Chapitre 8 : Les reperes.
Miss Fowler avait ses petites habitudes journalières. Dès le réveil, elle se précipitait dans la salle de bain pour se refaire une beauté, du moins elle essayait. Ensuite, après avoir préparée le petit déjeunée de son mari et qu'il fût partit au travail, elle s'habillait et s'en allait, comme elle le disait, en ville, pour acheter le pain et flâner dans les grandes rues. A l'occasion, elle entrait dans certains magasins pour voir les nouveautés. Les nouvelles séries de jupes et de chapeaux sans toutefois, bien souvent ne rien acheter. Pour le plaisir des yeux aimait-elle dire. De retour au foyer, elle préparait le dîner en y mettant à chaque fois, tout son cœur et son talent indiscutable à l'ouvrage. Après le départ de Charles pour son travail, elle débarrassait la table et nettoyait les plats qui ne pouvaient pas être lavé dans le lave vaisselle. De temps à autre, après une bonne matinée accomplie, elle s'assoupissait quelque peu dans son merveilleux canapé cuir qu'elle trouvait insolemment confortable. Parfois, elle s'empressait de vaquer à ses occupations, pour rejoindre Miss Ronneby chez elle afin de papoter de choses et d'autre. Ce temps là paraissait bien révolu. Cela faisait un petit bout de temps que Marge Fowler n'avait pas organisé sa journée comme cela. Elle n'osait plus sortir de chez elle. Depuis le massacre chez les Banks, elle regardait les gens traverser la rue ou les enfants jouer sur l'herbe du petit parc de derrière la fenêtre de sa salle à manger. Pourquoi ? Parce que Marge Fowler pensait que tout le quartier savait qu'elle savait. Parce que Marge savait, malgré elle, beaucoup de choses. Parce que Marge n'avait jamais sut taire ses secrets. Parce que c'était une maladie chez elle de devoir raconter tout et n'importe quoi. Parce que quand elle sortait de chez Miss Ronneby qui venait de lui avouer un écart de Miss Maple, par exemple, elle s'empressait d'aller le lui raconter. Marge Fowler ne savait pas se taire et savait aussi que certaines personnes autrefois considérées comme amies, sont devenues des ennemies. Marge se posait beaucoup de questions. Beaucoup trop qui parfois la poussait à faire des choses qu'elle regrettait souvent après coup. Elle avait bien des choses à se reprocher et elle n'était cette fois ci pas la seule à le savoir.
Ce matin là, Marge se décida à reprendre ses activités normales. Charles reput du petit déjeunée et partis au travail avec sa moto, elle se pouponnât, revêtit une extraordinaire robe en satin clair et descendit l'escalier qui menait dans son salon. Elle enfila ses chaussures à talon et ouvrit en grand sa porte d'entrée. Le buste droit et les épaules relevée, les seins pointant l'horizon et le ventre rentré, elle se décida de sortir et de montrer aux autres propriétaires, qu'elle n'avait rien à se reprocher et que s'ils pensaient qu'elle savait beaucoup de choses, elle s'en fichait pas mal. Avec son allure chevaleresque, elle dévalait la rue qui menait vers le bois. Son élégance les ferait tous taire, pensait elle. Elle se mouvait à n'en plus pouvoir, jusqu'à s'en faire des courbatures dans le dos. Marge Fowler se faisait peut être des idées sur ses voisins, mais elle se persuadait du contraire. Elle arpentait la rue et laissa derrière elle le jardin d'enfant. Elle se produisait littéralement en spectacle. Ses plus belles bagues étaient autour de ses doigts. Madame Fowler était de sortie. Puis soudain, une voix fluette se fît entendre.
- « Miss Fowler ! Miss Fowler !
Marge tourna les talons avec l'élégance d'un mannequin sur un podium et aperçut Miss Maple qui accourait vers elle comme un chiot de la SPA devant son nouveau maître.
- Tenez donc ! Miss Maple ! Quel plaisir de vous voir.
- Merci, c'est gentil. Dit elle essoufflée.
- Vous êtes d'une élégance ce matin ! C'est fou.
- Je vous remercie, c'est un sacré compliment. De votre part, il est d'autant plus apprécié je vous assure.
- J'allais justement venir vous voir car j'aurais un petit service à vous demander.
- Mais bien sûr Miss Maple. Si ce service est pour moi réalisable, c'est sans soucis.
