Chapitre 12

                      

— Chaton ? m'enquis-je, débarrassant un peu la cuisine. Tu es là tôt !

— Tu veux que je parte ?

— Non, non ! Pas du tout ! Au contraire, je suis content ! souris-je. Ça me surprend, c'est tout.

— J'avais du temps libre.

Et tu as décidé de passer ce temps avec moi ? N'essaye pas de paraître nonchalant, tu ne peux plus rien me cacher. Je suis certain que c'est ça... Travailler, lire et baiser, voilà à quoi semblait se résumer sa vie, d'après ses dires. Et voilà qu'aujourd'hui, son éternité se résume à travailler et passer du temps avec moi, sans forcément qu'on fasse l'amour.

Je suis heureux. Vraiment très heureux. Être seul est toujours un peu triste, alors vraiment, je suis heureux. Après qu'il soit parti, ce matin, je ne pensais que je le reverrais de sitôt. Il semblait avoir pas mal de choses à faire, en plus... Comme quoi, encore une fois, je passe en priorité... Je suis vraiment chanceux, maintenant, c'est une certitude.

— Tu avais prévu quelque chose ?

— Je voulais aller à la salle de sport, mais ça peut attendre.

— On peut faire du sport ensemble, si tu veux, propose-t-il, le sourcil arqué.

— Ah et Janggun doit passer le week-end avec moi.

— Qui est Janggun ?

Son expression blasée ne fait qu'accentuer son air jaloux.

Sois jaloux, je t'en prie. Au moins, ça me prouve que tu tiens à moi.

— Le fils de Hyunwoo.

— Ah oui, c'est vrai. Il arrive quand ?

— Vers dix-sept heures.

— J'imagine qu'il dormira avec toi, cette nuit.

— Il va dormir avec nous, oui, souris-je, la tête relevée avec assurance.

— Nous ?

— Tu peux rester cette nuit, puisque tu sembles avoir pas mal de temps libre. Passe ce temps avec moi.

Il essaye si durement de refuser, de continuer à jouer les méchants, mais il n'y arrive pas. Soit il se fait très chier lorsqu'il est là-bas, soit il aime vraiment passer du temps avec moi, et cet attachement qu'il a pour moi l'énerve. Mais que ça le frustre ou pas, moi, je m'en fous. Tant que j'arrive à mes fins, alors ça me va.

Il ne répond rien, comme la plupart du temps lorsque la conversation ne va pas dans son sens, et se contente de lever les yeux au ciel, avant de partir s'asseoir sur le canapé. Je sais aussi qu'il est rongé de curiosité. Il veut voir cette bouille d'amour, voir ce qu'il a à dire, ce qu'il a à raconter sur son père et moi, et surtout, il veut savoir si cet enfant innocent pourrait dire des choses compromettantes. Je le connais par cœur, je sais que ça lui a traversé l'esprit, mais encore une fois, je m'en fous. Tout ce que je retiens, c'est qu'il va passer la journée avec moi et que je pourrai même me blottir contre lui, cette nuit. Tout le monde est satisfait, alors c'est parfait.

— Tu joues les bons garçons, je suis content, conclus-je, enfilant ma veste, avant de m'asseoir à ses côtés.

— Je peux avoir ma récompense avant dix-sept heures ?

— Je dois faire quelques courses et je dois préparer un dessert pour mon filleul. Il faudra patienter.

— D'accord, mais tu cuisines nu, avec un tablier.

— Si tu veux, mais attention, on touche avec les yeux, souris-je, malicieux. Bon courage.

— Tu me sembles bien à l'aise, petit humain.

— Je suis à l'aise, effectivement.

— Tellement à l'aise que tu es à deux doigts d'être insolent, gronde-t-il.

N'est-il pas adorable lorsqu'il est énervé ?

— Et tu n'aimes pas ?

— Ma réponse pourrait t'influencer.

— Dans tous les cas, je ne vais pas changer qui je suis pour tes beaux yeux. On est lié pour l'éternité toi et moi, alors il va falloir que tu t'y fasses.

— Oui, tu es vraiment insolent.

Je n'arrive pas à m'empêcher de sourire. Lui qui m'effrayait tellement dans le passé. Aujourd'hui, je sais que même s'il est une personne dangereuse, il a ses propres limites, et cette limite, en ce moment, s'appelle Hoseok. Je sais que quoi que je fasse, il ne me fera jamais rien, alors mon assurance grandit de jour en jour. Et je sais qu'au fond, il aime ça, lui aussi.

— Tu viens faire les courses avec moi ? Le magasin n'est pas loin et tu pourras récupérer de l'énergie en dormant cette nuit.

— J'espère pour toi que tu ne vas pas utiliser l'excuse d'avoir besoin de gros bras.

