Chapitre 9
Tu parles d'une bonne semaine... Elle est interminable ! Ça fait quatre jours que je passe des nuits horribles. Des nuits seul, dans ce grand lit froid. Il n'a pas pour habitude de rester toute la nuit, mais au moins, quand c'est le cas, il passe la soirée avec moi et parfois, attend même que je m'endorme avant de partir.
N'importe qui aurait été soulagé de ne plus le voir. Ce démon, ce petit chaton... Espérant par cette absence de plusieurs jours maintenant, que ce lien, cette relation forcée, étrange et malsaine, puisse enfin se terminer. Mais pas moi... Bien évidemment que non. Je ne suis pas comme les autres. Je ne l'ai jamais été. Qui se prendrait d'affection pour un ange déchu qui ne pense qu'au sexe et qui ne voit en son partenaire qu'une érection ? Je suis bien trop dérangé... Mais que puis-je y faire ? Comment pourrais-je changer maintenant, à mon âge ? Je dois me rendre à l'évidence que jamais je ne pourrai devenir quelqu'un de normal. Je vais devoir me faire à l'idée que je m'attache de plus en plus à cet être hors du commun. Me faire à l'idée que ce lien que nous avons n'est plus une malédiction à mes yeux, mais bel et bien tout le contraire. Je dois me faire une raison... Cette créature ayant souhaité ma mort, me manque... Je m'inquiète, j'angoisse. Que lui est-il arrivé ? S'est-il lassé de moi ? Il n'a pas l'air d'apprécier les humains... En aurait-il eu marre de mon corps faible et pas assez performant ? Il semblait pourtant très satisfait de ce que je lui offrais... Il ne cessait de me répéter combien j'étais parfait. Je suis un idiot. Un pauvre humain sans cervelle, qui n'a rien de mieux à faire que s'inquiéter à propos d'un démon qui ne s'inquiéterait jamais pour lui. Il me rirait certainement au nez s'il savait combien je me ruine la santé à cause d'une simple absence.
« J'avais des choses plus importantes à faire, désolé d'avoir fait attendre ton beau petit cul ».
Je suis certain qu'il dirait ce genre de choses. Je commence à bien le connaître, à force. Pourquoi je souris à l'idée de l'entendre me dire ce genre de phrases ? Tu mérites de très grosses claques, Lee Hoseok. T'attacher à cet être ne va t'apporter que du malheur. Tu le sais pertinemment, mais tu ne peux t'en empêcher. Tu aimerais être aussi distant que lui. Tu aimerais ne le voir que comme un plan cul, mais encore une fois, tu es bien trop sentimental, bien trop tordu et suicidaire. Tu mérites tout ce qui t'arrive. Tu récoltes ce que tu sèmes.
Je me revois encore lors de notre première rencontre... Je n'ai rien dit ou fait qui lui montrait que je ne voulais pas de lui. Je lui ai simplement dit que j'aimais son apparence. Je lui ai montré, sans même le vouloir, que je le désirais. Il l'a senti, il l'a tout de suite compris. Mes actions, mes paroles, mes émotions. Tout chez moi trahissait cette envie secrète qu'il me fasse sien. Comme si je le connaissais depuis toujours. Comme s'il m'était destiné depuis le début. Comme si j'avais toujours été sien ou du moins, été créé pour l'être un jour. Ce sentiment était si fort. Ce sentiment qui me submergeait de toute part. Ce sentiment qui me hurlait que lui et moi, nous étions liés, faits pour être dans la vie de l'autre... Je ne comprends et n'explique aucun des sentiments qu'il provoque en moi, mais mon inconscient est tellement convaincu que nous sommes unis par quelque chose d'invisible, que cela ne me choque même pas. Qu'a-t-il fait de moi ? Quel sort m'a-t-il jeté, pour que je sois à ce point irréfléchi et dépendant à lui ?
D'un sursaut impossible à contrôler, je me tétanise lorsque j'entre dans la chambre, pour me changer. Il est là... Assis nonchalamment sur le lit, guitare à la main. Il m'a manqué... Putain, qu'est-ce qu'il m'a manqué ! Son regard sombre et incandescent me scrute, un petit sourire flanqué au coin des lèvres. Il est amusé. Il comprend combien il m'a manqué. Il le sait. Il lit si facilement en moi que c'en est effrayant. J'aimerais le serrer dans mes bras... Bon sang, je suis ridicule.