- Voilà, j'ai ma fille et mon gendre qui, comme vous le savez, habite à Dublin. Ils m'ont proposés de venir chez eux une petite semaine. Cela fait quelques fois déjà que je refuse d'y aller, vous comprenez on a toujours peur de déranger un jeune couple, mais cette fois ci, je me tenterais bien d'y faire un tour. J'aurais aimée, si c'est possible, vous laisser les clefs de ma demeure pour que vous puissiez ouvrir les volets chaque jour de mon absence. Vous savez bien que les odeurs s'installent vite quand on laisse les volets fermés trop longtemps.
- Hé bien... Oui ce serait avec plaisir.
- Ah ! c'est bien aimable de votre...
- A une seule condition.
Miss Maple se doutait qu'il y aurait une ou des conditions. Miss Fowler ne fonctionnant qu'avec des conditions, elle s'attendait au pire.
- Oui, je vous écoute dit elle un peu tendu.
Après un petit instant de silence opportun, Marge, gorge sensuellement déployé s'exclama :
- Que vous me rapportiez une bonne bière de chez Spencer et compagnie.
Soulagée de sa réponse, elle s'esclaffa :
- Oh mais bien sûr Miss Fowler ! Bien sûr, je vous en ramènerai un carton.
- Quand devrais-je garder votre maison ?
- Ce n'est pas pour tout de suite, ce n'est pas la semaine prochaine mais l'autre semaine. La semaine numéro 9. Entre le 15 et le 22.
- Bien. J'en parlerais avec Charles mais considérez que c'est acquis comme cela Miss Maple, en plus si je lui parle de bière de chez Spencer, il en sera plus délicat.
- Je vous remercie Miss Fowler.
- Mais... Ne me remerciez pas Miss Maple, c'est normal de se rendre des services entre voisins n'est ce pas ?
- Bien sûr... Bien sûr... » Fût-elle obligée d'ajouter.
Elles se séparèrent, l'une étant contente d'avoir trouvé quelqu'un de confiance pour sa maison et l'autre satisfaite d'avoir pût montrer qu'elle n'était pas qu'une éponge à ragots. Le talon aiguille claquant sur l'asphalte, Miss Fowler reprit sa démarche assurée et pleine de sensualité quand pour la seconde fois, la voix Miss Maple la fît se stopper.
- « Miss Fowler ! Cria t elle, car elles étaient désormais assez éloignées l'une de l'autre.
Vous avez un peu de chocolat au lait séché sur la joue droite ! »
La stupeur envahit Marge au point qu'elle se mit à rougir d'un seul coup. Elle se retourna vers sa destination et tourna sèchement le dos à Miss Maple en ne la remerciant qu'à peine. Elle poursuivit son chemin avec un peu moins de classe évidemment. Elle se posta à l'arrêt de bus et attendit debout, car il était hors de question qu'elle salisse sa belle robe en satin. Elle se mit soudainement à parler toute seule.
- « J'ai peut être du chocolat sur la joue mais je suis bien habillé, moi ! Mes ongles frôlent la perfection et je sais marcher avec des talons aiguilles, moi ! Je n'ai pas une sorte d'anorak effilé aux manches et je mesure plus d'un mètre cinquante. L'élégance est innée chez moi, je n'ai pas besoin de me forcer pour ressembler à un être humain et ... Patati et patata.
