu crois que je vais l'embrasser ?!

-- Eh bien il faut sortir de là alors...

-- Je te hais et souviens-toi s'en bien !

Elle s'approcha de la bagarre d'un pas décidé. Une fois qu'elle n'y était qu'à plus que quelques pas, sa marche devint plus hésitante. Elle lançait des appels de détresse et de colère à Silas qui lui répondit par un regard signifiant : "Allez vas-y, courage !" La jeune femme avança son pied gauche et son autre pied le rejoigna et ainsi de suite. Lorsqu'elle se retrouva à côté des deux hommes, ces derniers se stoppèrent instantanément.

-- Ah les mecs sentimentaux, je vous jure, souffla le subconscient.

Agathe déglutit plusieurs fois tandis que les garçons la regardaient sans savoir quoi faire. Elle prit son courage à deux mains et se rua sur Eliott afin de lui donner un rapide baiser. Après cela, elle s'enfuya et se plaça à côté de Silas.

-- J'espère pour toi que tu ne t'es pas trompé, lui confia-t-elle.

Soudain, Nathan devint fou de rage. Il détruisit tout autour de lui. Leur environnement se décomposa comme un miroir brisé.

-- Bon, il se ramène ce portail ?

-- Je me serai trompé ? Dommage je pensais que cela aurait une bonne conclusion de rêve.

-- Tu te moques de moi ?!

Le coup faillit partir quand un portail couleur corail apparut.

-- Vite ! On se tire !

Les deux se précipitèrent vers la flaque colorée. Peu de temps avant d'y plonger, Agathe s'arrêta brutalement.

-- Et Nathan ? Il ne devait pas nous accompagner ?

-- Mais il est fou de rage là !

-- ... On s'en fout, je le fais venir avec nous !

Elle fit demi-tour, attrapa le jeune homme par l'épaule avant de glisser sa main sur son bras pour le tirer vers le portail.

-- Et Eliott ? demanda Silas.

-- On le laisse là, ça me fera des vacances.

Les trois se précipitèrent alors dans le portail.

☆ ☆ Portail couleur corail ☆ ☆

*voix inconnue imposante*

Il était une fois !
...

-- Ah pardon je me suis trompé de script, je la refais :

Dans une contrée lointaine, là où régnait l'ordre et la justice, là où les bandits en prenaient plein la gueule, se trouvait un petit bar dans un adorable batîment rose en forme de cœur.
Les habitants adoraient se retrouver là-bas autour d'un bon gros chope de... tisane !
En ce moment même, il était encore peu rempli

-- Bon, il est quand même 4h du matin alors ça se comprend.

Mis à part, deux hommes, le serveur et un client, le bar était vide.
Soudain, une jeune femme poussa violemment la porte.
...

-- Euh... elle est où ? Ah, elle arrive ? Ok, pas de souci.

Donc je disais, une jeune femme poussa violemment la porte.

-- Bien le bonjour ! Ça sera un chocolat chaud pour moi, lança-t-elle.

-- Je vous fais ça immédiatement, répondit le serveur.

Ce dernier enclencha la machine et attendit un peu plus d'une minute avant de servir la demoiselle.

-- Faîtes attention, c'est froid.

En effet, la boisson était congelée dans la tasse. La femme dû la retourner afin de faire tomber le bloc de chocolat chaud. Ensuite, elle sortit une massette de sa poche et frappa le liquide congelé. Elle remit les éclats dans la tasse, secoua rapidement cette dernière et la boisson était prête. Après quelques gorgés, elle assura que le chocolat chaud était parfaitement froid et félicita le serveur.

-- Vous me flattez. Puis-je vous poser une question ?

-- Allez-y, répondit-elle en sirotant sa boisson qui lui glaçait les dents.

-- Vous êtes nouvelle dans le coin, je me trompe ?

-- Pas du tout.

-- Alors pourrais-je connaître le nom de la charmante demoiselle en face de moi ?

-- Bien sûr, c'est...

-- Hmm ?

Étrangement, la femme ne sut finir sa phrase. Elle était comme bloquée. Pourtant, ce n'est pas si compliqué de dire le prénom "Agathe".
...
Quoi ? Que se passe-t-il ?

-- Euh Nathan, pourquoi est-ce que j'entends ta voix ? questionna la demoiselle.

-- Je n'en ai aucune idée. Et puis où suis-je ? Je... Je vous vois depuis le plafond !

