Chapitre 5 : La fraternité morale.

Dans un hangar bien protégé, complètement à l'écart de la vue du tout public, le 4x4 était analysé de fond en comble. Les housses arrière et avant enlevées et passées au peigne fin par la brigade scientifique. Le sang dans le coffre recueilli sur des cotons pour l'analyse ADN.

Une bonne dizaine de personnes tout de blanc vêtus tournaient autour de la voiture en essayant de ne passer à côté de rien.

- « Chef, je crois que j'ai trouvé quelque chose qui va vous intéresser au plus haut point.

- Si c'est du sang ou des cheveux, nous avons déjà agent Scott.

- Non, non, c'est bien plus intéressant encore chef ! »

Le chef de la brigade scientifique sortit alors du capot du véhicule et s'avança tranquillement vers l'arrière où l'attendait l'agent Scott.

- « Qu'avez-vous trouvé qui mérite mon déplacement ? Scott.

- Regardez chef, juste derrière le passage de roue gauche. »

Il se pencha et écarta doucement le coffrage qui entourait le passage de roue et fût surpris de ce qu'il y vu. Le peu qu'il apercevait ressemblait au plus près à un manche de pelle ou de pioche recouvert de traces de sang mais aussi et surtout de trace de doigts.

- « Scott !

- Oui Monsieur.

- Faites moi sauter ce cache misère s'il vous plaît.

- Bien Monsieur »

L'agent Scott s'exécuta aussitôt et dépeça délicatement le passage de roue de son cache en bois jusqu'à ce qu'il ne lui reste dans les mains que cette étrange découverte. Une hache tachée de sang.

- « Incroyable ! Emmenez moi cela au labo Scott. Vous leur demandez qu'il fasse une analyse approfondie de cette hache. Toutes les traces de sang, empreintes et compagnie...

- Bien chef. Je l'apporte tout de suite chef.

- Scott...

- Oui chef ?

- Ca fait huit ans que l'on bosse ensemble parfois jour et nuit. Je vous en pris, arrêtez de m'appeler chef, ca me fatigue.

- D'accord chef... Heu enfin je veux dire...

- Appelez-moi mulot.

- Mulot ?

- Ne faites pas l'ignorant Scott ! Je sais que c'est le surnom que vous me donnez tous dans la brigade.

- Ah mais non chef ! vous vous méprenez, je vous assure...

- Allez ! Ca va Scott ! Arrêtez de pâlir comme ça, on va être obligé d'appeler les collègues pompiers. Vous demandez aussi à la balistique qu'il me fasse un rapport complet sur l'utilisation de cette hache, une durée etc.

- Très bien... j'y vais, dit-il un peu gêné. »

La nuit était tombée et les chercheurs travaillaient dur sur ce véhicule qui regorgeait de stupéfiantes choses. Quand enfin, vers 6 heure du matin, toutes les analyses eurent étés faîtes dévoilant d'étranges résultats.

- « Allo, ici Raynquard de la scientifique, pourrais je parler au commissaire Lautrec s'il vous plaît.

- Il est actuellement en rendez vous, et je ne sais pas si...

- J'ai des choses plus qu'importantes à lui annoncer.

- Oui je me doute mais vu qu'il est en rendez ...

- Ecoutez mon petit, il s'agit d'éléments qui pourront certainement mettre la main sur le massacreur du dossier Banks à Enfield road. Alors son rendez vous, j'en ai rien à secouer, Surtout si c'est un rendez vous de fin de nuit, si vous voyez ce que je veux dire...

- Ah oui... Le dossier Banks, je vais voir ce que je peux faire tout de suite.

- J'aime mieux cela !

A peine quinze secondes plus tard, arrivant essoufflé au combiné téléphonique, le commissaire répondit :

- Lautrec j'écoute.

- Hé bien alors commissaire, comme ça on est en rendez vous de nuit ?

- Hé bien oui, j'interrogeais un mineur qui...

- Je me fiche de ce que vous faisiez avec la prostituée de dernière heure qui n'a pas eut le temps d'échapper à votre panier à salade ! J'ai des choses à vous dire Lautrec. Des choses de la plus haute importance donc pas par téléphone.

- Très bien. Où et quand ?

- Dans une heure, juste le temps pour moi de traverser le compté. Rendez vous au bar « la tulipe bleue » au carrefour de la 8ème et du 9 ème quartier ouest.