Elle se parlait à elle-même et commençait à sentir monter en elle, une curieuse sensation qui s'appelle la haine. Marge Fowler n'avait jamais eut de chance dans sa vie. A part le fait d'avoir épousé un homme qui avait réussi à gagner beaucoup d'argent en maîtrisant d'une main de maître les aléas boursiers, les cours, placements et tout un tas d'autres mouvements bancaires. Elle, elle s'en moquait bien de tout cet argent. Elle ne comprenait rien à la bourse de toute façon. Charles avait eut plusieurs fois l'intention de lui expliquer les rudiments des échanges monétaires et des fluctuations et bien d'autres choses encore, mais Marge se fichait bien de savoir comment le compte commun était approvisionné. Marge avait été, dès sa plus tendre enfance, habituée aux malheurs. Déjà toute petite, elle portait sur elle les malheurs de la terre entière. A l'âge de 6 ans, sa mère décéda d'un tragique accident de cheval. Son papa l'éleva tant bien que mal mais avait essayé de faire tout son possible pour le bonheur de sa fille. Cependant, Marge attirait comme un aimant tous les ennuis possibles et inimaginables. Quelques années plus tard, l'entrée au collège fût difficile. Elle se souvenait par exemple qu'à la fin d'un cours de mathématiques, elle n'osa pas se lever de sa chaise car le bois sous ses fesses était imbibé de sang qu'elle venait de perdre dût à ses premières menstruations. Toutes les autres filles de sa classe avaient réussis à éviter cette honteuse situation, sauf elle. A partir de ce jour là, les moqueries commencèrent et le calvaire ne se termina plus jusqu'à aujourd'hui. Les années lycée furent elles aussi très délicates. Marge avait l'impression que tout ce qui était négatif était pour elle. Elle pensait qu'elle était née pour vivre, souffrir et mourir. Aucune fois dans sa vie, elle ne ressentit le plaisir d'éprouver une réelle satisfaction, un moment de plénitude, de gloire. Ce moment, elle crut pourtant bien le tenir un jour. Au lycée, elle c'était inscrite à un cours de théâtre, le but étant, en fin d'année, de récolter des fonds pour un voyage à l'étranger en donnant des représentations payantes. Toute l'année elle incarnait, trois soirs par semaine, Leila la prêtresse d'un royaume perdu. Elle se donnait à fond pour que toute la troupe puisse partir à l'étranger. Tout était fait. L'argent récolté, les bagages bouclés, mais au moment de quitter sa maison pour rejoindre le groupe, elle se fît renverser par une moto. Tibia Perronet fracturés, clavicule cassée. Six mois d'hôpital plus tard, elle n'avait pas pût partir en voyage avec sa troupe mais avait rencontré son futur mari. Son instant de gloire ? Marge Fowler l'attendait toujours et encore.
- « Alors Raynquard ? Cela donne quoi ?
- Attends un peu Lautrec ! Tu as mis neuf mois ! Tu peux bien attendre deux minutes ! Ha ! ça y est ! Les résultats sortent de l'imprimante.
- Alors ?
- Je vais te décevoir Lautrec ! Négatifs.
- Quoi négatifs ? Dit-il interrogatif.
- Hé bien il n'a rien trouvé. La personne qui a envoyé cette lettre a pris soin de la coller et non de la lécher.
- Hé merde alors ! Cria t il dépité. Ce n'est quand même pas un civil qui va me faire tourner en bourrique bordel ?
- Si j'étais toi Lautrec, sais tu ce que je ferais ?
- Si c'est pour dire des conneries, abstient toi je ne suis pas d'humeur.
- Si j'étais toi, je laisserais cette personne t'écrire et voir si ce qu'elle te dit est vrai. Si vraiment cette personne te fait tourner en bourrique, tu t'en apercevras bien assez tôt.
- Ouais tu as raison. Je vais la laisser m'apporter quelques indices. S'il s'avère que c'est une fausse piste, je trouverais bien le moyen de la coincer autrement. »
Raynquard et Lautrec ressortirent du laboratoire de recherche sans avoir plus d'informations sur l'étrange enveloppe et finirent la nuit sur un banc non loin du laboratoire.
Les lueurs des lampadaires n'offrent souvent qu'une clarté partielle et on peut parfois avoir le sentiment que nous ne sommes pas seul à ce moment précis. Raynquard et le commissaire Lautrec n'ont pas eut cette nuit là cette désagréable impression et pourtant... Peut être durent ils l'avoir eut.
Lautrec rentra chez lui pour se reposer un peu et se poster devant son écran d'ordinateur pour rassembler tous les éléments en sa possession. Alors qu'il pensait l'affaire quasiment bouclé et qu'il ne lui restait plus qu'à rassembler toutes les preuves scientifiquement prouvés pour retrouver le coupable, il s'arrachait les cheveux aujourd'hui avec des éléments en pagaille plus contradictoire les uns que les autres.
Son organisation habituelle, qui était il faut bien l'avouer, très carré, allait d'un seul coup être complètement chamboulé par un élément perturbateur qu'il n'avait pas prévu, et ne pas prévoir le déroulement d'une affaire dans les moindres détails revêtait d'une complexité supplémentaire pour lui.