— Tu joues de la guitare ?
Le ton de sa voix est grave – comme à son habitude –, mais pour une fois, il est également doux. Si doux... Il semble apaisé. C'est très étrange, mais ce n'est pas désagréable, au contraire. J'aimerais qu'il soit plus souvent dans cet état.
— Je ne suis pas un pro, mais ça m'arrive parfois, oui, réponds-je, troublé par cet instant.
D'un sourire mélancolique, ses doigts se positionnent correctement sur les cordes, avant de s'activer. La mélodie qui s'échappe de l'instrument me remue l'estomac. Je me pose alors difficilement sur le lit, les jambes tremblantes. Je n'arrive pas à détacher mes yeux de l'être assis face à moi. Je ne cesse d'osciller entre ses doigts et son visage aux traits apaisés. J'observe ainsi les accords s'enchaîner, tandis que mes larmes cèdent la barrière de mes paupières.
Cette douce musique me rend mélancolique. Je suis envahi de tristesse, sans réellement savoir pourquoi. C'est si douloureux. Ma poitrine me fait mal. Elle est tellement belle... J'aimerais qu'elle ne s'arrête jamais, mais à la fois, cela me semble si douloureux, que j'espère tout le contraire. Lorsque celle-ci se finit enfin, mes émotions sont toujours en vrac. D'un geste brusque, j'essuie mon visage noyé d'une tristesse incompréhensible. Mon comportement est bien trop étrange et ça m'effraye de plus en plus. Ses prunelles calmes se fondent dans les miennes, encore légèrement voilées, et mon cœur accentue ses battements, devant ce regard que je qualifierais de chaleureux. Que lui arrive-t-il ? Et que m'arrive-t-il ? Pourquoi suis-je si sensible, tout d'un coup ? Quel est ce moment perdu dans le temps ? Je n'ai jamais rien vécu de si irréel et pourtant, je fais l'amour chaque jour à un démon.
— Quelques imprévus m'ont amené à ne pas pouvoir quitter mon monde. J'espère que je ne t'ai pas trop manqué, sourit-il, narquois.
Je me suis tellement inquiété... J'ai tellement angoissé... Idiot.
— Sans doute autant que je t'ai manqué, tenté-je, désinvolte.
Il souffle du nez, puis se lève pour ranger la guitare sur son support, avant de s'élancer vers le couloir.
— Bien. Rattrapons le temps perdu, entends-je, au loin. Je veux que tu me baises devant Harry Potter.
Quel idiot... Je suis persuadé qu'il est extrêmement curieux de voir ces films et il n'ose simplement pas le dire. Je me demande d'ailleurs comment sans connaître l'univers, il savait qu'il y avait des dragons... Il semblait tellement perturbé quand il m'a demandé pourquoi je l'avais appelé Draco lorsqu'il s'est transformé en serpent. C'était vraiment étrange. Mais je n'aurai sans doute jamais aucune réponse, comme d'habitude.
Nous avons regardé deux films avant qu'il ne perde sa concentration et se place sur moi, pour me demander de lui offrir ce qui lui a sans doute manqué le plus durant ces quatre jours. Et je n'aurais jamais pensé que ça m'aurait autant manqué, à moi aussi. Lui qui semble me voir comme quelqu'un d'innocent et naïf... Comment réagirait-il s'il savait à quel point je suis devenu accro à son corps ? C'est si bon d'être en lui. Si bon de le sentir contre moi, alors que ses gémissements noient mes tympans. Qu'est-ce que j'aime être blotti contre son corps, alors que nous ne faisons qu'un. Je suis loin d'être la personne qu'il pense que je suis. Je ne sais pas ce qu'il voit réellement en moi, mais il ne me connaît pas comme il le devrait. Voilà pourquoi j'aimerais discuter avec lui, faire connaissance plus en détail. Il me juge sans me connaître et ça me frustre tout comme ça me blesse. J'espère sincèrement qu'un jour, il acceptera de s'ouvrir à moi.
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