- J'y serais. A tout à l'heure. »

Le commissaire Lautrec s'empressa de faire relâcher la femme de mauvaise vie qu'il avait effectivement fait arrêté dans la nuit, enfila son manteau et quitta les bureaux du commissariat pour aller au rendez vous fixé par l'agent Raynquard. Le commissaire Lautrec avait un énorme problème. Il n'avait pas le sens de l'orientation et même s'il avait fait installer un système de guidage par satellite dans sa voiture de fonction, il lui arrivait de se perdre. Sa femme disait souvent qu'il se perdrait entre la baignoire et le lavabo de leur salle de bain ! C'est dire ! Du coup, après trois quart d'heure à tourner en rond comme un poisson rouge, il trouva enfin le bar en question où l'attendait déjà l'agent Raynquard.

- « Vous avez du retard commissaire ! Serais ce la garde à vue de cette nuit qui vous a retenue ? »

Pendant ce temps à quelques kilomètres du bar où se trouvait le commissaire Lautrec et l'agent chef de la police scientifique, se trouvait toujours Charles qui après quelques examens, sortit de son lit et descendit au 3ème étage de l'hôpital discrètement. Malgré tous ses efforts commando pour éviter de croiser quelconque personne dans les couloirs, il tomba nez à nez avec un infirmier.

- « Bonjour Monsieur, excusez moi de vous déranger, je sais que vous avez beaucoup de travail mais j'ai un ami cher à mon cœur qui se trouve dans cette chambre juste là et j'aurais aimé avoir de ses nouvelles s'il vous plaît.

- Vous voulez parler du patient Banks qui est dans le coma ?

- Oui exactement.

- Pour l'instant son état est stationnaire, il ne va ni mieux ni moins bien. Ce qui nous étonne le plus, c'est que son état physique ne permet pas vraiment de dire qu'il se trouve dans un coma profond mais tant que rien ne bouge et qu'il ne revient pas à lui, si je puis m'exprimer ainsi, nous devons continuer à veiller sur lui.

- Bien. J'aurais encore juste une petite question, si votre temps le permet.

- Allez-y !

- Vous allez la trouver idiote cette question, mais est il possible qu'une personne comme Marty Banks actuellement, puisse sortir de son lit et je ne sais pas moi, par exemple sortir de l'hôpital et conduire une voiture ?

- Effectivement, sans vouloir vous offenser, cette question est grotesque. Comment ce jeune homme, qui n'est pas encore physiquement assez fort pour prendre sa soupe à la cuillère tout seul et qui ne le pourrait pas d'ailleurs car il est toujours inconscient, je vous le rappel, pourrais alors sortir de l'hôpital, prendre une voiture pour faire je ne sais quoi, et rentrer le soir en se recouchant dans son lit tranquillement ? Je sais bien que vous n'êtes ni infirmier ni médecin mais pensez vous que son état le permettrai ?

- Non bien sur... Suis-je bête ! Comment le pourrait-il ? Pardonnez-moi Monsieur je suis un peu fatigué et quand il en est ainsi, je me surprends à raconter n'importe quoi ! » Seules les lèvres de Charles pensaient ce qu'elles venaient de dire. Lui-même n'était pas vraiment convaincu que ce ne soit pas possible. Il était certain que la personne qui conduisait ce 4x4 était Marty Banks.

Charles posa son séant sur l'un des inusables bancs dans les salles d'attente du 3ème étage et regardait une émission pompeuse à la télévision, très petit format de celle-ci. Son regard semblait hagard comme si il venait de fumer trois cigarettes à la marijuana d'affilée. Puis soudain, le bruit d'un pas lourd et cliquetant qui ne lui était pas inconnue résonna dans le couloir. Il se pencha pour que ses yeux échappent le mur qui séparait la salle d'attente et le couloir, et aperçu avec stupeur, comme à chaque fois qu'il l'apercevait désormais, Miss Ronneby haletante, visionnant à droite puis à gauche du couloir pour voir si quelqu'un était présent. Enfin assurer que personne ne l'interpellerait, elle poussa la porte de la chambre de Marty Banks et y entra. Charles bien que déjà assis et surpris, se leva d'un bon et se posta aux abords de la porte restée entrouverte par Miss Ronneby.

Miss Ronneby s'approcha lentement du lit de Marty Banks tout en regardant furtivement autour d'elle pour s'assurer que personne ne pouvait la surprendre. Elle caressa délicatement les cheveux de Marty en le regardant d'un œil bienveillant, comme celui que pourrait avoir une grand-mère envers son petit fils puis changea d'attitude d'un seul coup. Elle se pencha doucement de son visage et lança trois mots qui glacèrent le sang de Charles.