-- Pourtant tu n'es pas là, fit-elle remarquer en regardant vers le haut. C'est... AAH ! Oh non ! Tu es encore là ?!

-- Salut Agathe.

Agathe avait eu la peur de sa vie en réalisant qu'elle était face à face avec Eliott.

-- Eh ! Pourquoi j'ai dit cela ? Je n'ai pas pu m'en empêcher !

-- Et où est Silas ? questionna Agathe en regardant tout autour d'elle. Ah, tu es là.

Le second client se leva et rejoignit le reste du groupe.

-- Voilà quelque chose d'inédit, déclara Silas. Nathan, tu as l'air d'être le narrateur de ce rêve.

-- C'est génial ! Tu penses que je peux faire ce que je veux alors ?

-- Tu n'as qu'à essayer.

-- Fais attention tout de même ! mit en garde la jeune étudiante. Déjà que ta tenue... légère ne me met pas en confiance, je ne veux pas que ça s'empire. Donc rien avec moi, ok ?

-- D'accord, d'accord. Alors je vais... Ahahah ! Je vais bien m'amuser !

-- Je crains le pire, confia Agathe à son subconscient.

Le serveur, qui n'avait rien demandé bien évidemment, avec sa grande maladresse, glissa soudainement sur le sol et s'étala en long sur celui-ci. Agathe ne pu s'empêcher de rire, tout comme Silas.

-- Oh tu vas me le payer toi ! s'écria Eliott. Ramène-toi pour que je te fasse ta fête !

-- Comme si j'allais m'abaisser à toi ?

-- Eh redescend un peu, lança la jeune femme afin de calmer l'égo de Nathan qui se gonflait.

-- Mais je ne peux pas ! ria-t-il.

-- Silas, il y aurait un moyen de sortir d'ici ?

-- Toujours, reste à trouver comment ? Oh je sais ! Nathan, tu peux décider de tout ce qui se passe dans ce rêve, donc tu peux faire apparaître un portail pour qu'on quitte cette endroit !

-- Euh... Non. Je ne suis pas dupe, en quittant ce rêve, je vais perdre ce rôle que j'apprécie énormément.

-- Il ne manquait plus que cela, souffla Agathe. Allez, s'il te plaît, fais-le pour moi.

-- Non, désolé.

-- Tu ne le ferais pas pour ta meilleure amie ?

-- Faut-il te rappeler la façon dont tu m'as traîter la dernière fois ? C'était quoi le mot déjà ? Ah oui, pot de colle ! Eh bien tu sais quoi ? Pot de colle, il te dit d'aller voir ailleurs.

-- Oulala, règlement de compte, murmura Silas.

-- Toi, ne te mêle pas de ça ! s'exclama Agathe.

-- Oh comment elle t'as recalé, intervint Eliott.

-- C'est pareil pour toi !

-- Oooouuh..., fit Silas comme si Eliott s'était violemment blessé.

-- Eh ! relança la jeune femme.

-- Nathan... Je suis vraiment désolée. J'aurai dû réfléchir avant de te dire cela. En plus, c'est complètement faux. Tu n'es pas pot de colle. Enfin, peut-être de temps en temps mais cela ne me dérange pas du tout, au contraire. Je t'apprécie pour ce que tu es.

-- Eh tu l'as rédigé ton discours ou quoi ? demanda Silas sur un ton ironique.

-- Pff...

Nathan... ou plus simplement "je" ne répondis pas. En effet, tout ce qui était autour de nous commençait lentement à disparaître.

☆☆☆☆☆☆☆☆☆☆

Malgré les rêves étranges qu'elle venait de faire, Agathe se réveilla apaisée. De plus, elle savait exactement ce qu'elle avait à faire. Elle se prépara à la hâte et sortit de chez elle trente minutes avant l'heure habituelle. La jeune étudiante attendit donc devant chez elle que son ami passe. Au bout d'une quinzaine de minutes, un jeune homme marcha vers elle. Il avait ses mains dans les poches de veste et traînait des pieds. Même s'il avait la tête baissée, on pouvait voir son expression qu'on pourrait qualifier de sombre. Pourtant, il se mordait la lèvre assez violemment.

-- Nathan ?

Le jeune homme releva la tête et à sa tête, on aurait dit qu'il venait de voir une parfaite inconnue.

Publié le 11/05/2020