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- Mais bouge !!

Le klaxon de ma vieille voiture retentit comme le souffle d'un vieux canard mourrant, mais ça suffit pour attirer l'attention du connard et de sa Ferrari.
Ce dernier me fait un doigt d'honneur et bouge enfin.
Si je n'étais pas aussi content et pressé je lui aurais bien écrasé son doigt pour le lui mettre autre part.

***
J'arrive enfin au magasin de Kyle après des heures coincé dans les embouteillages.

- Je suis là !

Je galère complètement à faire entrer les dizaines de gros cartons remplis jusqu'au magasin, mais Samar est à l'intérieur alors il est hors de question de râler.
Je fini enfin de tout faire entrer, et les autres sont si occupés qu'ils se préoccupent à peine de venir me saluer:
Samar et Isabelle à peindre les murs d'une nuance de bleu très attirante, Kyle et Vanessa à nettoyer les nouvelles étagères, et Alex... disons que ce tas d'os et de chair coordonne les actions des autres assis sur un petit tabouret en mangeant son bretzel.

Vanessa me voit entrer et lâche l'étagère qu'elle nettoie pour venir me faire la bise.

- Tu tombes bien ! On a plus de nettoyant et les filles ont besoin de peinture, sourit-elle en m'ébouriffant les cheveux.

Des fois je me demande si elle se rend compte que c'est moi le plus âgé de nous deux.

Je lui souris alors qu'elle prend rapidement le nettoyant pour retourner au travail. Chacun d'entre eux travaille avec précision. Le magasin s'améliore à vue d'oeil, et les premières livraisons de nouvelles motos et leurs accessoires vont débarquer dans quelques jours.

Le sourire collé aux lèvres de Kyle ne s'est pas affaibli depuis que Samar et moi lui avons annoncé qu'on voulait rénover tout le magasin et l'agrandir.
Après avoir acheter le magasin d'à côté et les avoir réunis en un seul, le résultat est très plaisant.

Je m'approche de la merveilleuse femme qui ne s'est même pas levée pour me saluer et lui glisse un rapide baiser sur le cou.

- Comme ça on ne me salue plus ? Lui murmurais-je en souriant.

- Trop occupée, rit-elle en continuant de peindre le mur de quatre mètres de long.

- Trop occupée ? Plaisantais-je. La directrice de Wilkerson Industry me trouvait toujours du temps libre. Maintenant la meuf au pinceau n'a plus de temps à me consacrer ?

Son rire cristallin gâte mes oreilles alors qu'elle se lève pour m'embrasser doucement.

- Tu as tout compris, sourit-elle. Il n'y a plus de Wilkerson Industry alors il n'y a plus de Samar qui a du temps libre.

- Vous voulez une chambre tout de suite ou j'ai du temps pour saluer mon ami ?

Isabelle se lève pour venir m'enlacer rapidement.

- Tu as apporté les peintures ? Demande-t elle.

- Dans le gros carton.

Elle hoche la tête et se dirige vers les cartons au milieu du magasin.

Samar me tire la langue en souriant pour retourner à son travail.
Elle se porte à merveille, ça a pris quand même quatre mois pour qu'elle digère la nouvelle du suicide de Wilkerson, mais je suis content qu'elle soit redevenue comme avant.

Même mieux qu'avant.

Décider de vendre l'entreprise et ouvrir son propre business a été une des meilleures idées qu'elle a eut. Et décider de collaborer avec Kyle pour améliorer son business et devenir des partenaires est la meilleure idée qu'elle a eut.
Ça apportera beaucoup moins de profit que l'entreprise Wilkerson, mais au moins son nom ne sera plus accroché à celui de son père et, avec le profit de la vente, le magasin de Kyle paraît absolument magnifique, et le compte en banque de Samar a bien été rempli.

Rares sont les moments où elle ne sourit pas, son sourire m'illumine, son rire me donne des ailes.
Elle s'habille toujours comme si elle allait à un défilé, ou une réunion de jeunes femmes d'affaires internationales, comme quoi les anciennes habitudes ne changent jamais.
Mais il lui arrive de porter un bon jean déchiré, un top blanc et une vieille chemise bleue à carreau ouverte - comme aujourd'hui - et ça lui va tout aussi bien.
Tout lui va bien.

Je l'aime plus que tout.

- Psst.

Je me retourne pour voir Alex qui m'invite à m'asseoir près de lui. Je le rejoins rapidement en regardant tous les autres à l'oeuvre.

- Tu l'as acheté ? Me demande-t il en croquant son bretzel.

- Ta gueule, sifflais-je. Si elle t'entend ma surprise est morte.

Il sort un rire moqueur alors que je regarde Samar sans pouvoir m'empêcher de sourire.
Rien que la voir aussi heureuse, pleine de peinture ayant un fou rire avec Vanessa et Isabelle illumine ma journée.

Je n'imagine pas comment serait ma vie si je ne l'avais pas rencontré.
Si je n'avais pas postulé chez Wilkerson Industry.
Si je n'avais pas choisi le bureau de Marketing.
Si je ne l'avais pas croisé dans la fête des Wilkerson où j'avais eu l'audace de l'embrasser. Où elle avait eu l'audace de me giffler.

- Tu vas le lui donner quand ? Demande-t il moins fort.

- Aujourd'hui, souriais-je comme un gamin.

- Ça coûte combien ce truc ? Sourit-il intéressé.

- C'est pas tes affaires.