- « Adieu. Marty Banks. »

Puis, d'un geste assurée, elle prit dans ses vieilles mains une canule reliée à la fois à une machine et au corps du jeune Banks et commença à la desserrer lentement. Tout en le contemplant, avec un sourire diabolique, elle desserrer doucement. Charles, posté le long de la porte, ne savait plus quoi faire. Devait il prévenir un infirmier ou aller lui-même stopper l'acte meurtrier qu'allait accomplir avec un contentement certain, Miss Ronneby ?

Charles n'eut pas besoin de faire quoi que se soit car il fût encore plus étonné quand il entendit une voix qui disait fermement :

- « Si j'étais vous, Miss Frances Ronneby, je revisserais tout de suite cette canule. Vous me décevez tant. Vous avez pourtant un si jolie prénom ! »

Miss Ronneby sursauta et s'exécuta aussitôt.

Pendant ce temps là, assis dans le bar de la tulipe bleue, le commissaire Lautrec s'impatientait d'entendre ce qu'avait à lui dire l'agent Raynquard.

- « Un accident a eut lieu hier soir entre deux véhicules dont un 4x4 qui m'a été envoyé par des collègues de la 8ème. La première chose édifiante retrouvé dans ce véhicule est le porte feuille de son propriétaire. Un certain Monsieur Ronneby Alphonse.

- C'est impossible. Alphonse Ronneby est décédé il y a plus de deux ans !

- J'ai comme l'impression que pour une fois, vous bâclez un peu vite votre enquête commissaire. Regardez donc vous-même dans les registres des décès des trois dernières années. Nulle part vous y trouverez le nom d'Alphonse Ronneby. Il appartient au dossier des personnes disparus.

- Oui, disparu, donc décédé !

- Faux. Si vous faisiez bien attention, vous auriez remarqué que la case décès qui est en général cochée, je vous l'accorde, ne l'est pas pour Alphonse Ronneby ! Peut être, mais cela relève de votre travail et de vos compétences que je ne saurais bafouer, vous devriez poser quelques question à sa veuve concernant son mort vivant de mari.

- J'ai interrogé Miss Ronneby sur le drame de la famille Banks. Jamais je n'aurais pensé devoir le faire pour son mari.

- Ce n'était qu'une suggestion, commissaire. La deuxième chose est inexplicable. Dans le coffre de ce véhicule, sous la moquette, une énorme marre de sang recouvrait quasiment tout le plancher. Après toutes les analyses que nous avons pût faire, et après un premier résultat, j'ai demandé à ce qu'il soit reconduit pour que nous soyons sûr de ce que nous avancions et aucun doute n'est plus permis aujourd'hui. Dans ce coffre, trois sang différents ont étés détectés. Après comparaison faite par nos équipes sur place à Enfield road et celle du labo, le sang retrouvé appartenait à Miss Banks Linda, Monsieur Banks et sa fille. La coagulation, les critères métaphysiques et les rhésus correspondent en tout point, rien ne fait défaut. Les trois corps se sont forcement retrouvés à un moment donné dans le coffre de ce 4x4.

- In-cro-yable !

- Ce n'est pas fini commissaire, le plus incroyable est à venir. Enfin, la troisième chose que j'avais à vous dire, c'est que sous le passage de roue, nous avons trouvé une hache pleine de sang et d'empreintes digitales. L'analyse complète n'est pas encore terminée. Par contre, les empreintes ont été identifiées et cela d'une manière plus que certaine. Elles appartiennent sans aucun doute possible à ...

- Désirez-vous un autre café, Messieurs.

- Heu... Oui s'il vous plaît.

- Elles appartiennent à Miss Maple !

Le commissaire en resta bouche bée. Dans son esprit, Miss Maple ne pouvait pas avoir fait cela. Elle était bien trop effacée et tellement serviable et tellement tout à la fois.

- Ce n'est pas possible, Miss Maple n'est pas le genre de femme à...