Un café bien serré et un muffin au chocolat plus tard et Lautrec s'était endormit sur ses feuilles, ses dessins et ses annotations hypothétiques. Lautrec était très professionnel. Il remplissait des pages entières avec des mises en situations de meurtre. Quand les affaires étaient difficiles à résoudre, il lui arrivait même parfois, de faire des maquettes.
Le cerveau au repos et les pensées aussi, Lautrec sursauta d'un coup de son siège de bureau lorsque la sonnerie de son téléphone retentit.
Dring ! Dring ! ... Dring ! Dring !
La tête encore posée sur son bureau et les yeux tout englués, le bras de Lautrec se tendit pour accéder au téléphone. La main tâtonnant le dessus du meuble trouva enfin le combiné.
- « Allo ? Dit-il d'une voix encore toute sèche et hésitante.
- Je vous avez pourtant demandé de me faire confiance Lautrec ! Annonça une voix étouffé et sensiblement camouflée.
- De quoi parlez-vous ? Et qui êtes vous ? Dit-il d'une voix cette fois ci totalement réveillée.
- Si vous aviez eut des résultats positifs provenant de votre petite escapade de cette nuit vous le sauriez déjà !
- Vous êtes la personne qui m'a écrit cette lettre ? Questionna t il en enclenchant son détecteur d'appel satellite.
- Oui, mais apparemment, vous ne désirez pas que je collabore avec vous puisque vous désobéissez déjà à ma première demande de ne pas chercher à connaître mon identité !
- Non attendez ! je voulais juste...
- De plus, puisque vous n'êtes pas parvenu à vos fins, vous continuez à vouloir savoir qui je suis pendant notre conversation téléphonique en actionnant votre détecteur d'appel !
- Comment savez-vous cela ? Vous êtes ici ? Vous m'espionnez ? Dit-il d'un ton qui trahissait son habituelle confiance en lui.
- Si vous ne souhaitez pas que je vous aide, dites le moi maintenant. Je ne peux vous être utile que si je sens que vous ne me ferez pas faux bon. Si tel est le cas, éteignez tout de suite votre détecteur, sinon, ce sera terminé entre nous. »
Lautrec regardait tout autour de lui et par la fenêtre de son salon pour voir si quelqu'un, peut être caché quelque part l'observait mais il ne vît rien de cela. Il posa délicatement son doigt sur le bouton du détecteur et hésita un instant à l'éteindre. Puis, il actionna le bouton et l'éteignit à contre cœur.
- Ca y est c'est fait ! dit il légèrement amer.
- Je sais ! C'est bien... C'est bien, vous commencez à comprendre le fonctionnement. Quelle heure indique votre montre Lautrec ?
- 13 H 15 environ, pourquoi ?
- Ajustez là pour qu'elle indique 13 h 18, car c'est l'heure exact.
- Je ne vois pas où vous voulez en venir.
- Nous avons désormais la même heure et cela nous sera très utile pour les prochaines fois ! Je peux d'ores et déjà vous annoncer que cela fait très exactement 38 minutes que le premier indice est à votre disposition dans votre boite aux lettres personnelle.
- Comment cela ?
- Je dois vous quitter Lautrec ! habillez vous, rasez vous et allez ouvrir votre boite. Je vous rappel qu'il est indispensable que vous suiviez toutes mes indications au mot près et à l'heure précise. Ne me faite pas douter encore une fois de vous Lautrec. A bientôt. » Le bip de fin de conversation retentit et le commissaire, abasourdit, raccrocha.
Impatient, il s'apprêta à courir pour ouvrir sa boite quand le téléphone retentit une nouvelle fois.
- « Vous n'écoutez pas ce que je vous dit Lautrec ! Vous avez le temps ! La lettre ne va pas disparaître comme par enchantement ! Prenez le temps de vous habiller et de vous raser ; je vous assure que vous aurez meilleure mine ! » Et la conversation se termina brusquement sans qu'il n'eut le temps de dire quoi que se soit.
Il s'exécuta comme un gamin à qui l'on dit de ranger ses jouets avant de pouvoir consommer un bonbon et lorsqu'il fût prêt, il prit dans sa main la toute petite clef de sa boite aux lettres et l'ouvrit délicatement. Une seule et unique lettre était déposée. Exactement la même que la première, même écriture, même enveloppe, même couleur de stylo bille.
Il se posa lourdement sur son fauteuil, l'ouvrit, et en commença la lecture.