— Oh non, ne t'inquiète pas, je m'en sors bien seul de ce côté-là, ris-je. Non, je veux juste ta compagnie.

Comment peut-il espérer me dire non ? Je suis si satisfait. S'il n'était pas revenu hier soir, je crois que rien n'aurait évolué de cette façon. Il a changé d'avis, alors qu'il avait décidé de me laisser seul chez moi, à broyer du noir. Je sais qu'il y a pensé, mais ça m'importe peu. L'important, c'est qu'il se soit ravisé. Et voilà où ce changement nous a conduits...

— Allons-y, avant que je change d'avis.

                  

                

***

                         

                      

— Tu avais raison, ta tenue est bien trop provocante pour ton propre bien.

— J'ai toujours raison, gloussé-je.

Comment a-t-il pu penser qu'il pourrait me résister, alors que je suis dans cet accoutrement ? Je sais combien il me désire, cela est donc suicidaire, mais je voulais le faire. Bien évidemment... Comment ne pas vouloir l'embêter, le rendre fiévreux ? J'adore me sentir ainsi désiré par lui, alors bien sûr que je me devais de répondre à ses envies. J'espère qu'il ne regrette pas trop ses choix, parce que moi, je ne regrette rien.

— Va te changer, avant que le prédateur prenne le dessus sur le gentil garçon.

Encore une fois, je me vois dans l'obligation d'obéir. Il faut se rendre à l'évidence que cette petite blague a assez duré. Sa voix devient plus profonde, plus grave, et son regard se fait plus intense et brûlant. Je ne tiens pas à ce qu'il ne puisse s'empêcher de me toucher, alors qu'ils doivent arriver d'une minute à l'autre.

— J'y vais. Si ça sonne, va ouvrir !

Je suis en train d'enfiler mon dernier vêtement lorsque la sonnette retentit. Je m'apprête à trottiner vers la porte d'entrée, mais change d'avis une fois dans le couloir. Je suis curieux de ce qu'il pourrait faire...

Après d'interminables secondes et un deuxième essai sur la sonnette, il se décide enfin à se bouger les fesses. J'espère pouvoir tout entendre d'ici. Je suis bien trop curieux, ça me perdra un jour.

— Bonjour, salue calmement mon meilleur ami.

— Bonjour, qui tu es ?

La petite voix de mon adorable filleul me remplit le cœur de bonheur. Qui aurait cru qu'on puisse faire aussi doux et adorable que Hyunwoo ?

— Je suis l'animal de compagnie de ton parrain.

— Changkyun est en couple avec Seokkie, rectifie le papa.

— Ça veut dire qu'ils sont amoureux ?

— Ne brûle pas les étapes, petit, râle mon chaton.

Je crois que c'est mal parti pour un début... Ça aurait pu être pire, c'est déjà ça.

— Bonjour ! m'écris-je, en les rejoignant. Bonjour, mon cœur. Comment tu vas ?

— Très, très bien, maintenant que je sais que tu m'as préparé des muffins !

— J'aurais presque oublié que tu avais l'odorat d'un chien, ris-je, tout en prenant les affaires que son père me tend.

— Je vous laisse. Ça ira ?

— Oui, tout se passera bien, ne t'inquiète pas.

Le regard incertain et quelque peu inquiet de mon meilleur ami m'attriste, mais je peux totalement le comprendre. Moi aussi je suis un peu anxieux, voire extrêmement anxieux, mais je sais que ça ira. Oui... J'y crois.

— Je te fais confiance, conclut-il, d'un sourire contrit. Passez un bon week-end.

— Toi aussi, Hyun. Bonne fin de journée et bon week-end !

— À demain, papa !

— À demain, fiston.

Mon démon rejoint le canapé avant même cette conversation terminée et je suis interloqué lorsque Janggun le suit, peu après. Que mijote-t-il ?

— Alors comme ça, tu m'as volé mon parrain ?

— Pardon ?

La personne concernée est aussi perplexe que moi. Les mains dans les poches de l'un de mes trainings, affalé nonchalamment, il fixe le petit d'un sourcil arqué, curieux de connaître la suite, tandis que moi je reste planté là, au milieu du séjour.

— Je ne partage pas.

L'air déterminé de mon filleul l'étonne quelques secondes et puis, sans crier gare, il se met à rire à gorge déployée. Il paraît vraiment amusé. Pas la moindre trace d'énervement ou d'impatience.

— J'aime ta façon de penser. Je n'avais pas prévu de le partager, moi non plus, mais je vais faire une exception pour toi, souffle-t-il du nez.