- Je ne vous demande pas si Miss Maple eut été capable d'avoir fait un massacre ou si Alphonse Ronneby est encore vivant ou même encore qu'ils aient put faire ce carnage à deux. Je vous dis simplement et avec tout ce que le progrès scientifique peut apporter comme certitude aujourd'hui, qu'il ne peut y avoir aucun doute sur les empreintes retrouvées sur le manche de cette hache. Elles appartiennent à Miss Maple. Lorsqu'elle été un peu plus jeune, Miss Maple a été arrêtée pour conduite en état d'ivresse, et vous connaissez la procédure aussi bien que moi. Alcotest, cellule de dégrisement et prise des empreintes digitales. Elles correspondent à cent pour cent. »

Le commissaire Lautrec n'en revenait toujours pas. Si bien que lorsque la serveuse lui amena son deuxième café, il lui demanda de lui ramener un whisky.

Miss Maple serait elle sa coupable ? Le commissaire ne le pensait pas mais tout était envisageable puisque apparemment il se pourrait qu'un disparu ne le soit plus vraiment deux ans après.

- « J'aimerais faire acquisition de la hache dès ce soir pour preuve à conviction. Dès cet après midi, je convoquerais celle qui figure désormais comme le suspect numéro 1 ; enfin avec Monsieur Ronneby bien sur.

- L'analyse de l'objet n'est pas totalement terminée, elle devrait l'être dans la fin de matinée. Je vous la ferai parvenir avec le bilan complet sous scellé par l'un de mes collaborateurs au plus vite.

- Très bien, je vous remercie. Je serais bien resté encore un peu avec vous, mais j'ai du pain sur la planche.

- Bon courage commissaire.

- Merci, nous allons en avoir besoin. Les quelques nuits qui arrivent s'annoncent longues et difficiles. »

Ils se quittèrent comme ils s'étaient trouvés en se serrant la main et en reprenant chacun la direction de leur lieu de travail. Lorsque Lautrec arriva à son bureau, c'était l'effervescence. Tous étaient attablés devant quelques amuses bouches appétissant et un verre de champagne bon marché, ce qui eut le don de mettre le commissaire dans un état d'humeur plus que préoccupant. Il devint impénétrable, furieux et grossier par la même occasion, ce qui ne lui arrivait presque jamais.

- « Qu'est ce que c'est que ce bordel la dedans ? Il y a du boulot sur l'affaire Banks. J'ai de nouvelles infos qui méritent réflexion, je veux tout le monde sur le coup et réunion dans mon bureau dans cinq minutes ! Ramassez moi tout ce bordel et mettez vous au boulot ! » Dit il légèrement énervé. Il s'avançait vers son bureau et quand il apposa la main sur la clenche, il se retourna vers tous ce petit monde qui paraissaient bien décidé à finir de fêter leur évènement et s'exclama :

- Au fait ! Vous étiez censé fêter quoi au juste ?

Lisa Barclay, la plus jeune du service en termes d'ancienneté, leva son verre et répondit au commissaire :

- Mais Monsieur, c'est votre anniversaire aujourd'hui ! »

Lautrec, tellement pris par cette affaire, en avait même oublié de fêter son anniversaire.

- « C'est très sympa d'y avoir pensé les gars mais nous feront la fête une prochaine fois. Mettez vos bouteilles au frais, nous feront péter les bouchons quand nous auront bouclé l'affaire Banks et bouclé par de là même l'auteur du carnage. »

Tous reprirent donc chacun leur poste et une fois la petite réunion terminée, Lautrec contacta Miss Maple.

- « Allo Miss Maple ?

- Oui, il s'agit bien de moi.

- Commissaire Lautrec au téléphone, vous vous souvenez de moi, je suis le commissaire qui ...

- Oui, oui, je sais pertinemment bien qui vous êtes.

- Lors de notre dernière et seule entrevue, j'ai omis de vous faire part de quelques petits détails, oh, rien de bien important rassurez vous, mais j'aimerais tout de même m'entretenir avec vous cet après midi dans mon bureau.

- Il me semble possible de pouvoir vous y rejoindre. A quelle heure désirez-vous vous entretenir avec moi ?

- Le mieux serait 14 heures si cela vous est possible.

- Sans soucis. Je serais là au rendez vous.

- Très bien, alors dans ce cas, je vous dis à tout à l'heure Miss Maple.

- A tout à l'heure commissaire. »

L'heure était venue de faire le point sur la stratégie à entreprendre pour faire parler Miss Maple si difficile à dérider. Tous réfléchissaient à la meilleure manière de lui faire croire qu'il ne s'agissait que d'un entretient des plus banals. Ils pensèrent qu'un thé dès son arrivée était la meilleure façon de la mettre en confiance.

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