- Oh allez ! Dit moi !

- Quinze dollars.

- Quoi ?! Quinze dollars pour un truc pas plus grand qu'une crotte de nez ?

- Ta gueule ! Tu vois ? C'est pour ça que tu n'as toujours pas de copine, riais-je. Quinze dollars ce n'est rien, elle mérite même plus.

Elle mérite tellement plus...

***

Après des heures de travail, tout le monde est en sueur et plein de peinture - sauf Alex -.
Nous commandons mexicain et je profite que tout le monde soit occupé à manger pour entraîner rapidement Samar dans le jardin derrière le magasin.
Malgré mes efforts pour passer inaperçu, des sifflements pervers se font entendre.
Et ce n'était pas Kyle ou Alex qui ont sifflé...

Une fois sortis, Samar m'enlève mon sandwich des mains pour m'embrasser longtemps.

- Tu es libre maintenant ? Souriais-je taquin.

- Et oui, rit-elle. Un problème avec ça ?

- Je suis trop accro à toi pour pouvoir te dire non.

Je l'embrasse de nouveau alors qu'elle entoure ma nuque de ses bras.
Elle est mon tout.
Toute ma vie.
Tous mes espoirs.
Tous mes rêves réalisés.

- Et si on s'en allait discrètement ? Proposais-je en lui prenant rapidement la main.

- Quoi ? Rit-elle. Non ! On a du travail Jonathan !

Ma moue d'enfant déçu la fait rire un instant avant que j'abandonne mon idée d'escapade rapide.

- N'oublie pas ce que demain tu pourras passer la journée entière avec moi, me rappelle-t elle en caressant ma barbe.

Comment pourrais-je oublier ? Un an de plus passée près du soleil, du paradis, de Ma Lune.
Les anniversaires n'ont jamais été mon truc, mais cet anniversaire est spécial, et je veux le fêter chaque année.

- J'ai quelque chose pour toi, lançais-je rapidement.

Elle ouvre grand les yeux comme une petite fille attendant son cadeau de Noël. Son sourire attendrissant me fait littéralement fondre.

- Je n'ai pas pu attendre demain, je veux te le donner maintenant, continuais-je en sortant un minuscule sac de velours de ma poche arrière.

Elle attend en me regardant, les yeux brillant d'amour et d'impatience.

- Enlève ton collier..

- Quoi ?

Une minuscule mine d'inquiétude se lit dans ses yeux lorsque je lui demande d'enlever le collier qu'elle n'a jamais retiré depuis qu'elle est sortie de l'hôpital il y a des mois.

- Ne t'inquiète pas, c'est juste pour quelque secondes, plaisantais-je amusé par sa mine enfantine.

Elle se laisse faire et enlève son collier qu'elle me passe.
Je revois le cristal modeste qui pend, ainsi que la petite lune en argent qui représente tellement de choses.
Qui la représente.
Je la regarde du coin de l'oeil en sortant un minuscule pendantif du petit sac, pour l'ajouter au collier, tout près de la lune.

Samar sourit en voyant la petite étoile en argent pendre gentiment près de la lune, et me regarde de ses yeux lumineux.

- Et cette étoile elle représente qui ? Demande-t elle.

- Le petit con qui ne peut plus du tout se passer de la lune, et qui souhaite rester près de sa lune.

Je lui prend les mains en plongeant mon regard dans le sien. Plus rien au monde ne compte. Le magasin pourrait s'effondrer je m'en fou royalement.
Il n'y a qu'elle qui importe.
Elle est ma lune, et je suis son étoile qui ne peut plus se passer d'elle.

- Jonathan, bégaie-t elle en rougissant. Tu n'es pas une étoile... tu es l'univers tout entier.

Elle s'approche pour sceller nos lèvres en un baiser envoûtant, s'accrochant à mes cheveux blonds, ce qui me fait perdre la tête.

- Tu garderas cette étoile près de la lune d'accord ? Je refuse de la voir s'éloigner.

Elle sourit devant cette phrase pleine de sous-entendus et relie nos lèvres une énième fois.

- Jonathan ! Nous coupe Kyle. Ta mère est là !

Samar se retire rapidement en souriant.

- On rentre ? Demande-t elle en me serrant dans ses bras.

- On rentre, souriais-je. Mais il faudra absolument continuer ce que nous avons commencé...

La vie nous réserve bien des surprises.
De l'instant où notre mère nous met au monde jusqu'au dernier instant de notre tout dernier souffle.
Il y a une dizaine d'années j'étais en prison, la liberté n'était qu'un rêve éloigné.
Il y a quelques années, j'étais libre, mais la liberté réelle se trouvait bien loin de moi.

La liberté réelle se trouve maintenant devant moi: Un travail pour passer mes journées, des amis, une mère sur qui je peux compter et un ange aux yeux verts qui reste près de moi.

La vie m'a réservé bien des surprises, bien des malheurs.
Mais jamais je ne pensais pouvoir être aussi gâté de toute ma vie.

La liberté n'est pas pouvoir aller n'importe où, ou ne pas être limité ou enfermé dans une cage sinistre.
Mais c'est bien être heureux et satisfait de ce qu'on a, de ce qu'on a fait et de ce qu'on pourrait faire.

Et là, à cet instant, en plongeant mes yeux dans ceux de la femme que j'aime, de la femme avec qui j'ai fait face à toutes nos souffrances, c'est dans cet instant particulier que je peux dire que je suis

Enfin Libre...

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