Cet instant est encore une fois bien plus irréel que les ailes qui peuvent se déployer dans son dos. Un démon est assis dans mon canapé, aux côtés de mon filleul de huit ans, et ces deux êtres que tout oppose sont en train de se chamailler. Suis-je encore en train de dormir ? C'est improbable... Mais si parfait. Un moment idyllique qui m'offre l'occasion de sourire jusqu'aux oreilles.

— Très bien, je vais faire la même chose dans ce cas, cède le plus jeune.

— Vous avez terminé, vous deux ? râlé-je, tout en riant.

— C'est une conversation entre nous deux, parrain. Ne fais pas attention à nous.

— Je l'aime vraiment beaucoup, s'enquit mon chaton.

Je suis définitivement dans un rêve. Un démon pris d'affection pour un enfant, c'est la meilleure...

— Si tu es avec mon parrain, alors ça veut dire que tu es ma marraine ?

— Je vois d'où tu tiens ton insolence, grogne ladite marraine.

— Tu peux l'appeler tonton, si tu veux, pouffé-je, heureux comme jamais je n'ai pu l'être.

— Tonton ! Tu joues avec moi aux voitures ?

— Tu ne veux pas qu'on joue tous les trois à Mario Kart ? proposé-je. Ton papa n'en saura rien.

— Tu es un vilain, parrain !

— Je n'aurais pas dit mieux, ajoute l'ange déchu.

— Mais j'accepte...

— Ok alors, c'est parti ! pouffé-je.

Je m'assieds ainsi entre ces deux petits êtres surprenants et tends une manette à mon filleul, avant de faire la même chose avec mon démon.

— Je vais te montrer comment jouer.

— Je sens que ma patience va être mise à rude épreuve, marmonne-t-il, manette en main.

— Ce n'est pas grave... Tu es si patient ces temps-ci.

— Ne joue pas trop avec le feu, humain, tu pourrais te brûler.

— Tes muffins sont toujours aussi bons, parrain ! s'écrie peu après mon filleul, parti discrètement dans la cuisine, en quête de son précieux dessert. Tu es certain de ne pas avoir faim, tonton ?

— Je suis affamé, petit homme.

— Mange un muffin, alors !

Ce n'est pas de ça dont il est affamé... Voilà ce que le regard qu'il me porte signifie. Comme si je ne pouvais le deviner seul. Par contre, je n'aurais jamais pu croire qu'il en prendrait réellement un. Il mange mes muffins ! Je sais qu'il est capable de se nourrir de cette façon, mais ça ne l'a jamais intéressé. Je n'aurais jamais cru qu'il cède aussi facilement. Ce démon aurait-il une légère faiblesse face aux enfants ? En même temps, ils sont le symbole de l'innocence, j'imagine que les anges déchus savent eux aussi pertinemment qu'un enfant n'est pas capable de faire le mal autour de lui. Je suis vraiment très fier de ces deux petits êtres.

— Assez bon, je confirme, finit-il par grommeler, entre deux bouchées.

Je pourrais jurer sans mal que mon sourire n'a jamais été aussi grand. Je suis tellement heureux. Si on m'avait dit, il y a quelques semaines, que le démon qui m'a pris pour cible serait aujourd'hui assis dans un canapé, avec moi à ses côtés et un filleul envahissant et doux comme un agneau, je ne l'aurais jamais cru. J'ai même encore un peu de mal à y croire, à l'heure actuelle, alors que tout semble bel et bien réel...

Janggun sur mes genoux, mon chaton à nos côtés, et des heures de rire et de rage face à un jeu vidéo. Que demander de plus ?

— Après la fin de cet épisode, tu vas te laver les dents et puis au lit, petit cœur.

— Oh parrain, encore un, s'il te plaît !

Ses paupières tombent de fatigue. Peluche dans les bras, il est blotti entre mon démon et moi, et tente, encore et encore, de s'empêcher de dormir. Je sais qu'il veut rester près de nous, pour faire comme les grands, et s'endormir tard, mais il n'a que huit ans, et l'âge adulte, ce n'est pas pour tout de suite.

— Il est déjà tard...

— Tonton... geint-il alors, d'un regard adorable en sa direction.

— Un dernier et au lit.

— Chaton !

— Oui, Seokkie ? sourit-il, d'une voix mielleuse.

— Rien, rien...

Mes oreilles sont brûlantes et ma poitrine se fait martyriser par mon organe vital. Il connaît mes points faibles comme je connais les siens et c'est ce soir que je pourrais le regretter. Non... En fait, je ne pourrai pas le regretter. Pas ce soir, en tout cas. Comment pourrais-je, alors que le spectacle que j'ai devant les yeux me donne envie de pleurer ? Janggun est collé à son tonton et ce dernier regarde la télé de façon nonchalante, comme si tout ceci était normal pour lui...  Sauf que rien ne l'est et mon coeur pourrait ne pas tenir le coup... Qu'a-t-on fait de mon démon ?