Commissaire Lautrec
Pour une fois, vous ne cherchez pas en premier là où il le faudrait. Laissez donc Miss Maple tranquille. Pour le moment. Je vous propose aujourd'hui, de découvrir un étrange indice qui vous permettra peut être de comprendre l'un des trois mobiles qui ont engendré ce massacre. Vous avez posté devant la maison ensanglantée, deux de vos hommes pendant près d'un mois. Ne vous êtes vous jamais demandé si l'important des recherches n'était pas plutôt à l'intérieur de cette maison ? Vous allez vous rendre à Enfield road dans la maison des Banks et ouvrir leur porte à 16 h précise. Pas avant et pas après. Pour trouver ce mystérieux indice, il vous faudra faire marcher votre jugeote car je ne vous donnerez rien de tout cuit. Voici mon énigme :
« Quand la fleur pleure, sa tige se fige. »
Vous n'avez plus qu'à trouver. Bon courage et bonne chance. Je vous recontacterez dans trois jours. Si vous n'avez rien trouvé d'ici là, l'indice sera éternellement perdu. Il est évident que vous êtes le commissaire de cette enquête, vous ne devez parler à personne de ce que vous trouverez et vous ne devez pas vous faire aider. Tout ce que vous ferez après avoir lu cette lettre, vous devrez le faire seul.
MLF.
Lautrec enfila sa veste et ferma sa maison à clef. Il prit son téléphone portable et prévint ses collègues qu'il ne serait pas présent au commissariat pendant trois jours et enclencha la première vitesse de sa voiture. Le paysage défilait à grande vitesse autour de la voiture du commissaire qui se sentait espionné même jusque dans sa voiture. Qui pouvait bien être cette personne ? La voix au téléphone était bien trop caverneuse et camouflé pour pouvoir reconnaître ne serais ce que le sexe de cet individu. Pour la première fois de sa vie, le commissaire avait l'impression d'agir comme un mouton. Bien sûr qu'il en avait résolu des enquêtes ! Mais jamais seul ! Ceux qui avaient toujours fait sa gloire étaient ces collègues. Sans eux il ne serait pas le grand commissaire qu'il était devenu. A qui pouvait bien appartenir ces trois consonnes « MLF » signé à chaque fois ? Se demandait Lautrec en regardant de nouveau la lettre posé sur le volant en attendant sagement l'heure devant la maison des Banks.
15 h 59 ! Lautrec claqua la portière de la voiture et se posta devant la porte. Il inséra la clef dans le canon sans la faire tourner. Une minute plus tard, il était dans la maison et commença par observer tout ce qui pouvait ressembler à une fleur. Rien de tout cela n'apparaissait dans le couloir ni même dans la salle à manger où l'odeur du sang prédominait. Rien non plus dans le salon alors il poussa la porte de la cuisine. Un bouquet de roses fanés trônait sur le plan de travail. Il se surprit à les inspecter de long en large pour voir si, au cas où, l'une d'entre elles pouvaient pleurer. Une fleur qui pleure ? Comment cela se pouvait il ? Il lui semblait plus judicieux de prendre cette énigme au sens figuré, mais dans cette affaire rien ne semblait impossible alors... Par acquis de conscience, il souleva le vase et passa sa main sur la table pour finalement le reposer à son endroit initial. Il quitta la cuisine et monta dans les étages. Sur la droite en haut des escaliers, se trouvait la chambre de Linda et de Tom Banks. Il y entra et ouvrit les placards, penderies et autres tiroirs. Rien ne coïncidant avec une quelconque fleur qui pleure et une tige qui se fige. Une lourde ambiance pesait dans cette maison. C'était la première fois que le commissaire Lautrec ressentait cela sur une scène de crime et pourtant il en avait vu.
Il referma la porte de la chambre des parents de Sonny et de Marty en ajoutant un « paix à leurs âmes ». Sur la gauche de l'escalier, une porte avec un écriteau « Ne pas déranger », se postait là devant lui. Il l'ouvrit malgré la recommandation, pensant de toute façon qu'il n'y dérangerait plus personne. De magazines de mode en magazines de stars s'entassant les uns sur les autres, Lautrec compris que cette chambre appartenait à la fille de la famille. Il fouilla partout mais là encore, rien de bien intéressant si ce n'était un petit calepin fermé avec un petit cadenas minuscule. Il s'agissait du livre intime, que beaucoup d'adolescente de l'âge de Sonny Banks possédaient. Il posa ses fesses sur le lit et tenta de percer les secrets les plus profonds que pouvaient renfermer ce calepin. Il l'ouvrit sans mal mais avec une certaine pudeur qui ne lui était pourtant pas familière et ne tarda pas longtemps pour s'instruire. Il renfermait des sujets qu'ont toutes les jeunes filles de son âge. Du professeur de sport trop sexy en passant par certains tics d'élèves énervant. Des sujets banals et peu interressant si ce n'était quelques frasques inavouables familiales. Sonny indiquait notamment que la passion de son frère pour la France était totalement débile. Que sa mère l'énervait lorsqu'elle mettait des gâteaux dans son cartable à son insu. Que le temps que passait Tom dans la salle de bain était littéralement abusé. Elle indiquait aussi des choses plus personnelles. Par exemple, la délicatesse qu'avait Tom, qui n'était pas son père avec elle. Lautrec avait bien compris en lisant le rapport d'ADN de la scientifique, que Tom n'était pas le père biologique de Sonny. Un détail anodin dans l'enquête pour Lautrec. Elle avouait très honnêtement que sa mère notamment lui donnait plus d'amour qu'à son frère. Que Linda était bien plus intéressée par sa fille que par Marty. Elle annotée aussi quelques injures sur ses voisins, Miss Ronneby était selon elle, une vieille sorcière vicieuse. Miss Rosière était sa préférée. Elle obtenait trois pages à elle seule. Elle disait que c'était ce couple Français exilé qui avait donné le goût de la France à son frère. Que leurs parties conjugales étaient déplorables surtout quand elles étaient faites les volets ouvert. Tout un tas de reproches plus futiles les uns que les autres. Seuls inconnus et dispensés de jugement, les Fowler. Lautrec se demandait bien pourquoi mais ne s'arrêta pas à cela, il lui fallait découvrir l'indice qu'il recherchait depuis trois heures maintenant. Il referma le journal intime et le remit sur la table de chevet de Sonny Banks et après un coup d'œil circulaire pour s'assurer que rien ne lui échappait, il sortit de la chambre et se dirigea vers la salle de bain. Pas grand-chose ne lui sauta aux yeux. Des serviettes humides où n'apparaissaient pas de fleurs qui pleuraient. Il poussa ensuite la porte de la chambre de Marty Banks et entra dans un silence religieux. Un vrai musée se dressa devant lui. Des tours Eiffel en plastiques, des photos aériennes de Paris. Au dessus du lit, punaisé au mur, un énorme drapeau bleu, blanc et rouge. Sur le petit bureau, une collection impressionnante de timbres Français et de pièces de toutes sortes, il y avait même des boites de camembert moulé à la louche. Tout un attirail qui faisait que la chambre semblait être toute petite et ce n'était pourtant pas le cas. Le commissaire fouilla tant bien que mal en enlevant certaines choses à droite pour les déposer à gauche puis les remettre à droite, le désordre de cette chambre lui rappelait étrangement son bureau. Il entreprit d'ouvrir le tiroir du bureau de Marty. Des copies doubles entières entassées où étaient raconté l'histoire de France et la géopolitique Française, son PIB, sa population, ses ports, ses fleuves, ses devises, Liberté, Egalité, Fraternité, la valeur monétaire et les nouvelles et anciennes monnaies... Lautrec chercha en vain un journal intime et se dit de toute façon que même s'il en avait un, il ne parlerait sans doute que de sa passion. Il commençait à être fatigué de chercher tout et n'importe quoi et doutait soudain de pouvoir trouver quelque chose dans cette chambre. Il doutait tout court de cet indic inconnu. Le commissaire décida de laisser tomber et de s'en aller sans être passé avant cela aux toilettes pour des besoins naturels qui l'encombraient depuis une bonne heure. Il redescendit les escaliers pour se retrouver dans le couloir menant à sa destinée. Lautrec baissa son pantalon en velours ancien et posa son séant sur la cuvette et se mit à réfléchir. La tête posée sur ses mains et les coudes posés sur ses genoux. Après un temps de réflexion, il releva la tête vers le mur d'en face qui arborait un magnifique cadre incrusté dans le mur. Il avait enfin trouvé...
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