— Cette fois, c'est la bonne. Au lit, mon cœur.

— Vous me rejoignez après ? marmonne-t-il, les yeux mi-clos, glissé confortablement sous la couette.

— Oui, on ne va plus tarder. Endors-toi, ne nous attends pas, soufflé-je, avant d'embrasser tendrement son front. Bonne nuit, trésor.

— Bonne nuit, parrain. Bonne nuit, tonton ! hurle-t-il, depuis la chambre.

— Bonne nuit, petit homme.

Cet idiot ne m'a jamais dit bonne nuit, pas une seule fois. Il ne l'a jamais fait, mais répond à mon filleul ? Je le déteste.

— Pourquoi tu me regardes comme ça ? râle-t-il, quelques minutes après mon retour.

— Je ne pensais pas que tu jouerais aussi bien le jeu. Merci de l'avoir aussi bien traité.

— Ce petit homme à un caractère fort et honnête. Je l'aime bien.

— Je n'aurais pas pu rêver mieux.

— J'ai été très gentil avec vous deux, pas vrai ? sourit-il, se léchant avidement les lèvres. Je mérite bien une petite récompense, non ?

— Chaton...

— Une toute petite récompense, susurre-t-il à mon oreille.

Son corps pesant sur moi ne m'aide pas à le repousser. Il sait combien j'aime le sentir contre moi. Ses mains se font déjà trop curieuses. Glissées sous mon haut, elles caressent mes abdos et pincent mes tétons. Sa langue trace d'invisibles dessins au creux de mon cou, alors que j'essaye, vainement, de reprendre mes esprits.

— Non, p–pas moi, chaton.

— Pourquoi ?

— Parce que premièrement, c'est ta récompense, pas la mienne, et deuxièmement, je suis trop bruyant pour faire ça maintenant.

— Je ne peux te donner tort, souffle-t-il, amusé, le nez toujours collé contre ma gorge. Et qu'est-ce que j'aime t'entendre hurler ton plaisir. Ça pourrait être une très belle récompense pour moi, pourtant.

— Oui, mais ça, ce n'est pas avant demain soir.

— Je ne sais pas si je pourrai résister aussi longtemps, grogne-t-il, mordillant ma pomme d'Adam. J'ai assez attendu. Je n'en ai plus la force.

— On a fait ça ce matin, chaton.

— Je maintiens ce que j'ai dit, claque-t-il.

— Il va de toute façon falloir te forcer.

À contrecœur, j'inspire profondément, m'arme de courage, et le pousse un peu plus fort pour qu'il s'éloigne. Ça me demande un effort surhumain parce que j'en ai tellement envie, moi aussi. Même si nous l'avons fait ce matin, je n'ai qu'une envie, c'est de recommencer. Je n'ai jamais été aussi avide de sexe, mais il m'attire tellement, m'excite tellement, que ça en devient addictif. Moi qui pensais que je n'avais pas ma place en Enfer, je me suis définitivement trompé. Lorsque la vie me quittera, je le laisserai me guider sans rechigner. Que pourrais-je dire de toute manière ? Ma vie et ma mort sont à présent sur un chemin tracé à la perfection. Je n'ai plus qu'à marcher sans avoir peur de me perdre... Pas vrai ? Mais qui aurait cru qu'un chemin balisé soit plus effrayant qu'une forêt sans un seul repère ?

— Mon neveu a raison, tu es un vilain, râle-t-il, assis plus à l'écart.

— C'est vrai, je suis le vilain et toi le gentil. C'est le monde à l'envers, tu ne crois pas ?

D'un rire timide et légèrement malicieux, je m'approche de lui, et plonge sur ses chairs tentatrices. J'ondule de longs instants mes lèvres contre les siennes, puis glisse vers sa gorge, que je n'hésite pas à mordiller et suçoter. Ses soupirs d'aise me font à nouveau sourire. Il est si faible, face à mes gestes. J'adore ça au plus haut point.

— Et ce n'est pas si mal, finalement, souffle-t-il, de cette voix rauque qui ne fait que m'exciter davantage.

— Non, tu as raison. Allonge-toi, lui ordonné-je, tirant sur son pantalon pour qu'il le baisse et l'enlève. Mais fais attention, tes grognements sont très audibles, eux aussi.

— Je ne te promets rien, mais je vais essayer.

— Tu as intérêt.

— Mais tu fais ça si bien, que je ne peux faire autrement...

— Tais-toi et profite de ce que ton méchant garçon a à t'offrir, souris-je, de façon provocante, avant d'avaler son érection jusqu'à la base.

— Oui, grogne-t-il, la paume de sa main appuyant contre mon crâne. Vraiment un humain très vilain.

        

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top